Dossier cabotage - ShortSea : Bienvenue sur le site BP2S
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Dossier cabotage - ShortSea : Bienvenue sur le site BP2S
19 DOSSIER Bruno Saussier CABOTAGE Europe Les grandes compagnies investissent massivement France L’armement peu impliqué dans les échanges internationaux émissions Faute de texte réglementaire, le short-sea reste dans le gaz navigation Les marins étrangers soumis à de rudes conditions de travail Sables-d’Olonne Bon départ de la pierre ponce Sète Des cargaisons spécifiques entretien Christian Domini, de Maritima : « Investir dans des outils de niche » Paimpol L’Agence maritime de l’ouest, affréteur au cabotage Transport maritime côtier Le spécialiste de la desserte des îles du Morbihan ABCRM Le seul armateur français dans le vrac sec fluvio-maritime Vendredi 21 octobre 2011 20 21 22 27 29 29 30 31 31 32 UN DES PILIERS DES PORTS FRANÇAIS De certains vracs secs aux produits pétroliers, en passant par le feedering de conteneurs, grands et petits ports vivent en partie de trafics à courte et moyenne distances en Manche mer du Nord, en Méditerranée et dans les échanges avec la péninsule ibérique. Certains opérateurs, comme l’Agence maritime de l’ouest, en ont fait leurs fonds de commerce. Mais sans navires en propre. Dans un contexte très concurrentiel, où les taux de fret sont à des niveaux très bas, le pavillon français est quasiment absent. Les rares armateurs français qui occupent ce créneau, comme ABCRM, ne pourraient pas tenir sous pavillon national. Seuls certains trafics spécifiques, comme les biocarburants de Biomar (groupe Maritima), arrivent à défendre les couleurs tricolores. Tour d’horizon. 20 dossier cabotage Les grandes compagnies investissent massivement Europe Le norvégien Wilson Eurocarriers, actuellement leader européen du cabotage par petits navires (111 unités de moins de 7 000 tpl), continue à investir. Outre une série de 8 navires de 8 300 tpl ouvrant un nouveau segment de tonnage dans sa flotte dont le dernier, le Wilson Nanjing, est en achèvement au chantier chinois Yichang, la compagnie fait encore construire chez Shandong Baibuting 8 unités de 4 500 tpl dont le premier, le Wilson Farsund, est à flot. Carisbrooke Shipping, de Cowes (île de Wight), à la tête d’une soixantaine de navires, prendra incessamment livraison du Martina C., dernier d’une série de 16 navires de 8 000 tpl, construite depuis 2006 par le chantier chinois Jiangsu Yangzijiang. Ce même chantier se lance maintenant dans la construction de deux séries de 4 unités baptisées « Super Green », respectivement de 8 500 tpl et 10 000 tpl, qui, grâce entre autres à l’étrave révolutionnaire Groot Cross-Bow, conçue par l’architecte naval néerlandais Groot Ship Design, présenteront une consommation très inférieure à celle de navires équivalents (jusqu’à 30 % selon l’armateur). INTER INTER L’irlandais Arklow Shipping qui dispose déjà de 43 caboteurs en majorité très récents, continue d’agrandir sa flotte : 3 navires de 14 450 tpl sont en construction en Corée et 6 de 7 000 tpl chez Ferus Smit aux Pays-Bas. En Allemagne où les armateurs au cabotage sont très nombreux, il faut citer l’exemple de Briese Schiffahrts, de Leer, qui non content d’aligner une flotte de l’ordre de 120 navires (dont beaucoup aux noms en « BBC »), attend la livraison, d’ici 2012, de 14 navires de 8 000 tpl dont 11 en Chine et 3 en Bulgarie et de 5 de 3 000 tpl au Vietnam. Eric Houri Les grands armements européens de cabotage dont les navires fréquentent assidûment les ports français sont tous engagés dans le développement de leur flotte. Le norvégien Wilson Eurocarriers, actuellement leader européen du cabotage par petits navires fait construire chez Shandong Baibuting 8 unités de 4 500 tpl. Aux Pays-Bas, Spliethoff (Amsterdam) qui détient plus d’une centaine de navires avec ses filiales, a reçu 8 unités de 18 000 tpl en 2008-2010 et une nouvelle série de 6 de 12 500 tpl, débutée en 2010 avec le Florijngracht, est en construction en Chine. Autre grand néerlandais traditionnel, Wagenborg (Delfzijl) qui a en portefeuille quelque 175 unités, va continuer jusqu’en 2013 à recevoir du chantier Hudong Zhonghua les unités d’une interminable série de 25 navires de 17 500 tpl commencée en 2006 avec l’Amstelborg. Spliethoff et Wagenborg se partagent désormais entre le cabotage et le long cours. Flinter de Groningen compte aujourd’hui une cinquantaine de navires dont 24 construits depuis 2006 et en attend encore 3 en 2012 : le Flinter Tide (8 000 tpl), commandé en Chine, et les Flinter Rose et Flinter Ruby (5 500 tpl) au chantier indien Chowgule, de Goa. Parmi les derniers nés sous pavillon néerlandais, Canada Feeder Lines, JAMES FISHER : DU CABOTAGE AUX SERVICES` J ames Fisher & Sons est une vieille compagnie anglaise de cabotage fondée à Barrowin-Furness en 1847. Après avoir acquis P&O Tankships en 1996 et FT Everard en 2006, sa flotte compte aujourd’hui deux caboteurs pétroliers de 3 400 à 13 000 tpl, qui portent pour la plupart des noms en « Fisher » (Clyde Fisher, Cumbrian Fisher, Mersey Fisher…). Si elle reste une des principales compagnies britanniques de cabotage (8 millions de tonnes de produits raffinés transportées annuellement), James Fisher & Sons s’est lar- gement diversifié au point que l’activité de ses tankers ne représentait plus en 2010 que 27 % de son chiffre d’affaires total équivalent à 306 millions d’euros. Restant proche de son métier d’origine, la compagnie a pris en charge, dès les années 1980, la gérance technique des transports de combustibles nucléaires anglais. Elle assure aujourd’hui celle des Atlantic Osprey, Pacific Egret, Pacific Grebe, Pacific Heron et Pacific Pintail appartenant à Pacific Nuclear Transport Ltd ou à la Nuclear Decommissioning Authority. Mais depuis l’arrivée à sa présidence, début 2002, de Tim Harris, l’ancien patron de P&O Nedlloyd, c’est principalement hors de l’armement maritime que se sont déployées les diversifications. Ainsi, James Fisher fournit maintenant des prestations d’assistance à la Royal Navy, livre à l’industrie offshore toutes sortes de matériels (compresseurs, treuils, pompes…) en plus de l’apport de personnels spécialisés, vend des services d’ingénierie aux armateurs ou intervient dans l’industrie nu- de Groningen, un armement de cabotage contrairement à ce que sa raison sociale laisserait supposer, s’est constitué, en 3 ans seulement, une flotte de 12 navires de 6 500 à 10 000 tpl, tous issus du chantier Peters, de Kampen, qui en livrera encore 3 en 2012. Gérard CORNIER cléaire (inspection, mesures, démantèlement…). Sa filiale Fendercare Marine est l’un des principaux