20 ans de succès entrepreneurial en France
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20 ans de succès entrepreneurial en France
20 ans de succès entrepreneurial en France Etude réalisée par Ernst & Young, en collaboration avec la Chaire Entrepreneuriat ESCP Europe, à l’occasion du 20e Prix de l’Entrepreneur de l’Année Octobre 2012 Sommaire Editorial ............................................................. ................................................ 1 Le Prix de l’Entrepreneur de l’Année ........................................... 3 Synthèse ........................................................................................................... 4 20 ans de création ..................................... ................................................ 6 20 ans de financement ........................................................................... 16 20 ans d’international............................. ................................................ 24 D'hier à aujourd'hui... .............................................................................. 30 Méthodologie.................................................................................................. 32 Bibliographie ................................................. ................................................ 33 20 ans de lauréats du Prix de l'Entrepreneur ....................... 34 Editorial Parler d’Ernst & Young et des entrepreneurs, c’est raconter l’histoire d’une relation privilégiée de longue date. En France et partout dans le monde, notre cabinet accompagne au quotidien les plus dynamiques et les plus ambitieux d’entre eux, afin de les aider à devenir les leaders de demain. Dans le cadre de notre programme mondial du Prix de l’Entrepreneur de l’Année, nous avons l’occasion de rencontrer et d’échanger avec des femmes et des hommes à l’origine des entreprises les plus innovantes et performantes du monde. Alors qu’en France, Ernst & Young célèbre les 20 ans du Prix de l’Entrepreneur de l’Année, nous avons souhaité revenir sur 20 ans d’entrepreneuriat, vus au travers de ces parcours d’exception. Ce Prix est une fenêtre ouverte sur un entrepreneuriat rentable et innovant, source de croissance et d’emplois, conquérant et ouvert à l’international. Depuis 1993, nous avons pu observer l’évolution des entreprises candidates, le profil des entrepreneurs et leurs moyens de financement. C’est de cette observation assidue que nous pouvons aujourd’hui tirer des enseignements pour l’ensemble de la sphère entrepreneuriale française. Dans un environnement économique globalisé, où innovation et flexibilité sont des facteurs clés de réussite, jamais le rôle des entrepreneurs n’a été aussi important et jamais, ils n'ont dû faire preuve d'autant de résilience. Et pourtant, ces dirigeants de PME ou d’ETI sont le "sang neuf" de notre économie. Créateurs, repreneurs ou héritiers, ils innovent, stimulent l’activité, créent des emplois et contribuent largement à la croissance et la prospérité de nos territoires et au-delà de nos frontières. Néanmoins, dans notre pays, quelle que soit l’époque, la situation économique ou la tendance politique, les entrepreneurs et l’esprit d’entreprise restent trop peu valorisés. Les ETI familiales en particulier, maillon essentiel de notre tissu économique, doivent impérativement être préservées face à un environnement réglementaire et fiscal toujours plus contraignant. Plus que jamais, nous avons le devoir d’écouter les entrepreneurs et de comprendre ce qu’ils étaient hier, ce qu’ils sont aujourd’hui afin de les aider à grandir pour qu'ils puissent continuer à jouer pleinement leur rôle demain. Mettre à l’honneur l’esprit entrepreneurial, c’est aussi mettre à l'honneur l'audace, le courage, l'innovation et l'envie qui caractérisent ces femmes et ces hommes qui sont le moteur de notre économie. Bonne lecture. Jean-Pierre Letartre Président d’Ernst & Young en France 1 2 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Le Prix de l’Entrepreneur de l’Année Le Prix de l’Entrepreneur de l’Année est la plus prestigieuse des récompenses décernées aux entrepreneurs dans le monde. Créé en 1986 par Ernst & Young aux Etats-Unis, le programme s’étend aujourd’hui à plus de 140 villes dans 58 pays et récompense chaque année plus de 900 entrepreneurs exceptionnels. Décerné en France depuis 20 ans, ce Prix a récompensé plus de 500 entrepreneurs, qui nous prouvent qu’il est toujours possible de croître, d’innover et de créer de la valeur et des emplois, y compris lorsque le contexte économique est difficile. Ces femmes et ces hommes nourrissent la confiance et l’envie d’entreprendre. Depuis vingt ans, nous récompensons les champions nationaux de l’esprit d’entreprendre mais aussi ceux qui sont les fers de lance de l’économie au niveau régional. Car la croissance et la compétitivité de notre pays dans son ensemble s’appuient sur celles des entrepreneurs de chaque région : Est, Ile-de-France, Méditerranée, Nord, Ouest, Rhône-Alpes, Sud-Ouest. De ces lauréats régionaux émerge celui qui, tout comme ses pairs venus des quatre coins du monde, porte ses couleurs nationales au World Entrepreneur of the Year. Des régions à la mondialisation, la boucle est bouclée : l’Entrepreneur de l’Année incarne l’économie en action. Qui sont les participants au Prix de l’Entrepreneur ? Pour être élu Entrepreneur de l’Année, il faut au préalable que l’entreprise candidate figure au Top 100 des entreprises les plus dynamiques et performantes de France. Etabli et publié chaque année par le magazine L’Entreprise, ce classement recense les entreprises qui conjuguent avec brio croissance et rentabilité. Le candidat doit être dirigeant depuis au moins trois ans d’une entreprise : • dont le capital n’est pas détenu à plus de 50% par un groupe, • dont il est actionnaire à hauteur de 10% minimum (directement ou indirectement), • qui affiche une croissance cumulée sur les quatre derniers exercices : d’au moins 20% pour un chiffre d’affaires compris entre 10 et 100 millions d’euros, d’au moins 15% pour un chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros, • dont la rentabilité est d’au moins 3% (résultat courant avant impôt) sur le dernier exercice. Afin de s’ouvrir aux champions de demain, le Prix intègre également des critères spécifiques pour les "Entreprises d’avenir" : exister depuis huit ans maximum ; avoir réalisé un chiffre d’affaires d’au moins 1 million d’euros sur le dernier exercice, ou une levée de fonds du même montant depuis la création de l’entreprise ; être dirigeant actionnaire à hauteur de 10% minimum. Qui sont les gagnants du Prix de l’Entrepreneur ? Les gagnants sont ceux qui savent démontrer aux jurys, composés d’entrepreneurs et de membres du réseau entrepreneurial français, les plus grandes qualités et ce, dans un vaste ensemble de domaines : • Personnalité et leadership, caractère visionnaire ; • Capacité à gérer la croissance interne/externe, dimension internationale et innovation ; • Originalité du positionnement de l'entreprise et qualité du modèle économique ; • Dimension sociale et sociétale de l'entrepreneur et gestion de la relation sociale dans son entreprise ; • Performances économiques et pérennité de l'entreprise. 3 Synthèse A l'occasion des 20 ans du Prix de l’Entrepreneur de l’Année, cette étude entend tracer les grandes évolutions de l’entrepreneuriat français au travers de ces vingt dernières années. Ces entrepreneurs ont-ils tous le même profil, partagent-ils des qualités et des valeurs communes ? Les entreprises candidates ont-elles profondément évolué en vingt ans en termes de taille, de financement, de stratégie… ? Pour répondre à ces questions, nous avons exploité les données relatives aux 1 700 entreprises candidates au Prix de l’Entrepreneur de l’Année en France entre 1993 et 2011. Une enquête a été également conduite, en partenariat avec la Chaire Entrepreneuriat ESCP Europe, auprès des entrepreneurs candidats à ce prix (voir méthodologie complète en page 32). L’étude s’est naturellement enrichie de notre observation assidue du monde des entrepreneurs, en France et dans le monde, ainsi que des points de vue d'experts qui sont venus apporter leur éclairage. 4 20 ans de succès entrepreneurial en France 5 points clés 1 De plus en plus de créateurs, moins d’héritiers ? En moyenne sur ces vingt dernières années, la grande majorité des candidats (64%) est composée d’entrepreneurs ayant créé leur propre entreprise. Aujourd'hui les héritiers ne représentent plus que 4% des candidats (vs. 17% en 1993). En termes d’évolution depuis 1993, la part des créateurs est en augmentation, ils sont 85% en 2011, contre 66% en 1993. 2 Des entrepreneurs qui se lancent plus jeunes Les candidats au Prix de l’Entrepreneur démarrent leur aventure entrepreneuriale de plus en plus tôt. En 2011, ils étaient plus d’un candidat sur deux à avoir créé ou repris leur entreprise avant l’âge de 35 ans. Ils n’étaient que 2% dans ce cas en 2002. 3 La taille des entreprises de croissance a sensiblement augmenté Les entreprises candidates au Prix de l’Entrepreneur sont bien plus grandes aujourd’hui qu’elles ne l’étaient il y a 20 ans : de quelque 200 employés, leur effectif moyen est passé à 640. Les candidats du Prix de 2011 ont affiché une croissance moyenne de leurs effectifs de 70% sur les trois dernières années. Cela représente au total plus de 39 000 emplois créés sur trois ans, un chiffre non négligeable compte tenu de la conjoncture. 