Exposé de français : Les différents aspects du mal selon

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Exposé de français : Les différents aspects du mal selon
Exposé de français : Les différents aspects du mal selon Baudelaire Plan : I.
Définition de mal selon Baudelaire II.
Les différents aspects du mal : a) le mal physique et moral b) le mal métaphysique c) le mal social III.
Conclusion a) le mal est-­‐il seulement autobiographique (mal être du poète) ? b) s’interroger sur les poètes venant après : « poètes maudits » Qu’est ce que le mal selon Baudelaire ? Nous allons essayer de définir la notion de mal à travers l’œuvre de Baudelaire, pour nous, le mal c’est contraire au bien, à la vertu et c’est condamné par la morale, tandis que chez le poète des Fleurs du mal, le mal est tout à fait différent. Le bien et le mal sont liés. Dans un de ses projets de préface de son recueil de poésies, Baudelaire précisait : « il m’a paru plaisant et d’autant plus agréable que la tâche était plus difficile, d’extraire la beauté du mal… » La beauté et le mal se retrouvent dans l’oxymore du titre du recueil : Les Fleurs du mal (fleurs = essence même de la beauté, le mal, c’est le mal, il contredit les fleurs). On y remarque une ambivalence répétitive tout au long du recueil entre le beau et le laid, le bien et le mal. Par exemple, dans le poème une Charogne, où Baudelaire montre avec ironie une ébauche de beauté du fond de la laideur. On retrouve donc une fusion entre le laid et le mal comme dans le titre : entre les « fleurs » et le mal qui les rend indissociables. D’autre part dans le premier poème intitulé Au Lecteur (p31-­‐32), Baudelaire évoque que l’homme est en proie au pêché, qu’il est sous l’influence de Satan et qu’il se laisse envahir par l’ennui. Dans ce poème le champ lexical est très important, on y trouve le mot mal dit explicitement, et il est associé à Satan. (Sur l’oreiller du mal, c’est Satan trismégiste qui berce longuement notre esprit enchanté). Cependant la notion du mal est implicite dans la plupart de ces poèmes, il l’exprime sous forme de champs lexicaux très variés tels que la pluie (évoquant la tristesse), l’humidité, la brume, le froid, la vieillesse, la maladie, la mort, les couleurs sombres comme le gris et le noir. Pour Baudelaire, l’objectif est de parler du mal et de chanter le mal et le spleen qui marque l’homme de ses humeurs noires. La poésie naît de ce « terreau infâme » qu’est le mal du poète et le mal de l’homme. Il disait à propos : « Tu m’as donné de la boue, j’en ai fait de l’or. » Le recueil des Fleurs du mal est construit en 6 parties, ce qui est important car cela reflète la quête absolue de la perfection de son auteur. La première section porte le nom de Spleen et Idéal : il dresse un constat du monde réel qui est source d’affliction et de blessures. Les 3 sections suivantes (Tableaux parisiens, le Vin et les Fleurs du mal) constituent des tentatives pour atteindre l’Idéal. Par exemple, dans Tableaux parisiens, il essaie de se noyer dans la foule pour sortir de sa mélancolie, puis il tente les paradis superficiels (vin, opium), puis dans les Fleurs du mal, il va solliciter les plaisirs charnels (femme, volupté), qui sont une source d’enchantements très vite suivis de remords. Ses échecs entraînent donc le rejet d’une existence vaine (dans Révolte) qui se solde par la mort (dernière partie). Baudelaire écrit à sa mère en 1859 : « Ce que je sens, c’est un immense découragement, une sensation d’isolement insupportable, une peur perpétuelle d’un malheur vague, une défiance complète de mes forces, une absence totale de désir, une impossibilité de trouver un amusement quelconque. » (champ lexical du mal) Baudelaire a attribué à cet état mélancolique le nom de Spleen ayant pour origine en anglais : rate ou mauvaise humeur. D’ailleurs, dans l’Antiquité grecque, on pensait que la rate humaine déversait une bile noire dans le corps responsable de la mélancolie. Chez le poète des Fleurs du mal, le « Spleen » est un profond sentiment de découragement, d’isolement, d’angoisse et d’ennui que le poète exprime dans plusieurs de ses poèmes. Avec Baudelaire, cet état mélancolique sans cause définie devient plus populaire. « La mélancolie est pour ainsi dire l’illustre compagne. » C’est ce que Baudelaire montre dans la section Spleen et Idéal, où le spleen prend une place centrale et constitue le mal auquel est confronté le poète