fournisseurs mondiaux de défenses (comme les fameuses défenses pneumatiques « Yokohama ») et de dispositifs d’amarrage. Sans oublier sa branche de sauvetage sous-marine qui a, par exemple, réussi à récupérer, en 2005, sains et saufs sept marins russes bloqués dans un mini-sousmarin à 190 mètres de profondeur au large de la péninsule de Kamtchatka, dans le Pacifique. G. C. I N GEN I ER I E F I NA NC I È R E R A M FI [email protected] 14 ANS D’EXPÉRIENCE ET DE SOLUTIONS POUR LE FINANCEMENT des : - NAVIRES DE COMMERCE ET PASSAGERS EN CRÉDIT BAIL FISCAL 16 B Quai F. Mitterrand 44200 NANTES - Tél. 02 51 70 89 28 Vendredi 21 octobre 2011 dossier cabotage 21 L’armement peu impliqué dans les échanges internationaux France En cabotage national « sec » (transports de vracs ou de marchandises diverses entre ports français, en l’occurrence, vers les îles), la flotte ne progresse pas en nombre de navires depuis des années, mais reste relativement jeune. Ces caboteurs sont toujours au nombre de cinq : le Molenez (326 tpl) du département du Finistère, géré par la Compagnie maritime Penn ar Bed, les Guédel 3 et Taillefer 3 (600 tpl) de Transport maritime côtier, de Vannes, le Casam IV (780 tpl) de la société Pajarola, exploité entre les Sables-d’Olonne et l’île d’Yeu, et le cimentier Capo Nero (2 780 tpl) opérant entre Nice et la Corse sous le pavillon de Someca Transport (Maritima). PEU DE CARGOS POLYVALENTS En cabotage international, hors services réguliers transmanche ou trans-Méditerranée, la seule compagnie exploitant des navires sous pavillon français est Louis Dreyfus Armateurs avec les rouliers City of Hamburg, Ciudad de Cadiz et Ville de Bordeaux. LDA a par ailleurs lancé, en septembre 2010, l’autoroute de la mer Montoir - Gijon qui doit recevoir en novembre le Norman Voyager sous pavillon français. Mais dans ces deux cas, il ne s’agit pas de cabotage « sec » classique mettant en jeu de petits vraquiers, rouliers ou cargos polyvalents si nombreux chez nos voisins. Depuis le départ du Bouguenais (4 800 tpl) en 2002 et de La Paimpolaise (5 100 tpl) en 2007, cette classe de navires a disparu de la flotte française. Pour trouver un armement français opérant dans ce segment du shipping avec ses propres navires, il n’y a actuellement qu’une seule adresse, celle d’Agency & Bulk Chartering Rhône-Méditerranée (ABCRM) (lire page 32) qui exploite ses quatre unités sous pavillon maltais : trois caboteurs fluviomaritimes entre les ports de la Saône et du Rhône et le bassin méditerranéen, les André-Michel 1 (1 613 tpl), Frelon (1 702 tpl) et Laguepe (1 775 tpl), et le cargo AM Larafale (4 950 tpl) sur la façade atlantique. L’acquisition, en août 2010, de ce navire, ex-néerlandais Ijsseldiep de l’armement Feederlines de Groningen, construit en 1998 à Waterhuizen (Pays-Bas), constitue le seul fait vraiment nouveau dans l’évolution du cabotage vu de France. Quelques entreprises comme l’Agence maritime de l’ouest (lire page Eric Houri À part dans le domaine du transport de produits pétroliers raffinés – quoique que 28 des 42 navires de moins de 20 000 tpl que compte cette flotte sont sous contrôle étranger –, l’armement français ne brille pas par son implication dans le cabotage. Parmi les cinq caboteurs de la flotte française, le « Casam IV » de la société Pajarola, exploité entre les Sables-d’Olonne et l’île d’Yeu. 31) et Arcelormittal Logistics France (lire page 28) opèrent également en cabotage international, mais ils ne sont pas propriétaires de flottes. Les opérateurs allemands, néerlandais, anglais ou norvégiens peuvent donc continuer à assurer pratiquement en exclusivité toute l’activité de cabotage international de nos ports. Et ce n’est pas rien puisqu’il s’agit de plus de la moitié de leur trafic. Gérard CORNIER FEEDERING AU CONTENEUR : UN RÉSEAU FRANÇAIS LIMITÉ L les toiles d’araignées qui font la force des grands ports nord-européens. Voici un inventaire de ces liaisons réalisé à partir des « schedules » (horaires) actuellement publiés. La presque totalité des services de feeders existant dans les ports est assurée par les trois principaux armements mondiaux du transport conteneurisé au bénéfice de leurs hubs principaux : Rotterdam pour Maersk, Anvers pour MSC et Le Havre pour CMA CGM. Ainsi, Maersk Line assure une navette hebdomadaire entre Montoir, Brest, Dunkerque et Rotterdam avec le Jessica B. (660 EVP) de la BG Freight Line basée à Rotterdam. La Mediterranean Shipping Company aligne actuellement sur un rythme hebdomadaire le Laura Schulte (1 740 EVP) entre Portbury (Bristol), Dunkerque et Anvers, le Jana (974 EVP) E. H. e feedering consiste à acheminer des conteneurs entre les hubs, ports d’escale des grands porte-conteneurs au long cours, et d’autres ports géographiquement proches qui ne sont pas directement touchés. Cette activité, qui met en œuvre, en général, des porte-conteneurs de petite taille, fait partie intégrante du cabotage. À cet égard, les ports français disposent d’un certain nombre de services, sans toutefois tisser Avec le « Dina Trader » qui tourne entre Bassens, Montoir, Brest et Le Havre, CMA CGM aligne un service régulier hebdomadaire. Vendredi 21 octobre 2011 entre Grangemouth, Anvers et Dunkerque, le Magellan Comet (735 EVP) entre Le Verdon, Montoir et Anvers et l’Aries (1 835 EVP) entre Montoir, Brest et Anvers. CMA CGM aligne deux services réguliers hebdomadaires : l’« Atlantic feeder » avec le Dina Trader (868 EVP) qui tourne entre Bassens, Montoir, Brest et Le Havre et le « West coast UK feeder » avec le Perseus J. (639 EVP) dont l’itinéraire embrasse Liverpool, Belfast, Dublin et Le Havre. On peut également citer le service hebdomadaire « Casa 4 » assuré par les OPS Hamburg (1 080 EVP) et Elite (1 008 EVP) vers le Maroc en coopération avec l’armement néerlandais Van Uden Maritime. La rotation couvre Anvers, Rotterdam, Dunkerque, Le Havre, Rouen, Casablanca et retour sur Anvers. Pour ce qui est de la façade méditerranéenne, outre les services vers l’Afrique du nord de CMA CGM, Marfret ou MSC au départ de Marseille est ou de Fos, il existe un service hebdo- madaire indépendant assuré par X-Press Feeders entre Fos et les ports espagnols (Barcelone et Tarragone notamment) avec les BF Maryam (500 EVP) et le Navigator (520 EVP). X-Press Feeders fait partie du groupe singapourien Sea Consortium, un des principaux armements de feedering dans le monde avec une soixantaine de navires. La dernière initiative en date concernant le feedering en conteneurs dans les ports français a été le lancement, le 17 février, de la Bayant Line (Bayonne Antwerp Line) créée par la société espagnole Elorza y Cia, de Bilbao. Il s’agissait