4 Le financement reste un défi majeur, de la création au développement Dans les premières étapes de la création ou de la reprise, les entrepreneurs financent largement leur société par autofinancement : 73% des entrepreneurs interrogés y ont eu recours. Le financement via des business angels et autres investisseurs externes ne concerne que 19% des entrepreneurs interrogés. Cette tendance se vérifie à toutes les étapes du développement : pour 68% des entrepreneurs interrogés, l’autofinancement reste le mode privilégié pour assurer la croissance de leur société. 5 Si l’international est au cœur de la stratégie dès la création de l’entreprise, de nombreux entrepreneurs tirent encore la majorité de leurs revenus du marché domestique Malgré une volonté forte et précoce des entrepreneurs de se développer à l’international, le marché français représente encore plus de trois quarts des revenus pour plus de 60% des entrepreneurs interrogés. Le niveau de l’activité réalisée à l’international est resté relativement stable depuis 20 ans. 5 20 ans de création 6 20 ans de succès entrepreneurial en France Des entrepreneurs pluriels, un profil singulier ? S’il n’existe pas de "gène de l’entrepreneur", il ne fait aucun doute que les moteurs de l’entrepreneuriat se trouvent dans des caractéristiques communes : un goût prononcé pour l’indépendance, la volonté de saisir les opportunités et d’affronter de nouveaux défis. Près de deux tiers des entrepreneurs sont des créateurs Depuis 1993, année de création du Prix de l’Entrepreneur en France, la grande majorité des candidats (64%) est composée d’entrepreneurs ayant créé leur propre entreprise. Les héritiers ne représentent que 17% des candidats, et les repreneurs 19%. Statut des entrepreneurs (moyenne 1993-2011) Sur l’ensemble de la période analysée, les créateurs ont toujours été largement majoritaires. Mais leur part progresse significativement depuis 2007, tandis que celle des repreneurs et des héritiers est en baisse. 17% 19% 64% Créateur Repreneur Héritier Statut des entrepreneurs (évolution 1993-2011) 100% Repreneur 80% Héritier 66% Créateur 63% 61% 60% 85% 40% 20% 17% 17% 21% 18% 21% 16% 12% 4% 0% 1993 2000 2007 2011 Source : base de données Ernst & Young – Candidats au Prix de l’Entrepreneur de 1993 à 2011 1700 entreprises 7 Des entrepreneurs qui concrétisent leur projet de plus en plus jeunes En 20 ans, on constate que les candidats démarrent leur aventure entrepreneuriale de plus en plus tôt. En 2011, ils étaient plus d’un candidat sur deux à avoir créé ou repris leur entreprise avant l’âge de 35 ans. Ils n’étaient que 2% dans ce cas en 2002, la majorité à l’époque se situant plutôt dans la tranche d’âge des 45-54 ans. De plus en plus jeunes, au moment où ils créent leur entreprise, les entrepreneurs ne se lancent pas pour autant "à l’aveugle" dans l’aventure. Nos précédentes études le montraient déjà1 : si de nombreux entrepreneurs se lancent relativement tôt, l’expérience acquise pendant leurs études ou au sein d’une entreprise joue un rôle primordial dans la concrétisation de leur projet. Âge des candidats au moment de la création / reprise de l’entreprise "J’ai fait ce choix de l’entrepreneuriat très tôt, c’était quelque chose de fort en moi, cette volonté d’entreprendre." Aliza JABÈS, Nuxe Quelles ont été les raisons principales qui vous ont poussé à créer / reprendre une entreprise ? (3 choix possibles) Goût d’entreprendre et épanouissement personnel 84% Désir d’affronter de nouveaux défis, goût du risque >65 ans 55-64 ans 0% 3% Nouveaux services/produits 24% 10% < 25 ans 43% 15% Perspective d’augmenter ses revenus 15% 10% 4% 55% 2% 0% 21% Une opportunité provenant d’un emploi précédent Un partenariat offert par une personne tierce (entrepreneur) Sans emploi, a choisi de créer son entreprise 26% 28% 35-44 ans 25-34 ans 33% Etre indépendant 1% 45-54 ans 46% Source : enquête en ligne - mars 2012 8% Quelles sont les qualités et valeurs qui vous définissent le mieux parmi les propositions suivantes ? (3 choix possibles) Entreprises candidates en 2011 (104) Entreprises candidates en 2002 (114) Passionné Source : base de données Ernst & Young Pourquoi entreprendre ? Motivations et moteurs 47% Visionnaire 46% 39% Intègre Les motivations financières sont moindres puisque la perspective d’augmenter leurs revenus n’est citée que par 15% des entrepreneurs. 8 Créatif Gestionnaire La création d’entreprise est principalement portée par le goût d’entreprendre et la volonté de s’épanouir (raisons citées par 84% des entrepreneurs interrogés). Le désir d’affronter de nouveaux défis et la recherche d’indépendance sont aussi des motivations majeures. 1 62% 35% Proactif 26% Loyal Aimant le risque 24% 19% Source : enquête en ligne - mars 2012 Inné ou acquis, l’ADN de l’entrepreneur décodé, Ernst & Young, 2011 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France "Il faut la passion, il faut aller toujours plus loin […]. Il faut apprendre à ne jamais s’arrêter, surtout lorsque vous avez déjà un peu réussi et que vous avez alors peur de perdre ces acquis." Franck PROVOST De plus en plus d'ingénieurs entrepreneurs Aujourd’hui, près de la moitié des entrepreneurs sont diplômés de grandes écoles, contre seulement un tiers en 2003. Ecoles d’ingénieurs et écoles de commerce sont les formations majoritairement privilégiées. Parmi les facteurs de réussite entrepreneuriale, la formation obtenue par le biais des études supérieures est en effet jugée "importante" par 45% des entrepreneurs interrogés, voire "très importante" pour 20% d’entre eux. En revanche, avec le temps, la part des autodidactes s’est réduite : elle représente aujourd’hui 20% des candidats au Prix de l’Entrepreneur, contre 26% en 2003. Niveau de formation des entrepreneurs Passion, créativité et vision : au-delà de constituer de réels gages de succès dans l’entrepreneuriat, ce sont aussi les trois qualités les plus citées par les entrepreneurs que nous avons interrogés. S’ils citent volontiers "le désir d’affronter de nouveaux défis" comme étant à l’origine de leur entreprise (pour 46% d’entre eux), ils ne semblent pas pour autant être des "têtes brûlées". Quand on leur demande de se décrire personnellement, ils ne sont en effet que 19% à déclarer "aimer le risque". Ecole d’ingénieurs Ecole de commerce 19% 20% Autodidacte 7% Formation professionnelle Autres 22% 20% 20% Université A cet égard, de précédentes études ont en effet montré que la prise de risque a tendance à être dissuadée en France en raison de notre relation culturelle à l’échec. Dans notre pays, plus que dans d’autres nations du G20, les entrepreneurs estiment que l’échec est perçu par le milieu des affaires et la société en général comme un handicap majeur pour de futurs projets d’entreprise2. 26% 14% 5% 26% 11% 10% 2011 (104 candidats) 2003 (161 candidats) Source : base de données Ernst & Young – Candidats au Prix de l’Entrepreneur de 1993 à 2011 – Focus 2003/2011 On note une progression particulièrement marquée des profils "ingénieurs" : ils représentaient 26% des candidats en 2011, alors qu’ils n’étaient que 14% en 2003. Dans un secteur où l’innovation est un moteur central de la croissance et où l’industrie occupe une place de choix, il existe en effet un lien de plus en plus étroit entre l’entrepreneuriat et le métier d’ingénieur. Bien que ce soient plutôt les grandes entreprises qui puisent dans le vivier des 30 000 ingénieurs formés par an en France, une proportion croissante d’entre eux reçoit une préparation à l’entrepreneuriat au cours de leur scolarité : 26% pour les moins de 30 ans au lieu de 13,6% en moyenne3. 2 Les entrepreneurs lancent un appel aux gouvernements du G2O, Baromètre de l’entrepreneuriat Nice Côte d’Azur 2011, Ernst & Young. 3 Observatoire des ingénieurs, Enquête 2011, CNISF. 9 Ce qu’en dit le Baromètre Ernst & Young de l’entrepreneuriat4 A l’occasion du Sommet des Jeunes entrepreneurs du G20 (G20 YES) qui s’est tenu à Nice en octobre 2011 en parallèle du sommet des chefs d’Etats, Ernst & Young a présenté la première édition de son Baromètre de l’entrepreneuriat au sein des pays du G20. S’appuyant sur une enquête menée auprès de 1 000 entrepreneurs des pays du G20, ce baromètre est le premier à croiser perception et réalité de l’activité entrepreneuriale, avec pour objectif de mettre en lumière les meilleures pratiques et d’apporter des recommandations aux gouvernements concernés. Il est primordial d’enseigner le métier d’entrepreneur En France, les jeunes diplômés tendent encore à valoriser la stabilité professionnelle au détriment de l’esprit d’entreprise. Le rôle de l'éducation est déterminant pour faire évoluer cette tendance culturelle et favoriser la croissance d’un écosystème permettant de développer l'entrepreneuriat. 74 % des décideurs interrogés dans le cadre du Baromètre estiment que les étudiants doivent suivre une formation spécifique pour devenir entrepreneur. La France a commencé à jeter les bases favorisant un certain épanouissement de l’esprit entrepreneurial, universités et écoles de commerce adoptant des initiatives dans le bon sens. A cet égard, 68% des entrepreneurs français pensent que l'enseignement et les formations dédiés à l’entrepreneuriat se sont améliorés au cours des cinq dernières années en France. Certaines écoles mettent en place des incubateurs pour offrir l’opportunité aux étudiants de développer leur société. Des universités et des écoles de management favorisent la création de cursus spécifiques d’entrepreneuriat et de sessions de formation dédiées et spécialisées. Ce changement souligne une meilleure compréhension de l'impact des entrepreneurs sur l'emploi et la création de valeur. 