qui tente de lui opposer un Idéal. (ex : A une Passante). Dans les 4 poèmes intitulés Spleen, Baudelaire définit la condition humaine en décrivant cet état. Pour lui, le spleen est le plus grand mal, il renvoie au mal être causé par la condition humaine car l’homme est étouffé par le monde qui l’entoure. Ainsi, dans le 4ème poème de Spleen (p106), il nous décrit la montée d’une crise et la crise elle-­‐même. Sans jamais vraiment citer le mot mal, Baudelaire utilise un champ lexical qui revient de manière récurrente tout au long de son recueil. Ce champ lexical évoque l’humidité, la pluie, la tristesse, quelque chose de lourd et d’étouffant (pèse comme un couvercle, esprits gémissants en proie aux long ennuis, un jour noir plus triste…), pour finir avec le lexique de la douleur (un affreux hurlement, geindre, et de longs corbillards sans tambour ni musique défilent lentement dans mon âme…) On retrouve la tristesse dans le poème Elévation et une inexorable fuite du temps dans L’Horloge. Le Cygne, les 7 Vieillards, les petites Vieilles, les Aveugles, à une Passante essaie de répondre à son ennui en se réfugiant dans la vie quotidienne. Dans la Fontaine de sang et un Voyage à Cythère, il montre à la fois la grandeur et la misère humaine car il cherche à débusquer la beauté même dans la laideur physique. Dans Révolte et la Litanie de Satan, il s’oppose à la divinité. Dieu est battu par Satan, le mal l’emporte. Le thème de la mort (mal suprême) est présent, car pour échapper au mal, il faut mourir (dans le Voyage). Dans les poésies posthumes, le poème Recueillement peut clore l’œuvre car il dit : « Sois sage, ô ma douleur et tiens toi plus tranquille » On remarque donc un rejet du monde réel soumis au mal quoi qu’on fasse. La mort est un endormissement de la souffrance. De plus, le mot mal est explicitement dit dans les poèmes. Baudelaire le désigne par la tristesse, l’ennui, la souffrance morale, la douleur… II. Les différents types de mal Il existe 4 différents types de mal : -­‐ Le mal social : L’homme est un être déchu, on l’a mis sur terre pour qu’il souffre éternellement. -­‐ Le mal moral : par exemple, dans une Charogne, il montre la puanteur, il a un goût pour les choses horribles (putréfaction, sadisme, les meurtres...) -­‐ Le mal physique : (dans les 7 Vieillards, les petites Vieilles) Il y a présence du vieillissement, du délabrement. La vieillesse correspond au mal physique du poète qui souffre de paralysie. Il y a aussi des correspondances entre les paysages, les gens et son sentiment face à ses problèmes de santé. -­‐ Le mal métaphysique : comme dans Révolte où il apparaît comme une âme angoissée car il ne croît pas en Dieu, mais plus en Satan… Par exemple dans les Aveugles, où Baudelaire se compare aux aveugles qui regardent ailleurs et ne voient pas ce qui les entoure. Ce poème suscite une inquiétude : il rappelle que l’existence est laborieuse. Les hommes vivent du côté du Spleen, comme des aveugles tournés vers l’idéal mais incapables de le voir… Il se sent proche d’eux. Il faut donc continuer à chercher les « fleurs » dans le mal. Ou encore dans la Litanie de Satan, où tout ce cheminement va le conduire à l’espoir ce de qu’il attend : vendre son âme à Satan. Il cherche à échapper au spleen et est prêt à tout pour mettre fin à cette angoisse. Déjà dans le prologue avec le poème au Lecteur, on a la présence du mal social car Baudelaire met l’accent sur la fraternité des hommes dans la déchéance, sur la fraternité des damnés et des victimes (comme dans 7 Vieillards, où ils se tiennent par la main). Les hommes se sentent solidaires devant la misère, la sottise, la lâcheté, l’Ennui et le mal. (que des choses mauvaises = le mal) Dans Spleen et Idéal, il y a une déchirure du poète qui aspire vers « l’Idéal et vers le Spleen » (ennui, angoisse). Il y montre la misère et la grandeur de l’homme et il dit : « Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations, l’une vers Dieu, l’autre vers Satan. » C’est le mal métaphysique. On trouve encore cette ambivalence du beau et du laid, de Dieu et de Satan et du bien et du mal. Baudelaire montre souvent avec ironie une ébauche de beauté du fond de la laideur, comme dans le poème une Charogne où le champ lexical choque. Dans les Tableaux parisiens, on retrouve la présence du mal physique et moral, dans les 7 Vieillards et les petites Vieilles. On peut montrer que l’angoisse du poète face au spectacle des rues et des images reflètent son état intérieur et multiplie son malheur dans son être propre. Analyse de certains poèmes. 