d’un service à cadence hebdomadaire entre Bayonne et Anvers utilisant le Kalina (700 EVP). Il a dû s’arrêter en mai faute d’un remplissage suffisant. Malheureusement, des études de marché favorables ne font pas nécessairement le succès et il est toujours difficile de creuser un nouveau sillon dans un champ déjà labouré. G. C. 22 dossier cabotage Faute de texte réglementaire, le short-sea reste dans le gaz émissions Dans le gaz, Jean-Marie Millour et tous les promoteurs du short-sea en Europe y sont jusqu’au cou. « Le temps passe et aucun texte n’est encore prévu, déplore le responsable du Bureau de promotion du shortsea shipping (BP2S). Nous n’arrivons pas, ne serait-ce qu’à obtenir la nomination d’un coordinateur au niveau administratif. » L’enjeu ? Il est énorme. Au 1er janvier 2015, le taux de teneur en soufre des combustibles utilisés dans la zone ECA (Emission Control Area) Manche mer du Nord ne pourra pas dépasser 0,01 %. Comme il n’existe pas de fuel avec une teneur en soufre aussi faible, les armateurs n’ont pas d’autres solutions que d’utiliser du gas-oil, beaucoup plus cher. « Plus de 50 % jusqu’à 90 %, tonne Jean-Marie Millour, ce qui risque de rendre le maritime complètement dissuasif par rapport à la route. » Première solution pour les armateurs : utiliser des scrubbers pour nettoyer les fumées. Mais ces dispositifs volumineux et lourds ne sont pas forcément adaptés aux ferries en raison des risques de perte de stabilité. Autre problème : que faire de ce qui a été nettoyé. La législation autorise un rejet en mer mais c’est un non-sens écologique. S’il faut les évacuer au port, parce que la législation ne manquera pas un jour de l’exiger, rien n’est encore prévu pour cela. UNE NÉCESSAIRE VOLONTÉ POLITIQUE L’autre solution pour éviter une inflation des coûts du maritime, c’est le gaz naturel liquéfié (GNL). D’autant qu’il répond aux futures normes de rejet des oxydes d’azote en 2016, puis du CO2. Mais le gaz, ça fait peur et dans l’imaginaire collectif, y compris portuaire, ça rime avec explosion. Alors même que le GNL, à très basse température, ne représente aucun risque de ce type. Des dizaines de départements administratifs, compétents sur la mer ou la terre, vont donc avoir leur mot à dire avant que la première citerne de gaz ne puisse être construite dans un port. « Car si on sait faire des moteurs, des réservoirs et adapter un navire au gaz, aucun texte ne le prévoit comme combustible, explique Jean-Marie Millour. Le gaz, dans la législation française, on n’en parle uniquement comme marchandise. Alors comment fera-t-on pour souter ? On ira en Norvège ? » Dans ce pays, le GNL est déjà un combustible utilisé par les ferries. Mais en France, qu’il Jacques Le Meur Les nouvelles normes sur les émissions de soufre en Manche - mer du Nord vont augmenter substantiellement les coûts du maritime. Le gaz serait la solution mais rien n’est prêt sur le plan réglementaire. Certains ferries norvégiens fonctionnent déjà au gaz. Mais en France, aucun texte n’est encore prévu pour permettre par exemple leur avitaillement. s’agisse de soutage par la terre (réservoir ou camion) ou par la mer, via des barges à construire, c’est encore le désert. « Et sans texte réglementaire, personne ne se risquera à investir et aucun armateur ne se lancera», admet Jean-Marie Millour. Quelle formation pour l’équipage ? Le ferry devra-t-il déhaler pour souter à l’écart des habitations les plus proches du port ? Devra-t-il souter à vide ? Autant de questions qui exigent des réponses administratives. Et sans volonté politique, rien ne sera prêt fin 2014 ! « Si tout était lancé dès maintenant et qu’on travaillait d’arrache-pied d’ici là, c’est possible, mais on n’en est pas encore là. Plutôt au stade de se dire qu’il faut commencer de penser d’y penser…» Quand un député pose la question en avril, le gouvernement lui répond en quelques lignes en octobre que des études sont en cours… Et tous les débats autour du navire du futur, y compris l’argent mis sur la table dans le cadre du grand emprunt, se projettent à des échéances bien trop lointaines pour régler un problème d’actualité. Le BP2S réunit un groupe de travail sur le sujet depuis un an et pousse à ce que la redéfinition des projets européens (Marco Polo et Réseau transeuropéen de transport) intègrent cette urgence d’efficacité énergétique. Car ces nouvelles normes au nord posent de nombreuses questions. Les armateurs de Méditerranée, qui ont droit à des teneurs de 0,5 % jusqu’en 2020, pourraient bien débarquer en mer du Nord le jour où le marché se sera effondré. Car il en faut peu pour déstabiliser une ligne et la faire disparaître. « Il suffit d’un taux d’occupation qui descend de 10 % pour que la rentabilité s’effondre et que l’exploitation s’arrête », constate JeanMarie Millour. Et si le maritime, devenu trop cher, perdait un peu des 40 % de la part modale européenne qu’il occupe actuellement en tonnes-kilomètres (contre 45 % pour la route), il y aurait des centaines de milliers de camions en plus sur les routes. Les tenants, écolos de bonne foi souvent, de la baisse des émissions en seraient alors pour leurs frais ! Thibaud TEILLARD AUTOROUTES DE LA MER : L’ATLANTIQUE PERCE P romesse d’avenir pour les autoroutes de la mer. La ligne Montoir - Gijon, un an après son ouverture, affiche de bons coefficients de remplissage au-delà des espérances de son armateur LD Lines, avec 70 poids lourds par escale en moyenne. Certains jours, le navire est même complet avec 120 pièces de fret. De bons chiffres d’autant plus que la capacité en mètres linéaires et passagers a été augmentée en introduisant le Norman Asturias (2 250 mètres linéaires et 518 passagers) puis désormais le Norman Voyager, tous deux plus gros que le Norman Bridge du démarrage. Avec 14 000 poids lourds transportés en un an, la première autoroute de la mer bénéficiant d’aides publiques a fait ses preuves. Pour offrir une fréquence « autoroutière », un deuxième navire est donc espéré même si, en termes de coûts d’exploitation, on passerait alors à une autre échelle. D’autant que c’est la ligne qui prend seule le risque dans le cadre d’une enveloppe globale de subvention des États français et espagnol (15 millions d’euros de chaque côté). L’autre autoroute qui doit se créer dans ce même cadre est, quant à elle, toujours en gestation. La volonté politique semble néanmoins au rendez-vous, particulièrement côté espagnol dont les intérêts armatoriaux ne sont pas représentés jusqu’à présent sur la première liaison. Le service doit relier Montoir et Le Havre à Vigo sans que l’on ne sache encore si c’est le même navire qui fera la rotation. Cela semble