Libéralisation financière et accès au crédit et à l`épargne des
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Libéralisation financière et accès au crédit et à l`épargne des
Cahier de Recherche ELIFID 03-4 LIBERALISATION FINANCIERE ET ACCES AU CREDIT ET A L’EPARGNE DES SYSTEMES FINANCIER DECENTRALISES: LE CAS DES FEMMES AU BENIN Roch E. Gbinlo, Yves Y. Soglo Février 2003 Copyright. Organisation internationale du travail 2003 ISSN : 1609-8374 1 LIBERALISATION FINANCIERE ET ACCES AU CREDIT ET A L’EPARGNE DES SYSTEMES FINANCIER DECENTRALISES: LE CAS DES FEMMES AU BENIN Roch E. GBINLO, CEFRED-FASEG et Université d’Abomey Calavi∗ Yves Y. SOGLO, CEFRED-FASEG et Université d’Abomey Calavi Février 2003 Résumé La libéralisation financière a permis de mettre en place dans les années 90 des systèmes de financement décentralisé qui octroient aux populations défavorisées, de petits crédits compatibles avec leur cycle économique. Ce travail analyse à l’aide du modèle de sélectivité endogène de Heckman l’impact de la libéralisation financière sur l’accès au crédit et à l’épargne par les femmes au Bénin. Les analyses ont révélé entre aut res que malgré les réformes, les garanties constituent le principal obstacle à l’accès des femmes aux services financiers. Cependant, les femmes membres d’un groupement surmontent les obstacles liés à la garantie par le biais des cautions solidaires. L’étude suggère donc le développement des crédits de groupe afin d’accroître l’accès d’une frange plus importante de la population féminine aux services financiers. Numéro de classification JEL :D82, G14, G21, G33 Mots clés : Libéralisation financière, accès des femmes aux services financiers, coûts de transaction, garantie, besoin de crédit, appui, Bénin. Adresse pour correspondance : Roch E. Gbinlo, 10 BP 0113, Cotonou, Bénin, e-mail : [email protected] ∗ Nous remercions le Bureau International du Travail et le Gouvernement des Pays-Bas qui ont financé cette recherche dans le cadre du programme ELIFID dirigé par Madame D.M. Gross. Nous remercions également Les membres du Comité National de Pilotage, et son secrétariat, en particulier Monsieur M. Gracia. Nous témoignons enfin notre reconnaissance à des lecteurs anonymes pour leurs commentaires sur des versions antérieures. 2 LIBERALISATION FINANCIERE ET ACCES AU CREDIT ET A L’EPARGNE DES SYSTEMES FINANCIER DECENTRALISES: LE CAS DES FEMMES AU BENIN Roch E. GBINLO, CEFRED-FASEG et Université d’Abomey Calavi Yves Y. SOGLO, CEFRED-FASEG et Université d’Abomey Calavi February 2003 Abstract With financial sector liberalization in the 1990s new microfinance institutions developed rapidly. They specialize in providing small credits to the poor while taking into account their specific economic conditions. Using Heckman's estimator for sample selection this paper analyses the impact of financial liberalization on access to credit by women in Benin. The analysis shows that despite all the reforms, collateral requirements still remain the main obstacle to women's access to financial services. However, women who are members of groups avoid such difficulties. Therefore encouraging the development of group lending would increase access to financial services by the female population. 3 Table des matières 1. Introduction.......................................................................................................... .3 2. La libéralisation financière et les femmes au Bénin ........................................ .4 2.1 La libéralisation financière au Bénin……………………………………………...4 2.2 Les femmes et les services financiers…………………………………………….7 3. Cadre théorique de l’étude……………………………………………………..9 3.1 Survol sur la théorie de la libéralisation financière…………………….………..11 3.2. Accessibilité des femmes aux services financiers des SFD….……………..…..14 4. Méthodes d’analyses…..……………………………………………………….20 4.1 Modèle…………………………………….……………………………………..20 4.2 Application empirique………………………………………….………………..23 4.3 Données………………………………………..………………………………..26 5. Résultats…………………………………………………………………………28 5.1. Accès aux services financiers par les femmes………...……………………..28 5.2. Le chiffre d’affaires……………………………..