Les oligoéléments comme facteur de risque dans la genèse des

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Les oligoéléments comme facteur de risque dans la genèse des
10.4 Les oligoéléments comme facteur de risque dans la genèse des calculs
rénaux : étude d’un effet catalytique possible.
De nombreux travaux montrent l’influence possible de certains cations comme le zinc
sur la vitesse de croissance de phases présentes dans les calculs rénaux. Afin d’établir le rôle
catalytique possible de ces éléments, il convient d’en déterminer la nature et d’en définir la
quantité. Dans ce dessein, nous avons analysé les photons de fluorescence X émis par le
matériau suite à son exposition aux rayons X. La mise en oeuvre du rayonnement synchrotron
(Figure 6A) nous permet alors d’atteindre une sensibilité proche du ppb et d’effectuer des
cartographies.
Dans le cas des calculs urinaires, lorsque l’échantillon contient du calcium
(figure 6B), on observe deux raies dont les énergies sont égales à 3691 eV et 3688 eV. Si le
zinc est présent, alors les deux raies d’émission qui en signent la présence ont des énergies
égales à 8638 eV et 9572 eV. On arrive donc sans peine à préciser les différents éléments
contenus dans le matériau. Rappelons que la mesure de l’intensité de la raie permet de
connaître la quantité de cet élément si l’on prend en compte toutefois toute une série de
corrections.
Figure 6. A. Photographie du montage de microfluorescence sur la ligne de lumière D15. On
reconnaît le diaphragme de sortie du faisceau émergent (1 en figure 6A), la barrette supportant
les échantillons (2 en figure 6A) ainsi que le détecteur (3 en figure 6A). B. Spectre d’émission
d’un calcul rénal composé d’acide urique et d’oxalate de calcium monohydraté. On reconnaît
les raies du calcium (E = 3 691 eV et 4 012 eV), du zinc (8 638 eV et 9 572 eV), du plomb
(10 551 eV, 12 613 eV) et du strontium (14 165 eV et 15 835 eV). La dernière raie correspond
aux photons incidents réfléchis par l’échantillon (E = 18 000 eV). C. Spectre d’émission d’un
calcul rénal composé de cystine contenant des traces d’oxalate. On reconnaît la raie du soufre
(E = 2 309 eV), celles du calcium (E = 3 691 eV et 4 012 eV), du zinc (8 638 eV et 9 572 eV),
du sélénium (E = 11 222 eV et 12 459 eV) et du strontium (14 165 eV et 15 835 eV). La
dernière raie correspond aux photons incidents réfléchis par l’échantillon (E = 18 000 eV).
L’ensemble des expériences de fluorescence X-durs réalisées sur une centaine
d’échantillons nous a conduits à distinguer trois types d’éléments :
- ceux présents dans la formule stœchiométrique et qui fluorescent dans la gamme
de 2 à 18 keV, comme le calcium pour la whewellite (CaC2O4.H2O) ou la
weddellite (CaC2O4.2H2O) qui sont des oxalates de calcium ou le soufre pour la
cystine ([S-CH2-CH(NH2)-COOH]2). On peut rajouter le phosphore dans la
gamme des photons de plus basse énergie ;
- les oligo-éléments, dont on peut distinguer trois groupes :
o d’une part, ceux qui appartiennent à la même colonne dans le tableau de
classification périodique que ceux cités précédemment. Ainsi, la présence
de strontium sera détectée dans une lithiase composée d’oxalate de
calcium, celle de rubidium dans certains calculs riches en phosphates. De
même, la présence de sélénium sera significative dans le cas d’une cystine.
Notons que le rapport atomique Ca/Sr fluctue suivant la nature de la phase
cristalline dans laquelle est impliqué le calcium comme l’apatite
carbonatée, la brushite, la weddellite ou encore la whewellite ;
o d’autre part, les oligo-éléments comme le zinc ou le cuivre qui sont
impliqués dans de nombreux aspects du métabolisme endogène. Nous les
retrouvons dans des proportions plus élevées lorsque la phase cristalline
constituante du calcul est riche en calcium. Nous basant sur les
cartographies des oligo-éléments réalisées sur les différents calculs, nous
n’avons pas observé d’enrichissement ni en zinc ni en cuivre, d’une zone
particulière du calcul. Ces résultats ne sont pas en faveur d’un rôle
catalytique des oligo-éléments dans l’initiation des calculs ;
o enfin, le fer, dont la provenance peut aussi être liée aux saignements
provoqués par la présence du calcul dans les voies urinaires ;
- les éléments comme le plomb, le cadmium, l’arsenic ou le mercure, dont la présence
témoigne d’une contamination de l’environnement ou de l’alimentation du sujet.
Nous n’avons détecté que le plomb dans les calculs urinaires.
L’ensemble des résultats obtenus sur 70 calculs et autant de cartographies ne nous
conduit pas à établir un rôle catalytique des oligoéléments. Il semble que les règles de
golsschmitt qui régissent l’insertion d’éléments traces dans une matrice et qui reposent
notamment sur des comparaisons entre les rayons ioniques et leur charge suffisent pour
expliquer la présence de ces oligoéléments dans les calculs. Les oligoéléments sont donc
plutôt piégés par les phases chimiques présentes.
Publications relatives à ce travail
- Heavy elements in urinary stones
D. Bazin, P. Chevallier, G. Matzen, P. Jungers, M. Daudon
Urological Research 2007 : 35 179-184
- Very first tests on SOLEIL regarding the Zn environment in pathological calcifications
made of apatite determined by X-ray absorption spectroscopy
D. Bazin, X. Carpentier, O. Traxer, D. Thiaudière, A. Somogyi, S. Reguer, G. Waychunas,
P. Jungers and M. Daudon
J. of Synchrotron Radiation, 15, 506-509 (2008).
- Revisiting the localisation of Zn2+ cations sorbed on pathological calcifications made of
apatites through X-ray absorption spectroscopy.
D. Bazin, X. Carpentier, I. Brocheriou, P. Dorfmuller, S. Aubert, Ch. Chappard, D.
Thiaudière, S. Reguer, G. Waychunas, P. Jungers and M. Daudon
Soumis à J. of Synchrotron Radiation