4 Les entrepreneurs lancent un appel aux gouvernements du G2O, Baromètre de l’entrepreneuriat Nice Côte d’Azur 2011, Ernst & Young. 10 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France "Je pense que l’entrepreneur doit être de plus en plus performant sur de plus en plus de sujets. Et cela, parce que nous étions autrefois dans un monde compliqué et qu’aujourd’hui, nous sommes passés dans un monde complexe". Des entrepreneurs entourés, gage de la réussite La capacité à s’entourer des bons collaborateurs dès l’origine du projet est considérée comme le facteur le plus déterminant pour réussir en tant qu’entrepreneur, jugé "important", ou "très important" par 70% des personnes interrogées. Le réseau personnel vient ensuite (59%). Quant aux investisseurs, ils semblent jouer un rôle moins essentiel, renforçant ainsi l'idée que notre panel privilégie majoritairement l'autofinancement (voir partie 2). Qui, dans votre entourage, a le plus contribué à votre succès en tant qu’entrepreneur ? (Part des facteurs notés "important" et "très important") Jean MANE, V. Mane & Fils On ne naît pas entrepreneur, on le devient, par sa formation mais surtout par son expérience. Moins d’un dirigeant sur cinq était déjà entrepreneur avant la création / reprise de sa société. En revanche, plus de 40% d’entre eux nous disent avoir fait leurs premières armes en tant que salariés. Cette expérience en tant que salarié est d’ailleurs citée par 67% des entrepreneurs comme un facteur "important", voire "très important" de leur succès actuel. Investisseurs 14% 36% Co-fondateurs Famille / Amis 13% 19% Très important 34% 40% Important Source : enquête en ligne - mars 2012 Expérience préalable à la création / reprise d’entreprise Salarié non dirigeant 41% 24% Salarié dirigeant 17% Entrepreneur Indépendant / Profession libérale 8% 6% Autre Etudiant 4% Source : enquête en ligne - mars 2012 11 Le point de vue d’Elizabeth Ducottet, Présidente-Directrice Générale de Thuasne Dans un contexte de crise, les entrepreneurs savent faire preuve d’agilité et de créativité et apportent toute leur vitalité à l’économie Aujourd’hui plus que jamais, la conquête se fait à la force du poignet. Le contexte de crise qui nous tenaille depuis de très longs mois s’est confortablement installé au cœur de notre système, au cœur de nos entreprises. En dépit de ce constat amer et de cet environnement toujours marqué par l’incertitude, j’ai néanmoins le sentiment, notamment au travers de mon implication au sein de nombreuses d’associations entrepreneuriales dynamiques que sont le MoovJee5 ou encore l’Institut du mentorat entrepreneurial, que la cote de popularité des entrepreneurs remonte. Les grandes structures apparaissent comme moins attractives et on rebat les cartes du jeu économique. Les PME et les ETI, offrant plus de souplesse, permettent de nouveaux challenges, comme celui d’être plus près des consommateurs et davantage dans "le vrai". Tout cela apporte une nouvelle liberté, une réponse aussi à la quête de sens, chère aux plus jeunes générations. La crise donne ainsi corps à de nombreuses initiatives, individuelles et collectives : on prend plus de risques, on crée plus. Les plus jeunes, notamment, se lancent avec conviction dans la création d’entreprise en faisant preuve d’une innovation et d’une créativité sans faille. Vitalité et espoir sont les deux mots qu’ils m’inspirent. De la même manière, on assiste à une désacralisation des emplois "de matière grise à forte valeur ajoutée" au profit de métiers plus techniques dont on ne peut plus faire l’économie aujourd’hui. A titre d’exemple, la "réémergence" des métiers d’ingénieurs, pour ne citer qu’eux, est un véritable atout. Les jeunes ont une vision intelligente du monde. Ils captent dans les comportements les innovations de demain. De la même manière, je crois beaucoup au brassage des cultures qui évite l’hypertrophie artistique. Tous ces signaux faibles nous indiquent une nouvelle voie. Si la crise nous a permis de prendre conscience d’une chose, c’est que nous ne sommes pas le centre du monde. Il faut s’adapter, changer de modèle, et il devient nécessaire pour les entreprises de s’inscrire en rupture avec les paradigmes existants. D’autres modèles sont possibles, comme celui de rendre le monde simple. 5 12 Mouvement pour les Jeunes et les étudiants entrepreneurs. 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Entreprise de croissance deviendra grande… Depuis la création du programme, les entrepreneurs participant au Prix de l’Entrepreneur de l'Année doivent respecter des critères de croissance et de performance rigoureux. Croissance moyenne du chiffre d’affaires des entreprises candidates (croissance cumulée sur 3 ans) L’entreprise, qu’ils doivent diriger depuis au moins 3 ans, et dont ils doivent détenir au moins 10% du capital, doit afficher une croissance supérieure à 15% sur 4 ans et une rentabilité d’au moins 3% sur l’exercice précédant leur candidature. Pourtant, en l’espace de 20 ans, des modifications profondes sont intervenues. Comment ces entrepreneurs d’exception ont-ils évolué à travers ces deux décennies ? 200 2007 56 50 50 M€ 40 M€ 46 38 34 33 30 M€ 28 28 23 25 29 30 50 2011 (104 candidats) Source : base de données Ernst & Young – Focus 2007/2011 56 41 100 (161 candidats) Evolution du chiffre d’affaires (1993-2011) 42 138% 0 Evolution de la taille des candidats CA moyen en M€ 150 148% 47 44 36 36 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 La croissance moyenne du chiffre d'affaires des entreprises, cumulée sur 3 ans, était de 148% pour les candidats de 2011, contre 138% pour ceux de 2007. Ces croissances exceptionnelles, et en forte progression, témoignent du dynamisme sans faille de ce tissu entrepreneurial. Evolution des effectifs moyens (1993-2011) 800 640 700 600 Source : base de données Ernst & Young – Candidats au Prix de l’Entrepreneur de 1993 à 2011, 1700 entreprises 400 300 Après une première phase (1993-1997) où le chiffre d'affaires moyen des candidats a significativement baissé, il a ensuite régulièrement progressé jusqu'en 2003. Son évolution a connu ensuite des variations plus marquées, atteignant 56 millions d'euros en 2006 et 2007, avant de baisser à nouveau, pour se stabiliser autour de 45 millions d'euros ces dernières années. 452 500 200 204 233 100 0 1993 2000 2007 2011 Source : base de données Ernst & Young – Candidats au Prix de l’Entrepreneur de 1993 à 2011 Les entreprises candidates au Prix de l’Entrepreneur sont bien plus grandes aujourd’hui qu’elles ne l’étaient il y a 20 ans. De quelque 200 employés, l’effectif moyen est passé à 640. Si l’on se penche en particulier sur les entreprises candidates de l’année 2011, leurs effectifs ont connu en moyenne une croissance de 70% sur les trois dernières années. Cela représente au total plus de 39 000 emplois créés sur trois ans, un chiffre exceptionnel compte tenu de la conjoncture. 13 Les secteurs des services et des technologies au premier rang Ce qu’en dit le Baromètre Ernst & Young de l’entrepreneuriat La répartition entre les secteurs des entreprises candidates au Prix de l’Entrepreneur connaît des écarts moins prononcés au fil des années, avec toutefois une croissance marquée des sociétés de services, qui passent de 23% des candidats en 1993 à 44% en 2011. Le secteur des technologies s’illustre aussi par une très forte augmentation : seules 3% des entreprises candidates en 1993 appartenaient à ce secteur, contre désormais près de 20%. Elles ont rattrapé les entreprises industrielles, qui représentaient pourtant plus de la moitié des candidats à l’époque de la création du Prix. Evolution des candidats par secteur d’activité (1993-2011) Technologies Distribution Services Industrie 60% 50% 51% 37% 40% 30% 20% 10% 0% 23% 37% 23% 15% 3% 11% 1993 2000 40% 25% 44% 15% 22% 20% 16% 2007 2011 25% Source : base de données Ernst & Young Cette convergence entre les secteurs dont sont issus les différents candidats peut s’expliquer en partie par l’interdépendance entre ceux-ci. Comme le souligne une récente étude intitulée "La Révolution des services"6, la frontière entre industrie et services est de plus en plus poreuse ; quant aux technologies, elles sont au cœur de l’innovation, dans le secondaire comme dans le tertiaire. 6 La Révolution des services. Nouveaux besoins, nouveaux services, nouveaux métiers ; Ernst & Young, 2012. 