Livret d`activités pratiques

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Livret d`activités pratiques
La peine de mort
est con damnée à disparaître
Réf : SF 11 EDH 29- Document externe - septembre 2011
Activités
Pratiques
Édito
Lorsque nous intervenons auprès des jeunes, nous constatons qu’ils sont souvent, a
priori, plutôt pour la peine de mort. Ce livret propose des activités et des pistes pour
changer leur regard.
« La peine de mort est condamnée à disparaître », son abolition totale semble de fait
inéluctable, même s’il faut attendre encore un peu. Mais rien n’est acquis, un fait divers
sordide relance l’idée que la peine de mort pour les violeurs d’enfants par exemple, et
seulement pour eux. Mais si l’on exécute de nouveau les violeurs d’enfants, demain ce
seront les violeurs, ou les assassins de vieillards, ou les malades mentaux… Où mettre
le curseur ? Comment tenir compte des particularités régionales, sociales, ethniques,
philosophiques, religieuses ? On serait exécuté ici pour une relation hors mariage, là pour
des crimes atroces en série ?
On avance souvent l’idée que la peine de mort serait dissuasive. Or, elle ne sert pas à
dissuader ; en outre, elle est irréversible, alors que les sociétés et les personnes qui la
prononcent sont faillibles par essence. Il est impossible alors de la considérer comme un
châtiment équitable et surtout elle maintient la société qui la pratique dans l’engrenage
de la violence qu’elle veut combattre.
Ce sont ces pistes, ainsi que cinq thèmes de réflexion, que nous vous proposons pour
un travail sur la peine capitale et le combat pour son abolition avec des jeunes, à partir
de 14 ans.
Comprendre, analyser, discuter, aller au-delà des discours convenus,
c’est amener ces jeunes à penser par eux-mêmes
sur un sujet essentiel pour les droits humains.
Les membres de la
commission éducation aux droits humains
Sommaire
Illustrations couverture :
Visuels campagne de communication
sur l’abolition de la peine de mort:
Chaise électrique, peloton d’exécution
et décapitation.
© TBWA \ Paris
2 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
• Peine de mort
et Amnesty
p
3
• Vers l’abolitionnisme
p
4
• Cinq thèmes de réflexion
p
7
• Peine de mort
et risques
p 10
• Peine de mort
et discrimination
p 12
• Peine de mort
et secret
p 14
• Peine de mort
et mineurs délinquants
p 16
• Peine de mort
et répression
p 18
• Parler avec les jeunes
p 20
• Pistes pédagogiques
p 22
• Matériel pédagogique
p 30
Réf : SF 11 EDH 29
Peine de mort
et Amnesty International
Une première évolution
Dès l’origine, Amnesty International s’est opposée à la peine de mort requise contre des prisonniers d’opinion.
Progressivement sa position a évolué et en 1977, le mandat et les statuts ont été amendés dans le sens d’une
opposition inconditionnelle à la peine de mort, quels que soient les prisonniers concernés.
En effet, la peine de mort est la négation absolue de la dignité et de la valeur de l’être humain, telles que
proclamées dans le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme, texte adopté par les Nations
unies en 1948 et sur lequel Amnesty International fonde son action. Pour demander l’abolition de la peine de
mort, Amnesty International se base sur les droits inaliénables énoncés dans l’article 3 de ce texte
« Tout individu a droit à la vie et à la sûreté de sa personne »
et dans l’article 5
« Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » .
Dans l’immense majorité des cas, la peine de mort est utilisée contre des personnes appartenant à des
minorités, tant ethniques que religieuses, ou appliquée aux classes les plus pauvres et les plus défavorisées
de la société. Elle est fréquemment utilisée comme moyen de répression politique. Dans certains pays, on
continue d’exécuter des personnes malades mentales, ou encore mineures au moment des faits, au mépris
des recommandations internationales.
Pour une abolition totale, inconditionnelle et universelle
En 1977, à Stockholm, lors d’une conférence internationale, Amnesty International a déclaré
« Être totalement et inconditionnellement opposée à la peine de mort »,
et à invité :
« Tous les gouvernements à abolir immédiatement et totalement la peine de mort » et
« Les Nations unies à déclarer sans ambiguïté que la peine de mort est contraire au droit international ».
Depuis, Amnesty International mène une campagne permanente pour l’abolition inconditionnelle et universelle
de la peine de mort, quel que soit le motif de la condamnation, en intervenant pour des condamnés à mort
qui risquent d’être exécutés, en agissant auprès des États non abolitionnistes pour les engager à introduire
l’abolition dans leurs lois et aussi pour les engager à ratifier le traité des Nations unies intitulé : Deuxième
protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la
peine de mort, qui ne peut être juridiquement dénoncé. Autrement dit, une fois ce traité ratifié, il n’est plus
possible de revenir en arrière, c’est-à-dire de réintroduire la peine de mort dans une loi.
Dans l’attente de l’abolition définitive, Amnesty International appelle à commuer toutes les condamnations à
mort, à décréter un moratoire sur les exécutions, à respecter les normes internationales restreignant le champ
d’application de la peine capitale et à appliquer les normes d’équité les plus rigoureuses dans les cas d’espèce
passibles de la peine de mort.
En s’opposant à la peine capitale, Amnesty International ne cherche en aucune façon à minimiser ou à
excuser les crimes pour lesquels la condamnation à mort a été prononcée. Si c’était le cas, cela voudrait dire
que les pays ayant aboli la peine de mort font l’apologie des crimes violents, ce qui n’a évidemment aucun
sens. Engagée au quotidien dans un combat en faveur des victimes d’atteintes aux droits humains, Amnesty
International ne cherche pas à nier la réalité des souffrances des familles, pour lesquelles elle éprouve la plus
grande compassion. Toutefois, du fait de son caractère irréversible et cruel, la peine de mort est incompatible
avec les valeurs du monde moderne et civilisé, et constitue une réponse aussi inappropriée qu’inacceptable
aux crimes violents.
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Peine de mort
vers l’abolitionnisme...
Jusqu’au XVIIIème siècle, différentes formes de peines de mort existent, dont la gradation dans l’exécution va de
la mort immédiate, comme par une décapitation réussie, à une mort lente et atroce, comme sur un pal ou une
croix. L’exécution se déroule alors selon des rituels dépendant à la fois du type de crime, de la position sociale
du condamné et de celle de la victime éventuelle.
Les idées évoluent.
La cruauté du supplice, les erreurs judiciaires, l’inutilité de ce châtiment font réagir. En 1764, un jeune Italien,
Cesare Beccaria, publie un petit livre sur le fonctionnement du système judiciaire, intitulé Traité des délits
et des peines. S’élevant contre la torture et la peine de mort, il pose le principe d’un droit pénal fondé sur la
seule utilité sociale, principe qui servira de base théorique au droit pénal moderne. Au sujet de la peine de
mort, Beccaria écrit « l’expérience des siècles montre que le dernier supplice n’a jamais empêché les hommes
résolus de nuire à la société ». Dans une grande partie de l’Europe, l’ouvrage de Beccaria rencontre un succès
prodigieux Les idées vont peu à peu évoluer, une ère nouvelle commence. Provoqués par les philosophes des
Lumières, des débats s’ouvrent, ils seront l’amorce du premier mouvement abolitionniste.
Déjà, en 1786, le grand-duc Léopold promulgue un Code pénal qui supprime complètement la peine de mort
en Toscane. Puis, en 1846, le territoire américain du Michigan, devenu par la suite un État, est la première
juridiction du monde à abolir définitivement la peine de mort pour homicide volontaire. Très progressivement,
dans nombre de pays qui appliquent ces châtiments, la torture va être abandonnée et la peine de mort ne sera
plus que la privation immédiate de la vie. Dans certains pays d’Europe, la peine de mort tombe en désuétude.
La dernière exécution à Monaco remonte à 1847, au Liechtenstein à 1785, au Portugal à 1849. En Afrique,
où l’abolition est une idée nouvelle, il faut citer les îles du Cap-Vert où la dernière exécution eut lieu en 1835.
Le débat continue
Au cours du XIXème siècle, le nombre de crimes passibles de la peine de mort diminue, ce qui entraîne une
diminution du nombre d’exécutions. Certains chefs d’État accordent toujours la grâce, d’autres jamais. Des
parlementaires réclament l’abolition de la peine de mort, sans succès. Les opposants voient la peine capitale
comme utile à la société par son effet dissuasif et aussi comme un moyen de protection de cette dernière visà-vis des criminels.
Au début du XXème siècle, trois pays ont aboli de manière définitive la peine capitale pour tous les crimes. Il s’agit
du Costa-Rica, de Saint-Marin et du Vénézuela.
A l’issue de la Deuxième guerre mondiale, estimant trop vague la Charte des Nations unies, la communauté
internationale décide qu’il est nécessaire de préciser les droits fondamentaux des individus. Le 10 décembre
1948, à Paris, l’Assemblée générale des Nations unies, adopte la Déclaration universelle des droits de l’homme
qui proclame les articles 3 et 5 (voir page précédente)
L’idée de l’abolition progresse.
En 1966, l’Assemblée générale des Nations unies adopte le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques (PIDCP) qui précise dans son article 6, « une sentence de mort ne peut être prononcée que pour les
crimes les plus graves ». En 1971, la même Assemblée adopte une résolution affirmant qu’il est souhaitable
que la peine de mort soit abolie dans tous les pays.
A cette époque, onze pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes.
De son côté, à mesure qu’elle poursuit ses enquêtes sur les atteintes aux droits de l’homme, Amnesty
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International découvre la réalité du traitement infligé aux prisonniers dans le monde, la torture, les conditions
de détention inhumaines, le processus de liquidation physique dont la peine de mort est le moyen « légal ». En
1977, l’organisation adopte la déclaration de Stockholm : elle « s’engage à œuvrer pour l’abolition universelle
de la peine de mort. » La même année, l’Assemblée générale des Nations unies réaffirme la résolution de
1971. En France, Hamida Djandoubi sera la dernière personne guillotinée avant l’abolition adoptée en 1981.
En revanche, aux États-Unis d’Amérique, après un moratoire non-officiel sur les exécutions de près de 10 ans,
Gary Gilmore est fusillé en Utah.
A la fin de cette année 1977, dans le monde, 16 pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes. Ce
nombre va rapidement progresser.
Le temps des traités internationaux abolitionnistes est arrivé.
En Europe
En Europe, l’abolition continue sa progression sous l’impulsion du Conseil de l’Europe (1). En 1983 est adopté
le Protocole n° 6 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (2)
concernant l’abolition de la peine de mort. En 1989, l’abolition de la peine de mort constitue une condition
d’adhésion au Conseil de l’Europe de tous les nouveaux États membres.
Dans le monde, 38 pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes.
Au niveau international
En 1984, le Conseil économique et social des Nations unies approuve les Garanties pour la protection des
droits des personnes passibles de la peine de mort. Il y est précisé « la peine de mort ne peut être imposée
que pour les crimes les plus graves, étant entendu qu’il s’agira au moins de crimes intentionnels ayant des
conséquences fatales ou d’autres conséquences extrêmement graves ». En 1989, l’Assemblée générale des
Nations unies adopte et proclame le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif
aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, qui prévoit l’abolition totale de la peine capitale.
Sur le continent américain
En 1990, est adopté à San José, Costa Rica, le Protocole à la Convention américaine relative aux droits de
l’homme traitant de l’abolition de la peine de mort, qui prévoit l’abolition totale de la peine de mort. Cette annéelà, dix pays abolissent la peine de mort portant à 46 le nombre de pays abolitionnistes pour tous les crimes.
Désormais, la pression internationale peut se développer.
Lors du sommet du Conseil de l’Europe tenu en octobre 1997, les Chefs de gouvernement, y compris ceux de
l’ensemble des États membres de l’Union européenne (UE), lancent un appel en faveur de l’abolition universelle
de la peine de mort. En juin 1998, « considérant que l’abolition de la peine de mort contribue au renforcement
de la dignité humaine et au développement progressif des droits de l’homme », l’Union européenne adopte les
Orientations pour la politique de l’UE à l’égard des Pays tiers en ce qui concerne la peine de mort. Désormais,
« l’Union européenne abordera, s’il y a lieu, la question de la peine de mort dans le cadre de son dialogue avec
les pays tiers (3) ».
Dans le monde, 68 pays sont désormais complètement abolitionnistes
Avancée remarquable, le statut de la Cour pénale internationale adopté en 1998 exclut la peine de mort des
châtiments que cette juridiction est habilitée à prononcer bien qu’elle soit compétente pour poursuivre les
responsables de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre lorsque les juridictions nationales ne
sont pas capables ou n’ont pas la volonté de le faire. L’Europe continue sur le chemin de l’abolition.
En 2002, le Conseil de l’Europe adopte le Protocole n°13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances c’est à dire y
compris en temps de guerre ou de danger imminent de guerre. Entré en vigueur le 1er décembre 2009, le traité
de Lisbonne dispose dans son Article 6 : « L’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés
dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne […], laquelle a la même valeur juridique que
les traités ». ». Cette Charte, adoptée à Nice en 2000, dispose dans son chapitre 1, article 2 : « Nul ne peut être
condamné à la peine de mort, ni exécuté ».