improbable, vu que la ligne doit théoriquement être aussi poursuivie jusqu’à Algésiras. Le fond de cale serait le trafic Gefco (groupe PSA PeugeotCitroën) qui assure déjà l’essentiel de la ligne ro-ro existante Montoir - Vigo. Gefco a égale- ment des trafics entre Le Havre et l’Espagne. Le hic, jusqu’à présent, était que le titulaire de l’autoroute de la mer, Acciona Trasmediterranea, avait perdu le trafic Gefco au détriment de la CMHF. Un accord a été trouvé en janvier entre les deux armateurs mais la commission intergouvernementale doit encore le valider. Le démarrage d’une ligne « new look », type autoroute de la mer, n’est donc pas prévu avant l’été. Côté Méditerranée, le timing est encore plus lointain. Les dossiers présentés lors de l’appel à projets des gouvernements français, italien et maltais à l’été 2009 n’ont pas été retenus. Ils seront peut-être représentés mais seule la mise en place d’un écobonus européen (une aide directe au chargeur qui choisit la voie maritime plutôt qu’à l’armateur) semble susceptible de relancer le projet. T. T. Vendredi 21 octobre 2011 dossier cabotage 27 Les marins étrangers soumis à de rudes conditions de travail navigation Pour être compétitif, le cabotage international suppose l’utilisation de navires gérés de la manière la plus économique. Ce qui a pour corollaire des conditions de travail souvent très médiocres pour les marins. « Sur les petits caboteurs, on trouve souvent des équipages de 6-7 marins, c’est-à-dire l’effectif minimum de sécurité, constate François Caillou, coordinateur français d’ITF, le syndicat international des ouvriers du transport. Les gens n’arrêtent jamais de travailler. » Par petits caboteurs, on entend des navires de 80 à 100 mètres. Ces navires naviguent en général sous un pavillon de libre immatriculation. Les marins proviennent en général des Philippines, d’Inde ou des ex-pays de l’Est. Les petits caboteurs changent fréquemment de port, souvent tous les deux ou trois jours. En escale, l’ensemble de l’équipage participe aux opérations com- merciales. Dans ces conditions, François Caillou observe qu’il est très difficile d’observer les temps de repos règlementaires. « Les registres sont trafiqués. On colle les gens au repos alors qu’ils font des heures supplémentaires. » En mer, les marins ne se reposent guère. C’est même plutôt l’inverse avec l’obligation d’assurer la veille. Ce rythme de travail se traduit par une importante fatigue. D’où un incontestable problème de vigilance et un risque accru d’accidents. PEU DE PLAINTES L’amélioration des performances des navires tend à rendre le rythme de travail encore plus intensif. Aujourd’hui, les petits pétroliers disposent de pompes qui leur permettent d’effectuer le déchargement en quelques heures, là où il fallait auparavant deux jours. La durée des contrats d’embarquement constitue un autre sujet de préoccupation pour ITF. « Les marins sont déjà complètement harassés au bout de quatre mois de travail. Mais, d’après les règles internationales, ils peuvent passer jusqu’à un an à bord. Là, les mecs sont cuits. » François Caillou évoque des marins « largement exploités ». Mais il enregistre peu de plaintes. Et elles ne concernent jamais les conditions de travail mais des impayés de salaires. La situation semble meilleure sur les gros caboteurs. La bonne conduite des opérations commerciales nécessite en général des équipages d’une vingtaine de personnes. De ce fait, le nombre de marins dépasse l’effectif minimum de sécurité. Ce qui facilite le respect effectif des temps de repos. L’entrée en application de la nouvelle Convention du travail maritime devrait améliorer les Sophie Maréchal/Ouest/France Sous-effectif, temps de repos non-respectés, rythme de travail épuisant… Pour ITF, les marins naviguant au cabotage international en Europe sont « largement exploités ». La fatigue, les effectifs trop légers peuvent avoir des conséquences très graves. choses. Déjà, certains affréteurs se montrent attentifs à la question du temps de travail. C’est le cas au pétrole. « Ils ne tiennent pas à avoir des accidents », observe François Caillou. On note aussi une pression des assureurs, soucieux des risques qu’implique la fatigue excessive des équipages. Lors des congrès de P&I Clubs, le thème de la nécessaire réduction de la durée des contrats d’embarquement revient régulièrement. Olivier MELENNEC TRANSPORT MARITIME CÔTIER Le spécialiste du cabotage côtier et du fret inter-îles • Groix • Belle Ile • Ile d’Yeu Dakar • Conakry • Bissau Port de commerce - Pont de Kerino - 56000 Vannes - Tél : 02 97 40 76 62 - fax : 02 97 63 35 79 Vendredi 21 octobre 2011 28 dossier cabotage ArcelorMittal à Dunkerque dans la traînée de la crise Des navettes conteneurisées fin 2012 La crise de 2008-2009 a laissé une trace durable dans l’activité d’exportation à courte distance d’aciers plats au départ de Dunkerque. L’activité a été très faible en 2009, alors que le quai aux aciers chargeait couramment plus de 500 000 tonnes pour l’automobile et les divers transformateurs industriels, à destination du Royaume-Uni et de la péninsule ibérique principalement. La crise a été fatale au flux ferroviaire initié peu auparavant par Eurotunnel pour le Royaume-Uni. Le groupe a constaté une reprise en 2010, « confirmée en 2011 mais à des niveaux inférieurs aux meilleures années », indique François Jaecque, responsable logistique expédition d’ArcelorMittal Atlantique, un ensemble de quatre usines à chaud et à froid. Cette année, à la fin septembre, ce chargeur avait expédié 165 000 tonnes à destination du Royaume-Uni pour Northfleet, Boston et Suttenbridge, sur la Tamise ou à proximité, 63 000 tonnes pour l’Espagne et le Portugal (Bilbao, Mari, Sagunto, Setubal), 85 000 tonnes pour la Turquie, et environ 100 000 tonnes en trafic interne au groupe pour ses sites Fin 2012, une navette conteneurisée d’une capacité d’environ 200 EVP effectuera deux ou trois rotations hebdomadaires entre les ports de Caen et du Havre. « Nous travaillons beaucoup sur ce projet de mini short-sea très innovant », commente Gilles Peyrot, responsable de l’agence havraise de Logiseinne (CFT et TN), en charge de la commercialisation du service et de la commission de transport. En novembre sera menée l’enquête publique pour l’aménagement d’une plate-forme spécialisée à Caen, sous le viaduc de Calix. « Nous espérons pouvoir réaliser les travaux, d’un montant de 4 millions d’euros, au cours des deuxième et troisième trimestres 2012 », estime JeanMichel Sévin, directeur de PNA (Ports normands associés), l’autorité portuaire de Caen et Cherbourg, maître d’ouvrage de l’opération pour ces infrastructures. Sur