14 Les entrepreneurs grandissent, qu’en est-il de leur environnement ? Les candidats sélectionnés pour le Prix de l’Entrepreneur ont tous une propension exceptionnelle à la croissance et à l’innovation, et ils se sont distingués comme les meilleurs dans leur domaine. Mais pour d’autres, l’écosystème entrepreneurial dans lequel ils évoluent peut présenter certains obstacles et leur être moins favorable. Encourager l’esprit d’entreprendre et insuffler la "Culture entrepreneuriale" En France, l’esprit d’entreprendre n’est pas ancré dans le cœur de l’ADN du pays. Se distinguant par une dernière place au sein des pays du G20, 76% des entrepreneurs français déplorent ainsi que la culture de leur pays n’encourage pas l’entrepreneuriat. A l’inverse, près de trois quarts des sondés dans les autres économies matures du G20 jugent leur culture nationale favorable à l’entrepreneuriat. La perception très négative en France peut en partie s’expliquer par la manière dont l’échec est perçu dans notre pays. Pour une large proportion des entrepreneurs interrogés, l’échec est vu par le milieu des affaires et la société dans son ensemble comme un handicap pour de futurs projets d’entreprise : une attitude qui n’encourage en rien à la prise de risque. Depuis 2009, on note toutefois une évolution positive suscitée par la mise en place du statut d’auto-entrepreneur, qui a fortement dynamisé l’esprit d’entreprise. De l’avis de 78% des entrepreneurs, cette tendance pourrait encore s’accentuer si le rôle joué par les entrepreneurs dans la création d’emplois était davantage mis en lumière. 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Le point de vue de Franck van Hassel, Associé Ernst & Young Société d'Avocats L’évolution de la fiscalité pour les entrepreneurs depuis 20 ans en France Contrairement à une idée reçue, la France est loin d’avoir la fiscalité la plus lourde de l’Union européenne. En effet, depuis vingt ans, ni le taux de l’impôt sur les sociétés, ni le barème progressif de l’impôt sur le revenu n’ont augmenté. Le régime du quotient familial, en particulier, allège considérablement l’imposition effective des ménages. Mis à part quelques fluctuations au début des années 2000, le taux de l’IS est resté relativement stable, n’enregistrant qu’une baisse globale de 0,6% entre 1995 et 2012. On constate même une décroissance de la tranche marginale de l’impôt sur le revenu des Personnes Physiques. Ainsi, le coût du travail pénalise fortement les entrepreneurs en France et constitue un frein à la compétitivité de l’économie nationale et à l’emploi. Rapport entre le coût salarial pour l'employeur et le salaire net en 2010 Cotisations sociales et impôt sur le revenu 60% 49% 50% 40% 30% Cotisations sociales 56% 48% 47% 40% 32% 32% 31% 42% 25% 40% 29% 40% 39% 32% 26% 20% 11% 10% 17% 30% 15% 0% Evolution des tranches marginales de l'IS et de l'IRPP en France depuis 1995 70% Tranche marginale de l’IRPP Tranche marginale de l’IS 60% 50% Belgique France Allemagne Italie Suède Espagne Pays-Bas Danemark UK US Source : OCDE 2010 Dans le contexte actuel, ne serait-il pas nécessaire de revoir la répartition économique des ressources de l’Etat ? Les réformes fiscales actuelles ne semblent pas aller dans ce sens. 40% 30% 20% 10% 0% 1998 2002 2006 2010 Source : Eurostat Néanmoins, le coût du travail, constitué du salaire, des cotisations salariales et patronales, est en progression constante depuis une quinzaine d’années. Evolution des prélèvements sociaux en France depuis 1998 180 Indice du coût du travail (base 100 au 1er janvier 1998) 160 140 120 100 80 60 40 20 0 1998 2002 2006 2010 Dans une économie ouverte et mondialisée, le régime fiscal applicable aux transmissions d’entreprises est plus que jamais un enjeu majeur de la préservation des Entreprises de taille intermédiaire (ETI) et de la sauvegarde de leur caractère familial. Inutile de rappeler que ces entreprises, qui jouent un rôle moteur dans la création de croissance et d’emplois, sont des maillons essentiels du tissu économique français et de ses territoires. Pourtant, aujourd'hui, leurs atouts sont trop peu reconnus et leur avenir risque d'être mis en péril par une fiscalité inadéquate. Alors que le chômage ne cesse d’augmenter, la France, en alourdissant la fiscalité pesant sur les entreprises ainsi que sur les personnes physiques, prend-elle la bonne direction ? Dans le contexte économique actuel morose, ne pourraiton pas s'inspirer d'un système allemand qui a fait ses preuves en combinant à la fois une exonération des droits de mutation à titre gratuit et la préservation de l’emploi ? Source : Insee 15 20 ans de financement 16 20 ans de succès entrepreneurial en France L ’accès au financement demeure un enjeu crucial pour le développement d’une entreprise et central dans les préoccupations des entrepreneurs. Autofinancement, emprunt bancaire, capital-investissement, capital-risque, business angels, introduction en bourse… les instruments sont nombreux, et démontrent selon les périodes des degrés de pertinence et de disponibilité variables. "J’ai la conviction que tout projet qui a du potentiel trouve un financement". André CHOULIKA, Cellectis Le point de vue de Patrice Dordet, Membre du Directoire de La Compagnie Financière Edmond de Rothschild En 20 ans, les possibilités de financement se sont considérablement ouvertes Aujourd’hui, les entrepreneurs disposent d’une palette bien plus large qu’il y a vingt ans pour financer leurs projets, et ce, quel que soit le stade de développement de leur entreprise. Au-delà du traditionnel crédit bancaire qui s’est récemment tari, les possibilités de financement se sont considérablement ouvertes au cours des deux dernières décennies. L’environnement actuel, marqué par une faible visibilité et par la fragilisation de nombreux acteurs, ne doit pas faire oublier cette tendance de fond. Je ne m’attarderai pas sur les introductions en bourse, qui ont permis à beaucoup de financer leur croissance au cours des vingt dernières années, mais qui, dans un contexte d’incertitude prolongée, ne répondent pas aux besoins du plus grand nombre. A mon sens, l’évolution la plus marquante en matière de financement, c’est le formidable essor du capitalinvestissement. Cette industrie s’est structurée autour d’approches complémentaires portées par des acteurs spécialisés pour répondre à toutes les problématiques : le capital-risque, le capitaldéveloppement, les fonds mezzanine (mi-dette, mi-equity), les fonds de LBO, les fonds de retournement, etc. Bien au-delà du simple financement, il peut s’agir pour les chefs d’entreprise, souvent seuls dans leurs décisions, de bénéficier d’un véritable accompagnement stratégique. Professionnalisation de la gouvernance, soutien stratégique pour aborder de nouveaux marchés ou réaliser une opération de croissance externe, capacité à recruter des talents… la valeur ajoutée d’un fonds d’investissement touche potentiellement tous les domaines. A ce titre, il est intéressant de constater que plus de 60% des entrepreneurs7 qui souhaitent effectuer une opération de croissance externe envisagent d’ouvrir leur capital à un fonds. Ce besoin d’accompagnement est tout aussi prégnant pour ceux qui veulent se lancer à l’international, autre tendance lourde dans le monde des PME. Parallèlement, les entrepreneurs ont indéniablement bénéficié de la montée en puissance d’acteurs publics comme Oséo, devenu un partenaire bancaire incontournable, ou encore le Fonds Stratégique d’Investissement, dont l’action est complétée par de multiples initiatives régionales. Enfin, et c’est un mouvement qui va s’amplifier, le marché obligataire s’est récemment ouvert aux PME, qui peuvent plus facilement faire appel au marché plutôt que de solliciter les banques. Ce sont des avancées significatives en matière de financement avec lesquelles il faudra compter dans les prochaines années. Quels qu’en soient les objectifs, les décisions liées au financement sont toujours stratégiques. Il nous paraît donc essentiel pour un entrepreneur d’être accompagné dans ses choix par des spécialistes, qui sauront resituer les enjeux dans une perspective globale et de long terme. C’est dans cet esprit que nos équipes travaillent à leurs côtés, en tenant compte à la fois de leurs projets professionnels et de leurs problématiques patrimoniales. 7 Etude Oséo Excellence 2012. 17 L'autofinancement : un instrument privilégié Dans les premières étapes de la création ou de la reprise, les entrepreneurs financent encore largement leur société par leurs économies personnelles : 73% des entrepreneurs interrogés y ont eu recours. Le financement via des business angels et autres investisseurs externes, bien qu’en progression, ne concerne que 19% des entrepreneurs interrogés. Comment avez-vous financé les premières étapes de la création / reprise de la société ? (Plusieurs réponses possibles) 80 En effet, bien que le capital-investissement en 2011 se rapproche de son niveau d’avant-crise8, et que les réseaux de business angels progressent, on est encore loin de ce qui a cours, par exemple, aux Etats-Unis. "Super angels" investissant en phases d’amorçage des start-up, fonds d’investissements de très grande taille permettant des injections massives de capital, pouvoirs publics jouant un rôle d’accélérateur, notamment avec le récent JOBS Act9 : les sources de financement externes sont bien plus développées outreAtlantique. En France, le capital-risque en particulier subit aujourd’hui une désaffection des investisseurs institutionnels, n’ayant plus les moyens de jouer pleinement son rôle au service de la croissance et de l’innovation. 73% 60 40 38% 30% 19% 20 11% 0 Economies personnelles Famille et amis Emprunts bancaires Business Incubateurs angels ou et/ou investisseurs subventions 8 Etude annuelle sur l’activité des acteurs français du capital investissement, AFIC, 2011. 