(1) : Le Conseil de l’Europe ne doit pas être confondu avec l’Union européenne : les deux organisations sont tout à fait distinctes.
Néanmoins, les 27 États membres de l’Union européenne font également partie des 47 membres du Conseil de l’Europe.
(2) : Souvent appelée Convention européenne des droits de l’homme.
(3) : Pays tiers : pays non membres de l’Union européenne.
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Dans le monde, 95 pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes.
Des coalitions abolitionnistes sont créées. En mai 2002, la Coalition mondiale contre la peine de mort est
fondée à Rome. Amnesty International est membre fondateur. Elle inspirera des coalitions nationales contre la
peine de mort dans plusieurs pays. En 2003, elle instaure le 10 octobre comme Journée mondiale contre la
peine de mort. A Hong Kong, en 2006, le réseau asiatique contre la peine de mort (ADPAN) est créé; ce réseau
indépendant interrégional se consacre à l’abolition de la peine de mort en Asie et en Océanie.
L’ONU intensifie son action. Le 15 novembre 2007, l’Assemblée générale, dont la composition est universelle,
adopte une résolution qui fera date dans l’histoire. Présentée par 87 États du monde entier, elle engage tous
les États qui maintiennent la peine de mort à « instituer un moratoire sur les exécutions en vue de l’abolition
de la peine de mort ». Le résultat du vote donne 104 voix pour, 54 contre, 29 abstentions, 5 pays n’ayant pas
participé. Cette résolution sera réaffirmée en 2008, puis en 2010, à chaque fois avec un nombre de voix accru.
Alors que l’Europe est sur le point de devenir un continent sans peine de mort (en 2010, seul le Bélarus
continuait d’appliquer la peine de mort), l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe crée, en juin 2009,
le statut de Partenaire pour la Démocratie en vue d’établir une coopération institutionnelle avec les parlements
des États non membres des régions voisines. Dans sa demande d’acquérir un tel statut, le parlement requérant
doit, entre autres, « s’engager à agir et à encourager les autorités compétentes à introduire un moratoire sur les
exécutions et à abolir la peine capitale ». Le parlement marocain est le premier à obtenir ce statut, le 21 juin
2011.
Puis, le 7 octobre 2010, à Madrid, le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, crée
une Commission internationale contre la peine de mort dont l’objectif principal est de parvenir, en 2015, à un
moratoire sur les exécutions capitales dans les pays qui pratiquent encore la peine de mort. L’objectif à terme
est de parvenir à l’abolition totale de la peine de mort.
Malgré ces progrès remarquables il reste beaucoup à faire
Fin 2010, 96 pays avaient aboli la peine de mort pour tous les crimes, au total 139 n’appliquaient plus ce
châtiment. En un peu moins de 40 ans, l’évolution est remarquable et semble bien irréversible. Toutefois,
toujours fin 2010, 58 pays maintenaient la peine capitale ; beaucoup de ces pays sont les plus peuplés
du monde, aussi c’est la moitié de la population mondiale qui continue de vivre avec le risque de subir ce
châtiment cruel inhumain et dégradant.
Il reste donc encore du chemin à parcourir pour atteindre l’objectif d’une abolition universelle de la peine de
mort.
Pays abolitionnistes et non abolitionnistes au 31 décembre 2010
Plus des deux tiers des pays du monde ont maintenant aboli la peine de mort en droit ou en pratique.
Les chiffres sont les suivants :
• Pays abolitionnistes pour tous les crimes : 96
• Pays abolitionnistes pour les crimes de droit commun seulement : 9
• Pays abolitionnistes en pratique : 34
• Total des pays abolitionnistes en droit ou en pratique : 139
• Total des pays non abolitionnistes : 58
Mais qu’est ce que la peine de mort ?
La peine de mort est une condamnation résultant d’une décision de justice rendue par un tribunal
régulièrement constitué. Elle est prévue par le code pénal de l’État qui l’applique. Son application,
l’exécution, est menée par des fonctionnaires en conformité aux lois de l’État. Homicide volontaire
et prémédité, c’est un assassinat étatique.
Remarque : Il ne faut pas confondre peine de mort et exécution sommaire ou extrajudiciaire.
L’exécution extrajudiciaire consiste à priver arbitrairement une personne de sa vie, en l’absence
de tout jugement d’un tribunal compétent, indépendant ou de tout recours. Elle est strictement
interdite par le Droit International.
Dictionnaire pratique du droit humanitaire de Mme F. Bouchet-Saulnier
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Peine de mort
5 thèmes de réflexion...
Peine de mort et risques
L’argument le plus irréfutable contre l’emploi de la peine de mort est le risque d’exécuter un innocent. Ce risque
n’est pas négligeable et la peine de mort étant par nature irréversible, elle exclut de rendre justice au condamné
si son innocence est reconnue ultérieurement. C’est un argument évident et assez fort pour susciter le doute
chez quelques partisans de la peine de mort.
Bien sûr un prisonnier exécuté ne récidivera pas. Mais, la thèse de la prévention de la récidive est irrecevable.
En effet, la peine de mort ne peut, par nature, être appliquée qu’à des personnes qui sont déjà emprisonnées,
et donc déjà hors d’état de nuire. Il est inutile de s’en protéger davantage en les exécutant.
En outre, il est impossible de savoir si les personnes exécutées auraient ou non récidivé. L’exécution consiste
à ôter la vie à un prisonnier afin de l’empêcher de commettre d’hypothétiques crimes qui, dans bien des cas,
n’auraient jamais été commis. Une politique d’exécutions visant à empêcher la récidive repose sur l’hypothèse
que l’État peut déterminer avec précision quels prisonniers vont recommencer ; sinon, il doit accepter l’idée
d’exécuter un grand nombre de personnes qui n’auraient pas récidivé. L’exécution prive en outre le condamné
de toute chance de réinsertion.
La prévention de la récidive passe par le réexamen des procédures de libération conditionnelle. Or, une politique
réelle de prévention demande beaucoup de moyens et de personnel, surtout pour des gens ayant commis des
crimes graves. C’est à la société de réfléchir sur les enjeux des différentes politiques visant à prévenir la récidive.
Tous les systèmes judiciaires étant imparfaits, il y a toujours eu des personnes condamnées à mort, alors
qu’elles étaient innocentes. D’autant que, dans la plupart des pays où existe encore un fort soutien à la peine
de mort, la peine capitale peut être prononcée au terme de procès inéquitables qui reposent souvent sur des
« aveux » obtenus sous la torture. Même dans des États se considérant comme respectueux du droit à un
procès équitable, la faillibilité inhérente à la justice est renforcée par la discrimination et l’erreur.
Le risque d’exécuter un innocent est avéré, mais ce châtiment présente d’autres risques comme celui d’aggraver
les violences. Par exemple, si le vol à main armée est sanctionné par la peine capitale, le voleur n’a rien à
perdre s’il tue des gens en tentant de s’échapper. Des trafiquants confrontés à une possible peine de mort
peuvent être plus enclins à tuer pour éviter d’être capturés, augmentant ainsi le danger auquel sont confrontés
les responsables de l’application de la loi et les passants.
Un risque existe aussi, dans le cadre des exécutions par injections létales, que des membres des professions
médicales soient amenés à tuer au nom de l’État, en violation des principes de l’éthique médicale reconnus de
longue date.
La seule réponse appropriée pour éviter de tels risques est l’abolition de la peine capitale dans les codes
pénaux.
Peine de mort et discrimination
La peine capitale est un châtiment fondamentalement injuste et arbitraire. Son utilisation est intrinsèquement
discriminatoire.
L’expérience montre que, pour un même crime, voire pour un crime plus grave, certaines personnes sont
épargnées tandis que d’autres sont exécutées. Les personnes exécutées ne sont pas toujours seulement celles
qui ont commis les pires crimes ; ce sont aussi parfois celles qui étaient trop pauvres pour engager des avocats
compétents ou qui ont eu affaire à des procureurs ou à des juges particulièrement sévères.
Tous les systèmes de droit pénal sont exposés à la discrimination et à l’erreur. Le lieu géographique, la recherche
de l’intérêt personnel, l’opportunisme, les décisions discrétionnaires et l’opinion publique prédominante
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peuvent influencer une procédure judiciaire à tous les stades, depuis l’interpellation jusqu’à la décision ultime
d’accorder ou non la clémence. Le plus souvent, dans la réalité de l’application de la peine de mort, ce n’est pas
uniquement en fonction de la nature d’un crime que l’on décide d’exécuter un individu ou de l’épargner : les
moyens financiers, l’origine sociale et ethnique ou l’opinion politique de l’accusé sont également déterminants.
Ainsi, aux États-Unis d’Amérique, l’importance accordée à la couleur de la peau, en particulier celle de la victime,
est l’aspect qui frappe le plus lorsque l’on étudie dans quelle mesure la discrimination a des répercussions sur
les condamnations à mort.
Amnesty International et d’autres organisations ont également noté des cas et pratiques de discriminations
basées sur d’autres facteurs tels que le genre, la sexualité, l’orientation sexuelle, la religion, les castes et
d’autres formes de hiérarchie sociale.
Les crimes pouvant entraîner la peine de mort diffèrent également selon les pays. L’adultère n’est nullement un
délit dans bon nombre de pays, mais il est puni de mort par lapidation dans certains pays de droit musulman.
Le trafic de drogue est puni de prison dans la plupart des États, mais de mort dans des pays d’Asie et du Moyen
orient. Parfois, même, la peine capitale est obligatoirement prononcée pour la détention d’une certaine quantité
de drogue illicite. Ainsi, spécificité de la peine de mort, des différences parfois infimes ont des conséquences
extrêmes : la vie ou la mort. En ce sens, la peine capitale n’est pas un châtiment comme les autres.
Peine de mort et secret
En maintenant le secret autour des exécutions, les gouvernements font en sorte que le public ne puisse pas
débattre des véritables problèmes liés à la peine de mort. En outre, il semble que certains gouvernements ne
tiennent pas à ce que la communauté internationale s’intéresse de trop près à la façon dont la peine capitale
est appliquée chez eux.
Dans de nombreux pays, la peine de mort est classée secret d’État et les détails concernant son application
sont gardés secrets. Seul un petit nombre de pays fournit des statistiques officielles sur l’application de la peine
de mort. Au Bélarus, en Chine et en Mongolie, la peine de mort est toujours classée « secret d’État ». Il n’y a que
peu d’informations sur la Corée du Nord, la Malaisie et Singapour. Au Viêt-Nam, en janvier 2004, le Premier
ministre a signé une loi interdisant le signalement et la diffusion des statistiques sur la peine de mort.
Les exécutions elles-mêmes sont souvent faites en secret. Dans plusieurs pays – notamment le Bélarus, le
Botswana, l’Égypte et le Japon – ni les condamnés à mort, ni leurs familles, ni leurs avocats ne sont prévenus
de la date de l’exécution. En outre, au Bélarus, au Botswana et au Viêt-Nam, les corps des prisonniers exécutés
ne sont pas rendus à leurs familles pour des funérailles. En Corée du Nord, les exécutions se déroulent
généralement en secret ; toutefois, en 2010 des exécutions auraient eu lieu en public afin de servir d’exemple.
De nombreux gouvernements soutiennent activement l’idée que la peine de mort est essentielle pour réduire
la criminalité. Pour que ce soit le cas, il faudrait que les délinquants potentiels sachent parfaitement à l’avance
qu’ils risquent d’être exécutés. Or, ces mêmes gouvernements qui, d’un côté, recourent à la peine de mort, font
tout, d’un autre côté, pour masquer son utilisation.
En 2006, le Rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires
a demandé que soit levé le secret entourant le recours à la peine capitale, indiquant qu’un débat public
satisfaisant ne pourrait avoir lieu que si les gouvernements divulguaient tous les détails concernant : a) le
nombre de personnes condamnées à mort ; b) le nombre d’exécutions […]. En supprimant ce débat et en
empêchant les gens de s’informer, les autorités privent la population du droit à une discussion éclairée. Or,
la gravité de ce châtiment exige qu’il soit porté à l’attention de la population et soumis au débat public. Les
exécutions ne doivent pas être masquées par une conspiration du silence.
Peine de mort et mineurs délinquants
« Le consensus écrasant qui prévaut au niveau international contre l’application de la peine de mort aux
mineurs délinquants est fondé sur la reconnaissance du fait que les jeunes, en raison de leur immaturité,
peuvent ne pas appréhender pleinement les conséquences de leurs actes, et qu’ils doivent par conséquent
bénéficier de sanctions moins sévères que les adultes. Plus important encore, ce consensus reflète la ferme
conviction que les jeunes sont plus susceptibles d’évoluer, et qu’ils ont donc une plus grande capacité de
réinsertion que les adultes. » Mary Robinson, ancienne haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations
unies, 2002 (Amnesty International, ACT 50/004/2003).
