Echinacea - Hippocratus
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Echinacea - Hippocratus
MEMOIRE REDIGE DANS LE CADRE DE LA FORMATION DE PHYTO-AROMATHERAPIE “HIPPOCRATUS” Docteur Emile LOUEDIN - Carhaix - le 04/02/2008 ECHINACEA Pourquoi s’intéresser à une plante telle qu’Echinacea ? Les médicaments allopathiques immuno-stimulants, tels que BIOSTIM, IMOCUR etc., ont été dé-remboursés , comme beaucoup d’autres. Mais il n’en reste pas moins indispensable de faire bénéficier les malades de substances pouvant stimuler leurs défenses immunitaires. 1 INTRODUCTION Effectuant une formation de phyto-aromathérapie, je me suis tout naturellement intéressé à Echinacea et l’ai prescrit à un certain nombre de mes patients. Cela m’a donné l’occasion de constater quelques excellents résultats, au nombre desquels, je citerai, en guise d’illustration, ces deux exemples : UN CAS DE SCOLIOSE MAJEURE Le premier concerne une femme de 47 ans qui a une scoliose majeure, ayant nécessité dans le passé une intervention chirurgicale. La déformation thoracique est très importante et cette personne a une faible capacité respiratoire. Elle présente régulièrement des surinfections bronchiques, difficiles à traiter. Il lui est ainsi arrivé fréquemment de devoir prendre trois cures d’antibiotiques, consécutives, par voie orale (Amoxicilline, ou Amoxicilline-acide Clavulanique), et parfois même, à la suite, durant plusieurs jours, une Céphalosporine injectable pour obtenir la guérison. Je lui ai prescrit Echinacea Angustifolia TM, à raison de 50 gouttes/jour, dix jours par mois, pour des périodes de 3 mois, depuis l’automne 2006. Mais cette patiente a, au fil du temps, découvert par elle-même que si elle prenait également, et sans tarder, Echinacea après “avoir attrapé un coup de froid”, les rhinites, angines etc…, « passaient rapidement ». Il lui est arrivé d’y associer, mais moins souvent, de la Propolis et de la vitamine C. Elle m’a expliqué avoir constaté plusieurs fois cet effet curatif, et en a tiré un bénéfice certain par rapport à ses problèmes bronchiques. UN CAS DE DILATATION DES BRONCHES Le second cas, également très démonstratif, concerne une femme de 81 ans : je lui ai prescrit Echinacea Angustifolia TM,depuis la même époque, à titre préventif, à la posologie citée précédemment. Elle a une dilatation des bronches, authentifiée au scanner, compliquée d’épisodes de pneumopathies. C’est une insuffisante respiratoire. Cette patiente n’a pas utilisé de Propolis, de vitamine C, ni d’autre substance de ce genre . Mais, elle aussi, a quelque peu “adapté” ma prescription, et a pris Echinacea angustifolia TM de façon subcontinue, environ quatre mois par an, particulièrement à la 2 mauvaise saison... ou même simplement quand elle se “sentait fatiguée”. (Elle sentait un effet “stimulant”... ce dont je ne lui avais pas parlé, cela va sans dire!). Avant ce traitement, elle était tellement encombrée sur le plan bronchique que je devais lui prescrire une cure d’antibiotiques tous les deux mois (Amoxicilline : 2gr/jour avec Rulid 150 : 2/jour ). Depuis qu’elle est traitée en phytothérapie, elle ne prend des antibiotiques qu’une seule fois par an, au grand étonnement de la pneumologue qui la voit régulièrement... et de sa propre fille, qui est pourtant pharmacienne ! MON ETUDE sur Echinacea Angustifolia Dans une démarche très pragmatique, je me suis donc intéressé à cette plante. Cet intérêt a été encore avivé lorsque j’ai pris connaissance de certaines études effectuées à son sujet, dont celle accomplie récemment par des chercheurs de l’Université du Connecticut, même si cette dernière doit être mise en parallèle avec d’autres travaux parus ces dernières années aux conclusions parfois différentes. Ce dont je me propose de parler ultérieurement. La préparation de ce court