ACHATS DE PRODUITS DU COMMERCE EQUITABLE ET CODE

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ACHATS DE PRODUITS DU COMMERCE EQUITABLE ET CODE
ACHATS DE PRODUITS DU COMMERCE EQUITABLE
ET CODE DES MARCHES PUBLICS
1 - La question posée
Les collectivités publiques - Etat, Régions, Départements, Communes, Etablissements
publics…- peuvent vouloir, elles aussi et comme les consommateurs individuels, être animées de
« préoccupations citoyennes » en « achetant responsable », c’est-à-dire vouloir éviter d’être, par leurs
achats, complices de situations où la dignité des hommes et la qualité de leur environnement seraient
menacées. Elles peuvent vouloir même que leurs achats aient un effet positif sur le développement
humain, les produits acquis dans des conditions équitables permettant à des producteurs et des
travailleurs marginalisés de retrouver la dignité par la vente de leurs produits.
Cette notion d’achat responsable a été reconnue par le code des marchés publics, texte
réglementaire dont le but est de faire en sorte que les collectivités publiques respectent les règles de
la concurrence et utilisent au mieux les deniers publics1. L’article 14 de ce code dispose à ce sujet :
« La définition des conditions d'exécution d'un marché dans les cahiers des charges peut viser à
promouvoir l'emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion, à lutter contre le
chômage ou à protéger l'environnement. Ces conditions d'exécution ne doivent pas avoir d'effet
discriminatoire à l'égard des candidats potentiels».
Il s’agit là de la reprise, mot, pour mot, de ce que disait l’article 14 de la précédente version du
code des marchés publics de 20012. L’instruction d’application de cette première version3 est utile à
rappeler car montrant bien les motivations d’une telle disposition sociale, alors toute nouvelle : « Le
code des marchés publics offre la possibilité de prévoir des conditions sociales ou environnementales
obligatoires dans le cadre de l'exécution d'un marché public. Ces dispositions nouvelles traduisent le
souci d'intégrer dans le droit de la commande publique des préoccupations citoyennes importantes qui
n'étaient jusqu'alors qu'imparfaitement prises en compte. (…)Dans ce même esprit de lutte contre la
précarité et de promotion de l'emploi, les personnes publiques peuvent également, sans fragiliser la
passation de leur marché, exiger des entreprises que la fabrication des produits achetés réponde à
des conditions de production socialement satisfaisantes, par exemple, qu'elles n'aient pas requis
l'emploi d'une main-d’œuvre enfantine dans des conditions contraires aux conventions
internationalement reconnues. La personne publique peut dans ce cas exiger que les fournitures
bénéficient d'un label de qualité sociale de production ou répondent à des conditions équivalentes ».
La légalité de l’inclusion d’une exigence sociale, en l’occurrence celle liée au respect
des règles du commerce équitable, dans les conditions d’exécution du marché ne pose de ce
fait aucun problème. La présente note aura donc pour seul objet d’examiner la manière dont,
concrètement, une telle exigence peut être mise en œuvre dans le respect des règles de passation
des marchés publics en matière de transparence, d’égalité d’accès au marché et de respect du droit
de la concurrence.
1
« Les marchés publics respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de
traitement des candidats et de transparence des procédures. Ces principes permettent d'assurer l'efficacité de la
commande publique et la bonne utilisation des deniers publics. Ils exigent une définition préalable des besoins de
l'acheteur public, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence et le choix de l'offre
économiquement la plus avantageuse » (article 1er du code des marchés publics, décret n° 2004-15 du 7 janvier
2004, JO du 8 janvier)
2
décret n° 2001-210 du 7 mars 2001, JO du 8 mars
3
instruction du 28 août 2001, JO du 8 septembre 2001
Max Havelaar France
Mars 2004
2 – Les règles à respecter
2.1 - En matière de publicité
Ce sont les règles applicables à tous les marchés publics qui doivent être respectées. Le code
des marchés publics prévoit différentes procédures en la matière en fonction de l’importance des
marchés passés :
-
-
pour les marchés d’un montant inférieur à 90 000 Euros, la collectivité doit organiser une
publicité suffisante mais selon des modalités adaptées qu’elle fixe elle-même. L’instruction
d’application du code des marchés publics 4 considère qu’une publication dans la presse
accompagnée éventuellement d’une publicité sur le site internet de la collectivité ou par
affichage sont des moyens appropriés. Pour les marchés de faible importance, la simple
sollicitation de plusieurs fournisseurs possibles est jugée comme une publicité suffisante.