Le droit international interdit formellement la condamnation à mort de mineurs délinquants. L’article 6(5) du
PIDCP dispose qu’ « une sentence de mort ne peut être imposée pour des crimes commis par des personnes
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âgées de moins de 18 ans et ne peut être exécutée contre des femmes enceintes ». Le Comité des droits de
l’homme de l’ONU considère l’interdiction d’exécuter des enfants comme une règle du droit international
coutumier, qui ne peut donc pas faire l’objet d’une réserve d’un État devenant partie au PIDCP. L’article 37(a)
de la Convention relative aux droits de l’enfant dispose : « Ni la peine capitale ni l’emprisonnement à vie sans
possibilité de libération ne doivent être prononcés pour les infractions commises par des personnes âgées de
moins de dix-huit ans. »
Tous les États du monde ont ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant, à l’exception des États-Unis
d’Amérique et de la Somalie, seulement signataires.
En 2010, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Iran, le Pakistan, le Soudan et le Yémen ont condamné à
la peine capitale des personnes âgées de moins de 18 ans à l’époque où les crimes ont été perpétrés. Début
2010, l’Iran a exécuté deux mineurs délinquants. Dans ce pays, l’âge de la majorité est de 15 ans pour les
garçons et de 9 ans pour les filles, ce qui signifie que des enfants peuvent être condamnés à mort bien avant
l’âge de 18 ans. Un autre problème vient que dans certains pays l’absence d’état civil empêche des jeunes de
prouver qu’ils étaient mineurs au moment des faits qui leur sont reprochés. On trouve de tels cas au Soudan,
Pakistan, Yémen.
Certes, les exécutions de mineurs délinquants sont peu nombreuses par rapport au nombre total d’exécutions
signalées dans le monde, mais là n’est pas la question. L’important est de savoir si les États qui y ont recours
ont réellement la volonté de respecter les normes internationales.
Peine de mort et répression
En tant que moyen de répression, la peine de mort est odieuse quand elle sert à écraser l’opposition politique,
et illusoire lorsqu’elle est invoquée comme moyen de protection contre le crime.
La peine capitale a été et reste un moyen de répression politique, utilisé pour faire taire à jamais les opposants
ou pour éliminer les personnes « gênantes » sur le plan politique. Des milliers de personnes exécutées sous un
gouvernement voient leur innocence reconnue sous le gouvernement suivant.
Comme moyen de répression contre le terrorisme, la peine de mort est un leurre. Jamais, nulle part, la menace
de la peine de mort n’a arrêté le terrorisme, ni le crime politique. Pourquoi la menace de la peine de mort feraitelle reculer un terroriste qui, dans l’action, met souvent en jeu sa vie ? Quel peut être l’effet dissuasif de la peine
de mort sur un terroriste qui décide de « se faire sauter » avec sa bombe pour supprimer d’autres vies ? Et
pourquoi reculerait-il, sachant que son exécution peut en faire un martyr dont la mémoire deviendra un point
de ralliement pour son groupe ?
La peine de mort est sans effet pour réprimer la criminalité. Toutes les études ont conclu qu’il n’existe aucun
lien significatif entre la peine de mort et la criminalité. La conclusion finale de ces études indique que la courbe
de la criminalité suit celle des conditions sociales et économiques d’un pays. L’exécution de la peine de mort
ne réduit pas plus le nombre de crimes que l’abolition ne l’accroît.
En outre, il ne faut pas croire que les personnes qui commettent un crime aussi grave que le meurtre agissent
après avoir calculé de façon rationnelle les conséquences de leur geste. Les meurtres sont souvent commis à
des moments où l’émotion prend le pas sur la raison ou sous l’influence de la drogue ou de l’alcool. Certains
auteurs de crimes violents sont très instables ou souffrent de maladie mentale. Dans tous ces cas, il serait vain
d’attendre de la peine de mort qu’elle joue un rôle dissuasif. Quant à ceux qui commettent des crimes avec
préméditation, ils peuvent toujours décider d’agir en dépit des risques dans l’espoir de ne pas être pris. Dans
ce cas, la meilleure solution pour les en dissuader est d’accroître leur probabilité d’être découverts, arrêtés et
condamnés.
Tant que la peine capitale restera considérée comme une forme légitime de châtiment, le risque d’une
application abusive pour des motifs politiques perdurera. Mais, de toute façon, en toutes circonstances, elle
restera une forme de répression violant les droits les plus fondamentaux de l’homme.
Les cinq thèmes qui viennent d’être développés sont illustrés
dans les pages suivantes par des citations et des exemples
qui pour la plupart peuvent être trouvés sur le site : www.amnesty.org/fr
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 9
Peine de mort
et risques...
Textes et déclarations
« Écoutez la voix de la justice et de la raison ; elle nous crie que les jugements humains ne sont jamais assez
certains pour que la société puisse donner la mort à un homme condamné par d’autres hommes sujets à
l’erreur ».
Robespierre à l’Assemblée nationale constituante - 30 mai 1791
Le projet de code pénal abolissant la peine de mort, présenté par Louis Michel de Saint-Fargeau, sera rejeté et
Robespierre se rangera à la volonté du peuple qui réclamait le maintien de la peine de mort mais sans les tortures.
« Je persisterai à demander l’abolition de la peine de mort tant qu’on ne m’aura pas prouvé l’infaillibilité des
jugements humains ».
La Fayette - Chambre des Députés, séance du 17 août 1830
« La peine de mort elle-même comporte bien entendu de nombreux risques, par exemple le risque d’exécuter
un innocent ».
Juge Stephen Breyer, Cour suprême des États-Unis - 2008
Des condamnés à mort innocentés...vivants !
De tout temps des prisonniers ont été exécutés pour des crimes qu’ils n’avaient pas commis. Toutefois
les systèmes judiciaires sont réticents à reconnaître leur erreur, ce qui explique le peu de cas recensés.
Par contre, on connaît de nombreux cas de condamnés à mort innocentés avant d’être exécutés.
• Tanzanie. En 2006, remise en liberté de Hassan Mohamed Mtepeka condamné à mort en 2004
pour meurtre. La Cour d’appel a conclu que sa condamnation reposait très largement sur des
éléments circonstanciels qui ne prouvaient pas indéniablement sa culpabilité.
Amnesty International - ACT 50/002/2007
• Chine. En avril 2005, remise en liberté de She Xianglin condamné à mort pour le meurtre de sa
femme en 1994. Sa femme était en prison, elle en est sortie en 2005 !
Amnesty International - ASA 17/046/2006
• Jamaïque. Carl McHarg est sorti du quartier des condamnés à mort en juin 2007, après avoir été
acquitté en appel.
AP
• Myanmar. En décembre 2003, remise en liberté de Than Tun condamné à mort avec huit autres
personnes en novembre. Il avait été arrêté par erreur.
Democratic Voice of Burma)
• États-Unis d’Amérique. Depuis 1973, 138 condamnés à mort ont été innocentés, dont 17 sur
test ADN.
DPIC
• Canada. Le 28 août 2007, la Cour d’appel de l’Ontario a renversé la condamnation de Steven
Truscott, reconnaissant qu’il s’agissait d’une erreur judiciaire. En 1959, Steven Truscott, bien
qu’âgé de 14 ans à l’époque, avait été condamné à la pendaison.
AFP
10 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11EDH
Quelques affaires plus récentes
En Chine
Un moratoire mondial sur les exécutions, maintenant !
Amnesty International - août 2007
Teng Xingshan a été reconnu coupable du meurtre de sa femme et
condamné à mort, en 1987.
Il a été condamné alors qu’il clamait son innocence et affirmait que
ses « aveux » lui avaient été arrachés sous la torture. Son épouse est
réapparue en juin 2005.
Pour Teng Xingshan, il était En Corée du Sud
trop tard : il avait été exécuté
en 1989.
Amnesty International
ACT 50/011/2007
Huit militants pour la démocratie ont été acquittés à titre posthume
d’accusations de trahison en janvier 2007, soit plus de trente ans après
leur pendaison, en 1975.
Le tribunal de district de Séoul a conclu que ces personnes n’étaient pas
coupables d’avoir créé un parti clandestin visant à renverser le gouvernement
autoritaire du président de l’époque, Park Chung-hee.
Mais aussi !...
« J’ai fait face à mon exécution et au tourment des adieux à ma famille trois fois ces deux
dernières années et je vais peut-être encore connaître à nouveau ce traumatisme ; je ne
souhaiterais pas cette expérience à mon pire ennemi et savoir que je suis innocent aggrave
l’injustice qui m’est faite. Pourtant, avec tant de personnes à mes côtés, je sais qu’un
changement viendra et que la peine de mort disparaîtra un jour en Géorgie. Ils peuvent juste
me prendre mon corps, mon âme est protégée par Dieu ».
Troy Anthony Davis, condamné à mort en Géorgie, États-Unis d’Amérique - mai 2009
Parmi les risques liés à la peine de mort, il y a celui, peu connu, de traumatiser les bourreaux.
Ainsi, au Viêt-Nam, la loi sur les exécutions capitales remplaçant le peloton d’exécution par
l’injection létale est entrée en vigueur le 1er juillet 2011. Le ministère de la police a proposé de
mettre fin aux pelotons d’exécution dès 2006, expliquant qu’ils avaient provoqué des troubles
mentaux dans un cas et de nombreux départs de membres attachés à ces unités .
AFP et Reuters, juin 2011
Il y a aussi, ce que l’on peut appeler des risques collatéraux comme celui, par exemple, de
critiquer l’application de la peine de mort à Singapour.
En novembre 2010, l’auteur britannique Alan Shadrake a été condamné à six semaines de
prison pour avoir publié un livre mettant en cause l’application de la peine de mort dans ce
pays.
AFP, juillet 2011
« J’ai représenté plus de cent condamnés à mort. A l’exception de trois ou quatre seulement, je ne les
aime pas. Parmi eux, il y en a sept que je crois innocents. Tous ont été exécutés parce qu’ils avaient
été jusque-là défendus par des avocats incompétents ».
Autobiographie d’une exécution, David R. Dow, avocat au Texas - 28 avril 2010
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 11
Peine de mort
et discrimination...
Textes et déclarations
« Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur
territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune,
notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion,
d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ».
Pacte international relatif aux droits civils et politiques - Article 2-1
« La peine de mort est souvent appliquée de manière discriminatoire et frappe un nombre disproportionné
d’individus parmi les plus défavorisés, les minorités et les membres de certains groupes ethniques ou religieux.
Elle est souvent prononcée et appliquée de façon arbitraire. Dans certains pays, elle est un instrument de
répression servant à réduire l’opposition politique au silence. Dans d’autres pays, les irrégularités des
procédures judiciaires sont aggravées par la discrimination, les déficiences du parquet et la qualité médiocre
de la représentation juridique ».
Amnesty International - ACT 50/072/2011
« La lapidation est une modalité de la peine capitale applicable principalement aux personnes reconnues
coupables d’adultère et d’infractions connexes, parmi lesquelles figure une très grande majorité de femmes,
ce qui est incompatible avec l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe, inscrite dans l’ensemble des
principaux instruments relatifs aux droits de l’être humain ».
Manfred Nowak,
Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants
15 janvier 2008
La peine capitale aux États-Unis : le règne de l’arbitraire
Dans ce pays, plus de 90 % des condamnés à mort sont indigents. Le risque d’être condamné à mort pour
meurtre dépend de l’endroit où a lieu le crime, puisque, parmi les 50 États fédérés de l’Union, 16 n’ont plus la
peine de mort. Le facteur racial, et plus particulièrement la couleur de peau de la victime, continue à jouer un
rôle important dans la justice pénale aux États-Unis.
Depuis 1977, dans 80 % des cas d’exécutions judiciaires, les victimes de meurtre étaient des Blancs alors que,
selon les statistiques, il y a autant de Noirs que de Blancs victimes de meurtre dans ce pays. Les études montrent
invariablement que, dans le système judiciaire américain à large majorité blanche, le meurtre d’un Blanc est
davantage passible de la peine de mort que le meurtre d’un Noir (Amnesty International - AMR 51/003/2002).
États-Unis d’Amérique
Amnesty International - d’après ACT 60/004/2007, et AMR 51/083/2010
Cal Brown a été exécuté le 10 septembre 2010 dans l’État de Washington. Il a été jugé pour
le meurtre de Holly Washa, une jeune femme de 21 ans et condamné à la peine capitale le
28 janvier 1994 . En novembre 2003, toujours dans l’État de Washington,
Gary Ridgway a avoué avoir tué 48 femmes. En concluant un accord avec le ministère public
qui lui promettait une peine de réclusion à perpétuité, s’il fournissait des informations relatives
aux crimes commis, il a évité la peine de mort.
Si Gary Ridgway n’a pas été condamné à mort, pourquoi Cal Brown a-t-il été exécuté alors
qu’il avait tué 47 personnes de moins que le tueur en série ?
