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12 FAITS PROSTITUTION ÉCONOMIE Des mères de famille SE PROSTITUENT pour vivre mieux Les femmes qui ont recours à la “prostitution alimentaire”, en plus d’avoir un travail, sont de plus en plus nombreuses 8 " En Belgique, la pauvreté tou- che un enfant sur trois. 23 % des parents peinent à boucler leurs fins de mois, rapporte une en- En plus de leur travail, elles louent leurs charmes pour pouvoir vivre un peu plus confortablement et payer leurs factures. Leur nombre est inconnu des autorités. Elke Sleurs, secrétaire d’État à la lutte contre la pauvreté, interpellée par la députée fédérale Nawal Ben Hamou (PS), quête des mutualités socialistes. Une précarité qui pousse de plus en plus de mères de famille, seules, à recourir à la prostitution. indique : “À ma connaissance, il n’existe pas de chiffres détaillés sur le phénomène de la prostitution alimentaire.” “Les 35-40 ans viennent pour subvenir aux besoins de leur famille” Elle reconnaît que le phénomène existe mais poursuit, se basant sur une enquête menée en Fédération Wallonie-Bruxelles : “On ignore cependant si la misère constitue un facteur de prostitution ou si c’est la prostitution qui serait facteur de misère.” Du côté de l’Espace P, une association qui œuvre au quotidien auprès des prostituées, on LA PHRASE “Les femmes d e 35 -40 ans, de différents profi ls, viennent essentiellemen pour des raiso t ns alimentaires” Mas seuse du salo n Le Hammam à Bruxelles ne remarque pas vraiment une tendance de cette prostitution dite alimentaire. Et pour cause : “Dans la majorité des cas, la prostitution est alimentaire”, dit-on. AU SALON de massages Le Hammam, à Bruxelles, qui recherche régulièrement des “hôtesses”, on assiste à une hausse de ce profil de femmes. “Beaucoup de mères de famille viennent en journée ou fin de journée pour gagner plus d’argent, nous dit-on. Les femmes de 35-40 ans, de différents profils, viennent essentiellement pour des raisons alimentaires et pour subvenir aux besoins de leur famille.” La responsable poursuit : “En dix ans, on a vu que le paysage a énormément évolué ! De plus en plus de femmes viennent pour arrondir leurs fins de mois.” Alicia (pseudo d’escort-girl) est également masseuse érotique et escort-girl, parfois. Elle a commencé à 32 ans, après la séparation avec le père de son fils. “Je travaillais à mi-temps et il était compliqué de joindre les deux bouts. On m’a proposé de gagner de l’argent en massant de façon sexy et en accompagnant des hommes lors de soirées, notamment; j’ai d’abord refusé. Puis, j’ai accepté face aux factures qui s’amoncelaient.” L. C.C. 15 Il y aurait entre 15.000 et 20.000 travailleurs du sexe en Belgique. : En plus de leur job, des femmes louent leurs charmes pour arrondir leurs fins de mois. La prostitution estudiantine EN HAUSSE 8 Les étudiants hésitent moins à devenir Sugar Babies… " Ils sont jeunes. Étudiants. Et ils doivent faire face à de nombreuses dépenses. Leurs parents ne peuvent pas toujours leur offrir des études coûteuses. Pour y avoir accès, certains étudiants proposent leurs services à des personnes plus âgées. Ils seraient de plus en plus prompts à donner de leur corps pour gagner leur vie. C’est de l’argent rapidement gagné et qui ne nécessite pas trop de changement de vie : un week-end ou une soirée de temps en temps. Le phénomène des Sugar Babies n’est pas neuf. “Différents travaux de recherche ont permis de mettre en lumière certains aspects de la prostitution. Le développement de la prostitution estudiantine a ainsi été étudié en 2014 par Renaud Maes, de l’Observatoire de la vie étudiante de l’ULB”, précise la secrétaire d’État à la Lutte contre la pauvreté. “Ces travaux ont mis en exergue une prostitution des étudiant(e)s alimentée par la précarité de certain(e)s étudiant(e)s ayant des difficultés financières.” Ce sont les motifs qu’avaient © SHUTTERSTOCK évoqués avec nous deux membres de Sugardaters, un site consacré à ces rencontres atypiques. Un ToyBoy et une SugarBaby témoignaient dans notre édition du 14 mars 2016. Ils faisaient état d’échanges de services. Une présence contre des extras (voyages, vêtements, cosmétiques, parfums…) qui leur permettent de se faire plaisir et de vivre confortablement. Ils refusaient toutefois d’apparenter cette activité à de la prostitution. Ils estimaient qu’une relation se créait avec la personne qu’ils voyaient. MARC, 22 ANS , étudiant à l’ULB, refusait obstinément de dire qu’il se prostituait. Il évoquait un échange de services : “Je n’ai jamais reçu d’argent liquide; en échange, elle m’emmène en weekend, je reçois des cadeaux, des vêtements…” Les hommes le font aussi BRUXELLES En Belgique, selon une enquête sur la prostitution me- née pour la Fédération Wallonie-Bruxelles par l’Helmo et l’ULg, on estime le nombre de prostituées entre 15.000 et 20.000 personnes. Au cabinet de la ministre du Droits des Femmes, Isabelle Simonis, on précise : “Ce sont essentiellement des femmes.” On ajoute cependant que les hommes se prostituent aussi. “La prostitution masculine existe dans une moindre mesure mais est encore plus difficile à chiffrer car encore moins visible”, déplore-t-on. Plus tabou. Ou simplement plus “privée”. Quelques professionnels du secteur ont répondu à des questionnaires. Et la raison pour laquelle les femmes seraient plus nombreuses serait les inégalités et un certain rapport de force avec une personne qui les y a contraintes. “D’après les entretiens, nous pouvons affirmer qu’il est plus facile d’entrer dans la prostitution que d’en sortir, lit-on. En effet, les traitements inégalitaires et souvent l’impossibilité de garantir des revenus suffisants sur le long terme impliquent que les tentatives de sortie sont des échecs, et que la personne se voit contrainte de retourner vers l’exercice de la prostitution.” Deux travailleuses du sexe sur trois souhaitent s’en sortir. Mais, exploitées ou en situation de réelle précarité, ne peuvent le faire sous peine de voir leurs revenus épuisés. “Un redressement fiscal peut être la cause d’un retour dans la prostitution, seule solution trouvée pour apurer le montant dû.” L. C.C. L. C.C. www.dh!be I MERCREDI 16 NOVEMBRE 2016 I LA DERNIÈRE HEURE - LES SPORTS © S.A. IPM 2016. 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