1. Au Lecteur L’homme est en proie au pêché dans les deux premiers quatrains : vers 1,2,5,7 Ensuite, on voit l’influence de Satan dans les cinq quatrains suivant : vers 9,10,13,15,21,22,25,26,27,31,32 Puis on remarque l’influence de l’Ennui (=le Spleen, donc le mal – évocation implicite du mal) avec la dernière strophe : vers 37,39,40 Ce poème joue un rôle de préface et illustre bien le titre : il faut parler du mal (courrier objectif du mal), qui marque l’homme de ses humeurs noires. La poésie naît de ce « terreau infâme » qui est le mal du poète et le mal de l’homme. Dés l’accumulation du 1er vers d’ « au Lecteur », on constate la faiblesse de l’esprit des hommes de ce qu’ils vivent dans l’illusion avec le mot « erreur ». On y retrouve donc le champ lexical du vice et du pêché : -­‐
lésine ;pêché ;lâche ;débauche ;démons ;Satan ;vice ;Ennui ; (il y a présence du mal social. Baudelaire met l’accent sur la fraternité des hommes dans la déchéance, sur la fraternité des damnés et des victimes (comme dans 7 Vieillards, où ils se tiennent par la main). Les hommes se sentent solidaires devant la misère, la sottise, la lâcheté, l’Ennui et le mal (que des choses mauvaises = le mal).) 2. Spleen (p106) Ici, le mal revêt surtout l’évocation du Spleen. Le spleen est le grand mal, il renvoie au mal être causé par la condition humaine car l’homme est étouffé par le monde qui l’entoure. (Spleen ayant pour origine : rate ou mauvaise humeur. Dans l’Antiquité grecque, on pensait que la rate humaine déversée une bile noire dans le corps responsable de la mélancolie. Chez le poète des Fleurs du mal, le Spleen est un profond sentiment de découragement, d’isolement, d’angoisse et d’Ennui) A travers les 5 quatrains, on assiste à la montée de la crise, notamment dans les 3 premiers quatrains avec une anaphore (« Quand ») marquant les étapes de la crise. Le champ lexical évoque quelque chose de lourd et d’étouffant : vers 1,2,4 Avec la crise qui s’installe, on retrouve un champ lexical porté sur l’eau : -­‐de l’humidité ;de la pluie ; de la tristesse-­‐ (2ème strophe, vers 4,8) La crise donne naissance à la douleur évoquée par tout un lexique montrant que cette douleur monte (douleur physique/morale) : vers 13,14,15,16,17,18 Puis à la fin, l’angoisse s’installe car elle a vaincu l’espoir. « l’Angoisse » vers 19,20 3. Réversibilité (p73) D’autre part, on retrouve ici le champ lexical du « Spleen » où on retrouvera toujours les mêmes notions, exprimant profondément cet état de déprime. Dans le 1er quintil : vers 1,2,3,4 (parler du courrier de ce qu’il ressentait : Baudelaire écrit à sa mère en 1859 : « Ce que je sens, c’est un immense découragement, une sensation d’isolement insupportable, une peur perpétuelle d’un malheur vague, une défiance complète de mes forces, une absence totale de désir, une impossibilité de trouver un amusement quelconque. » (champ lexical du mal) Dans le 2ème quintil : vers 7,8,10 Baudelaire évoque le mal physique qui est sans doute lié à son état de santé : « affreuses nuits qui compriment le cœur). (Baudelaire écrit à sa mère en 1859 : « Ce que je sens, c’est un immense découragement, une sensation d’isolement insupportable, une peur perpétuelle d’un malheur vague, une défiance complète de mes forces, une absence totale de désir, une impossibilité de trouver un amusement quelconque. » (champ lexical du mal)). 4. Les sept Vieillards Ce poème est dédié à Victor Hugo en exil. On y remarque une omniprésence du mal et du laid sans les mots explicites du mal. A travers une flânerie, dans un paysage lugubre et angoissant. En 13 quatrains, le poète dépeint le mal avec des scénettes aux allures d’enfer. Ce poème donne une impression d’époque décadente. On retrouve dans ce poème l’accumulation et le parallélisme parfait mettant en lien le laid et le mal, notamment au vers 29 à travers des champs lexicaux différents : -­‐champ lexical du fantastique : -­‐spectre,mystère,collosse-­‐ -­‐champ lexical d’éléments liquides évoquant l’eau : -­‐pluie,le canal,coule,pleuvoir,inonde-­‐ -­‐champ lexical rendant l’atmosphère lourde et poisseuse : -­‐brume,brouillard,sale,jaune-­‐ -­‐champ lexical du laid : -­‐hideux,dégoûtant,maladroit,sinistre-­‐ -­‐champ lexical de l’animalité : -­‐échine,quadrupède,pattes-­‐ Cela donne une apparence monstrueuse