12 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Arabie saoudite
Près de la moitié des exécutions, un nombre disproportionné par rapport à la composition de la
population, concernent des étrangers en provenance de pays pauvres ou émergents.
Il est très fréquent que les accusés, en particulier s’il s’agit de travailleurs migrants sans ressources
en provenance de pays en voie de développement d’Afrique et d’Asie, n’aient pas d’avocat pour les
défendre et ne comprennent pas la procédure, qui se déroule en arabe. Ces étrangers, ainsi qu’un
grand nombre des Saoudiens qui sont exécutés, n’ont ni argent ni possibilité d’entrer en contact
avec des personnes d’influence telles que les autorités gouvernementales ou les chefs de tribu,
deux facteurs essentiels pour obtenir une grâce.
Communiqué de presse AI du 14 octobre 2008
En octobre 2010, la Cour suprême d’Arabie saoudite a confirmé la condamnation à mort de Rizana
Nafeek, une employée de maison sri-lankaise, pour le meurtre d’un nourrisson dont elle s’occupait
alors qu’elle avait 17 ans. Cette jeune femme n’a pas pu bénéficier des services d’un avocat. Elle
a d’abord « avoué » le meurtre durant son interrogatoire, mais elle s’est rétractée depuis, affirmant
que ses « aveux » lui ont été arrachés sous la contrainte. L’homme qui a traduit ses déclarations
n’était pas un traducteur officiellement reconnu et il semble qu’il n’était peut-être pas capable de
traduire avec exactitude du tamoul vers l’arabe. Il a depuis quitté l’Arabie saoudite.
Amnesty International - MDE 23/012/2010
Discrimination sur la base de l’orientation sexuelle.
Dans le monde, 76 pays ont une législation criminalisant les actes sexuels consensuels, en privé, entre
personnes majeures du même sexe. Cinq d’entre eux prévoient la peine de mort : l’Iran, la Mauritanie, l’Arabie
Saoudite, le Soudan et le Yémen (plus certaines régions du Nigéria et de la Somalie).
Discrimination par l’argent.
Selon la charia (droit musulman), le tribunal doit statuer sur la culpabilité ou l’innocence de l’accusé. Les
personnes reconnues coupables de meurtre sont souvent condamnées en application du principe de qisas
(« rétribution »). Les proches de la victime ont alors à décider s’ils réclament l’exécution, ou s’ils demandent une
diya (« indemnisation » ou « prix du sang ») au lieu de l’exécution du meurtrier, ou encore accorder librement
leur pardon. Si une diya est demandée et que le meurtrier ou sa famille ne peut pas payer, il est exécuté, ce qui
est l’exemple même d’une discrimination par l’argent (Amnesty International - MDE 23/001/2000).
Et encore...
Pakistan
Amnesty International - ASA 33/011/2010
Le 8 novembre 2010, Aasia Bibi, une chrétienne mère de cinq enfants, a été accusée de blasphème et
condamnée à mort à l’issue d’un procès inéquitable . Deux responsables politiques qui voulaient réformer la
législation pakistanaise relative au blasphème ont été assassinés début 2011 : le gouverneur de la province
du Pendjab, Salman Taseer, et le ministre des Minorités, Shahbaz Bhati.
Iran
Amnesty International - MDE 13/066/2011
Âgée de 43 ans, Sakineh Mohammadi Ashtiani, qui est membre de la minorité azérie d’Iran, a été condamnée
à mort par lapidation en 2006 pour « adultère en étant mariée ». Elle s’est également vu infliger la peine de
10 ans d’emprisonnement pour son implication dans le meurtre de son mari.
Elle ignorait que le mot d’emprunt arabe « rajm », employé lorsque sa peine a été prononcée, signifiait
lapidation. Quand des codétenues le lui ont expliqué, elle s’est évanouie, sous le choc. Son avocat, Javid
Houtan Kiyan, ayant été arrêté en octobre 2010, Sakineh Mohammadi Ashtiani se trouve maintenant sans
représentation juridique. Actuellement, son avenir est incertain.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 13
Peine de mort
et secret...
Textes et déclarations
« La transparence fait partie des garanties fondamentales d’une procédure régulière qui empêchent la privation
arbitraire de la vie » et « les personnes condamnées [à mort], leur famille et leurs avocats devraient avoir des
informations fiables et en temps utile ».
Rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.
Amnesty International - AMR 51/064/2011
Les États membres sont instamment priés « de publier des renseignements sur le recours à la peine de mort, y
compris le nombre des personnes condamnées à mort, le nombre des personnes effectivement exécutées [et]
le nombre des personnes sous le coup d’une condamnation à mort ».
Article 5 du texte d’application des Garanties
pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort (ECOSOC, 1989/64)
« La publication des statistiques sur la peine de mort protégerait le droit légitime des citoyens de comprendre
et d’appréhender la situation relative à cette peine en Chine ».
Professeur Zhao Bingzhi, spécialiste du droit pénal chinois
Amnesty International - ASA 17/043/2007
« Tous les condamnés à mort détestent les portes. Tant qu’elles restent fermées, ils restent en vie. La mort arrive
toujours par une porte ouverte ».
Oleg Alkaev, ancien directeur de la prison de Minsk, Bélarus, où ont eu lieu des exécutions
Amnesty International - EUR 49/001/2009
Le secret pour de multiples raisons...
Dans le domaine de la peine de mort, le secret n’est pas limité aux seules statistiques relatives au nombre
de condamnations et d’exécutions. Comme les quelques exemples ci-dessous le montrent, le caractère
intrinsèquement cruel, inhumain et dégradant de la peine de mort est aggravé, pour les condamnés à mort
comme pour leurs proches, par le secret qui l’entoure.
Ne pas connaître la date d’exécution est pour le condamné, craignant le pire dès qu’on ouvre la porte de sa
cellule, un supplice quotidien. Sauf à engendrer des souffrances bien inutiles, on peut se demander à quoi
peuvent bien servir tous ces secrets.
Bélarus
Amnesty International - EUR 49/001/2009
Les dates d’exécution ne sont communiquées à l’avance ni aux prisonniers,
ni à leurs familles. Les corps ne sont pas restitués aux familles et le lieu
d’inhumation est tenu secret.
Le 25 juillet 2011, la mère d’Andreï Bourdyka, 28 ans, s’est rendue à la prison
où il était incarcéré. On lui a dit qu’il avait été abattu, avant de lui remettre ses
vêtements et ses lunettes. On ignore la date exacte de l’exécution d’Andreï
Bourdyka, mais elle se situerait entre les 14 et 19 juillet. Andreï Bourdyka a
été condamné à être passé par les armes le 14 mai 2010 pour des crimes
commis lors d’un vol à main armée en octobre 2009.
14 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Nigeria
Amnesty International - AFR 44/030/2007
Le 18 décembre 2007, Amnesty International a révélé que des exécutions secrètes avaient eu
lieu dans les prisons du Nigeria, malgré de récentes assurances du gouvernement selon lequel le
Nigeria n’avait pas procédé à des exécutions « depuis des années ».
L’organisation a réuni des éléments prouvant qu’au moins sept exécutions par pendaison avaient
eu lieu depuis 2005. Toutes les condamnations ont été prononcées par un tribunal de l’État
de Kano et les ordres d’exécution ont été signés par le gouverneur de cet État, Malam Ibrahim
Shekarau. Il semble que ces hommes n’ont reçu l’assistance d’un avocat à aucun moment de la
procédure et n’ont pas eu la possibilité d’interjeter appel.
Japon
Amnesty International - ASA 22/005/2009
Les exécutions sont réalisées en secret. Les avocats ont beaucoup de
mal à obtenir des informations, y compris sur la santé des prisonniers et
sur la date de l’exécution. Les familles sont informées seulement après
l’exécution et les prisonniers vivent dans la peur permanente que chaque
jour soit leur dernier.
Arabie Saoudite
Amnesty International - MDE 23/005/2005
Le secret qui entoure le fonctionnement de la justice pénale est tel que très souvent les accusés ne
connaissent ni les charges retenues contre eux, ni l’évolution de la procédure à leur encontre.
Dans la matinée du 4 avril 2005, six jeunes ressortissants somaliens ont été extraits de leur cellule
de prison à Djeddah et décapités en public. Le Ministère saoudien de l’Intérieur a déclaré que les six
avaient été condamnés pour vols en octobre 2004.
La nouvelle des exécutions a choqué les parents de ces hommes qui pensaient qu’ils avaient été
condamnés à des peines de prison de cinq ans et à la flagellation. Amnesty International a alors appris
que les six prisonniers eux-mêmes ignoraient les condamnations à mort jusqu’au matin-même de leur
exécution. Les six avaient quitté la Somalie déchirée par la guerre, à la recherche d’une vie meilleure.
En Chine
Amnesty International - ACT 50/001/2011
En 2010, la Chine aurait procédé à des milliers d’exécutions. Depuis qu’en janvier
2007, la Cour suprême populaire réexamine toutes les peines de mort prononcées, les
autorités chinoises annoncent une diminution du nombre d’exécutions. Néanmoins,
l’application de la peine de mort reste entourée du plus grand secret en Chine, et, sans
accès à de telles données, il est impossible de dire si ce
châtiment est moins utilisé.
Et encore...
Aussi, dans son rapport annuel sur les exécutions dans
Amnesty International
le monde en 2010, Amnesty International a décidé de ne
ASA 17/003/2004
pas publier de chiffres minima concernant le recours à la
peine capitale dans ce pays, mais a choisi de demander
Pour les accusés passibles de la peine de
aux autorités chinoises de publier le nombre de personnes
mort sur la base d’accusations touchant à
condamnées à mort et exécutées chaque année afin de
des questions politiques ou religieuses qui
confirmer qu’il y avait bien, comme elles le déclaraient,
gênent l’État chinois, les procédures juridiques
une diminution du recours à la peine capitale dans le
se déroulent parfois sans la présence
pays.
d’observateurs, au motif que l’affaire mettrait
en jeu des « secrets d’État ».
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 15
Peine de mort
et mineurs délinquants...
Textes et déclarations
« Une sentence de mort ne peut être imposée pour des crimes commis par des personnes âgées de moins de
18 ans et ne peut être exécutée contre des femmes enceintes ».
Pacte international des droits civiques et politiques - Article 6-5
« Ni la peine capitale ni l’emprisonnement à vie sans possibilité de libération ne doivent être prononcés pour
les infractions commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans. ».
Convention relative aux droits de l’enfant - Article 37(a)
«Il est admis de longue date que notre système judiciaire doit accorder aux mineurs délinquants un traitement
spécial qui prenne en compte leur maturité et leur désir de réinsertion dans la société en vue d’y jouer un rôle
constructif. L’incarcération dans le couloir de la mort d’un accusé mineur qui attend de connaître son sort, alors
que ces conditions de détention peuvent même briser un criminel endurci, réduit à néant l’essence même de
la protection accordée par l’État aux jeunes ».
Cour suprême des Philippines - juillet 2002
Depuis que les États-Unis d’Amérique ont aboli la peine capitale pour les mineurs délinquants en mars 2005,
des délinquants mineurs au moment des faits ont été exécutés dans cinq pays : Iran, Arabie Saoudite, Soudan,
Pakistan et Yémen. La plupart du temps, les autorités attendent que le condamné ait atteint l’âge de 18 ans
pour l’exécuter. D’autres pays condamnent des mineurs délinquants, mais ne les exécutent pas.
Amnesty International - Executions of juveniles since1990
http://www.amnesty.org/en/death-penalty/executions-of-child-offenders-since-1990
Au Soudan, plus de 35% des naissances ne sont pas enregistrées, et seulement 29,5% le sont au Pakistan, qui
a voté en 2000 une loi interdisant la peine de mort pour les enfants, sans toujours parvenir à la faire appliquer
sur le terrain. Au Yémen, le code pénal prévoit des peines maximales de 10 ans de prison pour les moins de
18 ans, mais 22% seulement des naissances sont enregistrées.
Ces pays possèdent peu de moyens pour parvenir à déterminer de manière fiable l’âge d’un enfant, d’autant
plus que les juges ne demandent pas forcément un tel examen.
Human Rights Watch - Report The Last Holdouts, september2008
Iran
En Iran, aux termes de la loi, sont considérées comme des enfants les personnes non pubères, c’est-à-dire,
selon une définition générale, les garçons de moins de quatorze ans et sept mois (quinze années lunaires)
et les filles de moins de huit ans et sept mois (neuf années lunaires) . Actuellement au moins 135 mineurs
délinquants sont condamnés à mort dans ce pays.
Amnesty International - MDE 13/139/2007
Alors qu’il avait quinze ans, Reza Hejazi a été mêlé à une dispute entre un petit groupe dont il faisait partie et
un homme, qui a été mortellement blessé à l’arme blanche en septembre 2004. Condamné à titre de qisas
(« réparation »), en novembre 2005, Reza Hejazi, a été pendu à la prison d’Ispahan le 19 juillet 2008.