9 Jumpstart Our Business Startups : entrée en vigueur en avril 2012, cette loi permet un allègement des conditions d’entrée en bourse pour faciliter les levées de fonds par les sociétés de capitalisation inférieure à 1 Md$. Source : enquête en ligne - mars 2012 18 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Les nouvelles réglementations Solvabilité II ou Bâle III bridant les investissements par les banques et les compagnies d’assurance, pèsent fortement sur le secteur du capital-risque et menacent potentiellement le financement des entreprises. Même dans les phases de développement de leur entreprise, les entrepreneurs que nous avons interrogés tendent à privilégier l’autofinancement pour financer leur croissance, traduction de leur désir d’indépendance. Mais ils ont aussi la particularité d’être plus "ouverts", en termes de structure du capital que la moyenne nationale des entreprises. Les chiffres de l’enquête annuelle sur les ETI réalisée par Oséo et la DGCIS confirment la prépondérance de l’autofinancement10. En France, en 2011, l’ensemble des investissements de croissance interne et externe ont été financés en moyenne à hauteur de 53% par autofinancement et 43% par recours à l’endettement et au crédit bancaire. Mais ce rapport indique également que, du fait du net ralentissement conjoncturel en Europe et de la crainte du durcissement des trésoreries dans les mois à venir, les ETI souhaitent à l’avenir recourir davantage à l’endettement et aux concours bancaires qu’à l’autofinancement. Comment avez-vous ensuite financé la croissance de votre société ? (Plusieurs réponses possibles) 80 68% 60 10 La conjoncture des Entreprises de Taille Intermédiaire, Enquête annuelle 2012, Oséo et DGCIS. 42% 40 34% 20 7% 4% 0 Autofinancement Emprunts bancaires Augmentation Introduction de capital en bourse Source : enquête en ligne - mars 2012 Vente d’actifs Lancement de la Banque Publique d'Investissement A l'heure où nous finalisons cette étude, la création de la Banque Publique d'Investissement (BPI) a été actée, mercredi 17 octobre, par le gouvernement, en Conseil des ministres. La BPI aura pour mission de garantir le financement des PME et des ETI, fragilisées en cette période de crise, en proposant un "guichet unique" dans chaque région. Regroupant les activités d'Oséo, de CDC Entreprises (filiale de la Caisse des dépôts) et du Fonds stratégique d'investissement (FSI). Elle offrira également des services d’accompagnement et de soutien renforcé à l’innovation et à l’export. La BPI devrait ouvrir ses portes en janvier 2013, après le vote du projet de loi par le Parlement, d'ici à la fin de l'année 2012. Souhaitons que ce nouvel outil de financement portera rapidement ses fruits, au service de l'innovation et de la croissance des PME et ETI. Source : www.gouvernement.fr 19 Question capital(e) Dans les premières étapes de la création d’entreprise, le capital demeure très largement aux mains des fondateurs : près de 4 entrepreneurs interrogés sur 5 détiennent plus de 75% du capital de leur entreprise. La proportion des entreprises dont les fondateurs possèdent plus des trois quarts du capital passe de 79% à 34%, entre le moment où les entrepreneurs interrogés ont créé / repris leur entreprise et aujourd’hui. Néanmoins, ces entrepreneurs sont prêts à ouvrir leur capital pour faire grandir leur société : à mesure que cette dernière croît, la part du capital des fondateurs diminue sensiblement, au profit de celle des investisseurs. Evolution du capital détenu par les fondateurs Ce qu’en dit le Baromètre Ernst & Young de l’entrepreneuriat 100 34% 80 60 79% 40 66% 20 21% 0 Au moment de la création/ reprise de l’entreprise Actuellement Entreprises détenues à plus de 75% par les fondateurs Entreprises détenues à moins de 75% par les fondateurs Source : enquête en ligne - mars 2012 Evolution du capital détenu par les investisseurs 100 4% 28% 80 60 96% 40 72% 20 0 Au moment de la création/ reprise de l’entreprise Actuellement De 51% à 75% du capital détenu par les investisseurs Moins de 51% du capital détenu par les investisseurs Il est indispensable d’exploiter plusieurs sources de financement En France, 84% des entrepreneurs jugent que l’accès au financement est difficile pour les jeunes créateurs d’entreprise. Le ratio du volume des prêts aux PME par rapport au PIB y est inférieur à la moyenne des pays du G20. Une tendance soulignée par un rapport de l’OCDE publié en 2009, qui indiquait un durcissement des conditions d’accès au crédit pour les PME françaises. L’action d’Oséo permet en partie d’enrayer cette tendance : en 2010, elle a soutenu plus de 80 000 entrepreneurs en garantissant des prêts à hauteur de 10Md€. Du côté des investisseurs externes, même si les temps sont chahutés actuellement, les entrepreneurs français peuvent trouver des opportunités, en phase de démarrage comme de développement, dans les instruments de capital investissement. Selon l’AFIC (Association Française des Investisseurs en Capital), près de 1 700 entreprises ont été accompagnées par le capital investissement en 2011, un record. Plus de 8 sur 10 sont des PME, et 90% sont basées en France. La progression du nombre de réseaux de business angels ces dernières années témoigne d’une maturité croissante de cet outil de financement. Source : enquête en ligne - mars 2012 20 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Le point de vue de Philippe Fourquet, Associé Ernst & Young Face au défi du financement, il faut savoir faire preuve d’ouverture et d’innovation Même si l’autofinancement est resté, au cours de ces dernières années, la source majeure de financement, le recours à des financements externes devient vite indispensable pour accélérer le développement de l’entreprise, et c’est bien ce challenge que nos PME et ETI doivent relever. Cependant, dans le contexte économique actuel, les sources de financement externes se sont taries. La fenêtre de la bourse s’est refermée et les banques, face aux contraintes réglementaires, ont durci leurs conditions d’octroi de financements, par une plus stricte sélection des dossiers et par des niveaux de coût, dans bien des cas, plus élevés. Dans un tel contexte, il est indispensable d’être innovant et ouvert aux expériences étrangères afin de trouver de nouvelles sources de financement, pour aujourd’hui et pour demain. Plusieurs pistes sont explorées et des initiatives sont lancées pour permettre à nos entrepreneurs d’accéder à des financements qu’ils ne pourraient pas obtenir dans le contexte actuel. Les projets de création d’une plateforme de cotation dédiée aux valeurs moyennes (dont notamment celui de NYSE Euronext), s’ils voient le jour, pourraient constituer des pistes intéressantes pour redynamiser le recours à la bourse comme source de financement pour bon nombre d’entrepreneurs qui s’en sont détournés (en 2011, on compte 12 PME / ETI cotées de moins qu’en 2010). A ce titre, il faut savoir que les marchés financent les entreprises européennes à hauteur de 30% en moyenne, et couvrent Outre-Atlantique 70% des besoins de financement toutes tailles d’entreprises confondues. En France, seules 0,3% des entreprises sont cotées et moins de 5% des besoins de financement de nos entreprises sont couverts par les marchés11… La mise en place d’émissions groupées via des fonds contractuels (dont notamment le projet MICADO) permettrait aussi aux entrepreneurs d’aller chercher sur le marché les financements que seuls ils n’obtiendraient pas. De plus, les conditions consenties pour de telles émissions pourraient être plus avantageuses et bénéficier de l’incidence positive liée à une plus grande diversification du risque pour le ou les organismes financeurs. Attention aux réflexes de prudence : dans cette période de crise économique, tout pousse les entrepreneurs, et on les comprend fort bien, à être de plus en plus focalisés sur le court terme (mon carnet de commande, mes prochaines échéances…). C’est pourtant dans ces périodes qu’il faut garder à l’esprit qu’il n’y a pas de présent sans futur. En effet, la capacité à obtenir des financements ne repose pas uniquement sur les chiffres passés ou présents : elle dépend aussi – et souvent en grande partie – de la qualité des hommes et du projet stratégique qu’ils portent. Il est donc essentiel de savoir expliquer, convaincre et rassembler autour de ce projet, les financements étant l’un des moyens de le mettre en œuvre. Chaque entreprise doit avoir une vraie vision à moyen / long terme de son plan de financement, vision directement connectée à son plan de développement stratégique. Cette vision doit également intégrer une structuration des financements adaptée à chaque étape du projet de développement de l’entreprise. Grâce à leurs qualités, nos entrepreneurs ont souvent pu négocier les virages stratégiques et franchir de nombreux obstacles. Gageons que dans l’environnement actuel, ils sauront trouver les solutions pour franchir celui des sources de financement. 11 L'observatoire du financement des entreprises par le marché – Rapport annuel 2011. 21 ETI familiales : attention fragiles ! Pour près de deux candidats sur trois, la création ou reprise d’entreprise est fondamentalement associée à leur volonté de développer une société familiale, dans la durée. Leur capacité à construire une vision sur le long terme et à maintenir le cap de manière opérationnelle grâce à la stabilité de leur actionnariat constitue leur premier facteur de réussite. La vision de long terme de leurs dirigeants et leur actionnariat stable favorisent leur développement, qui est en soi une garantie du maintien des centres de décision en France. Les grandes entreprises nationales peuvent avoir intérêt au développement, à leurs côtés, d'entreprises de taille moyenne pour développer le marché local et bénéficier des innovations nées en leur sein. Quelle était votre intention principale en créant votre société ? 