Montpellier : liposuccion fatale à la sortie du bloc opératoire, à

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Montpellier : liposuccion fatale à la sortie du bloc opératoire, à
Montpellier : liposuccion fatale à la sortie du bloc
opératoire, à Castelnau-le-Lez
Un chirurgien et un anesthésiste ont été jugés pour une opération esthétique ayant mal
tournée, fin 2008, à la clinique du Parc à Castelnau-le-Lez.
ILLUSTRATION / MIDI LIBRE
Justice : Un chirurgien et un anesthésiste ont été jugés pour
une opération esthétique ayant mal tournée, fin 2008, à la
clinique du Parc à Castelnau-le-Lez.
Il faut souffrir pour être belle ! Cette phrase, lâchée comme une boutade par une infirmière
de la clinique du Parc à Castelnau-le-Lez, raisonne encore dans la tête de cet homme. Six ans
et demi après la mort de son épouse, alors âgée de 72 ans. Décédée après son passage au
bloc pour une liposuccion abdominale.
Que s'est-il passé ?
Une opération tout sauf banale comme tout acte opératoire, fut-il ordinaire, déconseillée à
la victime par plusieurs médecins. Mais qu'un chirurgien montpelliérain va pourtant accepter
de pratiquer. Et dont la septuagénaire ne se relèvera pas, décédant le surlendemain soir du
4 novembre. Que s'est-il passé ? Une longue instruction et deux rapports de collèges
d'experts plus tard, deux éventualités, comme des évidences, se dégagent.
Un : le praticien a vraisemblablement percé le ventre de sa patiente à coups de canule. Mais
également son intestin grêle (à deux reprises), son côlon transverse et son côlon droit.
Deux : lui et le médecin-anesthésiste ont sérieusement sous-évalué la surveillance postopératoire d'une patiente potentiellement à risque, ne serait-ce qu'en raison de son âge. Et
ont enchaîné une accumulation d'inattentions ayant conduit à une suite d'erreurs avec la fin
funeste que l'on sait.
Trois : la victime est décédée deux jours et demi après, au terme d'un diagnostic posé trop
tardivement en réanimation puis un vain retour au bloc.
Une opération "qui n'était pas lourde"
Plus de six ans après pourtant, à la barre de la correctionnelle, le chirurgien s'en défend.
Minaude et répond quasi-systématiquement à côté aux questions de la présidente Laporte
et de ses assesseurs. Évoquant une opération "qui n'était pas lourde". Tellement pas aux
yeux du praticien qu'il ne passera voir sa patiente que quelques heures avant son décès.
Même discours en pointillé au sujet d'appels téléphoniques passés par les infirmières et qu'il
n'aurait jamais reçu. À partir de là, livrées à elles-mêmes et n'osant pas prendre certaines
initiatives, peut-être eu égard à leur statut hospitalier, celles-ci vont parer le plus pressé.
"On a une dame qui est morte. Ce n'est pas par l'opération du Saint-Esprit !"
"Ne pensez-vous pas qu'il y a eu un problème. Cela ne fait pas de gros saignements une
liposuccion", demande la magistrate à l'évocation des draps du lit imbibés de sang.
"Ah si, si ! Parfois à la limite de la perfusion", répond l'anesthésiste. Qui, deux jours de rang,
se contentera de prescrire des doses d'analgésique morphinique à la retraitée. Et assure
l'avoir ausculté.
Le faisant ressembler à un copilote déférent envers son commandant de bord tout en
sentant la situation leur échapper.
"Personne ne vous a vu !", tonne la magistrate tout à ses cotes de l'épais dossier. Et
d'appuyer, là où cela fait mal : "L'évaluation de sa douleur était de huit sur dix. Pour une
femme pas douillette cela ne vous a pas choqué ? On a une dame qui est morte. Ce n'est pas
par l'opération du Saint-Esprit ! Donc il faut dire les choses, poser les valises. On est pas là
pour se couvrir les uns les autres !".
"Vous n'êtes pas des maçons ! Il n'y a pas de garantie décennale !"
"Chacun à pour objectif soit de nier l'évidence, soit de mentir, soit de travestir les faits pour
ne pas assumer", s'agace Me Gérigny-Isern depuis le banc des parties civiles.
Sa consœur Gayet ne dit pas autre chose : "On a nié l'évidence, c'est lamentable ! J'ai
l'impression d'être en face de deux collégiens pris pour une petite faute devant leur
proviseur". Quand Me Dossat enfonce le clou : "Vous avez la vie des gens en mains, vous
n'êtes pas des maçons ! Il n'y a pas de garantie décennale ! Vous avez un comportement de
petits délinquants après un vol à la sauvette, c'est indigne !".
De son point de vue, la parquetière l'assure : ce décès est le fruit "de la rencontre fatale de la
confiance et de la négligence (...). La carence, elle est absolue".
"Causalité indirecte, trace de retard", peut-être. Mais pas "de manquement majeur, de faute
caractérisée", estime Me Cohen en défense. Le pénaliste parisien réclamant la relaxe de
l'anesthésiste.
"Mourir à la suite d'une opération esthétique c'est scandaleux mais c'est possible. Mieux :
sans responsabilité ! Il aurait dû voir sa patiente au matin du 5 novembre. Mais je suis sidéré
par la capacité des experts. Ils ont fait dire le contraire aux pièces du dossier. Et jamais ils ne
décrivent une perforation par instrument. La cause du décès ? Aujourd'hui encore elle n'est
pas attestée !", estime Me Lacœuilhe. Plaidant à son tour la relaxe du chirurgien.
Réquisitions : un an de prison assorti d'un sursis et un an d'interdiction d'exercice contre le
praticien ; huit à dix mois avec sursis contre son confrère. Le jugement a été mis en délibéré
au 1er octobre. L'opération a eu lieu à la clinique du Parc à Castelnau, fin 2008.

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