Gardez vos ceintures attachées!
Transcription
Gardez vos ceintures attachées!
Page 34 Chronique financière Le Brexit n’était pas «un moment Lehman» Page 34 Cinq actions préférées Riet Vijgen (Leo Stevens & Cie) Page 36 Épargne Les petites banques ont collecté moins d’épargne au premier semestre Page 36 La semaine sur les marchés Bilan hebdomadaire fantastique… pour la Bourse de Londres! samedi 2 juillet 2016 Marchés Après le choix du Royaume-Uni de s’éloigner de l’Union européenne, la seconde partie de l’année devrait être dominée, encore et toujours, par une intense volatilité sur les marchés d’actions. Dans cet environnement instable, toutes les actions ne seront pas bonnes à ramasser. Même après leur récent plongeon. MARC COLLET L a seconde partie de l’année 2016 risque d’être aussi volatile sur les marchés boursiers que la première. L’évolution des Bourses dans les jours qui ont suivi l’annonce du retrait des Britanniques de l’Union européenne en a donné un avant-goût. En deux séances à peine, les 24 et 25 juin derniers, les indices boursiers ont chuté de 10% et plus, avant de rebondir de 5% tout aussi rapidement lors des deux séances suivantes. Plutôt que d’avoir clarifié les relations entre l’Europe et le Royaume-Uni, le Brexit engendre plutôt de nouvelles incertitudes. À elle seule, cette observation suffit pour penser que les mois à venir resteront capricieux pour les actions. «À ce stade, les inconnues sont nombreuses. Le choix des Britanniques ouvre une période d’incertitude, synonyme de volatilité à court terme pour les marchés financiers au Royaume-Uni comme en Europe», font remarquer Philippe Ithurbide, directeur de la recherche et Didier Borowski, responsable de la macroéconomie, tous deux chez Amundi. «La volatilité persistera un bon moment, aussi longtemps que les incertitudes subsisteront», avance pour sa part Christophe Van Canneyt, chef économiste auprès de Puilaetco Dewaay Private Bankers. «On ne voit pas à cette heure qui succédera au Premier ministre Cameron. Il manque toujours un plan B dans une société qui se déchire au niveau politique, entre les générations (jeunes et personnes âgées), entre les régions, ainsi qu’entre Londres et le reste du pays». «Le Brexit aura-t-il vraiment lieu? Et en admettant que ce sera bien le cas, on ne sait pas quelle forme il prendra», s’interroge Christophe Donay, responsable de l’allocation d’actifs et de la recherche macroéconomique chez Pictet Wealth Management à Genève, en Suisse. Valorisation tendue Bien sûr, ce n’est pas la première fois que les marchés font face à des éléments incertains. Pour autant, ils ne réagissent pas toujours aussi violemment qu’ils viennent de © REUTERS Gardezvos ceintures attachées! le faire. Le hic, c’est que leur valorisation est actuellement tendue. Les entreprises qui y sont cotées s’échangent à des niveaux de PER (rapport cours sur bénéfice) supérieurs à ceux de long terme. «De 2 à 3 points au-dessus de leurs moyennes historiques», précise Christophe Donay. Des niveaux qui rendent leurs actions plus sensibles, du coup, à la moindre mauvaise nouvelle. Pour que cette volatilité s’atténue, il faudrait au moins que les résultats des entreprises ,qui affichent pour le moment des taux de croissance proches de 0%, s’améliorent. Mais sur ce chapitre, il n’y a pas lieu de se faire beaucoup d’illusions. Les prévisionnistes qui se sont risqués au lendemain du référendum britannique à établir des prévisions pour la croissance des économies les plus concernées par le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, ont revu à la baisse leurs estimations. Pour Christophe Donay, la croissance du PIB ne devrait plus être que de 1,3% contre 1,6% estimé auparavant en Grande-Bretagne en LIRE LA SUITE EN PAGE 