mémoire m’a amené à mesurer, davantage encore une réalité nettement exprimée dans la formation dispensée par “Hippocratus” (Je pense, en particulier aux cours traitant de l’Olivier, de la Monarde etc.), à savoir la nécessité de disposer de vérifications précises, pour donner à notre pratique des bases dûment étayées. C’est sous cet angle, qui m’a particulièrement intéressé, que je voudrai évoquer, tout simplement, les caractéristiques de cette plante, et ce qui a été dit à son sujet, sur ses vertus curatives - qui semblent admises - et sur ses effets préventifs - encore discutés- UN MEDICAMENT TRES UTILISE… Les Echinacées forment un groupe de 9 espèces de plantes, de la famille des Astéracées, dont les plus connues, pour leur intérêt médicinal, sont représentées par les 3 suivantes : 3 ECHINACEA ANGUSTIFOLIA DC ... ECHINACEA PURPUREA (L) MOENCH ... ECHINACEA PALLIDA (NUTT) NUTT... Cette plante trouve son origine dans le sud des Etats-Unis. Les indiens du Sud Dakota l’utilisaient pour guérir les plaies infectées et les morsures de serpent. Selon les cas, ils broyaient la plante fraîche, pour l’appliquer localement, ou en mâchonnaient la racine (1). De nos jours, on la cultive sous tous les climats tempérés, dans des endroits ensoleillés, dont les sols sont riches et bien drainés. Elle a été la plante la plus utilisée aux USA au XIXe siècle. Elle y connaît encore un grand succès, ainsi que dans certains pays d’Europe, tels que l’Allemagne. Plusieurs centaines de produits à base d’Echinacea sont, ainsi, commercialisés outre-Rhin pour traiter les affections bénignes des voies aériennes supérieures. Il en est de même aux Etats -Unis : 20% de la population adulte a utilisé en 2002, différentes substances naturelles ,dans le domaine de la phytothérapie ou des compléments alimentaires. Et plus de 40.3% de ces personnes se sont traitées, notamment, avec de l’Echinacea (2). La Commission E en Allemagne, l’Organisation Mondiale de la Santé, la Direction des produits de Santé Naturels du Canada ont recommandé l’utilisation de cette plante. Echinacea Angustifolia (racine) et Echinacea pallida (racine) figurent dans l’addendum 52 de la Pharmacopée Européenne depuis 2005, respectivement sous les numéros 1821 et 1822 . Ces quelques faits illustrent bien l’intérêt suscité par cette substance, non seulement dans le grand public, mais aussi dans les milieux scientifiques. UN PEU D’ETYMOLOGIE... Echinacea se présente comme une robuste plante herbacée, atteignant 60 à 100 cm de hauteur... Elle peut avoir des fleurs pourprées (Echinacea purpurea), ou de tonalité plus 4 pâle (Echinacea pallida).. Lorsque les feuilles sont étroites (du latin “angustus”), on emploiera le qualificatif d’Echinacea Angustifolia . De même, l’aspect du capitule, après fructification, fait référence à la présence de “piquants” (En Grec, le mot “Echinos”, signifie “oursin”, et donc quelque chose de piquant...) En dehors de ces détails étymologiques, notons encore avec le docteur J. M. Morel (fiche plante Hippocratus) ceci : la racine est fusiforme; les feuilles sont entières et lancéolées. Les capitules terminaux de grande taille sont constitués de fleurs tubuleuses jaunes ou pourprées réunies en boule, et de fleurs ligulées tombantes, généralement roses, la faisant ressembler à une marguerite. C’est une composée. CONSTITUANTS : VARIANTES ET POINTS COMMUNS.... La composition chimique des échinacées, souligne Jean Bruneton, professeur de pharmacologie à l’université d’Angers, varie selon les espèces, selon l’organe, mais aussi selon la période de récolte ou l’origine géographique (3)... Cependant, bien qu’il existe des variations de concentration, les trois espèces d’Echinacea, communément utilisées, contiennent toutes des polysaccharides hydrosolubles, une fraction lipidique (échinacéine etc.) et des