282 P12-16 THIN LIZZY

P
hilip Parris Lynott, né le 20 août 1949 d’une
mère irlandaise et d’un père afro-américain
à Birmingham, est élevé par ses grands-parents en Irlande à Dublin. C’est en chantant de la
soul dans les Black Eagles qu’il fait ses débuts
avec Brian Downey (batterie, ex-Sugar Shack),
un copain d’école, puis rejoint Kama Sutra. Il travaille pour la première fois avec le guitariste Gary
Moore dans Skid Row. Sa voix ne convient pas
et il est remercié mais Bruce Shields, le bassiste,
initie Phil Lynott aux subtilités de son instrument.
Phil retrouve Brian Downey dans Orphanage
classé en Irlande grâce à sa version de « Morning
Dew » (Tim Rose). En 1969, Phil et Brian croisent
Eric Bell (guitare, ex-Them, Dreams), un Irlandais
de Belfast. Un déclic se produit entre eux et ils
pactisent. Eric Bell propose Thin Lizzy, nom à
peine modifié d’un personnage de bande dessinée, pour leur trio qui, dès 1970, se fait remarquer par des prestations au son chargé. Un
premier simple, l’attachant « The Farmer »/« I
Need You » (Parlophone, 1970), renforcé par Eric
Wrixon (claviers), n’est disponible qu’en Irlande.
Puis Thin Lizzy signe chez Decca pour trois ans
et s’installe au Royaume-Uni.
Simple belge de 1972.
SHADES OF
Publié en avril 1971, l’album « Thin Lizzy » permet
d’apprécier l’imagination, les textes très personnels de Phil Lynott mis en valeur par la guitare
aux accents celtes d’Eric Bell à l’origine d’une
ambiance particulière. L’influence de Jimi Hendrix est perceptible sur « The Friendly Ranger At
Clontarf Castle » (Bell-Lynott), « Ray-Gun »
d’Eric Bell et « Remembering » de Phil Lynott qui
compose le reste du 33 tours. Mélodique et chaleureux, le style de Thin Lizzy est aussi marqué
par celui de Cream, Jeff Beck Group et Led Zeppelin, mais c’est sur scène que le trio s’exprime
le mieux. Le 7 juillet, « Look What The Wind Blew
In » et « Return Of The Farmer’s Son » sont joués
dans l’émission Sounds Of The Seventies de la
BBC et « New Day », un EP au punch bien supérieur à l’album, réunissant « Dublin », « Remembering Part 2 » et « Things Ain’t Working Out
Down At The Farm », est édité par Decca en août.
En 1972, sur « Shades Of A Blue Orphanage »,
son deuxième 33 tours, Thin Lizzy évoque son
passé dans le groupe Orphanage et donne le jour
à la première version de « Sarah ». Phil Lynott
signe tous les titres excepté « The Rise And
Dear Demise Of The Funky Nomadic Tribes »
composé par le trio. « Buffalo Gal » et « Brought
Down » sont prometteurs et, en novembre 1972,
le simple « Whiskey In The Jar » est déterminant
pour la popularité de Thin Lizzy. Placé au départ
en face B de « Black Boys On The Corner », ce
premier succès se vend en Irlande (N°1), en Angleterre (N°6) mais aussi sur le continent et en
Asie. Cette adaptation rock d’un traditionnel, enregistré presque comme une plaisanterie, offre à
Thin Lizzy de disposer d’un budget plus important pour son prochain disque mais, en contrepartie, l’enferme dans une catégorie folk
électrique aux antipodes de sa musique. « Whiskey
In The Jar » existe également en version spéciale
DJ raccourcie à trois minutes. De style flamenco,
« Randolph’s Tango », le 45 tours suivant, se vend
peu malgré l’excellent « Broken Dreams » en face
B. Le 16 janvier 1973, le trio joue « Buffalo Gal »,
« Dublin », « Suicide », « Going Down » et « Blue
Shadows » pour Radio Irlande. Le 1er février, Thin
Lizzy présente « Whiskey In The Jar » à la télé dans
Top Of The Pops.
Phil Lynott saga
Trio composé d’Irlandais à
ses débuts, Thin Lizzy évolue en une association cosmopolite, implacable machine à swing absorbant
blues, R&B, pop, hard rock
et folklore irlandais. Si
les guitares occupent une
place de premier plan dans
sa musique attachante, débordante de feeling, c’est
la section rythmique menée par Phil Lynott qui
fournit la pulsion vitale.
Considéré comme un combo
de heavy-rock, Thin Lizzy
joue un rock moderne,
tout en nuances et finesse, émotion et sensibilité, mélodies insidieuses
et rythmes frénétiques. A
l’affût de nouvelles sonorités, le groupe se connecte avec lA vague punk
comme avec LA génération
précédente.