35 L’ECHO SAMEDI 2 JUILLET 2016 34 Marchés Chronique financière Marc Lambrechts Ce n’était pas un «moment Lehman». Le Brexit a fait tanguer les marchés financiers. Mais il n’y a pas eu jusqu’à présent de mouvement de panique généralisée ou de crise de la liquidité comme en 2008. Une certitude: les taux d’intérêt vont rester au plancher plus longtemps qu’anticipé. Et ce n’est pas une bonne nouvelle. E n allant un peu vite en besogne, certains responsables ont affirmé de manière péremptoire que le «Brexit» constituerait un nouveau Lehman Brothers pour le monde financier. Alors, oui, le bateau a tangué très fortement le vendredi 24 juin et également lundi dernier, le 27 juin. Des chutes très sévères ont été enregistrées, des milliards de capitalisation boursière ont été effacés (mais les cours avaient aussi fortement grimpé avant le vote). Toutefois, sur les marchés, tout s’est finalement déroulé dans un certain calme. Il n’y a pas eu de mouvement de panique généralisée ou de crise de la liquidité comme en 2008. D’ailleurs, les Bourses ont commencé à se redresser à partir de mardi dernier. À moins de trouver des «cadavres dans les placards» (un gros hedge fund en difficultés par exemple), c’est l’élément rassurant du choc Brexit: depuis cette crise de 2008, les responsables des politiques économiques et monétaires ont – heureusement – retenu certaines leçons. Les grands banquiers centraux de la planète se sont d’ailleurs retrouvés le week-end dernier à Bâle, au siège de la Banque des Règlements internationaux (BRI) pour son assemblée annuelle. Le timing était presque parfait. Et le message de Jaime Caruana, le directeur général de la BRI, on ne peut plus clair. En le simplifiant, on pourrait le résumer ainsi: «Restons calmes, il y a toujours un pilote dans l’avion». Les banques centrales ont en effet mis en place des plans d’action détaillés pour gérer les perturbations sur les marchés financiers liées au Brexit alors que dans le secteur bancaire, le renforcement des volants de fonds propres et de liquidité a rendu les systèmes financiers plus résilients. Pas question donc de revivre l’épisode de panique de 2008… Dans le même temps, on ne peut que ressentir ce sentiment de fragilité persistante. Au moindre choc, la confiance sem- 5 ble prête à vaciller, à s’évaporer. Et les craintes ne manquent jamais de ressurgir concernant des pays plus fragiles comme l’Italie ou le Portugal dans la zone euro. Ou encore la Chine en cas de fluctuations du yuan. Et ce n’est pas la situation des taux d’intérêt qui va rassurer le secteur financier. Car le Brexit et ses conséquences négatives sur la croissance ne font que renforcer l’idée que les taux d’intérêt vont rester au plancher un bon bout de temps encore. Dans son rapport annuel, la BRI pointe la persistance de taux d’intérêt extrême- de Riet Vijgen © DOC PORTFOLIO MANAGER CHEZ LEO STEVENS & CIE le temps, ajoute encore la BRI, tous ces phénomènes peuvent exercer des effets délétères sur l’économie réelle. Qui plus est, des taux négatifs peuvent ébranler la confiance des ménages et exercer, sur les comportements d’épargne et d’investissement, une influence qui est difficile à prévoir. Bref, on n’est pas réellement sorti d’une zone de turbulences potentielles… Pour Laurence Boone et Eric Chaney, stratèges chez Axa Investment Managers, les banques centrales ne peuvent que rester en situation d’alerte après le Brexit. C’est le cas de la Banque centrale européenne. Mais dans le cadre de la politique actuelle, il n’y a pas beaucoup de solutions pour la BCE, hormis l’accélération des achats de titres trop décotés. Les deux économistes ne pensent pas que Francfort ira un jour jusqu’à acheter des titres émis par des institutions financières voire des actions