flavonoides (2). Ceci étant dit, examinons plus précisément, à propos, par exemple d’Echinacea purpurea, (racine ou plante entière avec la racine), les principaux constituants de cette plante(1) (4) : Des polysaccharides complexes de poids moléculaire élevé, hydrosolubles, tous supérieurs à 1000 D, ont été étudiés surtout chez E.Purpurea(4). On y retrouve un arabinorhamnogalactane de M 450 000 D, des fucogalactoxyloglucanes, un glucuronoarabinoxylane. Ils sont encore insuffisamment répertoriés... Notons, avec le docteur Yves Decor, que les plantes les plus actives en immunothérapie, sont celles qui contiennent le plus de certains polysaccharides (hétéroglycanes), à poids moléculaire élevé, et que de ce point de vue, Echinacea arrive en tête devant des plantes telles que 5 :Eupatorium, Chamomilla, Calendula, Eleuthérocoque, Ginseng... Des composés phénoliques, dérivés de l’acide caféique, variables selon les espèces(4) -Esters osidiques de l’acide caféique tel que l’échinacoside ( 0.3-1.3 %) -Acides dicaféyl-quiniques (cynaryne ) -Dicaféate de l’acide tartrique (acide cichorique, abondant chez E.Purpurea, presque absent chez E.Angustifolia) Des alkylamides ou alcamides (2 %). Une quinzaine de composés ont été identifiés sous forme de composés aliphatiques insaturés. On les retrouve dans la fraction lipophile. L’échinacéine est l’un d’entre eux. Ce sont des polyines ou isobutylamides d’acides polyényniques et polyèniques. Des alcaloides pyrrolizidiniques (tussilagine et isotussilagine: 0.006% chez E.Angustifolia et E.Purpurea) Une huile essentielle à humulène et échinolone. Des acides gras à longue chaîne, et des alcanes. Lesquels de ces constituants, considérés isolément, ou combinés entre eux, expliquent les propriétés de cette plante ? Sans doute faut-il, si l’on en juge par les publications, encore d’autres expérimentations pour répondre vraiment à cette question? PROPRIETES : CURATIVES ....PREVENTIVES ?... Les propriétés notées pour Echinacea sont celles d’une plante antivirale, antiinfectieuse, stimulante immunitaire, et tonique. Et c’est bien dans ces domaines que, de manière très pragmatique, ceux qui en ont l’expérience ont constaté des résultats. Le docteur Jean Michel MOREL les résume ainsi : (1) “Elle empêche les germes microbiens d’agresser le tissu conjonctif et limite leur progression. 6 Elle stimule l’activité des macrophages (augmentation de la phagocytose des granulocytes et macrophages par les extraits alcooliques de la racine ). Elle augmente le nombre des globules blancs et en particulier des lymphocytes, accroît la prolifération des cellules de la rate, la production d’IG M, induit la formation de cytokines (TNF alpha, interleukine 1 et 6 ) et celle d’interférons alpha et béta. Elle a, de plus, une action cicatrisante, elle participe à la restauration du tissu conjonctif en s’opposant à l’hydrolyse de l’acide hyaluronique. L’Echinacoside possède en outre une activité antivirale. L’Echinacéine serait surrénalo-mimétique, comme le ginseng, et elle augmente la résistance à l’effort. Le docteur Marc DELFOSSE (service scientifique de l’association pharmaceutique Belge) précise, pour sa part, les aspects suivants : l’activité immunostimulante de l’échinacée a été démontrée in vitro et in vivo en injection parentérale, sans que cela puisse, dit cet auteur, présumer de l’activité par voie orale... Ces propriétés seraient dues, ajoute-t-il, à l’association de plusieurs composants dont les polysaccharides et les composés polyinsaturés... Il note également qu’une activité antiinflammatoire a été décrite pour la fraction polysaccharidique administrée par voie intraveineuse et aussi en application locale(4). Le docteur Jean BRUNETON apporte (dans “Phytothérapie. Les données de l’évaluation”) les éléments suivants à propos des propriétés des extraits d’Echinacées, dans le domaine de la stimulation des mécanismes non spécifiques de défense de l’organisme, tels que la phagocytose par les granulocytes et la libération des cytokines et autres facteurs « L’hypothèse, écrit-t-il, s’appuie sur de nombreuses manipulations réalisées avec des cellules isolées, in vitro. Plusieurs substances pourraient participer à l’activité. Les polysaccharides d’E.Purpurea stimulent la phagocytose in vitro et la production de radicaux libres par les macrophages. In vivo, ils limitent l’infection de souris par des Candida. 