FUNKY JUNCTION
L’argent rentre difficilement et, pour payer les
factures, Thin Lizzy, augmenté de Benny White
(chant) et Dave Lennox (claviers), rebaptisé
Funky Junction, enregistre pour un homme d’affaires allemand « Funky Junction Play A Tribute
To Deep Purple » (Gold Award, 1973) avec
« Black Night », « Hush », « Fireball », « Speed
King » et des compositions dans un esprit
proche de celui des créateurs de « Smoke On
The Water ». En Allemagne, Funky Junction devient Rock Machine tandis que le titre du disque
évolue en « The Rock Machine Play The Best
Of Deep Purple » (Sonic Records). Edité en septembre 1973, le 33 tours « Vagabonds Of The
Western World » est encore supérieur et dévoile
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certaines des futures options de Thin Lizzy
comme « Gonna Creep Up On You », « Little Darling » et le funky « Slow Blues ». Il contient le dynamique « The Rocker » qui fait allusion à Ted
Caroll du magasin de disques Rock On de Londres, également créateur du label Chiswick, et
devient un hymne de scène. Sur le 45 tours édité
en Allemagne, « The Rocker » est jumelé avec
l’inédit « A Ride In The Lizzy Mobile ». Le titre
« Vagabond Of The Western World » puise son
inspiration dans la légende du Vagabond de la
mythologie celte. En décembre, Eric Bell annonce son départ et laisse sa place à Gary Moore
à partir de janvier 1974. Celui-ci ne reste que
quatre mois, contribue à la réalisation de maquettes, puis rejoint Colosseum II. Son empreinte
est perceptible sur le déchirant « Still In Love
With You » et sur « Sitamoia » publié par Decca
sur un simple en 1974 puis en EP en 1978. En
mai 1974, Thin Lizzy recrute John DuCann (guitare, ex-Atomic Rooster) et Andy Gee (guitare,
ex-Steve Ellis Band) pour honorer des concerts
en Allemagne mais le résultat est catastrophique.
Thin Lizzy devient un vrai quartet en juin quand
arrivent l’Ecossais Brian Robertson (guitare,
chant) et le Californien Scott Gorham (guitare). Le
5 juillet, cette nouvelle incarnation de Thin Lizzy
fait ses débuts au Lafayette de Wolverhampton.
Les maquettes enregistrées avec Gary Moore séduisent Phonogram qui signe Thin Lizzy alors en
tournée en Grande-Bretagne et en Irlande où
Scott Gorham et Brian Robertson affûtent leur
duo de guitares et donnent au gang une nouvelle
dimension.
NIGHTLIFE
Paru en 1974, produit par Ron Nevison et Phil Lynott, l’album « Nightlife » est l’œuvre d’un Thin
Lizzy en rodage. Les nouveaux membres cherchent encore leur place et l’énergie est trop contrôlée. Mais le potentiel est là sur « Showdown » et « It’s Only Money ». « Philomena »,
avec Jean Roussel (claviers), est édité en simple
jumelé à « Sha La La » très apprécié en concert.
Le solo de guitare de Gary Moore a été conservé
sur l’inoubliable « Still In Love With You » qui permet aussi d’apprécier les chœurs de Frankie Miller. Le 2 novembre 1974, l’hebdo Disc annonce
la participation de Thin Lizzy à un documentaire
sous la direction de Paul Cuzack qui s’est distingué avec le film « 200 Motels » de Frank Zappa.
Après quelques concerts anglais prometteurs en
janvier et février 1975, Thin Lizzy s’envole pour
une tournée aux Etats-Unis en première partie de
Bachman Turner Overdrive prolongée en Europe
et au Royaume-Uni en mai. C’est le début de la
période dorée ! En mai sort le simple « Rosalie »
(Bob Seger), avec Ian McLagan (piano, Faces).
Sur la face B, « Half Caste », Phil Lynott évoque
son inconfortable condition de métis. Le 23 août,
Thin Lizzy est à l’affiche du 15e National Jazz
Blues & Rock Festival de Reading. En septembre
paraît l’album « Fighting » (N°60), produit par Phil
Lynott. Nombreux sont les instants privilégiés
(« King’s Vengeance », « Suicide », « Fighting
My Way Back ») sur ce disque publié aux USA
par Mercury sous une pochette différente. Pourtant excellent, « Try A Little Harder », composé par
Lynott et Robertson, n’est pas utilisé sur le 33
tours. En octobre, « Wild One » fait l’objet d’un
simple couplé à « For Those Who Love To Live ».
Des concerts en Angleterre, Irlande, sur le continent, ainsi qu’une prestation triomphale au Great
British Music Festival à l’Olympia de Londres fin
1975 soutiennent « Fighting ». Le CD « UK Tour
75 », capté le 21 novembre au College of Technologie de Derby, donne un aperçu du potentiel
scénique de Thin Lizzy et permet de savourer
une version non définitive de « Cowboy Song »
du futur album « Jailbreak ». Contrairement à ses
confrères au son monolithique, son style emprunte des éléments au rock’n’roll, au blues, au
R&B et swingue.
JAILBREAK
Eric Bell, Brian Downey et Phil Lynott sur un
très rare simple allemand de 1973.
Edité en mars 1976, l’album « Jailbreak » (N°10),
réalisé par John Alcock, offre d’apprécier les
textes de Phil Lynott mis en valeur par les deux
guitaristes dont l’association fait merveille. Leur
complémentarité mélodique donne à Thin Lizzy
cette dynamique et ce son unique qui évoque