Amnesty International - MDE 13/122/2008
Le mineur délinquant Makwan Moloudzadeh, Kurde iranien, a été exécuté en décembre 2007 pour le viol présumé
de trois personnes. Makwan Moloudzadeh était lui-même âgé de treize ans au moment des faits présumés.
Amnesty International - MDE 13/136/2007
16 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Yémen
Amnesty International - MDE 31/018/2007
Arabie Saoudite
Adil Muhammad Saif al Maamari a été exécuté en février 2007. Il avait été
arrêté en juillet 2001 et placé en détention dans un poste de police, où il
a « avoué » avoir tué un parent de sexe masculin au cours d’une dispute.
Selon certaines sources, ces déclarations lui ont été arrachées sous la
torture. Bien que des examens médicaux aient montré qu’il n’avait pas
atteint l’âge de dix-sept ans, Adil Muhammad Saif al Maamari avait été
jugé et condamné à mort en octobre 2002.
Amnesty International - MDE 23/031/2007
Dhahian Rakan al Sibaii, ressortissant saoudien, a été condamné à mort pour un homicide qu’il aurait
commis alors qu’il n’avait que quinze ans. Placé dans un centre de détention pour mineurs jusqu’à ses
dix-huit ans, il a ensuite été transféré dans une prison pour adultes. Il a été décapité dans la ville de
Taïf le 21 juillet 2007. Le droit international interdit d’exécuter des personnes pour des crimes commis
alors qu’elles n’avaient pas dix-huit ans. Les responsables saoudiens affirment qu’ils respectent cette
obligation puisqu’ils n’exécutent pas de mineurs.
Soudan
Amnesty International - AFR 54/035/2010
Le 21 octobre 2010, le tribunal d’exception du Darfour a condamné à mort par pendaison 10
personnes, dont quatre mineurs, pour leur implication présumée dans un attentat visant un
convoi gouvernemental et son escorte en mai 2010, dans le sud du Darfour.
Les quatre mineurs ont été placés dans les mêmes lieux de détention que les adultes et ont
comparu avec eux devant le tribunal d’exception. Il semble
qu’ils aient tous les quatre indiqué leur âge exact au greffe.
Mauritanie...
Un examen médical n’a été requis que pour deux d’entre eux.
Amnesty International
Un premier rapport d’examen médical a conclu qu’ils avaient
AFR38/001/2011
tous deux moins de 18 ans. Un second rapport a établi que
seul l’un d’eux était mineur, il est donc le seul à avoir vu sa
Le 15 mai 2011, la cour criminelle de
peine commuée.
Nouakchott a prononcé la peine de
mort à l’encontre de Mohamed Yahya
Le tribunal n’a pas cherché à obtenir l’avis d’autres médecins
ould Salem et de Seydina Aly Ould
pour vérifier les résultats et expliquer pourquoi ils différaient.
Ahmed, tous deux âgés de dix-huit
Il n’a également pas permis à deux autres de se soumettre au
ans, et de Zeine Ould Abédine Ould
même examen .
Ahmed, âgé de dix-sept ans. Tous les
trois étaient jugés pour des meurtres
commis alors qu’ils étaient mineurs .
Nigeria
Bien que la Loi relative aux droits de l’enfant du Nigeria proscrive la peine capitale, plus de 20
personnes actuellement incarcérées dans le quartier des condamnés à mort ont été condamnées
pour des infractions commises alors qu’elles avaient moins de 18 ans.
Amnesty International, Condamnations à mort et exécutions en 2010 - ACT 50/001/2011
Patrick Okoroafor, est toujours maintenu en détention, « à la discrétion du gouverneur de l’État
d’Imo », dans la prison d’Aba (État d’Abia), malgré la décision d’une haute cour qui, le 18 octobre
2001, avait déclaré illégale, nulle et non avenue, la peine capitale prononcée contre lui. Il n’avait
que seize ans lorsqu’il a été condamné à mort, le 30 mai 1997, par un tribunal chargé des affaires
de vol et d’usage d’armes à feu. Il n’a pas eu la possibilité d’interjeter appel et a affirmé avoir été
torturé durant sa garde à vue.
Amnesty International - AFR 44/005/2008
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 17
Peine de mort
et répression...
Textes et déclarations
« La peine de mort ne peut être utile car elle donne aux hommes l’exemple de la barbarie. »
Cesare Beccaria, 1764
« Aux yeux de ses partisans, la peine de mort transforme le terroriste en héros qui aura sacrifié sa vie à la cause
qu’il soutient ».
Robert Badinter « Contre la peine de mort. », 2006
« Sacrilège contre la vie, la peine de mort est de surcroît inutile. Jamais, nulle part, elle n’a réduit la criminalité
sanglante. Réaction et non dissuasion, elle n’est que l’expression légalisée de l’instinct de mort. Elle nous
abaisse sans nous protéger. Elle est vengeance et non justice ».
Robert Badinter « Contre la peine de mort. », 2006
« Que les accusés soient déclarés coupables, qu’ils soient exécutés, ne ramènera jamais Julie ».
Bud Welch, dont la fille, Julie, est morte dans l’attentat terroriste d’Oklahoma city
http://www.fiacat.org/temoignage-de-bud-welch
La peine capitale a été et reste un moyen de répression politique, utilisé pour faire taire à jamais les opposants
ou pour éliminer les personnes « gênantes » sur le plan politique. Dans ces cas, la plupart du temps, la
condamnation à mort intervient au terme d’un procès inéquitable .
Amnesty International - ASA 21/014/2005
Répression et trafic de drogue
Le trafic de drogue est réprimé de façon particulièrement sévère dans de nombreux pays d’Asie et du Moyen orient.
Les infractions à la législation sur les stupéfiants sont passibles de la peine de mort, parfois de façon obligatoire.
Une part importante des applications de la peine capitale enregistrées en 2010 en Chine, en Égypte, aux
Émirats arabes unis, en Indonésie, en Iran, au Laos, en Libye, en Thaïlande et au Yémen concernaient des
infractions à la législation sur les stupéfiants (Amnesty International - ACT 50/001/2011fr).
Iran
Amnesty International - Condamnations à mort et exécutions en 2010, ACT 50/001/2011
13 infractions sont passibles de la peine de mort et les personnes condamnées à mort pour des infractions
liées à la drogue ne bénéficient pas du droit d’interjeter appel .
Singapour
Amnesty International - PRE 01/184/2011
Toute personne trouvée en possession de plus de deux grammes d’héroïne est automatiquement présumée
coupable de trafic de drogue, et la peine de mort est obligatoirement requise dans les cas où cette quantité
excède 30 grammes.
Chine
Amnesty International - CHINE. Les Jeux olympiques de 2008 et après ? ASA 17/043/2007
L’usage de la peine de mort est renforcé à certaines périodes de l’année, notamment à l’approche d’événements
importants dans le pays, comme la Fête nationale (le 1er octobre) et la Journée internationale contre l’abus
et le trafic illicite des drogues (le 26 juin).
18 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Indonésie
Amnesty International - ASA 21/001/2008
Amrozi bin H. Nurhasyim, Ali Ghufron et Imam Samudera, reconnus coupables
d’implication dans les attentats à la bombe qui ont eu lieu à Bali, le 12 octobre
2002, et qui ont fait 202 morts et 209 blessés, ont été passés par les armes
le 8 novembre 2008. Ali Ghufron aurait déclaré : « Je suis prêt pour la mort
[…] Ils devraient me décapiter car c’est la loi de Dieu et la volonté de Dieu,
je mourrai en martyr. »
Aucun n’a demandé la
Pakistan, Peine de mort pour les « cyber-terroristes
grâce présidentielle.
»
Reuters - novembre 2008
Le 6 novembre 2008, le président du Pakistan a signé un décret d’application
de la loi pour la Prévention des crimes électroniques, punissant de la peine de
mort quiconque aura provoqué la mort d’une personne pour avoir attenté à la
sécurité nationale en utilisant un ordinateur ou tout autre système électronique.
États-Unis
d’Amérique
Amnesty International - AMR 51/081/2001
Impressionné par l’assaut des forces de police contre une résidence où s’étaient réfugiés les
membres d’une secte religieuse, assaut qui avait fait plusieurs dizaines de morts au printemps
1993, Timothy McVeigh avait décidé de se venger du pouvoir fédéral.
Le 19 avril 1995, il faisait exploser une bombe contre un immeuble du FBI, à Oklahoma city. Cet
attentat avait fait 168 morts et plus de 500 blessés. Il fut condamné à mort, renonça à ses voies
de recours, ne sollicita pas la grâce du président Bush et fut exécuté en mai 2001.
En Iran
Amnesty International - MDE 13/052/2011
Depuis les troubles qui ont suivi l’élection présidentielle de juin 2009, la politique
de répression de la société civile menée par le gouvernement iranien ne concerne
pas seulement les opposants qui défilent pacifiquement, et dont certains sont
condamnés à mort et pendus. Des avocats sont aussi pris pour cible, notamment
ceux qui défendent des prisonniers politiques et des détenus passibles de la
peine capitale , ce qui revient à utiliser le système judiciaire comme instrument
de répression envers les opposants au pouvoir.
En Corée du Nord
Guinée équatoriale
Amnesty International - PRE 01/291/2010
Amnesty International- ASA 24/002/200624
La liberté religieuse, bien que garantie par la constitution, est
sévèrement restreinte en pratique. Selon certaines sources,
des personnes impliquées dans des activités religieuses
publiques et privées subissent une répression dure, sous la
forme d’emprisonnement, de torture et d’exécution.
Des Nord-Coréens accusés de prosélytisme ou de pratique
de culte dans des églises clandestines auraient également
été exécutés.
Le 21 août 2010, quatre hommes,
tous reconnus coupables de tentative
d’assassinat sur la personne du président,
ont été exécutés moins d’une heure après
avoir été déclarés coupables par un tribunal
militaire de la capitale Malabo.
Les quatre hommes, qui s’étaient réfugiés
au Bénin depuis plusieurs années, avaient
été enlevés par les forces de sécurité équato-guinéennes en janvier 2010, puis placés en détention
secrète à la prison de Black Beach à Malabo, où ils auraient « avoué » l’attaque lancée contre le
palais présidentiel le 17 février 2009.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 19
Peine de mort
en parler avec les jeunes...
Ce projet s’adresse aux enseignants des collèges, des lycées, ainsi qu’aux formateurs de jeunes dans le cadre de
l’éducation non-formelle. Il s’adresse également aux militants d’Amnesty International qui souhaitent intervenir
dans ces mêmes lieux.
Remarque : ce thème est abordable dès le collège, mais plutôt en 3ème, voire en 4ème. Si on peut parler de
la peine de mort à un enfant qui se pose des questions, il est préférable d’attendre la fin du collège pour en
discuter réellement.
Objectifs
Au niveau des formateurs
Trois dates peuvent inciter à cette discussion : Le 9 octobre, le 10 octobre et le 30 novembre. La France abolit
la peine de mort le 9 octobre 1981, le 10 octobre est la journée mondiale contre la peine de mort et le GrandDuché de Toscane est le premier État à l’avoir abolie, le 30 novembre 1786.
Ce document permet à des éducateurs / enseignants de mener un travail avec des jeunes autour de la peine
de mort et du combat pour son abolition dans le monde. Il est relié à d’autres documents et permet diverses
interventions :
• Le document de référence « Regard sur la peine de mort » (Réf AI SF 11EDH28 - 530 101) fait le point sur
cette problématique emblématique de la lutte pour le respect des droits humains.
• La « fiche mémo » sur la peine de mort (téléchargeable sur le site web de la commission « éducation aux
droits humains » d’Amnesty International France) rappelle l’essentiel sur le même thème.
• La fiche pédagogique sur la peine de mort (téléchargeable sur le site web de la commission « éducation aux
droits humains » d’Amnesty International France) permet de parler avec les jeunes de la peine de mort en
général.
• Les militants d’Amnesty International peuvent intervenir auprès des jeunes.
• La commission « éducation aux droits humains » et la commission « abolition de la peine de mort » d’Amnesty
International France peuvent également fournir conseils, argumentaires et documents.
• Ce document peut être adapté au contexte, au programme de diverses matières, au projet de l’enseignant,
de l’éducateur ou de l’équipe.
Au niveau des jeunes
• La peine de mort n’existe plus en France et en Europe (à une exception près) : faire prendre conscience
du combat qu’a nécessité son abolition, des regrets d’une partie de l’opinion publique, d’une vigilance des
militants des droits humains.
• Elle est appliquée ailleurs, dans des pays du Nord ou du Sud, pour des mineurs délinquants, des criminels
handicapés mentaux. Le combat pour l’abolition est également à mener sur ce plan.
• Le fait que la peine de mort soit appliquée dans des pays qui semblent lointains ne permet pas d’y réfléchir
« à froid » et c’est lors de drames qui se passent tout près de nous que resurgit la question de la peine de
mort. Il faut alors démêler le rationnel de l’irrationnel.
