Bactériologie des otites externes du nourrisson à Abidjan (Côte d

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Bactériologie des otites externes du nourrisson à Abidjan (Côte d
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Bactériologie des otites externes du nourrisson à Abidjan
(Côte d’Ivoire)
Microbiology of acute otitis externa in infants in Abidjan
(Ivory Coast)
E. Ette-Akre*, A. Kacou-Ndouba**, C. Ahounzo-Yavo*, M.J. Tanon-Anoh***, M. Dosso**
Résumé : Le but de ce travail était d’identifier les germes isolés au cours des otites externes du nourrisson à Abidjan. Pendant
9 mois, tous les nourrissons amenés en consultation pour otite externe ont eu un prélèvement bactériologique par écouvillonnage du conduit auditif externe. Soixante-treize prélèvements pratiqués chez 70 nourrissons ont permis l’isolement de 151 microorganismes, dont 37 Staphylococcus coagulase négative (24,5 %), 35 Enterococcus faecalis (23,2 %), 35 Candida albicans
(23,2 %), 20 Pseudomonas aeruginosa (13,2 %), 9 Staphylococcus aureus (6 %), 7 Candida non albicans (4,6 %), 6 Proteus (4 %),
1 Escherichia coli (0,7 %), 1 Enterobacter (0,7 %). Cette étude fait ressortir le caractère polymorphe de la flore isolée dans les
otites externes. L’association des Cocci à Gram + avec les levures était prédominante, avec une moindre fréquence de Pseudomonas aeruginosa. Cette flore doit être prise en compte pour le traitement probabiliste des otites externes.
Mots-clés : Otite externe - Bactériologie - Nourrisson.
Summary: The aim of this study was to identify the main germs of otitis externa in infants in Abidjan. A prospective study was
performed during 9 consecutive months. 72 samples were obtained in 70 infants. Analysis found 37 Staphylococcus coagulase
negative (24,5%), 35 Enterococcus faecalis (23,2 %), 35 Candida albicans (23,2%), 20 Pseudomonas aeruginosa (13,2%), 9 Staphylococcus aureus (6%), 7 Candida non albicans (4,6%), 6 Proteus (4%), 1 Escherichia coli (0,7%), 1 Enterobacter (0,7%). This
study emphasizes the polymicrobial nature of otitis externa. Gram positive cocci and fungus was the predominant association.
Pseudomonas aeruginosa had lower frequency. Otitis externa treatment had to be aware of this flora.
Keywords: Germ - External otitis - Infant.
nfection fréquente et banale, l’otite externe pose paradoxalement des problèmes thérapeutiques. Devant la relative fréquence d’otites externes en situation d’échec thérapeutique (1), une étude a été réalisée afin d’identifier les germes
présents dans le conduit auditif externe au cours des otites
externes chez le nourrisson à Abidjan.
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MATÉRIEL ET MÉTHODE
Il s’agit d’une étude prospective, effectuée de janvier 2003 à septembre 2003, et multicentrique, puisqu’elle a été effectuée dans
trois services de consultation d’ORL de la ville d’Abidjan, qui a
concerné les nourrissons des deux sexes amenés en consultation
* Service ORL, CHU de Cocody.
** Institut Pasteur de Côte d’Ivoire.
*** Service ORL, CHU de Yopougon.
pour une otite externe. Ont été exclus ceux qui avaient une otite
externe nécrosante progressive, une atteinte de l’oreille moyenne
concomitante ou ceux qui avaient reçu un traitement antibiotique
au cours des 5 jours précédant l’examen. Un prélèvement bactériologique du conduit auditif externe a été systématiquement réalisé. Deux écouvillonnages successifs ont été effectués, l’un pour
un examen microscopique direct et l’autre pour la mise en culture. Le choix des milieux de culture a été orienté par le résultat
de la coloration du Gram ; ainsi, des géloses au sang et des géloses
sélectives pour l’isolement des staphylocoques, des entérobactéries, des Pseudomonas et des levures ont été ensemencées.
L’identification des germes a reposé sur l’analyse des caractères
morphologiques, culturaux et biochimiques. Les données
recueillies ont fait l’objet d’une analyse statistique (descriptive
et analytique) au moyen du logiciel Epi Info version 6.04 au seuil
alpha = 0,05.
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 298 - mai-juin 2005
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RÉSULTATS
N
%
Cocci à Gram +
Bacilles à Gram –
Levures
16
1
6
22,23
1,38
8,33
Polymorphe
n = 49 (68,05 %)
Cocci à Gram + et bacilles à Gram –
Bacilles à Gram – et levures
Cocci à Gram + et levures
Cocci à Gram +, bacilles à Gram –
et levures
15
3
19
12
20,83
4,16
26,38
16,66
E
Notre étude a permis de mettre en évidence 68,08 % de flore polymorphe dans les otites externes du nourrisson. Ce caractère polymorphe de la flore a été retrouvé dans une proportion de
59,31 % dans le conduit sain du nourrisson à Abidjan (2) ; il est
classiquement rapporté dans la littérature que ce type de flore
aurait un rôle de protection de l’oreille externe contre les infections (3).