…………………………...32 5.3. L’épargne…………………………………………………………………… 34 6. Implications de politique économique…………………………………………37 7. Conclusions……………………………………………………………………...38 Références bibliographiques……………………………………………………….40 Annexe I : Sigles et acronymes………………………………………………………42 Annexe II : Données………………………………………………………………….43 Annexe III : Définition des variables………………………………………………...44 Annexe IV Estimation Probit avec l’ effet additionnels de groupement sur les.…….45 Annexe V : Questionnaire d’enquête………………………………………………...46 Liste des tableaux Tableau 1 : Evolution du nombre de femmes membres des SFD……………………16 Tableau 2 : Evolution du taux de pénétration féminine……………………………...17 Tableau 3 : Taux d’accessibilité des femmes selon les différents types de SFD les plus importants au Bénin en 2000…………..……………….……………...19 Tableau 4: Description des variables quantitatives…....…………………………….26 Tableau 5 : Résultats de l’estimation de l’équation probit de l’accès aux services financiers…….…….……………..…………………………….……………...……..28 Tableau 6 : Coefficients de l’estimation de l’équation du chiffre d’affaires…………32 Tableau 7: Coefficients de l’estimation de l’équation d’épargne……...…………….35 Tableau A2 : Répartition des femmes enquêtées selon le type d’activité……………43 Tableau A3 : Variables explicatives de l’épargne et du chiffre d’affaires……...……44 Tableau A4: Résultats de l’estimation de l’équation Probit..….……….…………….45 4 Résumé non technique Malgré la prolifération des Systèmes de Financement Décentralisées (SFD), le nombre de femmes ayant accédé aux services financiers (épargne et crédit) demeure faible. Le s analyses de cette étude se sont surtout appesanties sur les facteurs limitant la probabilité d’accès des femmes aux crédits et à l’épargne des SFD, l’effet des crédits sur le chiffre d’affaire des femmes, et sur la mobilisation de l’épargne des femmes ayant obtenu du crédit des S FD, car pour ces dernières le crédit est un facteur dont la perspective constitue un motif d’épargne pour les femmes. Après avoir été longtemps écartées des questions de développement, les femmes sont désormais au cœur des programmes de développement et on estime aujourd’hui qu’aucun développement durable n’est possible si les femmes n’ont pas accès aux ressources nécessaires pour satisfaire leurs besoins vitaux. Les femmes représentent l’une des couches les plus vulnérables de la population et sont très actives. Malheureusement, elles exercent pour la plupart des activités très précaires. On les rencontre surtout dans l’agriculture, le commerce et les activités de transformation. Le caractère informel des activités menées par les femmes au Bénin les empêche d’accéder aux circuits financiers formels. Malgré la libéralisation financière qui s’est traduite par la prolifération des SFD, l’accessibilité des femmes aux services financiers ne s’est pas accru de façon spectaculaire. Pour tant l’approfondissement financier a permis de voir apparaître au Bénin quelques institutions de financement qui ne prête qu’exclusivement aux femmes ou à dominante féminine. Ainsi, sur un total de 403 342 crédits accordés en 2000 par les SFD, seulement 154 787 femmes ont pu bénéficié de crédits, soit 38,87%. Quant à la mobilisation de l’épargne des femmes par les SFD, elle semble s’améliorer au regard des résultats de l’enquête effectuée auprès des femmes. En effet, si la quasi-totalité des femmes enquêtées affirment épargner, l’épargne de 52% d’entre elles est drainée vers les circuits financiers des SFD. En ce qui concerne le taux de pénétration féminine, il est de 4,94%. L’étude a permis de déterminer les facteurs limitant la chance d’accès des femmes aux services financiers des SFD. Au nombre de ces facteurs, il y a le capital initial, la distance entre le domicile de la femme et la SFD, la taille du ménage, la garantie, la honte de s’endetter, le taux d’intérêt, la situation matrimoniale, l’appartenance à une mutuelle (groupement), l’appui des services financiers et les coûts de transaction. On constate que le fait d’être membre d’une mutuelle et de pouvoir bénéficier de l’appui des SFD augmente considérablement les chances d’accès des femmes aux services financiers. Ce résultat est important car on remarque en effet que l’une des contraintes qui empêchent les