cette plate-forme de 7 ha, 3 existent déjà. La mise en place des superstructures reviendra à la société d’exploitation composée de la CCIT de Le « Sea Riss », ici au chargement au quai aux aciers est affrété à temps pour une à deux rotations par semaine vers la Tamise. de Basse-Indre près de Nantes, Gand et Brême. Pour le Royaume-Uni et la Turquie il s’agit en grande part de tôles galvanisées pour l’automobile, un produit assez cher et fragile. Pour l’Espagne et le Portugal les produits sont plus répartis entre « coïls noirs » (bobines de tôles minces laminées à chaud) et produits revêtus. Pour l’inter-usine, il s’agit de brames ou de coïls noirs principalement. La majorité des lots est largement inférieure à 5 000 tonnes, la fréquence du service primant sur le taux de fret. Depuis plus de 15 ans, le sidérurgiste affrète à long terme le Sea Riss par durées de 1 à 2 ans, au néerlandais Amasus. Ce navire de 1 900 tonnes, équipé de berces pour accueillir les bobines, effectue une à deux rotations par semaine. ArcelorMittal Shipping basé à Anvers a également négocié des contrats d’affrètement avec Navero pour l’Espagne et le Portugal, et Intersee pour la Turquie. Bruno Saussier Principal atout pour les caboteurs : Saint-Malo assure quasi systématiquement un fret retour pour l’Angleterre. OBJECTIF : 15 000 EVP Autre point qui reste en suspens : les aides qui pourraient abonder le lancement de ce nouveau service. En attendant, Jean-Michel Sévin préfère souligner : « Si la consultation sous forme d’appel à manifestations d’intérêt a été lancée par PNA, après la convention de partenariat signée avec le port du Havre fin 2010, il faut surtout retenir la forte implication des partenaires privés. » L’objectif est d’atteindre 10 000 à 15 000 EVP la première année, sur un potentiel de 50 000 à 80 000 EVP que ne transporteraient plus les camions sur les routes et ponts normands. Richard GOASGUEN L’atout de la double opération Rouen Le bois, une filière à forte plus-value liales issues du groupe Pinault. « Et le port qui importe le plus, c’est Saint-Malo. » Chaque mois, entre 5 000 et 17 000 tonnes de bois sont ainsi débarquées sur les quais de la cité corsaire. La filière représente 100 000 tonnes annuelles, soit 200 000 m3, livrés en 65 à 70 escales. Une paille (6 %) sur les 2 millions de tonnes qui transitent par le port, mais un marché très rentable en terme de manutention. « En valeur de maind’œuvre, le bois représente 20 % de l’activité du port. La plus-value de la rupture de charge est très importante ». Caen, concessionnaire du port, et de Sogemar (groupe SofrinoSogena). Son montage est en cours. Concernant les moyens nautiques mis en œuvre, le choix reviendra à la CFT, dans le domaine de l’affrètement selon toutes vraisemblances. Alain SIMONEAU Saint-Malo L’arrivée du bois sur le port malouin remonte aux années 1965-1970. Ne trouvant pas chez les producteurs français des Vosges et du Jura de bois prédébité propre à la commercialisation, François Pinault se rapproche des Scandinaves et importe du bois coupé en sections bien définies. « Sa grande force a été de structurer l’offre et de standardiser le marché », résume Jean-Luc Winter, directeur de l’Agence maritime malouine. Quarante ans plus tard, la moitié des volumes français de bois importés le sont toujours par des fi- Le Havre - Caen Alain Simoneau aciers L’explication est simple : quand trois personnes suffisent à débarquer du vrac, il en faut quinze pour le bois. Si Saint-Malo traitait encore les grumes de bois exotique il y a peu, la filière a, elle, cessé depuis 6 ans avec le départ de la société Bois de SaintMalo pour Miniac-Morvan et son choix de privilégier le transport par conteneurs. Recentrées sur le bois résineux en provenance à part égale de Russie et de Scandinavie, les importations malouines se partagent aujourd’hui entre Silverwood (filiale du groupe Wolseley, ex-Pinault) pour 80 %, le belge Van Hoorebeke pour 15 %, et le finlandais Finforest pour 5 %. Filière d’avenir (Silverwood a récemment investi 7 millions d’euros dans sa chaîne de production), le bois fait pourtant l’objet de discussions récurrentes sur la concession portuaire. En cause, son occupation de près du quart des surfaces de stockage alors que le port doit parfois refuser des bateaux d’aliments pour bétail faute de place. Le problème pourrait être réglé en 2012 avec le déménagement des stocks de bois sur le nouveau quai Lamenais. Bruno SAUSSIER Rouen bénéficie d’une très longue tradition de cabotage : le port s’est, en effet, positionné dès avant la Seconde Guerre mondiale comme un acteur important des échanges avec l’Afrique du nord, la péninsule ibérique, les îles britanniques et la Baltique. Cette très bonne connaissance du cabotage a été renforcée avec le développement des trafics de céréales à l’exportation, ouvrant largement la porte aux possibilités de rechargement. MOINS DE VOYAGES À VIDE « L’objectif de l’armateur, c’est d’avoir des navires toujours pleins. Son casse-tête, limiter les voyages à vide. Recharger dans le même port est idéal », explique Lionel Taconet, courtier d’affrètement et agent maritime. Avec ses possibilités de sorties avec céréales, graines oléagineuses, ferraille, etc, le port de Rouen permet cette double opération. Pour optimiser ainsi les escales, il faut être particulièrement attentif et réactif. Chaque jour, les armateurs adressent leur relevé de positions et les dates de dis- ponibilités de leurs navires aux courtiers. Ceux-ci peuvent ainsi assembler un fret proposé et le navire disponible. Si cette double opération se pratique relativement facilement pour les navires secs, elle est beaucoup plus complexe à réaliser avec les navires citernes, dont les spécificités ne permettent pas d’embarquer n’importe quel produit. L’une des entreprises de l’agglomération rouennaise, Vallourec-Manesmann, a, elle aussi, opté pour l’utilisation du transport maritime à courte distance. Face à des difficultés de transport ferroviaire il y a quelques années, le responsable logistique de Vallourec a pris cette option. Le dispositif est aujourd’hui parfaitement rôdé. « Nous arrivons à coordonner l’arrivée de billettes d’acier en provenance du Rhin (Duisbourg) et le rechargement de tubes à l’export », souligne Marcel Marais, président de l’Union rouennaise d’acconage. En 2009, le volume de marchandises au cabotage (tous types, toutes tailles de navires) représentait 81 % du trafic global du trafic portuaire rouennais. Jean-Claude CORNIER Vendredi 21 octobre 2011 dossier cabotage 29 Bon départ de la pierre ponce Sables-d’Olonne Aux Sables-d’Olonne, le trafic sablier a représenté 44 % du