« Les jeunes nous bousculent »

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« Les jeunes nous bousculent »
PAYS : France
RUBRIQUE : Décideurs
PAGE(S) : 32
DIFFUSION : 314312
SURFACE : 61 %
JOURNALISTE : Yann Le Galès
PERIODICITE : Quotidien
30 novembre 2015 - N°22179
DÉCIDEURS
AVEC
Alice Guilhon
Jean-Philippe
Courtois
« Les jeunes nous bousculent »
La directrice
générale de Skema
Business School
et le président
de Microsoft
International
décryptent
les nouvelles
manières
d’enseigner
et de diriger.
PROPOSRECUEILLIS
PAR
YANN LE GALÈS
@YannLeGales
ENTRETIEN Alice Guilhon et
Jean-Philippe Courtois expliquent
pourquoi le numérique transforme l’enseignement et l’entreprise.
LE FIGARO. - La transformation
numérique a-t-elle plus de
conséquences pour les entreprises
que les écoles de management ?
Alice GUILHON. - Skema, comme
toutes les entreprises d’éducation,
est obligée de s’adapter. Les talents que nous formons doivent
être prêts à l’emploi dans un
monde qui est un puzzle. Ils doivent savoir s’adapter à des cultures différentes, utiliser tous les
outils àleur disposition.
Jean-Philippe COURTOIS. - Les
changements technologiques s’accélèrent. Des dizaines de millions
de PMEutilisent le cloud. Les grandes entreprises se transforment.
L’économie numérique représentera 35 000 milliards de dollars en
2017. Cette transformation numérique crée des opportunités et des
menaces. Chaque secteur est touché. Une révolution culturelle est
nécessaire pour adapter nos manières de travailler.
Comment les manières
de travailler
changent-elles
chez Microsoft ?
J.-Ph. C. - Je suis témoin chaque
jour de la manière dont Microsoft
se transforme. Je suis entré chez
Microsoft il y a trente et un ans.
Nous étions 500 salariés dans le
monde. Une nouvelle culture
émerge. Les équipes de vente, de
marketing,
de consulting,
de
distribution travaillent différemment. Les changements concernent la formation, les comportements, les modèles d’organisation.
Quelle est votre méthode
vous adapter ?
pour
A. G. - Nous avons eu la chance de
partir d’une page blanche en
créant Skema. Nous sommes allés
voir des diplômés, comme JeanPhilippe,
président
de notre
conseil d’orientation stratégique,
des employeurs en leur deman-
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dant ce qu’ils attendaient des jeunes diplômés. Nous avons compris
qu’il fallait privilégier la mobilité,
le multiculturalisme,
le numérique, la capacité d’entreprendre,
l’apprentissage continu.
Est-ce plus facile de transformer
une école qu’une entreprise ?
A. G. - Non. Les écoles peuvent
être des bastions d’immobilisme
ou des catalyseurs de changements. Les professeurs sont très
conservateurs ou alors ce sont les
forces motrices de l’innovation.
Rien ne se passera s’ils ne veulent
pas changer leur méthode pour
enseigner. Pour certaines écoles
dont nous faisons partie, c’est eux
qui portent les innovations pédagogiques et participent activement au changement de culture
nécessaire pour rester en phase
avec les évolutions économiques
et technologiques.
Quelles qualités
demandez-vous
à vos équipes ?
J.-Ph. C. - L’état d’esprit de nos
collaborateurs doit être tourné
vers la croissance et les opportunités à saisir. Ils doivent se poser
des questions simples : qu’ai-je
appris de nouveau aujourd’hui ?
Qu’ai-je remis en cause dans ma
manière de travailler ? Les équipes doivent être beaucoup plus
agiles et rapides. Elles doivent être
capables de gérer l’ambiguïté car
les choses ne sont pas noires ou
blanches.
Les écoles comprennent-elles
les jeunes que les employeurs
plus
?
A. G. - Les jeunes générations
nous forcent à nous adapter. Elles
remettent en cause la manière
d’apprendre. Les jeunes ne restent
plus trois heures dans un amphi à
écouter un professeur. Nous devons leur donner accès à la
connaissance à la maison ou
ailleurs comme à l’école.
Qu’apportent
les jeunes ?
J.-Ph.
Nous embauchons
C. -
600 jeunes diplômés dans le
monde dans les services, les ventes et le marketing. Ils ont un apport très positif à l’entreprise. Ils
n’acceptent pas le statu quo. Ils
s’expriment. Ils entreprennent.
Ils échouent parfois. Ils remettent
en question la façon de travailler
avec des idées novatrices. Ils se
sont emparés de notre réseau social Yammer qui permet aux collaborateurs du monde entier de
coopérer sur des innovations.
Discutez-vous
avec les jeunes collaborateurs
?
J.-Ph. C. - J’organise dans chaque pays une réunion avec eux.
C’est rafraîchissant. Ils me parlent des dysfonctionnements. Ils
n’ont pas peur de challenger la
stratégie de l’entreprise. Ils ne
mettent pas les formes comme le
feraient des managers ayant plus
d’expérience.
Notre
culture
d’entreprise doit encourager ce
type d’attitude. Sinon l’entreprise ne survivra pas.
Les jeunes bousculent-ils
vraiment l’ordre établi ?
J.-Ph. C. - Au Japon, une jeune
collaboratrice qui travaillait depuis
neuf mois chez Microsoft m’a donné des exemples de dysfonctionnement quitte à remettre en cause
le fonctionnement d’un responsable. Jelui ai donné mon feu vert.
A. G. Les étudiants nous poussent.
Ils arrivent avec des idées nouvelles à chaque génération et auront
des comportements révolutionnaires dans les entreprises. Notre
rôle est les comprendre et de les
accompagner.
Les jeunes ont-ils
des défauts ?
J.-Ph. C. - Les jeunes n’adoptent
pas toujours les meilleurs comportements,
mais ils savent
s’adapter, remettre en cause les
choses, rebondir après un échec,
prendre des risques.
A. G. - Nous avons des leçons de
management à recevoir des jeunes. Ils ne croient pas à la sanction mais à l’apprentissage. Trois
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anciens de Skema qui ont créé
des entreprises avaient de mauvaises notes en cours de création
d’entreprise ! Pour autant, ils ont
créé des sociétés extrêmement
performantes !
CONFIDENCE
QUE
ELS
LS PRO
PROFESSEURS
FESSEU
S’ADAPTENT
LE
EM
MIEUX ?
A. G.- Ce n’est pas une question d’âge.
Le premier Mooc que nous avons lancé a été créé
par un de nos professeurs seniors. Nous
recrutons des enseignants capables de répondre
à ces nouveaux besoins, d’innover et d’adapter
leurs techniques de recherche et d’enseignement.
PASSEZ-VOUS DU TEMPS À ÉVALUER LES
HOMMES ET LES FEMMES DE VOS ÉQUIPES ?
J.-Ph. C. - Jepasse 35 à 40 % de mon temps
à m’occuper des talents des hommes
et des femmes.
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