femmes d’accéder au crédit est leur incapacité à pouvoir gérer de manière rigoureuse, et surtout à pouvoir tenir un état comptable des différent s mouvements financiers qu’elles seront amenées à opérer. Elles sont donc davantage incitées à demander du crédit, si l’IF a un service assistance avant et après crédit capable de les guider dans les choix à effectuer, et dans la manière de gérer de façon optimale le crédit obtenu. L’étude montre que les coûts de transaction (constitution des dossiers e demande de prêt, frais et commissions), le niveau du taux d’intérêt pratiqué, les garanties rigoureuses exigées pour l’octroi des crédits, la distance, la honte de s’endetter, et la situation matrimoniale des femmes constituent de véritables obstacles pour l’accès des 5 femmes aux crédits offerts par les SFD. Néanmoins, pour les femmes membres d’un groupement, elles arrivent à surmonter l’obstacle que constitue la garantie, elles éprouvent beaucoup plus de honte. Le résultat le plus surprenant est que plus, le capital initial est élevé moins est faible la probabilité d’accès des femmes au crédit. Cela paraît un peu paradoxal car on s’attend beaucoup plus à ce que les femmes qui disposent d’un capital initial important aient plus facilement accès au crédit, puisqu’elles sont plus aptes à constituer des épargnes préalables ou forcées exigées par certaines SFD avant de bénéficier de crédit. Mais ce comportement des femmes s’explique surtout par le fait que les femmes qui disposent d’un capital important ne ressentent plus la nécessité d’emprunter et donc ne demandent pas de crédit. L’étude a révélé également que, la probabilité d’accès des femmes mariées au crédit et à l’épargne est faible. Plusieurs raisons expliquent cela : • • • d’une part elles sont moins libres pour entreprendre et doivent chaque fois requérir l’avis de leur mari avant de prendre la décision d’emprunter; d’autre part le fait que certains maris, sur tout en milieu rural, éprouvent une réticence à voir leur femme devenir financièrement indépendante est également une explication plausible; enfin elles courent également le risque d’être expropriées par leur mari d’une partie du crédit obtenu, en conséque nce elles travaillent davantage pour rembourser. L’analyse de l’effet du crédit sur le niveau d’activité et la mobilisation par les SFD de l’épargne des femmes a été appréhendée à travers les fonctions de chiffre d’affaires et d’épargne. On remarque ainsi que le crédit permet d’accroître le niveau d’activité des femmes et augmente également leur propension à épargner. Les crédits obtenus par les femmes sont productifs dans la plupart des secteurs d’activité, sauf dans l’agriculture ou le crédit influence négativement le chiffre d’affaires et le niveau d’épargne des femmes. L’analyse des résultats entraîne les implications socio-économiques suivantes: • • • Pour mieux mobiliser l’épargne des femmes les SFD doivent mettre en place des systèmes de collecte quotidienne. Il faut également constituer les femmes en groupement afin qu’elles surmontent les entraves relatives aux coût de transaction, à l’épargne préalable et aux garanties individuelles. Les résultats indiquent que les SFD peuvent orienter les crédits vers les secteurs d’activité tels que le commerce, les activités de transformation et également vers les femmes qui investissent dans les activités de moulin. 6 1. Introduction Ce papier analyse l’impact de la libéralisation financière sur l’accès au crédit et à l’épargne par les femmes au Bénin. Les raisons essentielles qui justifient une telle étude sont les suivantes : • Les études précédentes se sont surtout intéressées aux effets macroéconomiques de la libéralisation financière : effets sur le PIB, la croissance, etc. Cependant dans un contexte de lutte contre la pauvreté, le taux d’accessibilité des femmes aux services financiers peut être considéré comme un bon indicateur pour analyser les effets de la libéralisation financière sur les défavorisés. • L’approfondissement de la libéralisation financière au Bénin (qui a conduit à la création des SFD) a permis à un nombre plus élevé de femmes d’accéder aux services financiers (Mehou, et Hounnongbo,1999). Mais le nombre de personnes