Parmi les staphylocoques, S. coagulase négative prédominait dans
notre étude avec 24,5 %, contre 7,3 % rapporté par Noyon (4).
Cependant, ce dernier notait un taux élevé de Staphylococcus
aureus : 27 % contre 6 % dans notre série. Quant à Pseudomonas aeruginosa, notre taux de 13,2 % est moins élevé que celui
observé dans les séries de Noyon (4), avec 44,8 %, et de Roland
(5), avec 38 % dans lesquelles ce germe était le plus fréquent des
germes responsables d’otite externe. La fréquence des levures
avec 27,8 % est plus élevée que celle observée par Noyon (4),
avec 15,3 %. L’analyse des différentes levures isolées dans notre
étude fait ressortir une prédominance des Candida albicans
(23,17 %) ; en revanche, Aspergillus niger et Aspergillus fumigatus, habituellement observés dans d’autres séries publiées dans
la littérature, étaient absents dans notre série (4, 6). Par ailleurs,
toujours dans notre série, l’association des levures aux cocci à
Gram + était fréquente (43,04 %), alors que Amigot n’en a pas
observé (6).
L’étude comparative des flores microbiennes dans les otites
externes et dans le conduit sain de nourrissons à Abidjan a permis de relever des différences. Alors qu’ils ne représentaient que
7,34 % des germes isolés dans le conduit sain à Abidjan, les staphylocoques à coagulase négative ont été retrouvés dans une proportion de 24,5 %. Pour Bordure (3), ces staphylocoques, souvent prédominants dans la flore des conduits sains, sont rarement
pathogènes (tableau III). En revanche, Staphylococcus aureus
représente 6 % des germes isolés au cours des otites externes,
Tableau I. Caractéristiques morphologiques de la flore identifiée dans
72 prélèvements d’otite externe.
Coloration de Gram
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COMMENTAIRES
Données bactériologiques
L’otite externe était unilatérale dans 68 cas et bilatérale dans 2 cas ;
ainsi 72 prélèvements ont été effectués.
L’examen microscopique direct a permis de découvrir que 22,8 %
des prélèvements comportaient des leucocytes (> 10 par champ
microscopique) de façon significative.
Les résultats de la coloration de Gram sont indiqués dans le
tableau I. La flore était polymorphe dans 71 % des cas, elle était
constituée d’une double association dans 37 cas et d’une triple
association dans 12 cas. Dans la majorité des cas, les cocci à
Gram + étaient associés à des levures.
Monomorphe
n = 23 (31,94 %)
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La culture a permis d’identifier 151 germes. Leur répartition est
représentée dans le tableau II. Les Staphylococcus à coagulase
négative représentaient 24,5 % des germes, les Enterococcus faecalis et les Candida albicans respectivement 23,2 % et le Pseudomonas aeruginosa 13,2 %.
Données épidémiologiques
Soixante-dix enfants ont été inclus dans l’étude ; l’âge moyen
était de 11,8 mois, avec des extrêmes allant de 1 à 24 mois. Le
sex-ratio était de 2,18. La répartition des germes n’était pas
influencée par l’âge ni par le sexe. 56,5 % des Staphylococcus
aureus ont été isolés chez les enfants de moins de 12 mois, contre
43,5 % chez ceux de plus de 12 mois. Il en était de même pour
les Candida.
Bien que certains facteurs favorisants des otites externes aient
été identifiés, aucun ne semblait favoriser la prolifération d’un
type particulier de micro-organisme : l’humidité du conduit
(44,9 %), les lésions de grattage (27,6 %), des antécédents d’otites
externes (14,6 %), le corps étranger (2,8 %), un terrain allergique
(2,8 %), un traitement de type traditionnel (7,3 %).
Type de flore
I
Tableau II. Répartition des germes identifiés au cours des 72 otites externes.
Gram
Cocci à Gram +
n = 81
Bacilles à Gram –
n = 28
Levures
n = 42
32
N
%
Staphylococcus, n = 46 (30,46 %)
Germe
Staphylococcus aureus
Staphylococcus coagulase (-)
9
37
5,96
24,50
Streptococcus, n = 35 (23,17 %)
Enterococcus faecalis
35
23,24
Entérobactéries, n = 8 (5,29 %)
Proteus mirabilis
Escherichia coli
Enterobacter
6
1
1
3,97
0,66
0,66
Non entérobactéries, n = 20 (13,24 %)
Pseudomonas aeruginosa
20
13,24
Candida, n = 42 (27,81 %)
Candida albicans
Candida non albicans
35
7
23,17
4,63
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 298 - mai-juin 2005
Tableau III. Étude comparative entre les germes isolés dans le conduit sain et l’otite externe.