tonnage 2010 et les céréales 30 %. Depuis 2010, quelques milliers de tonnes de pierre ponce se débarquent aussi sur place. Ces 8 500 tonnes importées l’an dernier pèsent cependant peu dans le bilan final de La Cabaude qui avoisine les 900 000 tonnes. Mais ce type flux illustre les nombreux petits frets qui confortent le port dans sa course vers le million de tonnes. « 3 000 tonnes par navire, c’est tout à fait cohérent avec nos besoins pour la fabrication de nos nouveaux parpaings à base de pierre ponce », relève-t-on chez l’importateur Vendée Matériaux. « On ne trouve pas suffisamment cette roche volcanique chez nous, c’est pourquoi, nous nous sommes tournés vers la Turquie. Le matériau vient de Cappadoce », note Daniel Robin, directeur général de l’activité béton chez Vendée Matériaux. Selon l’entreprise, cette pierre présente beaucoup d’avantages. La transformation du matériau s’effectue dans les mêmes machines que les parpaings classiques, sans avoir à ajouter ni sable ni gravier. « Il est plus isolant que le parpaing classique et plus léger. Ergonomiquement, c’est plus facile à poser pour le maçon. Et la pierre ponce s’inscrit bien dans la démarche des bâtiments basse consommation. » Pour Vendée matériaux, le recours à la voie maritime offre un bon bilan carbone par rapport à un transport terrestre. Ces importations ont de fortes chances de se pérenniser aux Sables car le parpaing haut de gamme en pierre ponce a pris un bon départ. CORK PLYMOUTH POOLE Jean-Marie LE PROVOST PORTSMOUTH CHERBOURG ROSCOFF Jean-Marie Le Provost ST MALO SANTANDER CAEN / Ouistreham BILBAO En 2010, 138 mouvements de cargos ont été comptabilisés aux Sables-d’Olonne. Des cargaisons spécifiques Sète Depuis le début septembre, un accord sanitaire a été trouvé entre le port de Sète et le gouvernement d’Ankara (Turquie) pour l’export de jeunes taureaux. « C’est un gros débouché », admet Antoine Jourde, le patron de Delom portuaire qui traite ce trafic, en partenariat avec des armements syriens. Dernièrement, les rotations se sont multipliées, et les navires sont à poste 3 à 4 jours par semaine. Sète, Casablanca, Agadir au Maroc, ou Sète, Oran, Ténès, Alger, parfois même jusqu’à Béjaïa et Bizerte en Tunisie, « tous les pays sont servis selon les demandes et les besoins en bateaux sont importants », explique Antoine Jourde. Le port maintient ainsi son statut de premier port européen en matière d’export de bétail. Les navires embarquent de 900 à 2 000 bêtes, mais seuls ceux pour la Turquie ne font qu’un touché en direct. Coté hydrocarbures, c’est l’armement français BiomarMaritima qui assure les charge- ments à Sète des 3 000 tonnes d’Emag (diester) produit par les oléagineux triturés de l’usine sétoise de Saipol, pour avitailler les usines de Fos et de Lavera de Total, « et de temps en temps BP », précise Patrick Moalic, le commandant du Tatiana B, qui navigue sous pavillon français. Six à sept heures de navigation nocturne, ou cinq heures pour les citernes de Port-la-Nouvelle, quand l’équipage (7 hommes) met cap au sud-ouest. Même si le trafic représente en moyenne un à deux touchés à Sète : difficile de parler de rotations régulières. « Nous n’avons pas de date fixes, explique Patrick Moalic. Nous ne venons que lorsque nous avons reçu un ordre de Paris, à la suite d’une commande des pétroliers. Du coup, on reste parfois en attente au mouillage quand on arrive et que le poste de chargement est occupé par un céréalier. Le second poste à quai prévu à Sète permettra de fluidifier les escales. » La différence est dans le voyage Au cœur des régions de l’Europe maritime, sur des navires à l’avant-garde du confort et de la sécurité des passagers, à bord d’une compagnie française engagée dans la défense de l’environnement marin… Aujourd’hui avec Brittany Ferries, acteur majeur du transport maritime français, voyagez autrement. Hélène SCHEFFER www.brittanyferries.com Vendredi 21 octobre 2011 BRITTANY AP INSTIT 133x330 L_Marin.indd 1 04/10/11 16:08 30 dossier cabotage Christian Domini, de Maritima : « Investir dans des outils de niche » entretien Directeur général de Maritima à Port-de-Bouc, Christian Domini détaille la stratégie maritime du groupe havrais CFT. Someca arme un navire qui transporte du ciment fluidifié en utilisant les moyens du bord pour la manutention. C’est typiquement ce qui intéresse le groupe qui, tant dans le domaine maritime que fluvial, cherche des métiers de niche qui nécessitent des outils spécifiques et spécialisés dans lesquels nous pouvons investir. Ainsi, dans le fluvial, nous n’allons pas chercher à investir dans du matériel basique pour nous retrouver, dans les céréales ou le vrac sec, face à des artisans qui vivent à bord de leur bateau et sont donc forcément moins chers, mais dans des outils spécialisés : barges pour conteneurs, voitures, produits chimiques, déchets et ciment… “ emploie 70 marins et exploite quatre petits pétroliers avitailleurs principalement à Marseille - Fos, les Cap Camargue, Cap Sicié, Cap Pinède et Cap Aiguades. Biomar, spécialisée dans le transport de biocarburants, emploie 35 marins à bord des Tatiana B et Florence B, affrétés par Diester Industries. Le premier est exploité en Méditerranée, entre Sète, Port-la-Nouvelle, Lavera, Gênes, Livourne et Vasto, dans l’Adriatique. Le second tourne en Atlantique, de la zone ARA (Anvers - Rotterdam Amsterdam) jusqu’à l’Espagne. Reste notre dernière filiale, CBS, Channel Bunker Service, qui exploite le Cap Méjean entre Le Havre et Dunkerque avec une vingtaine de marins. Des marchés très concurrentiels ? Le biocarburant est un marché qui demande du matériel spécifique, presque dédié. Les contrats sont à moyen et à long termes. Dans l’avitaillement pétrolier, tout dépend du contexte économique local. Après avoir beaucoup souffert, nous constatons un redémarrage des volumes à Fos, notamment grâce aux escales au terminal à conteneurs. Pour le Cap Méjean de CBS, notre seul navire armé au Rif, nous essayons seulement de limiter la casse ! Sur son marché Manche - mer du Nord, les taux de fret sont entre 4 300 et 5 000 euros par jour. À ce prix-là, même au second registre, c’est impossible de gagner de l’argent. Les pétroliers veulent réduire au maximum les coûts. Que représente l’activité maritime de CFT ? Avec le Capo Nero de Someca, qui emploie 18 marins, nous avons désormais huit navires sous pavillon français au sein de quatre sociétés. Maritima, en plus de la vingtaine de sédentaires basés à Port-deBouc pour définir et coordonner la politique maritime du groupe, ” Thibaud Teillard Votre maison mère, la Compagnie fluviale de transport, vient de racheter Someca Transports. Pourquoi