exclues des systèmes financiers est encore important, alors que les données permettent d’affirmer que le crédit améliore le bien-être des femmes (RDHB,1998). Il existe des barrières à l’accès des femmes aux services des SFD que la présente étude tente d’identifier afin d’apporter les solutions appropriées. Le problème aujourd’hui, est de savoir si la prolifération et la proximité des SFD dans le contexte de la libéralisation ont contribué à améliorer l’accessibilité des femmes au crédit et à l’épargne au Bénin. Notre préoccupation est de répondre aux questions suivantes: la libéralisation financière à travers la prolifération des SFD a-t-elle permis d’offrir des conditions particulières aux femmes en matière d’accès au crédit et à l’épargne ? Quels sont les déterminants de l’accès des femmes aux services financiers ? Quel est l’effet de la libéralisation financière sur les femmes ? En essayant d’apporter des éléments de réponse à ces questions, cette étude permettra de mieux appréhender l’impact des mesures de la libéralisation financière sur l’accès des femmes aux services financiers offerts par les SFD au Bénin. Les analyses économétriques et statistiques ont montré que ces facteurs tels que la distance, la garantie et les coûts de transaction constituent des obstacles pour l’accès des femmes aux services 7 financiers des SFD, mais également la honte de s’endetter constitue également un obstacle pour l’accès des femmes aux services financiers des SFD . En ce qui concerne l’accès à l’épargne, elle est appréciée différemment selon les secteurs d’activités des femmes. La suite du papier présente successivement le contexte de l’étude, le cadre théorique, le cadre institutionnel, les méthodes d’analyse, les résultats, les implications de politiques économiques et sociales et enfin, la conclusion. 2. La libéralisation financière et les femmes au Bénin 2.1 La libéralisation financière au Bénin Le secteur monétaire et financier apparaît à l’instar du secteur des infrastructures, comme un secteur prépondérant dans le développement économique. Ce secteur devrait mobiliser les ressources nationales et étrangères nécessaires à l’investissement et offrir à toutes les couches de la population un accès général aux services financiers. Il existe donc un lien étroit entre développement financier et développement économique (Schumpeter, 1911)1 . Le développement apparaît alors comme une promesse de financement (Assidon, 1991). Mais dans les pays en développement, l’accès aux ressources financières constitue un problème majeur. Après plusieurs années de répression financière, le Bénin à l’instar des pays de l’UEMOA, a entrepris au début des années 90, une politique de libéralisation économique et financière. Cette politique vise entre autre la réforme du secteur bancaire à travers l’ouverture du secteur et la libération des taux d’intérêt. L’effet attendu d’une telle politique est l’accroissement des dépôts effectués auprès des banques ainsi que l’augmentation du volume des crédits qu’elles accordent (McKinon 1973, Shaw 1973, 1 cité par P. Moreira 8 Banque Mondiale 1989). Cependant, cette approche de la libéralisation financière a négligé un des aspects les plus caractéristiques des économies en voie de développement : l’existence du secteur informel. Pour les économistes néo-structuralistes, (Taylor 1983, Van Winjbergen 1983 et Jesen 1989) l’offre de services financiers dans les PVD doit tenir compte de l’existence du secteur informel. Les prêts sur les marchés informels apparaissent en effet comme une alternative aux insuffisances des services bancaires (Venet, 1994). Il est opportun de rappeler que le but visé par toutes ces réformes est de permettre aux populations défavorisées de disposer des ressources nécessaires au développement de leurs activités afin d’améliorer leur bien-être. Ainsi, l’approfondissement des réformes financières a conduit à la création des SFD qui répondent beaucoup plus aux préoccupations des populations pauvres en matière de services financiers.Ces structures de financement décentralisées, en se rapprochant beaucoup plus des pauvres, pourraient contribuer à briser le cercle vicieux de la pauvreté (qui résulte de la faiblesse de