• Faire prendre conscience aussi du caractère définitif de la peine de mort : si c’est pour une catégorie de
crimes, ce sera ensuite pour deux, puis…
• Pour les plus âgés, ce thème est aussi l’occasion de réfléchir sur le pouvoir, la vie, la mort, la vengeance, la justice.
20 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Une production vivante
Cette réflexion est essentielle, mais débouche également sur de l’action. D’abord, par des lettres, pétitions ou
autres actions militantes.
Ensuite, par une production plus « ludique ». Nous vous invitons à proposer aux jeunes qui ont réfléchi sur la
peine de mort la réalisation d’une affiche sur le thème de ce long combat qu’est l’abolition de toute forme de
peine capitale. (*)
Ces affiches seront exposées localement et une sélection d’entre elles seront exposées dans un lieu national
emblématique de ce combat. Une dernière sélection sera déclinée sur différents supports, comme agendas,
calendriers…
(*) A cet effet, Amnesty International France mettra à votre disposition une fiche permettant
la cession des droits d’auteurs et des réalisations à l’association, afin de permettre leur utilisation par AIF.
Mise en oeuvre
Choisir un thème
Les formateurs et/ ou les jeunes choisissent un ou plusieurs thèmes parmi les cinq que présente le projet.
Ils mènent ensuite un travail sur ce thème, recherchent les textes officiels sur la question de la peine de
mort, les étapes de son abolition, les problèmes soulevés par le thème choisi. Ils cherchent également les
actions possibles, le tout étant à adapter naturellement à l’âge des participants, au projet des formateurs et aux
conditions matérielles.
Organiser la réflexion
Chaque formateur agit selon ses projets, nous vous proposons quelques pistes :
• En fin de collège, les enseignants de français et histoire-géographie peuvent collaborer avec le professeur
d’arts plastiques, ce qui est encouragé par les nouvelles épreuves du Brevet.
• Au lycée, les enseignants de lettres, histoire-géographie, économie, philo, peuvent s’associer à ce projet.
• Dans tous les cas, les documentalistes peuvent organiser réflexions, débats, expositions…
• En centre de loisirs, pour les plus grands, la réflexion débouchera très vite sur la production d’affiches, mais
peut également porter vers des réalisations « vivantes » : slam, saynètes, chansons…
Multiplier les sources d’information
La peine de mort est très souvent connue par les jeunes à travers les séries américaines, ce qui est sans doute
enrichissant, mais très réducteur. Ils en entendent parler également quand un fait divers sordide enflamme
l’opinion publique. Il importe donc de sortir de ces deux schémas et de susciter une approche rationnelle de la
question. Le combat pour l’abolition en est une, se pencher sur les motivations et le combat des abolitionnistes
permet de considérer la peine de mort sous des angles divers et moins convenus.
Pour cela, le CDI (Centre de documentation et d’information) des établissements scolaires permettra de trouver
d’autres sources d’information. Internet offre d’autres ouvertures (même si on peut trouver toutes les opinions
sur la peine de mort), avec les sites web d’Amnesty International, de la ligue des droits de l’homme, Ensemble
contre la peine de mort, la Coalition mondiale contre la peine de mort. Des textes, des films permettent de
compléter l’information. Les dates des 9 / 10 octobre et le 30 novembre seront aussi l’occasion de lire des
articles et regarder des émissions sur ce sujet. Là encore, des intervenants d’Amnesty International France
seront à votre disposition.
Quelques pistes
Utiliser les témoignages
Partir de ce qu’ont dit, écrit, pensé, filmé… des personnes liées à la peine de mort est une priorité. Ils ont
une légitimité, que ce soit Julos Beaucarne (dont la femme a été assassinée), Robert Badinter (qui a permis
l’abolition en France), Helen Prejean (religieuse américaine qui a accompagné des condamnés à mort et milite
contre la peine capitale) et tant d’autres.
Regarder le monde où nous vivons
Le monde va vers une abolition, cela semble inéluctable à long terme. Mais les retours en arrière existent,
d’autres atteintes aux droits se banalisent. La vigilance s’impose.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 21
Peine de mort
pistes pédagogiques...
Remarques générales
La peine de mort est un sujet délicat, que le combat pour son abolition permet d’aborder de façon plus aisée :
on se situe sur le plan du droit, des relations internationales, de l’évolution des mentalités, et non plus dans
l’affectif ou l’impulsion.
La tendance première est souvent de penser « débat », mais c’est le risque évident de retrouver l’émotion dont on veut
se détacher pour réfléchir sereinement. Nous vous proposons donc des voies de réflexion adaptées aux différents
âges, aux projets et aux thèmes que nous avons retenus. Libre à chacun d’élargir le champ des propositions.
A qui proposer ces activités
En collèges
Les professeurs de collège abordent souvent la peine de mort par le biais du français (étude du Dernier jour
d’un condamné, de V. Hugo par exemple), de l’histoire (la Terreur de 1792 ou la marche vers l’abolition, ou…).
On ne peut guère en parler avant, sauf pour répondre à des questions spontanées.
En lycée
Plusieurs matières se prêtent à un travail sur l’abolition, car la peine de mort pose des questions sur la
philosophie, la religion, l’éthique, le contrat social, le fonctionnement de la société sur les plans humain,
économique et social, la responsabilité et l’engagement et la conception de la justice, naturellement.
Dans l’éducation non-formelle
On privilégie les activités immédiates, le travail n’étant pas forcément suivi comme dans la scolarité. Il s’agit
d’amorcer une réflexion et éventuellement de faire agir. L’âge pour toutes ces activités est entre 14 et 18 ans,
mais on s’adapte au public particulier.
Quelques entrées en matière
Les activités qui suivent sont liées aux cinq thèmes, mais peuvent se décliner selon les situations. Pour tous,
une entrée par l’image peut aider à voir la peine de mort autrement :
• Travail sur l’exposition « Sur le chemin de l’abolition universelle » réalisée en 2009 par l’association
« Ensemble contre la peine de mort ». Voir leur site : http://www.abolition.fr
• Travail sur les affiches d’ Amnesty International. On peut faire décoder le message et les techniques utilisées
avant de parvenir à une discussion autour du thème. On peut se procurer ces affiches auprès des groupes
locaux ou de la commission abolition de la peine de mort d’Amnesty International France.
• Collecte et étude de diverses actions lancées par Amnesty International pour lutter contre la peine de mort et
réclamer son abolition, à se procurer auprès des groupes locaux ou de la commission abolition de la peine
de mort de la Section française d’Amnesty International.
• Éventuellement, passage d’un film ou d’un documentaire (voir matériel pédagogique p 30). Quelques images
peuvent susciter la réflexion, sans pousser l’analyse avant réflexion. On y reviendra plus tard.
• La lecture d’un texte emblématique peut fournir pour les plus grands une entrée en matière : la Ballade des
Pendus, de Villon, par exemple. Des extraits de Réflexions sur la peine capitale ou de Le zéro et l’infini, ou
bien la Lettre ouverte de Julos Beaucarne après la mort de sa femme.
22 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF11 EDH 29
Textes essentiels relatifs à la peine de mort
Au plan international
• La Déclaration universelle des droits de l’homme,
• Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP),
Ce traité encadre la peine de mort, et dispose qu’« une sentence de mort ne peut être imposée
pour des crimes commis par des personnes âgées de moins de 18 ans et ne peut être exécutée
contre des femmes enceintes ».
• Le Deuxième protocole facultatif se rapportant au PIDCP visant à abolir la peine de mort,
Les États qui ratifient ce protocole s’engagent à prendre toutes les mesures nécessaires pour
abolir la peine de mort.
• La Convention relative aux droits de l’enfant,
• Des résolutions récentes de l’Assemblée générale de l’ONU : résolution 62/149 (décembre 2007), résolution
63/168 (décembre 2008), résolution 65/206 (décembre 2010),
Au plan européen
• La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou Convention européenne
des droits de l’homme (CEDH),
Ce traité n’impose aucune mesure abolitionniste aux États qui le ratifient.
• Le Protocole n° 6 à la CEDH concernant l’abolition de la peine de mort,
• Le Protocole n° 13 à la CEDH relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances.
Les États qui ratifient les protocoles à la CEDH s’engagent à prendre toutes les mesures
nécessaires pour abolir la peine de mort.
Au plan américain
• La Convention américaine relative aux droits de l’homme
Ce traité encadre la peine de mort et interdit aux États qui le ratifient de l’infliger aux personnes
âgées de moins de 18 ans ou de plus de 70 ans au moment du crime, et aux femmes enceintes.
• Le Protocole à la Convention américaine des droits de l’homme abolissant la peine de mort en toutes
circonstances.
Les États qui ratifient ce protocole s’engagent à prendre toutes les mesures nécessaires pour
abolir la peine de mort.
Peine de mort et débat
La tentation est grande de faire dialoguer les jeunes au sujet de la peine de mort, mais cela donne trop souvent
de très mauvais résultats, des affrontements, une insatisfaction et la tendance à camper sur ses positions, sans
oublier que souvent, les jeunes sont souvent pour la peine capitale, sans s’être posé trop de questions.
Donner comme problématique, non la peine de mort, mais le combat pour son abolition est une façon de
mettre un peu la passion à distance : pourquoi des gens se sont-ils battus pour cette idée, depuis des siècles ?
Se mettre à la place de l’autre, ici, l’abolitionniste ou le partisan de la peine de mort, c’est déjà le comprendre
un peu, c’est aller vers ses idées. Il ne s’agit pas de renier les siennes, mais de savoir pourquoi on les défend.
Or, pour ce sujet, les jeunes ont rarement pesé réellement leur opinion.
Si on tient à organiser un débat
1. Un pour / contre
On forme des équipes de deux, dont la moitié va défendre l’abolition et l’autre moitié la combattre.
Par quatre, les jeunes cherchent les arguments pour défendre leur opinion (ou celle qu’on leur a proposé de
défendre).
Ils se mettent d’accord pour choisir les arguments les plus forts et présenter leurs conclusions au groupe
entier : il se peut qu’ils restent divisés, qu’un camp se rallie à l’autre, que les deux changent d’avis… Les points
importants sont notés au tableau. Le groupe entier discute alors sur ces points et dégage les thèmes récurrents
et importants liés à la peine de mort.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 23
2. Variante
Les jeunes sont par groupes de trois et on leur impose une opinion, pour ou contre l’abolition, sans souci de
leur opinion.
L’enjeu est de vraiment se mettre à la place de l’autre. Ils rédigent un bref exposé, sur ce modèle :
• Des gens luttent pour faire abolir la peine capitale partout.
• Nous sommes contre l’abolition, nous commençons par donner la parole aux abolitionnistes (avec 3
arguments).
• Si nous sommes pour, nous donnons 3 arguments des anti-abolitionnistes.
• Conclusion : donc, je suis pour / contre et il faut que… (préciser).
Le groupe entier écoute, les points sont notés au tableau et serviront de base à la discussion.
3. Le débat remplacé par le 6/6
C’est un débat encadré, minuté et débouchant ensuite sur un débat apaisé, parce que chacun a parlé, a été
entendu et a entendu les autres. Cela se pratique à tous les niveaux, mais attention au temps d’explication, plus
long avec les plus jeunes.
L’exercice est détaillé dans les fiches pédagogiques disponibles sur le site web de la commission EDH, mais
voici la trame essentielle :
• Répartition en groupes de 6 environ, un rapporteur et un modérateur sont nommés.
Chaque groupe travaille 6 minutes environ sur une question, chaque membre du groupe peut / doit
s’exprimer, le modérateur minute les interventions. On a en général besoin de 10 mn.
• Une question a été posée : « l’abolition est-elle irréversible ? ». Chacun répond.
• Mise en commun des réponses par chaque rapporteur qui ne répète pas les idées des autres. L’intervenant
note les idées au tableau en les regroupant .
• On peut s’arrêter là et exploiter ce qui est au tableau, ou bien poser une seconde question, par exemple :
« la peine de mort est-elle efficace ? ». Même travail d’expression et mise en commun.
• Exploitation des données : cibler ce qui est rationnel / non rationnel dans le débat, jauger les arguments pour
ou contre, chercher le sens profond de ce châtiment. Dire qu’on entend ceux qui sont pour, mais expliquer
la position des abolitionnistes comme Amnesty International.
Des activités pour les 5 thèmes
Thème 1 : Peine de mort et risques
Rappel
Le risque majeur de la peine de mort est son irréversibilité. Comme la justice est rendue par les hommes, elle
suppose une marge d’erreur, que le jury soit populaire (comme pour les assises en France) ou professionnel,
ou qu’un seul juge décide. L’erreur judiciaire est la première question que doivent se poser les partisans de la
peine de mort.
Un autre risque, souvent écarté d’un revers de main, ce sont les souffrances du condamné : psychologiques
dans les quartiers des condamnés à mort, physiques lors de l’exécution. C’est aussi la création d’une autre
famille en deuil, celle du condamné exécuté.