7 Des polysaccharides de structure proche, obtenus par culture de cellules d’E.Purpurea, possèdent des propriétés de même type. L’Echinacoside, faiblement antibactérien et antiviral, est un piégeur de radicaux. L’acide cichorique stimule la phagocytose in vitro. La fraction lipophile (les alkylamides) est, in vitro, inhibitrice de la lipo-oxygénase ; elle augmente également dans certains tests in vitro, la phagocytose » Cet auteur estime toutefois, à la date de rédaction de cet ouvrage (2002), que « la réalité d’une action immunostimulante in vivo et par voie orale n’est pas clairement démontrée et que l’on ne peut envisager d’obtenir des résultats reproductibles sans une stricte standardisation des extraits » (3) Plus récemment, SACHIN A SHAH et coll. de l’université du Connecticut font remarquer (2) que le mécanisme sous-tendant les effets immunostimulants demeure, selon eux, peu clarifié. Mais ils notent ceci : quelques éléments font penser que la régulation de l’ARm du Facteur de Nécrose Tumorale-alpha (TNF-alpha), qui est stimulé par l’activité agoniste du récepteur cannabinoide (CB2 ), cible pour les Alkamides d’Echinacea... a un rôle dans ce mécanisme (8). LES INDICATIONS THERAPEUTIQUES Le domaine d’action est essentiellement celui d’une plante antivirale, antiinfectieuse, stimulante immunitaire et tonique... Nous allons partir des indications mises en exergue par le docteur J. M. MOREL, dans la banque de données “Hippocratus”... en mentionnant au passage l’utilisation homéopathique. Puis, nous évoquerons quelques études publiées à propos d’Echinacea... Les indications ainsi mises en évidence concernent donc (1) : - La prophylaxie et le traitement des infections grippales et septiques 8 - L’action immunostimulante, aussi bien en préventif (infections bactériennes, grippe, herpès, cystites, candidoses, etc.) qu’en curatif, en potentialisant les autres thérapeutiques - Le traitement local des retards de cicatrisation et des dermatites - Des indications homéopathiques Dans ce dernier domaine, les auteurs (11) mettent l’accent sur l’activité immunostimulante et anti-inflammatoire d’Echinacea, en dilution de 3 à 6 DH. Des concentrations plus élevées sont considérées comme ayant un effet immunosuppresseur. L’expérimentation pathogénétique, toujours en Homéopathie, a amené à indiquer Echinacea angustifolia ou Echinacea purpurea dans les tableaux suivants : - Infections graves ou suppurations, avec ou sans altération de l’état général, celles-ci pouvant se manifester sous la forme d’un épuisement avec somnolence, voire d’une confusion, de sensations de courbature... Un état fébrile peut être présent, avec des nausées, des sueurs froides, des douleurs diffuses (tête, abdomen) . Les excrétions sont plutôt fétides et, dans les processus locaux, une lymphangite est souvent associée... En résumé , du point de vue homéopathique, Echinacea est indiqué soit dans les suppurations cutanées (anthrax, phlegmon, furonculose..), soit dans des syndromes infectieux d’étiologie variée. On prescrit alors Echinacea en décimales basses, 3 à 6 DH, à raison de 20 gouttes trois fois par jour. ETUDES ET CONTROVERSES L’action d’Echinacea, en phytothérapie, avons-nous dit, a fait l’objet de bien des controverses, compte