revenu), car l’absence ou l’insuffisance de crédit est perçue comme une cause du faible niveau d’activité des agents économiques à faible revenu. Par ailleurs, elles pourraient également mobiliser l’épargne des agents économiques à faibles revenus car ces derniers épargnent mais ils n’ont pas accès aux structures de dépôt pour les petites sommes qu’ils parviennent à mettre de côté. Or, parlant de la pauvreté, il est généralement admis que les femmes sont plus pauvres que les hommes. En effet, les femmes ont moins de possibilité que les hommes d’accéder aux moyens de production et d’accumuler des richesses, ce qui fait qu’elles ont moins de garantie à offrir aux banques. Pour lutter de façon efficace contre la pauvreté, le contexte socio-économique actuel impose le développement de nouvelles stratégies, en l’occurrence, la réduction de la pauvreté monétaire des femmes en leur offrant beaucoup 9 plus de facilités en matière d’accès aux services financiers. Les Structures de financement décentralisées (SFD), beaucoup plus proches de la population, sont perçues comme un instrument au service des défavorisés et pourraient contribuer à réduire la pauvreté. En définitive, il s’agit de voir si le nouvel environnement financier, à la faveur de l’avènement des SFD a vraiment permis l’accès au crédit et à l’épargne des couches les plus défavorisées de la population en l’occurrence les femmes. La situation des femmes reste préoccupante en matière d’accès au crédit et à l’épargne. Au cœur du développement, les femmes occupent une place de choix. L’approche «Genre et Développement» vise le développement équitable et durable quant à l’accès aux ressources, actifs productifs aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Au Bénin, secteurs formels et informels confondus, les femmes actives sont majoritaires soit dans l’agriculture, soit dans les services principalement dans le commerce et la restauration. Dans le domaine de l’agriculture par exemple, 60 % des agriculteurs béninois sont des femmes (Diogo et Dadjo, 1997). La forte prépondérance des femmes dans l’agriculture ces dernières années est surtout liée au phénomène «Zémidjan2 » qui absorbe une grande partie de la population active masculine. Mais cette situation des femmes ne les prédispose pas à de meilleures conditions en matière d’accès aux ressources financières. Les femmes expriment des besoins financiers pour mener à bien leur activité de production. Pour faire face à ces besoins financiers, soit elles constituent des épargnes personnelles ou familiales qui sont le plus souvent très faibles voire insignifiantes, soit elles recourent au crédit auprès des systèmes formels ou informels d’épargne-crédit. A cet effet elles font souvent face à des conditions qui ne sont pas toujours compatibles avec 2 "Zémidjan" désigne les taxis -moto 10 leur possibilité financière, notamment en ce qui concernent les garanties qui leurs sont exigées. Il apparaît alors nécessaire de s’intéresser à l’accès des femmes aux services financiers face à la flo raison des SFD. Le cas du Bénin, dans cette optique paraît, important pour des raisons suivantes: • premièrement les femmes béninoises représentent respectivement 51,3% et 50,8% de la population totale et de la population active au Bénin (RDHB, 1998). La majorité d’entre elles mènent leurs activités dans le secteur informel. Pour financer leurs activités, les femmes du secteur informel éprouvent beaucoup de difficultés à obtenir un crédit auprès des banques classiques et sont obligées, de ce fait, de recourir à l’autofinancement et au circuit financier informel notamment les tontiniers et usuriers (Mehou et Hounnongbo, 1999). • deuxièmement au Bénin plus de 95% des femmes empruntent dans les circuits de financement informel. L’emprunt à la banque (0,2%) et les programmes d’aide (0,4%) constituent des cas négligeables de circuit formel empruntés par les femmes (RDHB, 1998) ; • troisièmement, l’environnement financier béninois est marqué par l’existence d’ une cellule «Cellule Micro finance» de suivi des systèmes de financement décentralisés au Ministère des Finances et de l’Economie, d’une multitude de SFD, surtout appuyées par le renforcement du cadre législatif. Ainsi la loi PARMEC à travers un ensemble de règles de fonctionnement vise à favoriser un développement harmonieux des institutions financières. • et enfin le cadre législatif en vigueur au Bénin n’impose aucune barrière aux femmes en matière d’accès aux services financiers. 