D’autres risques sont liés à la peine capitale : la dangerosité de criminels qui n’ont plus rien à perdre, mais
aussi celle de leurs complices qui voudraient les libérer par la force (cette possibilité fut évoquée à propos des
terroristes lors de la dernière demande de députés français pour le rétablissement de la peine de mort).
29 propositions de loi visant à rétablir la peine de mort ont été déposées au Parlement de 1984
à 2004. Toutes ont été rejetées.
Objectifs
Notre société est obsédée par l’idéal du risque zéro. Or, certains pays pratiquent des exécutions alors que les
procédures judiciaires ne sont pas infaillibles.
C’est encore l’occasion de chercher au-delà des évidences pourquoi se maintient la peine capitale.
24 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Activité
Dès 14 ans.
C’est par un questionnement que l’on va aborder divers aspects de la peine de mort. Ces questions partent
de ce que sait chacun, de la mise en doute d’affirmations toutes faites et du cheminement vers une autre
interrogation : à quoi sert la peine de mort ?
1. Qui condamne-t-on à mort ?
Voici des affirmations fréquentes, mais pas forcément judicieuses. Dire ce qui les motive, les discuter, argumenter
• Un bon criminel est un criminel mort (variante : un criminel mort ne récidive pas)
• Une exécution, maintenant, c’est rapide et indolore
• Exécuter les violeurs d’enfants, les assassins de vieilles dames, c’est tout
• Exécuter les terroristes, ça dissuade les autres terroristes
• Il faut garder la peine de mort pour des crimes particulièrement odieux
• La société doit se protéger
C’est le moment de pointer certaines dérives : un peu de peine de mort…, c’est impossible, c’est tout ou rien, et
le combat pour l’abolition considère qu’une réduction des motifs de condamnation à mort n’est qu’une étape.
Les viols, les vieilles dames, et jusqu’où aller ? Jusqu’au blasphème comme au Pakistan, jusqu’au vol de navets
dans un champ comme en Angleterre au XVIIIème siècle ?
La notion de crime odieux introduit la relativité : comment définir ce caractère odieux ? Où mettre la limite ?
Quelle définition trouver ? La conclusion est encore là « tout ou rien » et plutôt rien, naturellement.
2. Les risques d’erreur judiciaire
• Quelques données
Des condamnés à mort ont été exécutés ici et ailleurs, bien que des doutes sur leur culpabilité aient existé,
avant et après leur mort. D’autres condamnés à mort ont été libérés : l’accusation a abandonné les charges ou
bien la révision de leur procès a prouvé leur innocence.
En 2000, un rapport américain évoque 68% d’erreurs judiciaires probables pour des condamnations à mort.
Dans ce pays, depuis 1973, plus de 138 personnes condamnées à mort ont été innocentées avant d’être
exécutées.
Quelquefois, elles sont innocentées par des intervenants extérieurs au système judiciaire. C’est le cas, par
exemple, en Illinois, en 1999, d’Anthony Porter innocenté par des étudiants journalistes (Amnesty International
- ACT 50/004/2000).
• Simulation
Trois groupes de jeunes travaillent sur l’erreur judiciaire, après avoir consulté des documents sur Internet ou
autre, sur ce thème. Un groupe défend la peine de mort en dépit de ce risque, l’autre défend l’abolition en
fonction de ce même risque. Chaque groupe désigne deux orateurs. Le 3ème se répartit l’observation des deux
groupes puis de la suite. Ce panel de « neutres » est indispensable pour le vote qui suivra le débat.
Un débat devant le groupe a ensuite lieu, opposant les quatre orateurs. Le groupe d’observateurs rend ses
observations (pour l’établissement de l’argumentaire et pour le débat). Le groupe, moins les orateurs, vote pour
ou contre une abolition liée au risque d’erreurs judiciaires.
3. Pourquoi prendre quand même ce risque ? A quoi sert vraiment la peine de mort ?
Quelle que soit la décision du groupe, il s’avère que des sociétés condamnent à mort, malgré ce risque. Le
groupe liste d’abord les conséquences que cela peut avoir sur la société dans son ensemble (martyre, désir de
vengeance, incompréhension, horreur…).
Ensuite, par petits groupes, chacun va chercher pourquoi des États maintiennent la peine de mort. Si on ne
punit pas seulement pour châtier un coupable, quelles sont les autres raisons? Par exemple, on s’interrogera
sur les défaillances d’une justice de classe, sur un système judiciaire inféodé au pouvoir politique, sur les
discriminations, sur une façon d’éliminer les opposants… et aussi sur le fait que la peine de mort touche au
tabou de la mort, au contrôle du destin de chacun par l’État. Forme de pouvoir, peut-être, plus que de punition.
Pour aller plus loin
Les souffrances des condamnés, l’emploi de certains types d’exécution et leur compatibilité avec la dignité .
La notion de dignité : celle du condamné, , celle des spectateurs (quand il y en a), celle des bourreaux.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 25
Thème 2 : Peine de mort et discrimination
Rappel
La peine de mort touche majoritairement, les classes défavorisées, les minorités de toutes sortes. Les plus
aisés / éduqués y échappent très souvent. C’est en outre une façon pour certains gouvernements de réduire
drastiquement leur opposition.
Objectifs
Pour les adolescents (à partir de 14 ans, mais particulièrement pour les 14-16 ans), c’est un moyen de
comprendre la discrimination à travers le cas exemplaire de la peine de mort. C’est une première approche de
la complexité de la question : si la peine de mort est un châtiment logique et légitime, comme le répètent ses
partisans, pourquoi ne touche-t-elle pas tous les criminels de la même façon ?
Activité
Matériel
Prendre deux cas dans les Actions urgentes ou Chroniques d’Amnesty International France. Par exemple, un
condamné, mineur au moment des faits, et un trafiquant de drogue. Exemples d’Actions urgentes :
• En Arabie saoudite, Rizana Nafeek, ressortissante de Sri Lanka, a été condamnée à mort en 2007 pour le
meurtre d’un nourrisson dont elle s’occupait. On pense qu’elle a « avoué » le meurtre pendant qu’elle était
interrogée par la police. Elle avait 17 ans. Elle s’est rétractée par la suite. (MDE 23/012/2010 )
• En Chine, Robert Shan Shiao-may, et Lien Sung-ching ont été condamnés à mort pour trafic de drogues,
possession illégale de drogues et possession illégale d’une arme à feu. Ils étaient accusés d’avoir envoyé
192 kilogrammes de métamphétamine aux Philippines depuis le continent en passant par Hong Kong. (ASA
17/028/2011 )
Se documenter sur la peine de mort : dans les deux pays choisis, les cas pour lesquels elle est prononcée, les
statistiques (caractéristiques des condamnés : classe ou caste, niveau socio-culturel, appartenance à une minorité,
etc), sans aller dans trop de détails.
La notion de discrimination
Définir cette notion à partir des exemples trouvés, puis de façon générale.
Approche plus personnelle de la discrimination
• Qui a connaissance de personnes discriminées, en général? Pour quelle raison ?
• Ces personnes discriminées sont-elles ici plus facilement poursuivies par la justice que les autres ?
• Quels sont les droits de la défense en France ? Dans d’autres pays (sans chercher l’exhaustivité, pointer des
différences manifestes) ?
Discrimination et justice
• Ces droits de la défense sont-ils assurés pour tous ? Si non, pourquoi ?
• Appartenir à une minorité ethnique, religieuse… peut avoir des conséquences sur le rapport à la justice.
Pourquoi ? Des exemples ?
• La plus grande des discriminations devant la justice vient sans doute de la pauvreté : pourquoi ? Essayer de
lister les conséquences et les causes de cette inégalité.
L’exemple des quartiers des condamnés à mort
Tenter une statistique (religion, couleur de peau, origine sociale, motif de la condamnation…) des personnes
qui s’y trouvent en ce moment. Quelles conclusions tirer de cet exemple ?
Pour aller plus loin
• On peut visionner le film Omar m’a tuer, de Raschdy Zem (2010) afin de comprendre comment peut se
fabriquer un coupable idéal, quelle que soit sa réelle implication dans le crime. Même chose pour Le pullover rouge, de Michel Drach (1979).
• Le cas de la lapidation dans la charia : avec quelles autres discriminations coïncide-t-elle ?
• Actions urgentes/lettres concernant des personnes défendues par Amnesty International, en attente d’une exécution.
• Parmi les cas des 12 personnes en danger (campagne proposée par Amnesty International) s’il se trouve
une personne condamnée à mort, on peut aussi lui écrire, ainsi éventuellement qu’à sa famille (en suivant
les indications fournies). Cette manifestation de soutien peut se faire avec l’aide des professeurs de langue.
26 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Thème 3 : Peine de mort et secret
Rappel
Certains pays mettent en avant l’effet dissuasif de la peine de mort tout en imposant le secret autour d’elle.
Cette dichotomie est encore un signe du flou entourant la peine capitale.
Objectifs
Dès 16 ans, comprendre le double sens d’un discours qui s’appuie sur le souci apparent de la sécurité nationale.
Prendre parti dans une situation nette : soit la peine capitale est utile et il faut en parler, la montrer, la rendre
exemplaire, soit non, et il faut en parler pour l’abolir.
Activité
1. Prise de conscience du problème
• Question ouverte aux jeunes, en petits groupes : « comment peut-on associer peine de mort et secret ? ».
Chaque groupe réfléchit et désigne un rapporteur.
• Mise en commun des réponses, au tableau en les regroupant par grands axes.
2. Analyse des grands axes trouvés
Selon les groupes, les réponses varieront, mais on peut présumer que les thèmes suivants seront évoqués :
• Le secret autour de la condamnation, la détention, la date et l’exécution.
• Le secret autour des statistiques du pays (condamnations, motifs, exécutions)
• La sécurité publique invoquée avec le « secret d’état ».
3. Il s’agit alors, en groupe entier, de discuter le bien-fondé de ces formes de secret
• Quel bénéfice la société tire-t-elle de ces formes de secret ? (Rappel : certains gouvernements évitent ainsi
de répondre à de trop nombreuses sollicitations).
• Quels inconvénients représentent ces mêmes pratiques pour les citoyens ?
4. Secret et débat
Au terme de ces analyses, les jeunes décodent la politique du secret comme un moyen, non de dissuasion,
mais de contrôle de la société et des éventuels contestataires.
Le rappel des traités ratifiés par ces États permet de montrer le double langage tenu. On s’interroge alors sur
la notion de criminel dans ce type de société.
Crime et criminel : tentative de définition, en général et en particulier dans des sociétés totalitaires.
Pour aller plus loin
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Peine de mort et double discours : protéger les citoyens ou l’État ?
Liens entre peine de mort et usage de la torture.
Évolution des diverses religions dans leur discours sur la peine capitale.
Les exécutions en Iran : la loi de compensation. Si l’argent entre en jeu, ne change-t-on pas de domaine ?
Les exécutions aux USA et la discrimination ethnique, sociale. Recherche d’autres problèmes de société
ayant fait / faisant l’objet d’un secret : l’objection de conscience, certains conflits comme la guerre d’Algérie…
Qu’en conclure ?
Thème 4 : Peine de mort et mineurs délinquants
Rappel
La Convention relative aux droits de l’enfant (CIDE), que tous les pays (sauf les USA et la Somalie) ont ratifiée,
interdit la détention à perpétuité et la peine capitale pour des crimes dont les auteurs avaient moins de dix-huit
ans au moment des faits. Or, des exécutions de mineurs délinquants ont toujours lieu.
Objectifs
Les jeunes sont sensibles à ce qui touche d’autres jeunes et l’exécution de mineurs au moment des faits est de
nature à leur faire comprendre les enjeux de la peine de mort et ce qu’elle recouvre.
Ainsi, quand des pays n’exécutent plus les mineurs, mais imposent une condamnation à perpétuité (par ailleurs
interdite par la CIDE), quelle est la conception de la justice ? De la réhabilitation ? Du châtiment ?
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AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 27
En outre, on sort des problèmes classiques de la peine de mort : erreur judiciaire, exemplarité… pour en
aborder d’autres liés à la société. Le fait que de nombreuses naissances ne soient pas déclarées prive des
jeunes de leur « excuse » de minorité, la discrimination les touche encore plus fortement que les majeurs, alors
qu’ils n’ont pas encore pu tenter de se révolter contre ces injustices.
Activité
On s’adresse à tous les jeunes, dès 14 ans.
La proximité des âges pour les participants et les mineurs condamnés peut entraîner une sympathie qui aide
à la réflexion.
1. Aborder le problème de la minorité
Les questions préalables pourront porter sur : qu’est-ce qu’un enfant ? Dans quels pays la majorité est considérée
atteinte avant 18 ans ? Les enfants ont-ils des droits particuliers ? Qu’est-ce qu’un mineur délinquant ? Pourquoi
une personne majeure ne doit pas être exécutée pour un crime commis quand elle avait moins de 18 ans ?
Présentation de la CIDE qui précise ces droits. Ceci peut être fait par les jeunes eux-mêmes, après des
recherches, ou bien par les formateurs ou par des intervenants d’Amnesty International.