un armement pétrolier s’intéresse-t-il au ciment ? « Dans les produits pétroliers et chimiques, les taux d’affrètement actuels – à leur valeur plancher – interdisent purement et simplement le pavillon français si on veut amortir le matériel. » Avez-vous des ambitions dans le cabotage méditerranéen ? Le cabotage sous pavillon français, c’est impossible ? Dans les produits pétroliers et chimiques, les taux d’affrètement actuels – à leur valeur plancher – interdisent purement et simplement le pavillon français si on veut amortir le matériel. Tous les armements souffrent car, depuis la crise de 2008, il y a une grande quantité de matériel disponible alors que les volumes diminuent. Pour faire des plus longues distances, il faut savoir charger des lots de 5 000 à 10 000 tonnes. Et si on augmente la volumétrie des navires, on change de métier. On se retrouverait alors face à une concurrence très intense. Le monde maritime a changé en quelques années. Le transport routier est confronté aux mêmes problèmes : les Français font face au cabotage de camions qui ne sont pas soumis aux mêmes règles sociales. Par exemple ? Rien qu’autour de l’étang de Berre, nous avions des clients qui ont disparu, comme le chimiste Cabot qui a fermé son usine il y a 2 ans, ou la centrale EDF de Martigues-Ponteau qui fonctionnait au fuel et se reconvertit au gaz naturel. Globalement, il y a de moins en moins de manutention de produits entre les raffineries et les dépôts. Les pétroliers veulent réduire au maximum les coûts. Thibaud Teillard La fermeture de la raffinerie LyondellBasell, c’est une mauvaise nouvelle pour vous ? Les « Cap Pinède » et « Cap Aiguades », deux des quatre navires de Maritima opérés au départ des raffineries du golfe de Fos. C’est un client qui, derrière Total, Exxon et Ineos, représente tout de même 7 à 8 % de notre chiffre d’affaires. La raffinerie est en contrat avec Sea-Tankers pour sortir des produits de son port privé, à la Pointe, et nous venions compléter l’offre du FS Camille (NDLR : le navire de Sea-Tankers affrété par la Compagnie de distribution des hydrocarbures, la filiale commerciale de LyondellBasell). Marseille - Fos est-il un port de soutage attractif pour les armateurs ? Tout dépend, en termes de prix, des volumes qu’ils achètent. Les atouts de la place, par rapport à d’autres ports méditerranéens, c’est d’offrir une très grande diversité de produits. Et une offre importante : nos quatre navires et le FS Camille représentent 15 000 à 16 000 tonnes de volumes disponibles par jour. Votre groupe, CFT, a choisi d’investir dans Fluxel, la société qui a repris les terminaux pétroliers de Fos - Lavera et dont vous êtes désormais administrateur. Pourquoi ? Nous sommes son premier client en nombre d’escales. Désormais, nous avons accès à l’information dès sa source et nous pouvons participer au développement de l’outil. Fluxel est gérée par une équipe très compétente dirigée par Michel Peronnet. Le dialogue social y est désormais permanent. Je suis très confiant. Propos recueillis par Thibaud TEILLARD Vendredi 21 octobre 2011 dossier cabotage 31 L’Agence maritime de l’ouest, affréteur au cabotage Paimpol Basée à Paimpol, cette société bientôt centenaire a longtemps armé des caboteurs. Aujourd’hui, elle a pour activité principale la commission de transport. Elle travaille avec des armements du nord de l’Europe. remorquage et les travaux maritimes. Elle traite annuellement entre 4 et 5 millions de tonnes de marchandises. UNE VINGTAINE DE GRANDS COMPTES Dans le domaine du cabotage, le « range » de l’AMO, son rayon d’action, s’étend à toute l’Europe, de la Baltique à la mer Noire, à la côte ouest de l’Afrique et à la côte est des Amériques. La société travaille avec des armements néerlandais, allemands et danois, son principal partenaire étant le néerlandais Vertom. « Nous disposons ainsi d’une flotte structurelle d’une cinquantaine de navires de 1 000 à 20 000 tonnes. » La société paimpolaise opère aussi une ligne régulière conventionnelle entre le port de Rochefort et le Maroc, en association avec le groupe Bolloré. L’affrètement d’opportunité d’un navire permet d’assurer une rotation par mois. Une vingtaine de grands comptes font régulièrement confiance à l’AMO, en France, en Europe et au Maghreb. « Nous partageons avec eux une vision à long terme. Ce sont des clients que nous gardons longtemps. Nous jouons sur notre flexibilité et notre capacité d’adaptation. Il ne faut jamais dire non à un client mais exécuter. » La crise de 2008 a durement touché le marché du cabotage. Elle s’est traduite par une chute des taux de fret et une surcapacité en tonnage. Cependant, Patrick Garnier discerne une embellie. « Depuis quelques mois, le marché se reprend. On devrait retrouver le niveau de 2006-2007 vers le milieu 2012. » Cette embellie est variable suivant les secteurs géographiques. « Si l’on prend l’agroalimentaire en mer Noire, les volumes ont Olivier Melennec À Paimpol, impossible de ne pas remarquer le siège de l’Agence maritime de l’ouest. Sa raison sociale s’étale en grandes lettres bleues sur la façade du bâtiment situé quai de Kernoa. Mais les activités de la société débordent largement le cadre local. « Nous restons à Paimpol parce que c’est notre siège originel, indique Patrick Garnier, le PDG de l’Agence maritime de l’ouest. Mais le gros de notre clientèle se trouve à Paris, en Belgique et en Méditerranée. » L’AMO fêtera son centenaire en 2012. Sa vocation première était l’armement au cabotage. Une activité qui a cessé dans le vrac sec dans les années 1990. Jusqu’en 2007, elle armait La Paimpolaise, un navire roulier et transport de colis lourds. Avec 12 collaborateurs, la société exerce aujourd’hui principalement le métier de commissionnaire de transport. Ses activités sont axées sur le vrac sec, le fret conventionnel, les colis lourds, le Pour Patrick Garnier, « il ne faut jamais dire non à un client. » augmenté de 100 % et les taux de fret de 50 % en un an, entre la mi-2010 et la mi-2011. » Hormis le bornage, c’est-àdire le trafic entre les îles et le continent, il n’existe pratiquement plus aujourd’hui d’armements français au cabotage en vrac sec ou en conventionnel. Une situation que regrette Patrick Garnier. « La mer est compétitive au-delà de 500 km à condition qu’il y ait un hinterland assez proche. » Olivier MELENNEC Le spécialiste de la desserte des îles du Morbihan Transport maritime côtier C’est l’un des derniers armements français de cabotage côtier. À Vannes, TMC exploite deux navires et tient bon le cap. Sur le quai du port de commerce de Vannes, les canalisations en ciment voisinent avec les parpaings, les