2.2 Les femmes et les services financiers Pendant longtemps, les femmes ont été absentes des théories du développement économique, sauf dans la mesure où elles sont à l’origine de l’accroissement de la population et de la croissance subséquente de la population active. Elles sont traitées de façon subsidiaire. Par exemple, Mc Clelland (1961) ne s’est intéressé qu’au degré d’ambition des hommes dans une société et il a totalement ignoré le potentiel de développement des femmes. Cependant, malgré leur absence des débats concernant la théorie économique et l’activité d’entreprise, les femmes ont une histoire en tant qu’entrepreneur. Aujourd’hui, il n’y plus de doutes sur la participation des femmes aux 11 activités économiques dans une société. Ainsi l’amélioration de la condition économique de la femme dans un processus de développement est un impératif au niveau mondial. Les femmes pendant longtemps ont en effet été considérées comme étant incapables d’entreprendre et de gérer efficacement des unités de production, ce qui a limité leur accès au crédit. En effet, les femmes ont moins de possibilité que les hommes d’accumuler des richesses, ce qui fait qu’elles ont moins de garantie à offrir aux banques. Qui prêterait de l’argent aux femmes lorsqu’on sait qu’elles représentent la majorité des pauvres du monde ? (Stevenson,1988). Il est alors indispensable d’offrir aux femmes des moyens devant leur permettre de maîtriser leur destinée et lutter efficacement contre la pauvreté. Le développement des Structures de Financement Décentralisées (SFD) s’inscrit dans une stratégie de lutte contre la pauvreté. Ces SFD ont surtout pour rôle d’offrir des services à une clientèle pauvre et de servir la population dispersée dans les zones rurales. Bien que les femmes remboursent plus souvent leurs emprunts que les hommes (Banque Mondiale, 1994), elles rencontrent de nombreux obstacles lorsqu’elles cherchent à bénéficier des services des SFD (Weideman, 1992). Généralement on leur exige une garantie (titre de propriété de terrain), ou bien la co-signature d’un homme. Les femmes ont également moins de temps et d’argent que les hommes pour se rendre dans les institutions de crédits éloignées. A ces difficultés s’ajoute le fait qu’elles sont moins instruites et ont moins de contacts avec les structures officielles et sont moins équipées pour venir à bout de toutes les formalités. Des facteurs socio-culturels renforcent ces obstacles dans les pays du sahel : Par exemple, le crédit y est généralement considéré comme une «affaire d’hommes». Au Mali par exemple, qu’elles agissent individuellement ou en groupe, les femmes doivent présenter leur demande de crédit par 12 l’intermédiaire de leur mari ou des hommes qui sont des chefs de collectivité, voire obtenir la permission de ces derniers avant de pouvoir soumettre leur demande (Banque Mondiale, 1994). Face à ce constat cette étude a donc pour objectif principal d’analyser l’accès des femmes au crédit et à l’épargne, suite à l’avènement des Structures de Financement Décentralisées sur le marché monétaire et financier au Bénin. De façon plus spécifique il s’agit: • d’apprécier l’impact de l’avènement des SFD sur les conditions d’accès des femmes aux services financiers ; • d’identifier les facteurs influençant l’accès des femmes au crédit et à l’épargne des SFD ; • d’apprécier l’impact de l’avènement des SFD dans le marché monétaire et financier sur l’accès au crédit et à l’épargne des femmes au Bénin. 