cotées en Bourse (comme la Banque du Japon). Quant à la banque centrale américaine, en raison des incertitudes liées au Brexit, la hausse des taux prévue en juillet n’est plus d’actualité. Compte tenu de la proximité des élections américaines, il est même peu probable que la Fed relève ses taux avant décembre, souligne-t-on chez Axa IM. La Fed pourrait même ne plus relever ses taux en 2016. Mais ce statu quo monétaire américain ne paraît pas constituer un facteur de soutien important pour les marchés. Même si les Bourses américaines ont finalement terminé légèrement dans le vert au premier semestre. C’est loin d’être le cas des Bourses européennes qui ont terminé en net recul: -9,6% pour l’indice Bel 20 et -12,3% pour l’indice européen EuroStoxx 50. C’est le pire premier semestre depuis 2008 pour les Bourses européennes, soulignent les experts. À l’époque, lors du premier semestre 2008, les marchés européens avaient dévissé de quelque 25%! C’était avant une autre dégringolade de 25% au second semestre 2008. Lors du vrai «moment Lehman». La BRI considère que la persistance de taux extrêmement bas constitue une menace. La sortie de la Grande-Bretagne de l’UE va maintenir les taux d’intérêt au plancher. © AFP EVS actions préférées ment bas comme une «menace». Les taux aussi faibles, explique la «banque des banques centrales», ont tendance à exagérer la valorisation des actifs. De ce fait, les prix des actifs, surtout les obligations d’Etat, deviennent plus vulnérables à une inversion de tendance. Toujours selon le rapport, en demeurant aussi faible, voire négatif, aussi longtemps, le niveau des taux d’intérêt érode aussi les marges d’intérêt des banques, aggrave les décalages de rendement des compagnies d’assurance et alourdit les engagements des fonds de pension. Et avec La petite entreprise EVS, qui produisait des images au ralenti pour les courses de Formule 1, est devenue fournisseur à part entière de systèmes de gestion de contenus utilisés lors de tous les grands événements sportifs. Au cours des dix dernières années, la société a acquis une position dominante dans la livraison de serveurs pour camions satellites. Depuis fin 2015, le carnet de commandes se remplit bien, en particulier aux Etats-Unis et en Asie. L’entreprise n’est pas endettée et sa valorisation actuelle – à moins de 12 fois le bénéfice – est attrayante, en particulier avec la perspective que 2016 soit une nouvelle année record (Coupe d’Europe de football en France et Jeux Olympiques au Brésil). Groupe hybride (pharmacie, chimie et matières plastiques) il y a quelques années à peine, Solvay s’est transformé en une entreprise diversifiée dans le secteur de la chimie fine. L’accent mis par l’entreprise sur l’augmentation des marges bénéficiaires, l’innovation et la croissance ont poussé Solvay à reprendre la société américaine Cytec, le second producteur mondial de matériaux composites légers. Les résultats du premier trimestre étaient meilleurs qu’attendu et les synergies de coûts (suite à la reprise) sont supérieures aux attentes. Ce plan stratégique clair, la position de marché très forte et le généreux dividende (rendement du dividende de 4,1%) devraient, à notre avis, créer beaucoup de valeur pour l’actionnaire. Air Liquide Air Liquide est le leader du secteur des gaz industriels et se caractérise par une grande stabilité. D’une part, la concurrence est limitée, car la production de gaz industriels est très exigeante sur le plan des capitaux, et d’autre part, les contrats signés avec les clients sont de longue durée. Ces éléments permettent à l’entreprise de réaliser des marges stables et d’augmenter régulièrement son chiffre d’affaires. Air Liquide dispose également d’une clientèle très diversifiée, jouit