tenu des résultats contradictoires de différentes études : 9 Il n’est pas possible d’être exhaustif. Je voudrais simplement noter quelques études typiques de cette réalité, qui permettent de mieux mesurer la diversité des approches par rapport à un tel sujet. Mme Marjorie DUBOIS, analyse ainsi, dans un article daté du 25/02/2005, du magazine “Hippocratus”, une expérimentation très intéressante .Je cite l’essentiel de ses propos : Elle rapporte une étude réalisée en Israël auprès de 430 enfants, entre Novembre 2003 et Mars 2004, multicentrique, randomisée, en double aveugle, contrôlée versus placebo (5). 215 enfants ont reçu un mélange d’Echinacea Purpurea (parties aériennes) et d’Echinacea angustifolia (racines) de 50 mg/ml, de Propolis (50 mg/ml) et de Vitamine C (10 mg/ml ). La dose était différente, de 5 ml pour les 1-3 ans et de 7.5 ml pour les 4-5 ans, deux fois par jour. Elle était doublée en cas d’infection aiguë. Le groupe placebo recevait une préparation identique du point de vue de la couleur et du goût. Les résultats relevés dans le groupe ayant reçu du “chizukit” (nom donné à cette préparation) ont été très significatifs, en fonction des critères retenus : - diminution de 55% du nombre total d’infections des voies respiratoires, - diminution de 59% du nombre total de jours de maladie - et diminution de 43% du nombre d’enfants présentant plus d’une infection des voies respiratoires. Par enfant, on note également des baisses de 50% du nombre d’infections des voies respiratoires, de 45% de leur durée et de 58% du nombre de jours de maladie. Mme Marjorie DUBOIS fait cependant deux remarques : 1- Le résultat de cette étude est toutefois inférieur si l’on prend en compte certains critères secondaires: fièvre, rhinorrhée, toux, consommation d’antibiotiques et d’antipyrétiques, absences à la garderie et nombre des visites médicales. 10 2- Les auteurs concluent à l’efficacité de cette préparation pour réduire les infections respiratoires, mais des questions ont été posées, au moins sur le plan méthodologique, notamment par M.LAEKMAN, analyste, dans la revue Minerva (6) : Quel est, par exemple, sur le plan thérapeutique, l’apport respectif de chaque élément de cette composition ?...La composition de la Propolis utilisée était elle constante ? etc. avec cette conclusion : “Une étude similaire menée avec une préparation exclusivement à base d’Echinacea... apporterait des éléments supplémentaires” “Refroidissements courants”, “Rhumes ” et “infections des voies respiratoires supérieures” Les “coups de froid”, les “refroidissements courants”, les “rhumes” sont souvent associés à des infections des voies respiratoires supérieures associant, dans des proportions variables, de la rhinorrhée, de la fièvre, parfois de la toux etc. J’utiliserai d’ailleurs l’un ou l’autre de ces termes, sans m’attarder sur les détails de traduction par rapport aux mots utilisés, à ce sujet, dans la littérature étrangère, tels que “common cold “, ou “cold” (que l’on pourrait traduire par “rhumes”). On peut tout aussi bien parler de “refroidissements courants”... De toute façon, il s’agit, d’un point de vue pratique, d’une seule et même réalité. Une étude effectuée par L’Institut National des Maladies Infectieuses et Allergiques, aux Etats-Unis (2) a, en effet, montré que ce problème fréquent peut être provoqué par 200 types différents de virus, dont les rhinovirus et les coronavirus. L’efficacité curative d’Echinacea semble acquise, dans cette pathologie, pourvu que ce remède phytothérapique soit pris suffisamment tôt. C’est ce qui ressort, par exemple, d’une étude systématique, déjà initiée en 2000 (9) puis réactualisée en Novembre 2005, publiée dans “The Cochrane librairy” (7). Elle a été menée par K. Linde, B. Barrett, K. Wölkart, R. Bauer, D. Melchart. 