Germes
Staphylocoques
Conduit sain
Otite externe
BORDURE (3)
ETTE-AKRE (2)
n = 395
Notre étude
n = 151
ROLAND (4)
n = 202
NOYON (4)
n = 248
Staphylococcus aureus
23 %
108 (27,34 %)
9 (6 %)
7,8 %
67 (27 %)
Staphylococcus coagulase (-)
_
29 (7,34 %)
37 (24,5 %)
16,6 %
18 (7,25 %)
Streptocoques
Enterococcus faecalis
00
71 (18 %)
35 (23,17 %)
1,9 %
_
Entérobactéries
Proteus mirabilis
_
1
6
_
_
Escherichia coli
_
18
1
_
_
Non entérobactéries
Enterobacter
_
2
1
1,6 %
_
Klebsiella et Serratia
_
39
0
_
_
Providencia sp.
_
1
0
_
_
Pseudomonas aeruginosa
1%
79 (20 %)
20 (13,24 %)
38 %
111 (44,75 %)
Pseudomonas matophilia
_
0
0
_
1
Pseudomonas stuzeri
_
0
0
_
1
Pseudomonas fluorescens
_
0
0
_
1
47 (12 %)
42 (28 %)
Levures
*38 (15,32 %)
* Les levures comportent des Candida (albicans, pseudotropicalis, tropicalis, parakrusei), et des Aspergillus (niger, fumigatus).
contre 27 % dans le conduit sain. Enterococcus faecalis a été isolé
dans une proportion de 23,17 % dans l’otite externe, ce qui est
supérieur à la valeur observée dans le conduit sain (18 %). Pour
Bordure (3), Enterococcus faecalis est absent dans l’oreille saine.
Contrairement aux données de la littérature (3), selon lesquelles
la fréquence de Pseudomonas aeruginosa est très faible dans le
conduit auditif sain (0 à 1 %), nous avons dans une étude antérieure, effectuée en 2001 à Abidjan (2), un taux de 20 %. Cette
valeur est supérieure à celle observée au cours des otites externes
dans notre étude (13,24 %). Notre prévalence de 13,24 % dans
les otites externes est moins élevée que celle observée par d’autres
auteurs (3-6). Bien que les levures soient présentes dans le conduit
sain (12 %) à Abidjan (2), la prévalence était plus élevée dans les
otites externes (28 %). L’espèce Candida albicans était plus fréquemment isolée à Abidjan que dans d’autres séries publiées dans
la littérature dans les deux cas.
CONCLUSION
Cette étude a permis l’identification des germes isolés au cours
des otites externes du nourrisson à Abidjan, avec une prédominance des cocci à Gram positif et des levures. Ils sont représentés par les staphylocoques à coagulase négative, Enterococcus
faecalis et Candida. Pseudomonas aeruginosa a été isolé dans
une moindre proportion. Par ailleurs, on observe une fréquence
de l’association des cocci à Gram + aux levures. Il importe de
prendre en compte toutes ces particularités pour proposer une
prise en charge thérapeutique adaptée à notre écosystème bactérien.
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1. Ette-Akre E, Tanon MJ, Amana B, Mandah-Angui A, Bamba M. Initiation
d’une consultation pédiatrique au CHU de Cocody (bilan de 14 mois d’activités). Rev Col Odonto-Stomatol Afr Chir Maxillo-fac Afr 2000;7:33-37
2. Ette-Akre E, Kacou-N’douba A, Kouassi-M’bengue A, Tanon-Anoh MJ,
Dosso M, Bamba M. Écologie bactérienne du méat acoustique externe du
nourrisson sain à Abidjan (Côte d’Ivoire). Afrique biomédicale 2001;4(3-4):
12-6.
3. Bordure P. Écologie microbienne dans le conduit auditif externe. Rapport
de la Société française d’ORL et de pathologie cervico-faciale, Paris : Arnette,
1995:47-54.
4. Noyon P, Portmann D. L’otite externe. Rev Laryngol Otol Rhinol 1997;
118(3):213-22.
5. Roland PS, Stroman DW. Microbiology of acute otitis externa. Laryngoscope 2002;112:1166-77.
6. Amigot SL, Gomez CR, Luque AG, Ebner G. Microbiological study of external otitis in Rosario City, Argentina. Mycoses 2003;46:312-5.
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 298 - mai-juin 2005
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