d’une présence mondiale, et réussit systématiquement à augmenter ses marges bénéficiaires. Avec la reprise de la firme américaine Air Gas, Air Liquide matérialise ses ambitions de croissance. Novartis Investor AB EVS SOLVAY AIR LIQUIDE NOVARTIS INVESTOR AB EUR Solvay EUR EUR 60 40 30 2012 2013 2014 2015 Source: Thomson Reuters Datastream 20 2016 CHF 2012 2013 2014 2015 Source: Thomson Reuters Datastream 2016 110 100 90 2013 2014 2015 Source: Thomson Reuters Datastream 80 2016 400 110 100 90 80 70 60 50 40 120 2012 Investor, le holding de la famille suédoise Wallenberg, affiche un palmarès impressionnant depuis plus de 100 ans en termes de création de valeur. Investor est l’actionnaire principal de plusieurs acteurs mondiaux (tels qu’Atlas Copco, ABB, AstraZeneca, Electrolux, Swedbank et Ericsson), ce qui lui garantit un flux stable et régulier de dividendes. Par ailleurs, un quart du portefeuille est constitué d’investissements de type «private equity» (capital à risque) principalement concentrés dans le domaine de la santé. Avec un cours de 268 couronnes suédoises (environ 28,41 euros), les investisseurs bénéficient d’une décote de près de 20% par rapport à la valeur intrinsèque du groupe. SEK 130 130 120 110 100 90 80 70 60 50 Novartis est une société pharmaceutique qui dispose d’un solide portefeuille de médicaments et d’une stratégie claire. Le cours de Bourse a souffert des prestations décevantes de la division ophtalmologique Alcon, mais la restructuration en cours devrait résoudre ce contretemps. Novartis réinvestit une grande partie de ses bénéfices dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments et s’assure ainsi des revenus futurs. Ses activités de recherche ont permis de lancer le nouveau médicament Entresto (contre l’insuffisance cardiaque), qui a été très bien accueilli par les spécialistes. Suite à la restructuration d’Alcon, le cours de l’action s’est stabilisé. 2012 2013 2014 2015 Source: Thomson Reuters Datastream 2016 300 200 2012 2013 2014 2015 Source: Thomson Reuters Datastream 100 2016 L’ECHO SAMEDI 2 JUILLET 2016 35 Marchés Les actions à privilégier. Et les autres... SUITE DE LA PAGE 33 2016, et de 0,9% contre 2% en 2017. Pour la zone euro, le responsable de l’allocation d’actifs suisse revoit également les taux à la baisse. De 1,8% à 1,5% en 2016, et de 1,7% à 1,3% l’an prochain. Une épée de Damoclès Ces révisions à la baisse de ces estimations constituent une sorte d’épée de Damoclès sur les résultats futurs des entreprises. On voit mal dans ce contexte comment les Bourses pourront faire preuve de sérénité, alors que les PER se situent à des niveaux élevés. «L’impact sur la croissance du produit intérieur brut (PIB) européen devrait constituer un handicap supplémentaire pour la croissance des bénéfices par action (BPA) des sociétés cotées à Londres et sur les places européennes au cours des 12 à 18 mois à venir», écrivent les analystes de Citigroup dans une note fraîchement publiée. «Même s’il est possible, ajoutent-ils, que l’évolution des changes ait un effet bénéfique au niveau du marché.» Cet impact de l’évolution des changes, les analystes de la banque Goldman Sachs ont tenté de le quantifier pour les sociétés du Stoxx 600. Ils estiment qu’une dépréciation de 10% de l’euro face au dollar se traduirait par une croissance de 2% des résultats finaux des entreprises. À ce jour, la baisse de la monnaie européenne reste limitée. Elle s’élève à 2,5% à 1,11 dollar depuis le 23 juin. Hors fluctuations des changes, Goldman Sachs table sur un repli de 5% des bénéfices des sociétés liées au Stoxx 600. Chez Pictet W.M., sans pour autant avoir chiffré pour le moment les risques, Christophe Donay craint que «la croissance des profits pour le second semestre et