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Les bas sont soumis à la vapeur pendant
quelques minutes, sur une forme en métal qui
les repasse et leur donne le galbe de la jambe.
Lors de la « visite »
(test de contrôle)
de chaque bas,
tout fil tiré est
délicatement
remis dans le
droit chemin.
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MAGAZINE DU VENDREDI 19 SEPTEMBRE 2014
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plaisirs I dans l’atelier de Gerbe
L’unique manufacture française
re
de collants perpétue un savoir-fai
teur
centenaire. Depuis 2010, le créa
ard
de mode et de chaussures Gasp
ique.
artist
teur
direc
son
est
h
ievic
Yurk
Des bas haut de gamme
Depuis quatre ans, le styliste Gaspard Yurkievich habille les jambes
de quelques grammes de luxe pour la maison centenaire.
PAR MATHIEU LABONDE PHOTOS ROBERTA VALERIO
A
Saint-Vallier (Saône-et-Loire), la longue
façade Art déco de la manufacture
Gerbe abrite depuis 1904 un savoir-faire
unique au monde. L’usine est en effet
la dernière en France à produire des
collants, et la seule de la planète à fabriquer encore le
célèbre « bas couture » qui a tant fait fantasmer. En
2003, l’entreprise est sauvée de la faillite par l’industriel Alain Regad. Celui-ci invite en 2010 le créateur de
mode et de chaussures Gaspard Yurkievich à devenir
son directeur artistique.
La même machine depuis 1934
Entre le dessin et le lancement de la fabrication,
l’équipe de recherche et développement travaille six
mois. Traduire le motif en points tricotables pour les
400 aiguilles d’un métier circulaire, régler les diminutions et la tension du fil pour qu’un collant soit
confortable dans toutes les tailles, nécessite une mise
au point à laquelle collaborent les 60 employées de
l’usine, qui testent et notent les prototypes. Pour le bas
couture, pas de recherche : ils sont fabriqués depuis
l’entre-deux-guerres sur une machine inventée en
Angleterre à la fn du XIXe siècle. Celle-ci, en service
depuis 1934, pèse 16 tonnes, mais « est fragile comme
un bébé », explique Pascal Nowakowski, 51 ans dont
trente et un de maison, seul mécanicien capable de la
piloter. Chaque matin, il en huile les rouages, surveille
son fonctionnement, à l’afût des fls cassés : « Il faut
quinze ans d’expérience pour la faire marcher. » En
une heure, les 32 têtes réalisent avec 600 aiguilles un
voile de nylon d’une fnesse extrême. Dans un bas de
20 grammes, plus de 12 kilomètres de fl…
Au contraire des collants, dont les jambes sont tricotées en tube, les bas sortent du métier à plat avant
d’être fermés par une couture longeant la jambe. Seule
Corinne Commeau, 42 ans, vingt-cinq ans de maison,
maîtrise ce geste. Sa machine à coudre, améliorée par
Gérard Prieto, directeur de production et « inventeur » maison, est unique, elle aussi. Teinté, formé à la
vapeur, chaque bas est ensuite « visité ». Si les bonnetières trouvent un fl tiré, elles le « raccoutrent » avec
une molette tournante et le replacent dans le droit
chemin. Le bas est enfn emballé, prêt à habiller les
jambes et emballer les cœurs.
MAGAZINE DU VENDREDI 19 SEPTEMBRE 2014
Gérard Prieto, directeur de production (à g.) et Pascal Nowakowski, seul mécanicien
capable de diriger la machine tricotant les bas couture, travaillent main dans la main.
Les prototypes sont testés et notés
par les 60 employées de l’usine
Traditionnellement noirs, les bas couture Carnation sont désormais déclinés
dans trois teintes vives : bleu ombré, fleur de cactus et violet foncé.
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