11 Ces auteurs ont pris en compte 16 études randomisées, qui comparaient les effets de préparations ne contenant que de l’Echinacea, par rapport à du placebo, ou à l’absence de traitement, ou encore à d’autres thérapeutiques destinées à prévenir ou à traiter cette pathologie. Ils avaient écarté les études statistiques où Echinacea était prescrit avec d’autres substances phytothérapiques. Ces études permettaient, au total, d’inclure 22 statistiques. Les trois d’entre elles qui recherchaient les effets préventifs de la plante, n’ont pas permis de les objectiver. L’action curative précoce, par contre, était significative, par rapport au placebo, dans 9 statistiques .On ne la retrouvait que sous la forme d’une simple tendance dans 1 statistique et elle n’existait pas dans les 6 autres. Le docteur Michel TOURRASSE commente ainsi ces résultats, dans le magazine en ligne “Hippocratus”, le 22/02/2006 : “9 études sur 16 montrent que les extraits des parties aériennes d’Echinacea Purpurea peuvent réduire les infections respiratoires des adultes lorsqu’ils sont pris suffisamment tôt. Si l’efficacité curative semble acquise, l’efficacité préventive semble remise en question. Les préparations de cette plante sont largement utilisées dans certains pays d’Europe et en Amérique du Nord pour les refroidissements courants. Les auteurs montrent les effets positifs de l’extraction alcoolique et du jus pressé des parties aériennes des plantes, mais n’ont pu mettre en évidence une efficacité pour les autres formes galéniques”... Le docteur Klaus LINDE apporte cette précision très importante : ”Les consommateurs et les médecins doivent prendre conscience que l’efficacité dépend grandement de la partie de la plante utilisée, du mode de préparation et de la qualité des principes actifs contenus”. De plus, les résultats de ce type d’expérimentation peuvent, bien évidemment, varier aussi en fonction des posologies administrées aux patients. Ainsi, selon un travail publié en 2005 par Turner et coll., Echinacea Angustifolia n’a pas “d’effets cliniquement significatifs” dans les infections provoquées expérimentalement par inoculation de Rhinovirus (10)... 12 Mais, d’autres auteurs (2) posent à ce sujet, la question suivante : La dose choisie dans cette étude (900 mg/jour) n’était-elle pas trop faible pour être véritablement efficace ? D’après une monographie établie en 1999, par l’OMS, font-ils remarquer, la dose recommandée pour utiliser Echinacea Angustifolia est de 3 gr/jour, soit trois fois plus élevée que dans cette étude. LES DONNEES D’UNE META-ANALYSE RECENTE Le débat n’est décidément pas clos! Une méta-analyse publiée dans “THE LANCET”en juillet 2007 (2) aboutit à des conclusions plus favorables... Auteurs de l’étude et méthode : Elle a été pratiquée par les auteurs suivants, de l’Université du Connecticut, aux USA, section Pharmacie : Sachin A. SHAH, Stephen SANDER, C. Michael WHITE, Mike RINALDI, Craig I COLEMAN... Dans la même université, M. RINALDI appartient aussi au “Centre de Santé, Division des Maladies Infectieuses” de Farmington, et les autres auteurs à la “Division de l’Information des Médicaments” de Hartford. Ils font tout d’abord référence à la méta-analyse, citée précédemment, de MELCHHART et coll.(9), réactualisée par LINDE K et coll. (7). Ils précisent sur quels points leur travail diffère de celui de leurs prédécesseurs : Ils choisissent, ainsi, d’intégrer à leur étude les données concernant les infections provoquées expérimentalement par le Rhinovirus, et quelques statistiques où Echinacea est donné avec certains compléments. Ils ne retiennent pas le critère de “sévérité” de l’affection, dont ils estiment l’évaluation trop hétérogène dans les données disponibles. Cette méta-analyse a été effectuée à partir de 14 études, précisément, et a embrasé 1356 participants pour tester les effets d’Echinacea, pris en préventif, sur l’incidence de ce type de pathologie, et 1360 patients pour en mesurer l’action curative, lorsque la maladie est déclenchée . 