l’année 2017 seront fort probablement à revoir à la baisse et le potentiel de hausse des Bourses en sera d’autant plus érodé». «Agir tactiquement» Comment les investisseurs devraient-ils se comporter dans ce nouvel environnement? Pour Christophe Donay, qui trouvait, déjà avant le référendum britannique, que les marchés évoluaient sans grande tendance forte en l’absence de momentum macroéconomique dans le monde, le Brexit amplifie le manque de visibilité. Il voit deux façons de se comporter. «La première c’est de rester pondéré, neutre en actions. La seconde, d’être actif tactiquement». C’est-à-dire d’acheter des actions lorsque les marchés ont bien baissé, et les vendre quand ils ont bien remonté. Responsable de l’investissement auprès de la banque ING (Belgique), Thierry Masset suggère de sous-pondérer les actions par rapport aux liquidités. «Ces dernières, explique-t-il, permettront d’agir tactiquement». © GETTY IMaGES © EPa LES SECTEURS DÉFENSIFS ONT LA COTE PAR CES TEMPS INCERTAINS On pouvait le prévoir. avec le choix de la Grande-Bretagne de ne plus être un pays membre de l’Union européenne, les secteurs défensifs ont regagné en popularité. Ce sont ceux que Thierry Masset, Chief Investment Officer chez ING (Belgique), privilégiait déjà avant le référendum britannique «pour le rendement sur dividende élevé que ces actions offrent». Ces secteurs sont qualifiés de défensifs, parce que les bénéfices que réalise ce type de société ont la réputation de faire de la résistance lorsque l’environnement économique est capricieux. Et comme les résultats de sociétés sont ce qui détermine pour l’essentiel l’orientation des cours de leurs actions en Bourse, des 19 sous-groupes sectoriels de l’indice Stoxx 600 paneuropéen, ils comptent parmi ceux qui ont été les moins affectés par le regain d’incertitude découlant du Brexit. Des pharmaceutiques aux “utilités” Les actions des soins de santé ont même progressé depuis le 23 juin, le jour du référendum. Elles ont gagné 3,5% en moyenne, une performance identique à celle enregistrée par UCB à la Bourse de Bruxelles. Également considérées comme des actions défensives, celles de l’agroalimentaire et des brasseurs ont gagné un petit 1,7%. Parmi elles, AB InBev est montée de 4% et Diageo11%. Le groupe de spiritueux Diageo est très actif en dehors de GrandeBretagne et en mesure de profiter de la faiblesse de la livre sterling (GBP), estime Filiip Bruynooghe. responsable de l’analyse actions chez CapitalatWork. «Ce qui explique la forte hausse de l’action après le référendum», dit-il. au rayon des actions de sociétés spécialisées dans les services aux collectivités locales («utilities»), les pertes ont été contenues à -0,55%. aux télécoms, à 3,33%. Dans ces compartiments, Engie a cédé 1,6%, mais Proximus a gagné 3,4%, toujours depuis la clôture du jeudi 23 juin. Les valeurs britanniques National Grid qui génère 53% de ses revenus en dehors de Grande-Bretagne, et Centrica 44%, dont une bonne partie aux Etats-Unis selon des données fournies par Bloomberg, devraient bénéficier de la baisse du GBP. M.C. KBC PLÉBISCITÉE PAR LES ANALYSTES © REUTERS EUROTUNNEL DÉRAILLE À PARIS ET LONDRES L’action du groupe emblématique Eurotunnel qui a permis de relier la Grande-Bretagne au Vieux Continent, a plongé de 30% au cours des deux séances qui ont suivi le référendum. Sur l’assurance qu’un Brexit «ne devrait pas affecter les activités de la concession du tunnel sous la Manche», le groupe a indiqué maintenir ses objectifs. «Une baisse de la livre sterling ferait baisser le montant de la dette du groupe dans cette monnaie, augmenterait les coûts des concurrents maritimes et soutiendrait les exportations britanniques, ce qui compenserait les éventuels effets négatifs», a