2% Ce qu’en dit le Baromètre Ernst & Young de l’entrepreneuriat 12% Développer durablement une société à dessein familial/patrimonial 23% Vendre sa société en totalité après son développement 63% Se créer une réputation en tant qu’entrepreneur Vendre sa société après son décollage, en gardant une participation minoritaire Des améliorations encore attendues en matière de règlementation et fiscalité Source : enquête en ligne - mars 2012 Les 4 700 entreprises de taille intermédiaire (250 à 5 000 salariés) constituent le maillon essentiel du tissu économique français, entre une base très large de TPE et PME (2,4 millions) et 235 grandes entreprises de dimension mondiale. Elles sont très performantes : malgré leur effectif réduit, elles ont un poids économique entre 20 et 30% de tous les grands indicateurs. Ces ETI sont largement représentées au sein du panel des candidats au Prix de l’Entrepreneur de l’Année. Mais l’économie française souffre de l’insuffisance du nombre d’ETI dans son pays, en particulier face à nos voisins européens (3 fois moins qu'en Allemagne et 2 fois moins qu'en GrandeBretagne). Cette faiblesse pèse à l'international, sur la création de richesses, source d'emplois et de contribution aux grands équilibres financiers. La mondialisation exige des entreprises qu’elles grandissent vite pour atteindre une taille critique adaptée aux enjeux de l'innovation et au développement international. Enfin, parmi les futures ETI, figurent les grandes entreprises de demain. Comment agir pour que plus de petites entreprises deviennent moyennes ? Le capitalisme familial est-il une des réponses ? Comment éviter que les entreprises de taille moyenne soient cédées ? La performance des entreprises familiales est meilleure : c'est donc un facteur d'attractivité des investisseurs. 22 Ces dernières années, les pouvoirs publics ont démontré une volonté d’alléger le cadre réglementaire et de simplifier les procédures requises pour lancer une entreprise, avec notamment la création du guichet unique. Mais les cotisations sociales rapportées au PIB restent en France les plus élevées de la zone euro. La marge de progression est importante pour répondre aux attentes des entrepreneurs français : 70% d’entre eux pensent qu’une plus grande flexibilité de l’emploi aurait une incidence élevée sur leur croissance à long terme. 82% des entrepreneurs estiment que ce sont les mesures en faveur de l’innovation qui bénéficieront le plus à leur croissance à long terme. A cet égard, la France offre un environnement plutôt favorable à l’innovation. Le Crédit d’Impôt Recherche est jugé comme l’un des meilleurs systèmes d’allègement fiscal au sein du G20. Entre 2008 et 2010, le nombre de déclarants du CIR a augmenté de 80% pour s’élever à près de 18 000, générant un crédit d’impôt de 5,05 milliards d’euros12. 12 Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Le point de vue de Philippe Vailhen, Associé Ernst & Young Société d'Avocats Sauvegarder les ETI familiales pour retrouver le chemin de la croissance En France, les 4 700 entreprises de taille intermédiaire (ETI), dont deux tiers sont familiales, représentent 33% de l’emploi industriel, 21% de l’emploi salarié, 30% des investissements et 25% du chiffre d’affaires total français13. Elles sont pourtant confrontées à de nombreux obstacles. Certains sont communs à toutes les entreprises françaises : réglementation complexe et instable, aversion au risque et méfiance à l’endroit du succès, marché du travail encore trop rigide. D’autres leur sont spécifiques : les ETI supportent une charge fiscale et sociale proportionnellement plus lourde, comme le montre un récent rapport du conseil des prélèvements obligatoires. Ainsi, après prise en compte du Crédit Impôt Recherche, l’impôt sur les sociétés réel des grandes entreprises s’établit à 18 %, tandis que celui des ETI familiales s’élève à 30%. Il devient aujourd’hui urgent de prendre des mesures adéquates pour permettre à nos ETI familiales de continuer à grandir, à investir et à se développer en France et à l’international. Ne devrait-on pas accepter que les titres de sociétés industrielles, commerciales, artisanales, agricoles ou libérales soient exonérés d’ISF et ce, quels que soient le pourcentage de détention et les fonctions ou non exercées dans l’entreprise ? Parce qu’ils sont l’expression de nos racines, les objets d‘antiquité, d’art ou de collection sont exonérés de cet impôt sans aucune condition. Pourquoi nos ailes, que sont ces entreprises, devraient être rognées par ce dernier ? L’entreprise est un patrimoine vivant que nous devons faire grandir. Aujourd’hui certaines entreprises, faisant face au paiement de l’ISF de leurs actionnaires, doivent générer des profits afin de verser un revenu pour le seul paiement de cet impôt, se privant ainsi de capitaux qui permettraient d’investir ou de renforcer leurs fonds propres. Et ne devrait-on pas considérer l’entreprise comme un sujet de droit avec une vie propre ? En effet, l’entreprise est très différente de tous les autres actifs transmis dans le cadre d’une succession. Elle doit donc être traitée totalement à part pour prendre en considération sa vraie nature, sa fonction, son rôle social. Cependant, la transmission d’une société au sein d’une famille supporte aujourd’hui des droits pouvant aller jusqu’à 45% de sa valeur, alors que la cession d’une société au sein d’un groupe ne supporte qu’une faible taxation. En procédant ainsi, on taxe des plus-values qui ne sont que latentes alors que l’objectif est uniquement de transmettre une entreprise, afin de poursuivre une activité. Ne serait-il pas possible de s’inspirer du modèle allemand et ne pas imposer la transmission de l’entreprise dès lors que l’actionnariat familial et la masse salariale restent les mêmes sur plusieurs années ? Nous devons changer notre regard et cesser de voir de telles mesures comme la protection accordée à peu au détriment de tous ; il faudrait plutôt les voir comme les nécessaires mesures accordées à quelques-uns – encore trop peu nombreux, faute de contagion suffisante du virus entrepreneurial – pour le bénéfice durable de tous. 13 Rapport Retailleau. Les ETI au cœur d'une nouvelle dynamique de croissance – Février 2010. 23 20 ans d'international 24 20 ans de succès entrepreneurial en France D e plus en plus, les entrepreneurs intègrent dès le démarrage les opportunités et les contraintes d’une activité internationale. Leur mode de pensée est naturellement "globalisé" et ils vont chercher leur compétitivité hors des frontières, sur le terrain européen ou vers les marchés à forte croissance. Mais qu’en est-il de la part réelle de l’activité internationale chez les entrepreneurs que nous avons observés ? "Born Global" : l'international au cœur de la stratégie… Si le développement à l’international est désormais au cœur de la stratégie de presque tous les entrepreneurs, les modalités de croissance ne sont pas toutes les mêmes, et alternent entre des stratégies délibérées et des opportunités saisies. Les entrepreneurs ont une vision précise de cet axe de développement très tôt dans leur projet : 41% des dirigeants interrogés avaient inscrit l’internationalisation dès l'origine de leur entreprise. Qu’est-ce qui a d’abord motivé votre développement à l’international ? Les motivations invoquées pour se tourner vers l’international peuvent être multiples : • Des raisons commerciales, avec la possibilité d’accéder à de nouveaux marchés ; 11% Des raisons commerciales et marketing 48% Elément inscrit dans la stratégie de départ Des raisons économiques et financières 41% • Une volonté des dirigeants, la dimension internationale étant souvent inscrite dans les "gènes" du management ; • Des raisons économiques et financières, lorsqu’une baisse structurelle des marchés de l’entreprise en France menace sa pérennité ; • Une recherche de compétitivité hors de France. Source : enquête en ligne - mars 2012 Les répondants sont les dirigeants concernés par l'international soit 48 entreprises. Evolution des effectifs* (comparatif 2007 et 2011) 800 640 700 600 500 400 452 446 339 300 194 200 113 100 0 2007 Effectifs totaux 2011 Effectifs France Effectifs à l’international Entre 2007 et 2011, la taille des entreprises – en nombre moyen d’employés – participant au Prix de l’Entrepreneur a progressé de manière très significative (+ 42%). Cette croissance est particulièrement marquée pour les effectifs implantés à l’international, en progression de 72%, quand les effectifs sur le territoire national augmentaient de 32%, illustrant la volonté des dirigeants de placer l'international au cœur de leur stragégie. * Effectif moyen par secteur et par année | 161 candidats en 2007, 104 candidats en 2011. Source : base de données Ernst & Young – Focus 2007/2011 25 Diriez-vous que votre stratégie principale aujourd’hui est plutôt tournée vers : (Plusieurs réponses possibles) Le développement à l’international 51% La pénétration de votre marché historique 50% 39% L’exploitation de niches L’exploitation de nouveaux marchés à venir 35% La croissance externe Le développement vers d’autres marchés déjà existants, diversification Du côté des ETI, Oséo confirme dans son enquête annuelle14 que le développement à l’international est toujours au cœur des préoccupations : en 2012, 14% d’entre elles prévoient de créer au moins une nouvelle filiale ou co-entreprise à l’étranger, l’Asie talonnant maintenant l’Europe comme choix de destination. Mais dans un cas sur quatre, il s’agira là de la première implantation réalisée en dehors de l’Hexagone. Ce qui tend à indiquer que le développement à l’international n’est pas encore une évidence pour tous les entrepreneurs. 