Producteurs de lait, grande distribution : enfin trouver le juste équilibre

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Producteurs de lait, grande distribution : enfin trouver le juste équilibre
agriculture
Producteurs de lait, grande distribution :
enfin trouver le juste équilibre
par Richard Ferrand
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© EricLegret
L
e travail du groupe d’études que je
copréside aux côtés de Marc Le Fur
sur les industries agroalimentaires et
la filière agricole est guidé par deux fils
directeurs : dégager une réflexion prospective,
par exemple sur les outils d’amélioration des
exportations agroalimentaires, et éclairer,
par des travaux en amont, le regard pouvant
être porté par le Parlement à l’occasion de
l’examen de textes intéressant directement
l’industrie et les filières agroalimentaires ou
de projets de loi qui, bien que non spécifiques
à l’industrie agro-alimentaire, peuvent avoir
un impact sur la situation de cette dernière. Je
prendrai pour exemple le texte sur la consommation ; il prévoit de renforcer la lutte contre
les fraudes économiques, et pourrait être
pour nous l’occasion d’engager un débat sur
l’amélioration de l’efficacité de la lutte contre
les marges arrière ou des possibilités accrues
de recours des syndicats professionnels
contre la grande distribution, lorsque cette
dernière abuse de sa position dominante. Le
Premier ministre en est pleinement conscient
et a d’ailleurs souligné que ce projet de loi
« concerne l’équilibre entre les fournisseurs et
les acteurs de la distribution : il faut garantir
l’origine des produits, mais aussi protéger les
PME et les producteurs agricoles dans leurs
rapports avec la grande distribution ».
Nous pouvons mesurer avec le secteur du
lait l’importance d’atteindre ces objectifs ;
structurellement il n’est pas possible de s’en
remettre aux lois du marché pour déterminer
le prix du lait, faute de concurrence véritable.
La rigidité de la demande explique qu’une
baisse de prix n’a que peu d’impact sur la
consommation mais qu’une faible variation de
l’offre induit une forte augmentation des prix.
L’exigence d’une contrainte de collecte forte
en termes de fréquence et de régularité, avec
un délai maximal de 72 heures, rendent quasiment impossible la mise en place d’un marché
de la première transformation, d’autant que 4
entreprises collectent 41,1% de la production
française, certaines entreprises ayant un quasi
monopole dans certains bassins.
Il est également très difficile de fixer un prix
à l’échelle européenne car il existe des écarts
Richard Ferrand
énormes entre les coûts de production des
États membres, et un prix médian ouvrirait la
porte à une rente pour certains producteurs
et ne couvrirait pas les coûts pour d’autres.
Cela ne règlerait en aucun cas l’effet de ciseaux entre le prix du lait, qui se stabilise à
un niveau bas, et le coût de production, qui
a augmenté en raison de l’accroissement du
coût des céréales.
Nous avons besoin d’une
régulation du marché, […] nous
devons essayer de mieux
organiser les producteurs et [...]
nous ne pouvons pas laisser des
industriels, voire les grandes
coopératives, fixer les lignes
stratégiques de la production
laitière
perspective la sortie des quotas prévue pour
2015, voudrait rediscuter d’un certain nombre
de mécanismes européen pour, au niveau
national, dans un cadre de contractualisation
évolutif, prendre des mesures afin de permettre aux producteurs d’organiser la filière et par
là, ce qui constitue une inovation majeure, de
donner du pouvoir aux producteurs.
A ces débats essentiels va s’ajouter en 2013
la loi d’avenir agricole ; le Parlement va donc
être engagé dans des débats qui vont conditionner l’avenir de notre agriculture avec
pour ligne directrice la mise en œuvre de plus
d’équité.
Aussi, devons-nous faire comprendre aux
institutions européennes que nous avons
besoin d’une régulation du marché, que nous
devons essayer de mieux organiser les producteurs et que nous ne pouvons pas laisser
des industriels, voire les grandes coopératives,
fixer les lignes stratégiques de la production
laitière, surtout que ces dernières se tournent
souvent vers l’exportation. Or, en cas de chute
du volume des exportations, toute la production revient sur le continent européen, ce qui
fait baisser les prix plus que de raison.
Aussi, le ministre de l’Agriculture, avec pour
Mai 2013 l la revue du trombinoscope

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