expliqué Eurotunnel. Et d’ajouter que «les biens et personnes transitant par le tunnel resteraient soumis aux mêmes procédures qu’actuellement», du fait que le RoyaumeUni n’a jamais été dans l’espace Schengen. Revenue à 9,50 euros à la veille de ce week-end, l’action a du coup effacé la moitié de ses pertes. Les objectifs de cours des analystes qui se sont prononcés ces derniers jours sur ce titre évoluent entre 10 et 13 euros. M.C. TOYOTA PARMI LES CONSTRUCTEURS AUTO LES PLUS IMPACTÉS © EPa © BELGa Décidément, le secteur bancaire joue de malchance. Il peine à se relever de la crise financière de 2008. Sur les Bourses, il se traîne tout près de ses plus bas des années 2000 atteints en mars 2009. Et tout indique qu’il ne devrait guère s’éloigner de ces planchers dans les mois à venir. Ce secteur a été le plus impacté par les résultats du référendum en Grande-Bretagne. Depuis la clôture du 23 juin, l’indice Stoxx 600 Banques est celui qui a perdu le plus de plumes. Il accuse toujours à ce jour une perte de 17,1%. assez curieusement, ce sont deux valeurs britanniques qui arrivent à afficher des gains. Il s’agit de Standard Chartered (+ 2,6%) et de HSBC (+ 6%). Le fait que ces établissements effectuent l’essentiel de leurs affaires en dehors de la Grande-Bretagne et même d’Europe, peut justifier cela. Pour les autres, elles souffrent, en plus de l’environnement de taux d’intérêt bas, des interrogations sur les affaires de leur banque d’investissement basée à Londres, du poids des créances douteuses comme c’est le cas pour certaines institutions en Italie, ou encore des doutes sur leur santé financière. Dans une note publiée au début de la semaine, les analystes de JP Morgan écrivent «avoir révisé à la baisse leurs prévisions de profits par action (BPA) pour le secteur, et anticipe une hausse du coût du capital pour les banques européennes pénalisées par un ralentissement de l’économie sur le Vieux Continent et des conditions de marchés plus difficiles après le Brexit». Ces analystes ont révisé leurs objectifs de cours pour les actions d’une série de banques. Notamment celui de BNP Paribas qui passe de 40 à 36 euros. À Bruxelles, KBC a fait par contre l’objet d’analyses favorables cette semaine. Goldman Sachs a inclus son action dans sa «Conviction list». Bank of america, qui a abaissé de 10% ses prévisions de BPa pour les banques françaises et du Benelux, est néanmoins à l’achat sur BNP Paribas, ING et KBC pour «les meilleures histoires de rendement sur dividende qu’elles offrent». M.C. LES COMPAGNIES AÉRIENNES TRAVERSENT DES TROUS D’AIR Le Brexit a fait perdre de l’altitude aux compagnies aériennes sur les Bourses. La plus affectée pour avoir émis un avertissement sur résultat du 3e trimestre, easyJet, a plongé de 28%. Air France-KLM et Deutsche Lufthansa ont perdu près de 7%, Ryanair 12,3% et IaG (British Airways et Iberia) 26,9%. Les résultats du référendum qui risquent d’impacter la demande de cet été, n’expliquent cependant pas totalement la chute des cours dans ce secteur. EasyJet pointe en effet les grèves dont elle a été victime récemment et qui impactent ses résultats. Des arrêts de travail qui ont aussi touché les compagnies allemande et surtout franco-néerlandaise. Rayon changes, la baisse de la livre sterling (GBP) entraînera un supplément de dépenses pour les compagnies britanniques qui paient le kérosène en dollars. Tourisme meilleur marché Mais la faiblesse de la devise britannique a son bon côté. Les propos tenus par le patron d’IaG selon qui «la Grande-Bretagne deviendra plus attractive pour les touristes», paraissent avoir rassénéré des investisseurs. Ce qui a permis à ces actions de reprendre un peu de hauteur ces derniers jours. Pour Filip Bruynooghe, responsable de