Pour les marchés plus importants, une publicité plus formalisée est prévue par l’article 40 du
code.
Recommandation : Compte tenu de la nature particulière du circuit de distribution des
produits du commerce équitable et afin d’éviter les marchés infructueux, il paraît souhaitable, dans
toutes les hypothèses, d’adresser une information aux entreprises répertoriées comme fournisseurs
de
tels
produits
liste actualisée sur le site www.maxhavelaarfrance.org , rubrique : S’engager/Collectivités
2.2 - Forme du marché
Le nouveau code des marchés publics confirme la possibilité de l’adhésion à un groupement
de commande. Le groupement permet de coordonner et de regrouper les achats, de réaliser des
économies d’échelle. Cela peut aussi donner un signal aux fournisseurs quant à la volonté de
consommer équitable et les inciter à se lancer dans cette démarche
Recommandation : Avant de passer le marché, il faut que les membres du groupement
s’accordent sur certains engagements (volume minimal, critères de sélection)
Le marché peut être lui-même unique ou séparé en lots. L’allotissement permet de séparer
en lots, d’importance moindre, le marché. De cette façon, le marché peut être exécuté par de petites
ou moyennes entreprises, qui ne seraient pas capables de réaliser l’intégralité du marché.
Recommandation : En prévoyant des lots pour les filières de produits intégrées dans le
commerce équitable, on permet à la collectivité de passer des marchés directement avec les
fournisseurs spécialisés dans la vente de ces produits et d’obtenir ainsi, du fait de cette fourniture
directe, des prix plus avantageux.
2.3 - Insertion de la « clause de commerce équitable » dans les marchés
On a vu que les clauses sociales étaient licites en tant que condition d’exécution du marché.
En d’autres termes, cette clause ne doit pas être utilisée pour exclure a priori des entreprises de la
passation des marchés. Toutes les entreprises peuvent se porter candidates pour la fourniture de
produits provenant du commerce équitable. Si le critère social ainsi imposé est respecté par une
entreprise, le marché pourra être conclu avec cette entreprise dans la mesure bien sûr où son offre
est par ailleurs jugée la meilleure.
Cette clause devra être contenue, comme toutes les autres clauses d’exécution des marchés,
dans le cahier des clauses techniques particulières sous une forme qui pourrait être « Les produits
fournis devront avoir été obtenus en conformité avec les règles du commerce équitable telles
que celles-ci ont été définies par les organisations internationales concernées »5.
4
circulaire du 7 janvier 2004, JO du 8 janvier
Ces règles ont été fixées par IFAT (International Federation for International Trade) et par FLO (Fairtrade
Labelling Organizations) International
5
Max Havelaar France
Mars 2004
2.4 – Vérification de la bonne exécution du marché
La collectivité a l’obligation de s’assurer que les exigences qu’elle a fait figurer dans les
marchés qu’elle a passés sont bien respectées. En notre matière, le respect des critères du
commerce équitable ne peut être vérifié directement par la collectivité qui risque ainsi d’être abusée
par certaines entreprises soumissionnaires peu scrupuleuses. Ainsi que le reconnaissait l’instruction
d’application du précédent code, citée de plus haut, le moyen le plus efficace de parer à une telle
difficulté est de faire référence à la garantie donnée, sous forme de label, par des organismes
indépendants, sur la base de cahiers des charges établis conformément aux critères internationaux
précités. En l’occurrence, le seul label existant actuellement et répondant à ces critères est le label
Max Havelaar. La clause suggérée au paragraphe précédent pourrait donc être suivi de la mention ciaprès « La conformité à ces règles devra être garantie par l’association Max Havelaar ou toute
autre organisation indépendante donnant des garanties équivalentes ».
Max Havelaar France
Mars 2004

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