2. Pourquoi un statut spécial pour les mineurs ?
On s’intéressera alors par exemple à la notion d’excuse de minorité et les dérives possibles.
Pourquoi les mineurs ont-ils généralement une protection spécifique ? De quels dangers les protéger, de la part
de la société, des autres, de soi-même ? Cela ne signifie pas qu’on les infantilise.
Et le rapport mineurs / justice ? Définir la justice des mineurs (hors peine de mort), voir que certains pays
comme les USA jugent et détiennent les mineurs exactement comme les adultes.
3. Quels sont les garants de cette protection ? Ses failles ?
Les garants sont tous les adultes, de la famille à la communauté internationale. Mais quand les protections
faillissent, que faire ? Pourquoi un État traite-il des enfants comme des adultes ? Un enfant peut-il prendre
totalement conscience de ses actes ?
Réflexion sur la prison : à quoi sert-elle ? Si elle punit et réhabilite, comment un mineur peut-il être rééduqué
s’il est exécuté ? Quelles autres motivations peuvent-elles faire apparaître ?
Pourquoi certaines minorités sont-elles plus facilement condamnées ? Quand on est mineur appartenant à
une minorité, une forme de double peine peut s’instaurer. Pourquoi, en Iran, peut-on, parfois, échapper à
l’exécution en dédommageant la famille de la victime ? La vie est-elle rachetable ?
4. Étude d’un cas
En Iran, Delara Darabi, 17 ans, et son ami Amir Hossein Sotoudeh, 19 ans, sont entrés par effraction chez une
femme pour un cambriolage. Amir Hossein l’aurait tuée au cours du vol. D’abord, Delara Darabi a « avoué » cet
homicide afin de sauver son ami de l’exécution ; il lui avait affirmé qu’en tant que mineure, elle ne pourrait être
condamnée à mort. Par la suite, elle est revenue sur ses « aveux ». Amir Hossein Sotoudeh a été condamné à
dix ans d’emprisonnement pour complicité de meurtre. Delara Darabi a été condamnée à mort puis exécutée
le 1er mai 2009. (Amnesty International - MDE 13/031/2009). Cette exécution est-elle justifiable ?
Quelles sont les violations commises au droit des enfants ? Aux droits de l’homme en général ?
Pour aller plus loin
Écrire pour une action urgente ou un cas de la Chronique d’Amnesty International concernant un mineur
condamné à mort.
Exposé sur la justice des mineurs en France : ses caractéristiques, son évolution, ses perspectives et risques.
Deux cas intéressants, à analyser rapidement :
• Un mineur délinquant. Behnoud Shojaee, un Iranien, 21 ans, a été exécuté à Téhéran, en 2009. Il a été
condamné à mort à titre de qisas (« réparation ») le 2 octobre 2006, après avoir été reconnu coupable du
meurtre d’un garçon l’année précédente ; Behnoud Shojaee avait 17 ans. La famille a refusé de pardonner
à Behnoud Shojaee, et son avocat a indiqué que les parents de la victime avaient poussé le tabouret sous
ses pieds après que la corde eut été placée autour de son cou. (Amnesty International - MDE 13/105/2009).
• Un « mineur » (en fait un jeune majeur handicapé mental) : Rickey Ray Rector, condamné à mort en 1992
(USA). Il ne mange pas le dessert de son dernier repas. Il préfère le garder pour son retour de la chambre
d’exécution... Commentaires.
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Réf : SF 11 EDH 29
Thème 5 : Peine de mort et répression
Rappel
La peine de mort peut sembler dissuasive a priori, mais les exécutions publiques des siècles derniers étaient un
excellent jour pour les voleurs, alors que le vol était puni de la peine capitale. Si la peine de mort ne dissuade
pas, elle n’éduque pas non plus, de façon évidente. Elle sert en revanche à réprimer.
S’il s’agit de supprimer des criminels, on peut lui accorder une certaine efficacité (pas de récidive possible pour
celui qui est exécuté), mais son absence de dissuasion limite la démonstration. De quelle répression s’agit-il ?
Objectifs
Dès 14 ans, mais plutôt niveau lycée.
Chercher à quoi sert la peine de mort, alors que ses partisans revendiquent son exemplarité, la dissuasion.
Quitter le domaine de la justice pour entrer dans le domaine politique.
Activité
Les participants vont réfléchir à certains points, de façon à progresser vers une autre vision de la peine de mort.
Ce sont des étapes pour qu’ils s’approprient une autre vision de cette notion.
1. Peine de mort et dissuasion
• Chercher sur Internet le taux d’homicides dans un certain nombre de pays, pour 100 000 habitants. Par
exemple, il était en 2008 de 1,75 au Canada, 0,8 en Allemagne, 14,2 dans le Fédération de Russie, 22 au
Brésil (source UNDP : hdr.undp.org/fr/).
• Faire la corrélation, ou plutôt son absence, avec l’existence de la peine de mort..
• Chercher l’évolution de ces taux avant et après l’abolition.
• Quelles conclusions en tirer ?
2. Peine de mort et éducation
• En quoi la peine de mort est-elle éducative ? Faire réfléchir par petits groupes.
• Les réponses étant, quoi qu’il arrive, peu nombreuses, s’interroger sur cette vacuité.
• Comment pourrait-on rendre une peine éducative ? En excluant la peine capitale, quelles solutions pourraiton envisager ? Voir des pays comme la Suède ou le Canada qui ont développé des stratégies pour éviter la
récidive.
3. Utilité de la peine de mort
• Si la peine de mort est maintenue dans presque la moitié des pays du monde, c’est que ces pays lui trouvent
une utilité. Laquelle ?
• A quel domaine appartient cette utilité ? Sommes-nous encore dans le domaine de la justice ? Si non, où
nous situons-nous ? Morale ? Politique ? Abus de pouvoir ?... ?
4. Fondements réels de la peine de mort
• C’est une forme de répression, envers certaines catégories de la population : minorités, opposants, gêneurs,
gens ne rentrant pas dans les cadres…
• Activité proposée : un 6/6 (voir plus haut) autour de cette forme de répression. La question peut être : «
Pourquoi maintenir la peine de mort, non dissuasive, inégalitaire, discriminante, dans un pays démocratique
ou qui souhaite le devenir ? ». Ceci peut amener à se poser la question du lien existant ou non entre
démocratie et peine de mort.
• Mise en commun des réponses. Vers l’action (action urgente, 12 personnes en danger…).
Pour aller plus loin
Les jeunes peuvent réaliser une exposition sur les aspects cachés de la peine de mort (modes d’exécution
éventuellement, trafic d’organes...).
Ils réalisent des affiches sur le thème de l’abolition, nécessaire et inéluctable, mais toujours menacée.
Ils peuvent organiser un sondage d’opinion avec comme axe l’appréhension des véritables enjeux de la peine
de mort et du refus de son abolition.
Réf : SF 11 EDH 29
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE - 29
Peine de mort
matériel pédagogique...
Documents réalisés par la commission éducation aux droits humains
d’Amnesty International France
• Regard sur la peine de mort. Référence : (SF 11 EDH 28 - 530 101- octobre - en cours de rédaction)
(S’adresser à la commission EDH [email protected])
• Fiche « mémo sur la peine de mort ». en cours de rédaction
(S’adresser à la commission EDH [email protected])
Documents réalisés par la commission abolition de la peine de mort
d’Amnesty International France
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Affiches - 3 visuels différents : chaise électrique, bourreau, peloton d’exécution - format 60 x 40 cm. (*)
Dépliant « Abolir la peine de mort » - réf. 650 010 (*)
Dépliant sur les modes d’exécution - réf. 650 101 (*)
Dépliant « Abolition de la peine de mort en France », réf. SF 11 MA 031 (*)
Quelques ouvrages
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La peine de mort dans le monde. Quand l’État assassine. Rapport. EFAI, 1989. 120p. (réf 570 850). (*)
L’Abolition. Robert Badinter, Fayard. 2000.
La ballade des pendus. François Villon. 1461.
Le Pull-over rouge. G. Perrault. M. Drach en a tiré un film portant le même titre.
Le couloir de la mort. J. Grisham.
Lettre ouverte de Julos Beaucarne
Claude Gueux. V. Hugo.
Le dernier jour d’un condamné. V. Hugo (1829).
Réflexions sur la peine capitale. A. Camus A. Koestler. 1957.
Le zéro et l’infini. A. Koestler. 1940.
L’exécution. Robert Badinter, Fayard. 1973.
L’étranger. Albert Camus. 1942.
La peine de mort ça existe encore ! Gérard Dhôtel 2008.
Des délits et des peines. Cesare Beccaria 1765 (en France).
Les peines de mort en Grèce et à Rome. Eva Cantarella 2000 (en France).
Peines de mort. Martin Monestier 1994.
Une histoire de la peine de mort. Pascal Bastien 2011.
DVD, documentaires...
• Images pour agir (réf SF08PDH06) disponible auprès du groupe local d’AIF. 2008
Deux spots : Peine de mort et Chaise électrique, ont pour thème la peine de mort. (*)
• Quand l’État assassine. M. Debord, Coproduction MatFilms-Histoire/Amnesty International. 2000.
(réf. 190305). (*)
30 - AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE
Réf : SF 11 EDH 29
Quelques sites...
• Les sites de différentes sections d’Amnesty International dont par exemple :
ŠŠ http://www.amnesty.org/
Site officiel d’Amnesty International.
ŠŠ http://www.amnesty.fr/
Site officiel d’Amnesty International France.
ŠŠ http://www.amnesty.be/
Site officiel d’Amnesty Belgique francophone.
ŠŠ http://www.amnistie.ca/
Site officiel d’Amnesty Canada francophone.
• http://www.peinedemort.org/peinedemort.php
La peine de mort dans le monde.
Ce site francophone traite de la situation de la peine de mort à travers le monde et du droit en matière de peine
capitale.
• http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/abolition-peine-mort/index.shtml
Un dossier complet sur l’abolition de la Peine de mort en France - ouvrages sur le thème.
• http://www.worldcoalition.org/fr/index
Site de la Coalition mondiale contre la peine de mort.
• http://www.deathpenaltyinfo.org/
Site du Death Penalty Information center, sur la peine de mort aux USA (en anglais)
• http://www.deathpenaltyworldwide.org
Base de données sur la peine de mort dans le monde (en anglais)
Quelques films et courts-métrages
Mort à l’écran. Court-métrage français réalisé par Alexis Ferrebeuf, drame sorti en 2005. Durée 14 min. Dix
minutes pour voter et décider de la vie d’un homme.
La Dernière marche (Dead Man Walking). Film américain réalisé par Tim Robbins, sorti en 1995, d’après
le livre du même titre de Sœur Helen Prejean, religieuse américaine, qui ne cesse de faire campagne pour
l’abolition de la peine de mort partout dans le monde.
Le Pull-over rouge. Film de Michel Drach sorti en 1979. Durée 120 mn.
La Veuve de Saint-Pierre. Film de Patrice Leconte. 2001. Durée 112 mn.
Les Sentiers de La Gloire. (Paths Of Glory) de Stanley Kubrick. 1957. Durée 126 mn. Exécutions de soldats en
1916. Longtemps interdit en France.
Jugé coupable (True Crime). Film américain réalisé par Clint Eastwood en 1999.
Sacco et Vanzetti. Film franco-italien réalisé par Giuliano Montaldo, sorti en 1971. Présenté en mai 1971 au
Festival de Cannes ; il retrace l’histoire de l’affaire Sacco et Vanzetti survenue dans les années 1920.
Nous sommes tous des assassins. Film franco-italien d’André Cayatte, sorti en 1952. Durée 115 mn.
Dancer in the Dark. Film co-produit internationalement, réalisé par Lars von Trier, sorti en 2000. Ce film a
remporté la Palme d’or et a valu à Björk le Prix d’interprétation féminine lors du 53e Festival de Cannes.
Le couloir de la mort. Film de Bret Michaels et Marvin Baker, durée : 90 mn.
Le droit de tuer. Film de Joel Schumacher. Durée : 149 mn.
Douze hommes en colère. Film de Sidney Lumet, Durée : 95 mn. Public : A partir de 10 ans.
Tu ne tueras point Film polonais réalisé par Krzysztof Kieslowski, sorti en 1988.
12. film russe de Nikita Mikhalkov, présenté à la Mostra de Venise (2007) et qui reçoit le prix de l’ Aigle d’or à
Moscou, la même année
(*) documents en vente Amnesty International France
Réf : SF 11 EDH 29
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Commission
éducation aux droits humains
•
[email protected] et/ou
Odile de Courcy - [email protected]
•01 53 38 65 14 (sauf mercredi)
•www.amnesty.fr
Commission
abolition de la peine de mort
•
[email protected] et/ou
Françoise Bigou - [email protected]
•01 53 38 65 13
•www.amnesty.fr
Contact local :
w w w. a m n e s t y . f r
76 Boulevard de la Villette
75019 Paris
Tél. : 01 53 38 65 65
Fax : 01 53 38 55 00

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