l’analyse actions chez CapitalatWork, «l’industrie du tourisme bénéficiera pleinement de la faiblesse du GBP qui attirera beaucoup plus de touristes à Londres. La consommation pourrait aussi augmenter si les Chinois en profitent pour acheter davantage de produits de luxe lors de leurs voyages. D’après un article paru dans Bloomberg, les acheteurs chinois pourraient même épargner jusqu’à 40% sur leurs dépenses en réorientant leurs voyages prévus au Japon vers l’Europe et le Royaume-Uni. Une entreprise du secteur du luxe telle que Burberry en sortirait aussi gagnante». M.C. Le Brexit n’est pas une nouvelle favorable pour le secteur de l’automobile dans l’ensemble. Le constructeur français Peugeot détient une part de marché de 8,5% outre-Manche. Les analystes de la banque Barclays ont calculé qu’une évolution de 1% de la livre sterling (GBP) a un impact de 1,6% sur le résultat opérationnel de la branche automobile, soit près de 30 millions d’euros. Cet impact valait-il pour autant une chute de 18% à 10,3 euros de l’action du constructeur à la Bourse de Paris, lors des deux séances qui ont suivi l’annonce du choix des Britanniques? Comptant parmi les plus optimistes des analystes suivis par Bloomberg, alexis albert, de la banque Barclays, «surpondère» le titre et a un objectif de cours de 22 euros pour l’action. Quant aux autres constructeurs, Renault, dont la part de marché en Grande-Bretagne s’élève à 4,3% (le pays représentant 5,2% de son chiffre d’affaires), sera moins impacté. Si l’action Renault a cependant été chahutée au lendemain du référendum, c’est parce que l’action Nissan, dont Renault détient 44%, avait dévissé de 8% à la Bourse de Tokyo. Les analystes répertoriés par Bloomberg visent un cours compris entre 70 et 110 euros pour l’action Renault. Droits de douane Du côté des groupes allemands, BMW a une part de marché de 10,5%, soit près de 2 fois supérieure à celle de General Motors. Le Japonais Toyota, qui monte 190.000 voitures en Grande-Bretagne dont 75% sont vouées à l’exportation, sera affecté par le Brexit. Les investisseurs paraissent en être conscients: l’action conserve à ce jour une perte de 10% à Tokyo. Toyota a déclaré que les droits de douane en cas de Brexit pourraient atteindre jusqu’à 10% dans le cadre des nouvelles règles commerciales et devraient être répercutés sur les marges ou sur les prix de vente au risque de freiner les ventes. Un taux que l’association des constructeurs sud-coréens craint également. Le recul de la livre constitue plutôt une bonne nouvelle. Enfin, selon LMC automotive, les ventes de voitures sont attendues en repli de 15% d’ici 2018 en cas de Brexit. «Un exercice de style» «Le processus de sortie va être long et coûteux et peut constituer un risque pour l’ensemble des actifs libellés en euros», estime Raphaël Sobotka, responsable mondial des gestions diversifiées chez Amundi. Pour cette raison, il réduit son exposition aux actions de la zone euro et aux obligations des pays périphériques. Il privilégie plutôt les actions des pays émergents, compte tenu entre autres de leur rendement, les bons du Trésor américains pour leur qualité de valeur refuge, et les liquidités. Les prévisionnistes sont quasi unanimes: ils conseillent de se focaliser sur les actions de sociétés de qualité. «C’est-à-dire celles ayant un bon niveau de free cash flow, de la visibilité sur les bénéfices, une capacité à relever le dividende et un ratio dette nette/ebitda inférieur à 1,2», souligne Thierry Masset. «Sélectionner des actions, c’est désormais plus un exercice de style que sectoriel», dit-il encore. Après deux séances fort mouvementées suite au Brexit, les marchés se sont repris. Les traders s’attendent toutefois à d’autres journées «chaudes». © BLOOMBERG M.C.