aux vieillards reprise dans la comparaison péjorative du vers 25. -­‐champ lexical de la mort : -­‐mort,enfer,spectre,décrépitude,cortège infernal – -­‐champ lexical de la peur : -­‐inquiétude,frisson,monstre,épouvanté-­‐ Cela montre un sentiment de terreur et de persécution. Il est terrifié par le spectacle donné par ces vieillards mais il se sent aussi persécuté : -­‐champ lexical de la persécution : -­‐complot infâme,méchant hasard-­‐ Il se sent proche de la folie et doute de ce qu’il voit : -­‐champ lexical de la maladie : -­‐malade,morfondu,esprit fiévreux.trouble,blessé-­‐ On a une correspondance très forte entre le tableau parisien et l’état d’esprit du poète exprimé dans les vers 5 avec : « triste rue » et « mon âme déjà lasse » au vers 11. Cela s’exprime aussi dans la métaphore finale du bateau pris dans la tempête qui montre que le poète n’a pas réussi à « reprendre la barre » sur son âme. 5. Les Aveugles (p125) Ce poème apparaît dans les Fleurs du Mal après les 7 Vieillards et les petites Vieilles. Ce sont des marionnettes auprès desquelles Baudelaire cherche une paix fraternelle. Dans ce sonnet, on peut comprendre que les aveugles sont les hommes, en général, plongés dans une nuit atroce et solitaire. Dans le 1er quatrain, le poète invite son âme à les « contempler », c’est à dire, à regarder et à réfléchir sur ce spectacle douloureux. « Ils sont vraiment affreux ». Ils sont vaguement ridicules, terribles, singuliers comme des somnambules. Ce sont des êtres menaçants. Par leur absence de vie, les aveugles marquent une relation avec les petites Vieilles qui étaient comparées à des marionnettes. Baudelaire montre encore une fois qu’il y a une correspondance entre la laideur et l’horreur. Son appréciation est violente et sans pitié, car le lexique est péjoratif et cruel. Ensuite ils montrent une opposition entre deux mondes : l’Idéal et le Spleen. D’un côté on a un champ lexical qui exprime l’élévation spirituelle (« divine étincelle, au loin, rêveusement, noir illimité, silence éternel, au ciel »), de l’autre, en contraste, on trouve un lexique évoquant le poids de la vie et du corps (spleen) : « pavé, appesanti, autour de nous, hébété, je me traîne .» Dans les rimes du 2ème quatrain, on peut nettement voir cette opposition entre le haut et le bas : -­‐« partie/appesantie » (contraste entre le mouvement et la lourdeur) -­‐« levés/pavés » (un regard vers le ciel contrastant avec le sol) -­‐« illimité/cité » (opposition entre le lointain et ce qui est là autour de nous -­‐« beugle/aveugle » (opposition entre le vulgaire et ceux qui sont tournés vers le ciel. Il dénonce le « vulgaire » de l’existence en utilisant le mot « plaisir » lié au mot « atrocité ». De plus, il confirme cette idée avec la gradation des verbes qui évoque la foule (chantes, ris, beugles) : les termes sont de plus en plus péjoratifs. Le poète se compare aux aveugles qui regardent ailleurs et ne voient pas ce qui les entoure. Le poète se traîne aussi comme les aveugles, il refuse de se laisser happer par la foule vulgaire. Toujours à la recherche de la perfection, de la beauté et de l’illimité, il comprend qu’il ne peut trouver cet idéal : le Ciel. Il reste seul en proie au désespoir. Ce poème suscite une certaine inquiétude : il rappelle que l’existence est laborieuse. Les hommes vivent du côté du « Spleen » comme des aveugles tournés vers « l’Idéal » mais incapables de le voir… il faut continuer à chercher les « fleurs » dans le mal. IV.
Conclusion La maladie du siècle de Baudelaire : Il est vrai que les Fleurs du mal sont autobiographiques : nous ressentons, dans ses poèmes, qu’il y a présence d’un homme qui vit mal : il subit la pauvreté, la maladie (syphilis + paralysie) et il se sent trahit par sa mère, remariée… Chez Baudelaire, on aura toujours cette image de l’âme qui se retrouve torturée. De plus, des poètes « maudits », comme Rimbaud et Verlaine (mal dans leur peau) vont s’inspirer de Baudelaire en intégrant cette notion de « Spleen » dans leurs œuvres. Nous pouvons donc dire que ce mal n’est pas seulement autobiographique, il est aussi récurent. Nous devons surtout retenir que Baudelaire a fait de sujets infâmes des pièces de poésie, il a bouleversé le monde poétique de son époque en cherchant à choquer, oser, provoquer en utilisant de nombreuses choses non-­‐poétiques. « C’est en faisant le mal, et surtout le mal que Baudelaire arrive au bien. » Jean-­‐Paul Sartre