13 Caractéristiques générales Les espèces suivantes d’Echinacea ont ainsi été testées : Il s’agit d’Echinacea Purpurea, dans sept études, d’Echinacea Angustifolia dans une étude... d’Echinacea Pallida dans une autre… d’une combinaison d’E. Purpurea et Angustifolia dans quatre autres.. Le type d’Echinacée n’est pas précisé, dans une seule étude. Par ailleurs, l’efficacité de la plante, en pédiatrie, a été évaluée par deux études. Cinq études utilisent “Echinaguard” ou bien “Echinacin” (il s’agit d’un extrait alcoolique d’Echinacea purpurea, produit par la société Madaus AG, à Cologne, en Allemagne) …trois études concernent les infections expérimentales par Rhinovirus.. ...et quatre, enfin, servent à mesurer l’activité d’Echinacea pris en association avec des compléments : selon les cas, il s’agit de Vitamine C, Propolis, Thym, Menthe poivrée, acide Citrique, Lemongrass (feuille), Menthe verte, Romarin (feuille), Eucalyptus, Fenouil (graine)... Les résultats ont été précisés à part, sur le plan statistique, dans des sous-groupes, en fonction de la présence ou de l’absence de ces produits... de même qu’avec “Echinacin” et “Echinaguard”. Liste des travaux concernés : Voici, à propos de ces travaux, les références de leurs auteurs, et quelques précisions utiles : 1 - Etude de TURNER et coll. (2005)... E. Angustifolia... 3 prises /jour, soit 900mg/jour... après inoculation de rhinovirus 39... durée : 7 jours avant l’inoculation et 5 jours après (10). 2 - COHEN et coll. (2004)... effectif pédiatrique... E Purpurea et E Angustifolia 14 ...étude de 12 semaines... adjonction de Vitamine C et de Propolis (5) ...étude évoquée précédemment.. 3 - SPERBER et coll. (2004) ...E. Purpurea, sous forme d’Echinaguard...2.5 ml, trois fois /jour... après inoculation de rhinovirus 39... durée : 7 jours avant l’inoculation et 5 jours après (12). 4 - TAYLOR et coll. (2003) ...E.Purpurea, effectif pédiatrique, posologie : 3.75 ml, deux fois/ jour pour les enfants de 2 à 5 ans et 5 ml deux fois / jour entre 6 et 11 ans - durée : 10 jours (13). 5 - BARRET et coll. (2002) ...E. Purpurea /E. Angustifolia... adjonction de Thym, Menthe poivrée, acide citrique... posologie : 6 gr un jour et 3gr les jours suivants...durée :10 jours (14). 6 - SCHULTEN et coll. (2001)... E.Purpurea, sous forme d’Echinacin... 5ml, deux fois /jour.. durée : depuis le premier signe du “coup de froid” jusqu’au dixième jour (15). 7 - TURNER et coll. (2000) ..Echinacea : type non spécifié... 300 mgr/ trois fois par jour.. après inoculation de rhinovirus 23... durée : 14 jours avant l’inoculation et 5 jours après (16). 8 - LINDENMUTH et LINDENMUTH (2000)….E.Purpurea / E.Angustifolia avec adjonction de Citronnelle (feuille), de Menthe verte.. 5 à 6 sachets de titre défini par jour, puis 5 /jour à partir du cinquième jour... durée de 12 semaines (17). 9 - GRIMM et MULLER (1999)...E.Purpurea, sous forme d’Echinacin... 4ml, deux fois/ jour ...durée:8 semaines (18). 10 - BERG (1998) ...Echinacea Purpurea sous forme d’Echinacin....8 ml / jour ...durée : 28 jours (19). 11 - MELCHART et coll. (1998)..E.Purpurea /E. Angustifolia ..50 gouttes deux fois / jour ...durée: 12 semaines ( 20). 12 - HOHEISEL et col. (1997) ...E.Purpurea, sous forme d’Echinaguard... 15 20 gouttes toutes les deux heures, dans de l’eau, le premier jour, puis trois fois / jour pendant neuf jours.... en commençant dès les premiers signes de la rhinite... durée: 10 jours (21). 13 - SCAGLIONE et LUND (1995) ...E.Purpurea...avec adjonction de Vitamine C, de Romarin (feuilles), d’Eucalyptus, de Fenouil (graines)... quatre comprimés par jour, équivalent à 100 mg/jour... prendre pendant la durée du rhume (22). 