bonbonnes de gaz et les bottes de foin. Chez Transport maritime côtier (TMC), le maître mot, c’est « l’adaptation ». Faut-il y voir la clé de la pérennité de cette société ? « Des armements au cabotage côtier, il n’y en a plus beaucoup en France », re- marque Fabien Dulon, le directeur d’exploitation. Transport maritime côtier dessert les îles à partir de Vannes, principalement Belle-Île mais aussi Groix et Yeu. Trois rotations par semaine sont assurées vers Belle-Île. La création de l’armement remonte à 1996, quand Hubert O’Neill, son fondateur, avait racheté le caboteur Taillefer 2 à la société belliloise vant. Tous deux ont été construits par le chantier Merré, de Nort-surErdre (Loire-Atlantique). Ces navires sont parfaitement adaptés au cabotage avec leur cale parallélipédique. Grâce à un tirant d’eau étudié, ils ne sont pas tributaires à l’excès des conditions de marée tout en restant marins. « Ce sont des « bellilemax, plaisante Fabien Dulon. L’élément dimensionnant pour nous, c’est la porte-écluse du port de Palais. » Servibat. En 2009, Hubert O’Neill a passé la main. TMC est rentré dans le giron de la Maritime nantaise, filiale de la Compagnie nationale de navigation. L’armement dispose de deux caboteurs récents, des sisterships, longs de 40 mètres et d’une capacité de 400 tonnes. Fin 2009, le Guédel 3 a rejoint dans la flotte de TMC le Taillefer 3, mis en service 5 ans aupara- TMC DOUZE MARINS Transport Maritime Côtier arme deux navires, dont le « Guedel 3 », ici dans le port du Palais, à Belle-Ile. Vendredi 21 octobre 2011 L’effectif embarqué est de cinq marins, l’armement employant au total 12 marins. « L’amplitude des horaires est relativement forte. La contrepartie, c’est qu’il n’y a pas d’activité le week-end. » On compte aussi 4 salariés à terre à Vannes, 3 autres à Belle-Île. En 2010, le chiffre d’affaires s’est élevé à 3 millions d’euros pour un trafic total de 48 000 tonnes. L’activité s’exerce dans deux domaines, les marchandises diverses et le vrac. Concernant les marchandises diverses, on assure chez TMC que les rapports sont « bons » avec le service public. « Il y a une vraie complémentarité acceptée par le service public et le conseil général. Il y a beaucoup de marchandises qu’un bateau mixte ne peut pas prendre. » Le vrac consiste essentiellement en matériaux de construction, sable et gravier. « Nous suivons les chantiers, indique Fabien Dulon. Il faut être très souple. Il nous arrive d’aller prendre des matériaux au départ de Saint-Nazaire. L’activité dure toute l’année, avec une petite coupure au mois d’août quand les chantiers s’arrêtent. » La société développe également des services à terre. À Belle-Île, elle assure les livraisons grâce à une flotte de deux camions de 19 tonnes et d’une camionnette. TMC s’est également lancée dans la messagerie. L’activité n’est pas appelée à connaître un développement exponentiel. Cela n’exclut pas la possibilité de trouver de nouveaux trafics. « Nous essayons de valoriser le voyage retour, souligne Fabien Dulon. Depuis juillet 2011, nous transportons les bennes à déchets de Belle-Île. Auparavant, 7 ou 8 camions voyageaient en permanence vers le continent. Ce trafic représentera entre 2 500 et 3 000 tonnes par an. » O. M. 32 dossier cabotage Le seul armateur français dans le vrac sec fluvio-maritime ABCRM Sur l’un des marchés les plus concurrentiels du cabotage – le fluviomaritime –, un armateur français se bat et se développe. Agency & Bulk Chartering Rhône-Méditerranée (ABCRM) est né en mai 2010 pour devenir la branche maritime de la Société métallurgique de l’ouest (SMO), basée à Nantes. Elle-même s’est lancée, en 2004, dans l’exploitation de navires en achetant un premier caboteur fluvio-maritime. Elle en compte désormais trois de 1 600 à 1 800 tpl, les André-Michel 1, Frelon et Laguepe, exploités en Méditerranée et sur le bassin Rhône - Saône. En août 2010, ABCRM a étoffé sa flotte en achetant un navire plus gros (5 020 tpl), baptisé AM Larafale, et exploité en Atlantique. Le premier métier de ces navires, c’est de transporter de la ferraille à l’export pour le compte d’un client fidèle, Guy Dauphin n° 2 français en ferrailles-métaux. Les navires chargent no- tamment à Salaise, au sud de Lyon, ou en Basse-Loire pour l’AM Larafale, vers la péninsule ibérique ou le bassin méditerranéen (Algérie, Italie, Grèce, Turquie principalement). Reste ensuite à trouver des frets retour ce qui, sur le Rhône, n’est pas toujours facile. « Sur le bassin rhodanien, les frets sont déséquilibrés avec moins d’import que d’export », confirme Christopher Ackland qui dirige les activités commerciales d’ABCRM depuis Port-Saint-Louis-duRhône, près de Fos-sur-Mer. L’armement transporte quelque 300 000 tonnes par an de vracs divers (ferrailles, ciment, aciers, minerais, céréales) mais aussi des colis lourds. Les trois navires fluviomaritimes fréquentent principalement les ports de la région lyonnaise mais remontent parfois en pleine Bourgogne. Le record ? Saint-Usage, à plus de 200 km au nord de Lyon, aux portes du Jura. Sur le bassin rhodanien, un Thibaud Teillard Avec quatre navires, Agency & Bulk Chartering Rhône-Méditerranée transporte 300 000 tonnes par an sur le bassin rhodanien et en Atlantique. L’ « André-Michel 1 », ici en transit vers le Rhône par le chenal de Port-Saint-Louis, est armé avec sept marins. marché très concurrentiel sur lequel on retrouve une poignée d’armateurs (turc, lituanien et allemand), ABCRM a fait le choix d’un pavillon européen (maltais). Ses quatre navires sont armés avec 29 marins, gérés par une agence de recrutement en Ukraine. ABCRM emploie de son côté sept salariés à PortSaint-Louis et à Nantes où elle est également agent maritime et courtier d’affrètement. ABCRM n’en a pas fini avec le développement de sa flotte et pourrait avoir des projets pour 2012. Thibaud TEILLARD marines-editions.com En librairie ou sur notre site Dictionnaire de la dissuasion Par Philippe Wodka-Gallien De A comme Atomique, Armes de destruction massive ou ASMP, à Z comme Zeldovich ou Zones dénucléarisées, en passant par CEA, Jacques Chirac, Enola Gay, Fat Man, France, Greenpeace, Hades, Hiroshima, Kissinger, Laser Méga Joule, Missile M51, sous-marin Nautilus, Plateau d’Abion, Rafale, Le Redoutable, Pompidou, Sarkozy, Tchernobyl, Traité de non prolifération, etc., le Dictionnaire de la dissuasion rassemble, en plus de 300 entrées, tout ce qu’il faut savoir pour comprendre le rôle et le fonctionnement de la doctrine de dissuasion nucléaire depuis la guerre froide et jusqu’à nos jours. Une clé importante pour l’analyse du monde moderne. 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