32% 26% 14 La conjoncture des Entreprises de Taille Intermédiaire, Enquête 2012, Oséo et DGCIS. Source : enquête en ligne - mars 2012 … mais un enjeu pas toujours traduit dans les faits Malgré l’intention de se tourner vers l’international, et la nécessité économique d’un développement des marchés hors des frontières nationales, le passage semble encore difficile pour une partie des entrepreneurs ayant répondu à l’enquête. En dépit d’une forte croissance du chiffre d’affaires global des entreprises sur la période analysée (1993-2011), et malgré une volonté très largement affirmée, le niveau de l’activité réalisée à l’international est resté relativement stable depuis 20 ans. Le marché français représente encore plus de trois quarts des revenus pour plus de 60% des entrepreneurs interrogés. L’Europe reste la destination principale de leurs exportations, devant les Amériques puis l’Asie. Les entrepreneurs concernés par l'international et que nous avons interrogés jugent qu'il y a, en France, un retard dans ce domaine : bien qu’ayant des capacités immenses, notre pays serait trop en proie à des inerties lourdes et des dogmes paralysants. 26 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France "C'est un des problèmes majeurs en France, le pays est en retard sur le plan international. Une entreprise doit aujourd'hui sortir de ses frontières, et en France on reste très frileux". Bruno ROUSSET, April Group Evolution de la répartition du chiffre d'affaires France / hors France (1993-2011) 100 80 33% 27% 30% 41% 60 40 67% 73% 70% 59% 20 0 1993 2000 2007 2011 Chiffre d’affaires France Chiffre d’affaires Hors France Source : base de données Ernst & Young – Candidats au Prix de l’Entrepreneur de 1993 à 2011, 1700 entreprises La mondialisation, facteur de croissance Là où les opinions publiques – particulièrement en France – sont parfois réfractaires à la mondialisation et la rendent responsable de nombreux bouleversements, la plupart des entrepreneurs y voient une opportunité. L'ouverture à l’international peut constituer pour les entrepreneurs un levier de croissance essentiel, même si l’aventure hors des frontières n’est jamais dénuée d’obstacles. Les marchés étrangers peuvent relayer efficacement le développement de l’activité quand le marché domestique est malmené ou saturé. "Ce qui est le plus marquant ces dernières années, c’est que les décisions, comme les clients, sont de plus en plus globaux. Tout s'internationalise". Gilles MARTINS, Eurofins 27 Dans une enquête menée par Ernst & Young auprès de 300 dirigeants d’entreprises de croissance dans le monde, près des trois quarts des entrepreneurs nous disent que la mondialisation a eu des conséquences positives sur leur croissance, et plus de la moitié juge qu’il en a été de même pour leur rentabilité. Sur quels aspects de votre entreprise la mondialisation a-t-elle eu un impact positif ces trois dernières années ? (Plusieurs réponses possibles) Croissance globale 51% 35% Accès aux matières premières Accès aux ressources humaines Accès au financement 78% La mondialisation a été globalement positive pour notre entreprise La concurrence sur notre marché local vient de plus en plus d’entreprises étrangères 30% Une réglementation globale, plutôt que locale, faciliterait nos affaires 29% Opportunités d’investissement La concurrence s’est accrue avec la mondialisation 75% La mondialisation a ouvert la porte à de nouveaux concurrents imprévus 32% Capacité d’innovation Dans l’ensemble, les trois quarts des entrepreneurs estiment toutefois que la mondialisation est positive pour leur activité. Etes-vous d’accord avec les affirmations suivantes ? (% de réponses "Tout à fait d’accord" et "D’accord") 72% Rentabilité Les cartes ont été rebattues : si la capacité à agir globalement n’est plus réservée aux grandes entreprises, la concurrence s’est accrue avec la mondialisation, comme le confirme la grande majorité des entrepreneurs interrogés. 67% 51% 46% 16% Source : Ambitious, Adept and Agile. How global entrepreneurs are changing the world, Ernst & Young, 2010 Source : Ambitious, Adept and Agile. How global entrepreneurs are changing the world, Ernst & Young, 2010 28 20 ans de succès entrepreneurial en France 20 ans de succès entrepreneurial en France Le point de vue de Jean-François Royer, Associé Ernst & Young Penser global, agir local La mondialisation ? Rien de nouveau ! Elle existait dès l’Antiquité, une époque marquée par les premiers échanges de marchandises et l’ouverture des routes commerciales. Depuis, les entreprises n’ont eu de cesse, chacune à leur rythme ou selon leurs moyens, de s’engouffrer dans cette voie qui nous a prouvé ses vertus. Les entrepreneurs "hightech", "biotech" ou "cleantech" ont été des précurseurs. Pour eux, les frontières n’existent pas. Cette génération d’entrepreneurs que l’on appelle les "born global" a donné le tempo et a défini les nouveaux réflexes. Dans leur lignée, de plus en plus d’entrepreneurs français démontrent aujourd’hui leur capacité à transformer avec succès leur modèle, qui devient global sans renier les valeurs et les atouts d’un ancrage local. Rompant avec les habitudes et les certitudes, ces entrepreneurs bousculent les préjugés. Par exemple, il n’est pas obligatoire d’avoir obtenu la reconnaissance du marché local avant de partir vers l’étranger. Une étude menée auprès des clients communs d’Oséo et d’Ubifrance montre que 38% d’entre eux ont commencé leurs opérations internationales moins de trois ans après leur création. L’irruption dans l’économie mondiale de pays tels que la Chine, le Brésil, l’Inde, mais aussi le Mexique, l’Indonésie… et le développement massif d’Internet ont créé rapidement un nouvel environnement. Les opportunités d’affaires ne sont plus seulement outre-Rhin ou outre-Manche ; elles peuvent être d’emblée outre-Atlantique, voire plus loin encore. Pour mieux comprendre les caractéristiques de ces nouveaux entrepreneurs et leurs modes d’organisation, nous avons mené une étude mondiale auprès de 300 d’entre eux, publiée sous le titre Ambitious, adept and agile. How global entrepreneurs are changing the world. Il ressort de cette enquête que ces entrepreneurs partagent un fort pragmatisme, qui s’illustre notamment dans la recherche d’équilibre entre local et global. La stratégie d’implantation en est un parfait exemple : le parcours classique – accord commercial, joint-venture, filiale – n’est pas forcément remis en cause, mais il est fortement anticipé. Car pour ces entrepreneurs, il ne s’agit pas seulement d’exporter, mais bien de prendre pied sur des marchés stratégiques. Notre étude relève également que ces entrepreneurs ont le souci d’internationaliser leur management. Leur souhait à moyen terme est de recomposer leurs instances de gouvernance pour prendre en compte la diversité des cultures, des marchés et la localisation de leurs activités. Cette démarche vers un management interculturel s’accompagne toutefois d’une certaine prudence, car ils ont également une volonté claire de conserver un savoir-faire. Si certaines tâches sont réalisées localement, d’autres, de nature stratégique, doivent rester centralisées. La majorité des dirigeants mettent en avant cet enjeu essentiel qui permet de rester agile et de réussir dans la durée : la combinaison d’un état d’esprit global et d’une déclinaison locale. 29 D’hier à aujourd’hui… Atouts et défis, d’hier à aujourd’hui Pour les participants au Prix de l’Entrepreneur de l'année, le facteur clé de succès le plus important, tant pour expliquer le succès rencontré jusqu’à aujourd’hui que pour permettre la réussite future, reste l’innovation (citée par 44% d’entre eux). Une caractéristique qui explique très probablement que ces entreprises soient souvent leaders sur leur marché. Par ailleurs, l’international et la croissance externe sont les deux facteurs de succès qui progressent le plus à mesure que l’entreprise se développe (respectivement +19 points et +10 points). Quant aux problématiques auxquelles les entrepreneurs font face, la concurrence (36%) et l’environnement réglementaire (30%) représentent des freins croissants à mesure que l’entreprise se développe. Le financement inquiète davantage les entrepreneurs au démarrage que les entreprises plus matures. Savoir s’entourer représente un défi constant : les questions de ressources humaines et de gestion des compétences sont citées par plus de 40% des entrepreneurs comme des obstacles difficiles. 