14 - BRAUNIG et KNICK (1993) ...E.Pallida ...90 gouttes équivalent à 900 mg par jour...durée : 8 à 10 jours (23). Les auteurs développent largement l’aspect statistique de leur travail : - Les critères d’inclusion : ils ont sélectionné des essais randomisés, contrôlés contre placebo - L’incidence des “refroidissements communs” (ou rhinites) a été rapportée comme une proportion de chances (“Odds Ratio” : “O R”), avec 95% CI. - La durée a été traitée comme une variable continue. Une “moyenne pondérée” a été calculée pour différencier la moyenne des jours de maladie dans le groupe “Echinacea” et celle du groupe témoin. Les auteurs ont utilisé la méthodologie de DerSimonian - Laird, pour calculer cet aspect (“WMD” : “Weighted Mean Difference”). - L’hétérogénéité statistique a été évaluée en utilisant le Q statistique (p<0.1, considéré comme significatif) etc. etc. Les résultats de cette méta-analyse sont les suivants : La prise d’Echinacea fait diminuer, en traitement préventif, les risques de présenter ce type fréquent de pathologie des voies aériennes supérieures, ”coups de froid”, rhumes etc., de 58% . S’il est administré en traitement curatif, le produit raccourcit la durée de l’affection, en moyenne, de 1.4 jours. 16 De même, des réductions significatives sont mises en évidence dans les sousgroupes de cette analyse, limités selon les cas à “Echinacin”, ”Echinaguard”, à l’utilisation concomitante d’un complément etc. Les auteurs notent également un fait intéressant : malgré les facteurs susceptibles d’influer sur l’efficacité des 3 espèces principales de cette plante (partie utilisée, origine géographique, période de l’année, doses administrées etc.), les données collectées dans cette méta-analyse suggèrent véritablement qu’Echinacea réduit l’incidence de ces infections - c’est son rôle préventif - et en diminue la durée -c’est son rôle curatif-... Mais ils rappellent, comme les autres auteurs, les réalités suivantes dont il faut demeurer conscient : plus de 800 produits contenant cette plante sont disponibles sur le marché, sous toutes sortes de présentations : comprimés, jus frais, teinture, etc. D’autres études doivent encore être effectuées (en contrôlant différents paramètres tels que la qualité des préparations etc.) pour que l’on puisse définir avec une précision plus grande les modalités thérapeutiques, et en particulier les posologies pour les différentes présentations. La revue de détail de cette méta-analyse fournit, d’ailleurs plusieurs exemples de posologies ... La posologie préconisée dans certains phytoconseils de la formation “Hippocratus”, est de 50 gouttes par jour pour la Teinture Mère, pour l’adulte ou l’adolescent, à diluer dans une boisson, et à prendre le matin... Des formules complexes sont également conseillées, comme la suivante dans le traitement des angines à répétition: Echinacea 0.2 gr , Cynorrhodon 0.25 gr qsp 2 gélules le matin avec Propolis (une capsule 250 mg) , 5 jours par semaine. Signalons également que cette substance est atoxique, si l’on excepte quelques situations particulières, où elle est contre-indiquée : Allergie aux astéracées, maladies évolutives telles que la tuberculose, les leucoses, les collagénoses, les maladies autoimmunes, la SEP, le SIDA. 17 CONCLUSION Il y a donc d’excellentes et de nombreuses raisons d’utiliser ce phytomédicament... Des cas précis, comme les deux évoqués au début de cette étude, m’en ont convaincu. Et, finalement, même si certains points sont encore à étudier, je trouve quand même que beaucoup de chemin a été parcouru, en ce domaine. 18 19 REFERENCES - 1 Hippocratus .Fiches plantes J Morel - 2 Evaluation of Echinacea for the prevention and treatment of the common cold: a méta-analysis. 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