30 20 ans de succès entrepreneurial en France … et demain, quelles actions mettre en œuvre ? Promouvoir la prise de risque et la culture entrepreneuriale dans notre pays En France, l’esprit entrepreneurial est freiné par la manière dont est perçu l’échec professionnel. Alors que dans de nombreux pays, il exprime positivement la prise de risque et l’ambition de grandir, il reste en France un handicap quasiment indélébile dans un parcours professionnel. Le système éducatif se doit de favoriser la créativité et l’initiative. Dès l’enseignement secondaire, l’entrepreneuriat doit être intégré dans l’apprentissage et valorisé comme potentiel parcours professionnel. Favoriser l’innovation comme levier de créations d’entreprises et d’emplois L’innovation est indissociable de l’entrepreneuriat. Les entrepreneurs donnent vie aux innovations, pour en faire de nouveaux produits ou services, créant ainsi de nouveaux emplois. Cet aspect attractif de l’activité entrepreneuriale doit être davantage mis en avant auprès des jeunes et du grand public en général. La France souffre d’une faiblesse dans sa capacité à mettre sur le marché des innovations produits et services nées de la recherche nationale. Mettre en place une fiscalité plus favorable au financement et à la transmission des entreprises familiales Les ETI familiales doivent bénéficier d’une attention particulière des pouvoirs publics, avec un double objectif primordial : baisse de la fiscalité et aide au financement. Le régime fiscal applicable aux transmissions d’entreprises est également un enjeu majeur de la préservation de ces ETI. Dans un contexte économique morose, il paraît urgent de s’inspirer du système allemand qui combine tout à la fois une exonération de droits de mutation à titre gratuit et la préservation de l’emploi. 31 Méthodologie A l’occasion des 20 ans du Prix de l’Entrepreneur, Ernst & Young a souhaité analyser de manière approfondie l’évolution des entreprises candidates et de leurs dirigeants depuis la création du prix en 1993, en collaboration avec la Chaire Entrepreneuriat ESCP Europe. Afin de mettre en lumière les facteurs clés de leurs succès entrepreneuriaux, et pour mieux comprendre les problématiques spécifiques qui sont les leurs, nous avons exploité les données régionales et nationales des candidats au Prix de l’Entrepreneur de l’Année depuis 1993. Pour mettre en regard les tendances passées et actuelles, ces analyses ont été complétées d’une enquête en ligne et d’entretiens qualitatifs réalisés en mars 2012. Les résultats de l’étude s’appuient donc sur les sources et la méthodologie suivantes : 1. Analyse de la base de données "Prix de l’Entrepreneur", consolidée par Ernst & Young depuis la création du Prix. Les données de plus de 1 700 candidats entre 1993 et 2011 ont permis de mesurer les évolutions marquantes des entreprises participant au Prix. 2. Réalisation d’une enquête en ligne en mars 2012, à partir d’une liste de 30 questions. 91 dirigeants d’entreprises, parmi les anciens candidats au Prix, ont répondu à cette enquête. 3. Dix entretiens qualitatifs menés auprès d’anciens lauréats, permettant d’éclairer les principales tendances. 4. Pour les besoins de l’analyse, des sources complémentaires reconnues ont également été utilisées, notamment les publications d’Oséo. L’étude s’est naturellement enrichie de notre observation assidue du monde des entrepreneurs, en France et ailleurs, grâce notamment aux travaux réalisés dans le cadre du Baromètre Ernst & Young sur l’entrepreneuriat dans les pays du G20, publié en octobre 2011. 32 20 ans de succès entrepreneurial en France Bibliographie • Inné ou acquis. L’ADN de l’entrepreneur décodé, Ernst & Young, 2011. • Les entrepreneurs lancent un appel aux gouvernements du G20, Baromètre de l’entrepreneuriat Nice Côte d’Azur 2011 réalisé par Ernst & Young pour le Sommet des Jeunes entrepreneurs du G20 YES. • Ambitious, Adept and Agile. How global entrepreneurs are changing the world, Ernst & Young, 2010. • Agir pour la croissance. Performance des ETI familiales en Europe, Ernst & Young, 2010. • La conjoncture des Entreprises de Taille Intermédiaire, Enquête annuelle 2012, Oséo et DGCIS (Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services). • Rapport Retailleau. Les entreprises de taille intermédiaire au cœur d'une nouvelle dynamique de croissance, février 2010. • L'observatoire du financement des entreprises par le marché. Rapport annuel 2011. Remerciements Nous remercions les entrepreneurs et les experts qui ont bien voulu partager leurs réflexions et nous permettre d’enrichir cette étude par leurs témoignages : André Choulika, Patrice Dordet, Elizabeth Ducottet, Philippe Fourquet, Aliza Jabès, Jean Mane, Gilles Martins, Franck Provost, Bruno Rousset, Jean-François Royer, Philippe Vailhen et Franck van Hassel. Cette étude Ernst & Young a été coordonnée par Audrey Vinès, sous la direction d'Emmanuelle Raveau et Jean-François Royer. Ont participé à sa réalisation : Marguerite Coiraton, Juliette Gayraud, Rudolphe Pennec, en collaboration avec Jacqueline Fendt, Kiran Dahan, Ankur Bansal et Yuanqi Lu de la Chaire Entrepreneuriat ESCP Europe. 33 19 95 19 94 19 93 Henri BACOU Jacques NOIROT Sidel (Seine-Maritime) Groupe Bacou (Drôme) Prosys (Haute-Savoie) Création en 1974 Création en 1985, avec Luigi Delfini (décédé) et Michel Nally Création en 1990 Rachat par Tetra Pak en 2003 Retraité Fusion en 2001 avec le groupe Dalloz (aujourd’hui Sperian) Retraité 19 99 20 00 Décédé 19 98 Les lauréats Francis OLIVIER Hervé et Eric CAEN Martin MICHAELI Jean-Michel BERARD Titus Interactive (Seine et Marne) Mephisto (Moselle) Création en 1965 Esker (Rhône) Actuellement président Actuellement président du directoire Créée en 1985, liquidée en 2005 Eric : Directeur digital et nouvelles technologies (Mc Donald’s) Création en 1965 Groupe Dirickx (Mayenne) Création en 1988 1853 : création Création en 1961 1997 : introduction en bourse 1998 : introduction en bourse Actuellement président du Conseil de surveillance d’April Group et président d’Evolem Actuellement président-directeur général Actuellement président-directeur général 20 10 Jacques DIRICKX Bonduelle (Nord) 20 09 Christophe BONDUELLE April Group (Rhône) 20 08 Bruno ROUSSET Franck PROVOST Yves GUILLEMOT Aliza JABÈS Franck Provost (Paris) Ubisoft (Ille-et-Vilaine) Nuxe (Paris) 1975 : ouverture du 1er salon Création par Y. Guillemot et ses frères en 1986 Rachat du laboratoire Nuxe en 1989 1995 : lancement de la franchise Actuellement président 34 20 05 20 04 20 03 Hervé : PDG (Interplay – Los Angeles) Introduction en bourse en 1996 Actuellement président-directeur général 20 ans de succès entrepreneurial en France 4e marque dermocosmétique en France, présente dans 58 pays Actuellement présidente Création en 1954 (par son père), reprise par Bernard en 1985 Digigram (Isère) Création en 1985 Introduction en bourse en 1996 Introduction en bourse en 1997 Renommée Delfingen Industry en 2007 - Actuellement président-directeur général Retirés des activités opérationnelles en 2003 20 01 20 02 Philippe GIRARD-BUTTOZ et Marian MARINESCU Pierre SAUBOT François DELACHAUX Pinguely-Haulotte (Loire) Delachaux (Hauts-de-Seine) Création en 1985 Introduction en bourse en 1998 Devient Haulotte Group en 2005 Actuellement président du conseil d’administration et directeur général Création en 1949 Fusion de Delachaux et Seplast en 1984 Introduction en bourse en 1987 Sortie de bourse en 2011 Eurofins (Loire-Atlantique) Création en 1987 Introduction en bourse en 1997 Bénéteau (Vendée) Création en 1884, reprise par A. Roux, petite-fille du fondateur, en 1964 Introduction en bourse en 1984 A. Roux est actuellement vice-présidente du conseil de surveillance et B. Cathelinais président du directoire 20 11 Actuellement président-directeur général Annette ROUX et Bruno CATHELINAIS 20 12 Gilles MARTIN 20 07 20 06 Actuellement président du conseil d’administration Jean MANE Jean-Luc PETITHUGUENIN V. Mane & Fils (Alpes-Maritimes) Paprec (Paris) Création par Victor Mane en 1871 Création en 1985, rachat en 1994 par Jean-Luc Petithuguenin 2006 : reprise de l’entreprise par le fils de Jean Mane (4e génération) Actuellement président du conseil de surveillance 20 ans de lauréats du Prix de l'Entrepreneur 19 97 19 96 HBS Technologie (Doubs) Bernard STREIT Actuellement président-directeur général 35 Ernst & Young Audit | Conseil | Fiscalité & Droit | Transactions Notre positionnement, notre engagement Ernst & Young est un des leaders mondiaux de l’audit et du conseil, de la fiscalité et du droit, des transactions. Partout dans le monde, nos 167 000 professionnels associent nos fortes valeurs communes à un ferme engagement pour la qualité. Nous faisons la différence en aidant nos collaborateurs, nos clients et tous nos interlocuteurs à réaliser leur potentiel. Ernst & Young désigne les membres d’Ernst & Young Global Limited, dont chacun est une entité juridique distincte. Ernst & Young Global Limited, société britannique à responsabilité limitée par garantie, ne fournit pas de prestations aux clients. Retrouvez plus d’informations sur notre organisation : www.ey.com Ernst & Young est une marque déposée au niveau mondial. Contacts Jean-François Royer Associé Tél. : +33 1 46 93 77 20 Email : jean-franç[email protected] Emmanuelle Raveau Directeur de la Communication Tél. : +33 1 46 93 83 68 Email : [email protected] Rudolphe Pennec Responsable marketing du marché Entrepreneurs Tél. : +33 2 51 17 44 23 Email : [email protected] © 2012 Ernst & Young et Associés. Tous droits réservés. Studio Ernst & Young - 1208SG094 Cette étude est la propriété d'Ernst & Young et Associés. Sa reproduction est interdite sans l'autorisation expresse d'Ernst & Young et Associés. Cette publication présente une synthèse d’éléments dont la forme résumée a valeur d’information générale. 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