3. Cadre théorique de l’étude L’accès aux services financiers est lié à un certain nombre de facteurs dont le besoin de crédit, les coûts de transaction, et l’appui des services financiers. Le besoin de crédit se fonde sur le rôle que peut jouer le crédit comme soutien au développement de l’activité des femmes (Leberson, 1990). Le besoin de crédit pour les femmes se fait sentir non seulement pour satisfaire le besoin de financement de court terme, tels que les besoins de trésorerie pour subsister pendant la période de soudure, mais aussi pour des fins d’investissements comme par exemple l’achat d’équipement, la réalisation de petites immobilisations, etc. Ces besoins peuvent prendre diverses formes : 13 crédits de consommation ou de production ; notons que ces crédits sont souvent de courte durée. Les coûts de transaction en matière de demande de crédit représentent l’ensemble des coûts liés aux opérations de préparation et de présentation du dossier de demande, d’acquisition et de remboursement de crédit. L’importance relative de ces coûts peut décourager le demandeur potentiel de crédit surtout si les coûts dépassent le montant du crédit comme c’est souvent le cas pour les petits crédits. Au nombre de ces coûts, on peut citer les formalités administratives, les déplacements vers l’institution financière, les coûts de l’information, et éventuellement les pots de vin, les dessous de table, etc. L’appui des services financiers regroupe un ensemble de caractéristiques qui sont susceptibles d’inciter les femmes à demander un crédit ou non. On remarque en effet que l’une des contraintes qui empêchent les femmes d’accéder au crédit est leur incapacité à pouvoir gérer de manière rigoureuse, et surtout pouvoir tenir un état comptable des différents mouvements financiers qu’elles seront amenées à opérer. Elles seront donc davantage incitées à demander du crédit si l’institution financière a un service d’assistance avant et après crédit capable de les guider dans les choix à effectuer et dans la manière de gérer de façon optimale le crédit obtenu. La présente étude s’inscrit à la fois dans le cadre de l’approche «Genre et Développement» et de la théorie de la libéralisation financière. La «problématique genre et développement » met en exergue les inégalités entre l’homme et la femme quant à l’accès aux biens et services nécessaires pour satisfaire les besoins vitaux. Ainsi entre autres il est de plus en plus exigé de nos jours un accès égal des deux sexes aux ressources financières, aux actifs productifs (RDHB, 1998). La présente étude s’intéresse 14 à l’accès des femmes aux services financiers dans un environnement libéralisé. A cet égard, il importe de faire avant tout un survol synthétique de la théorie de la libéralisation financière avant d’aborder l’accessibilité des femmes aux services des SFD. 3.1. Survol sur la théorie de la Libéralisation financière La théorie économique de la libéralisation du marché financier distingue deux grandes écoles: l’école de la répression financière et l’école néo-structuraliste. Le concept de libéralisation financière apparaît dans la théorie économique au début des années 70 avec les précurseurs de l’école de la répression financière (McKinnon, 1973 et Shaw, 1973). Ils présentent la libéralisation du secteur financier comme un moyen efficace et simple pour accélérer la croissance économique dans les pays en voie de développement (Venet, 1994). Selon eux, le marché financier d’actifs publics ou privés est presque inexistant dans de nombreux pays en développement. Pour pallier cette insuffisance, le secteur bancaire est appelé à jouer un rôle considérable en matière d’allocation des ressources. A ce titre, les pouvoirs publics le considèrent comme un secteur stratégique sur lequel ils exercent un contrôle direct ou indirect. Il s’agit de la nationalisation pure et simple du secteur, la fixation des taux d’intérêt au dessous de leur niveau d’équilibre de marché pour les secteurs considérés comme prioritaires. Selon McKinnon (1973) et Shaw (1973) cette répression financière caractérisée surtout par la mise en place de taux nominaux administratifs, la poursuite de politiques monétaires trop laxistes affecte négativement l’économie et de ce fait ralentit la croissance économique. Mais à contrario, la libéralisation, du secteur financier à travers certains instruments tel que la libération du taux d’intérêt, serait à même d’accélérer la croissance économique. Shaw montre que la hausse du taux servi sur les dépôts, en encourageant la demande de dépôts des agents accroît la capacité de crédits du secteur bancaire et stimule l’investissement. Par ailleurs 15 cela devrait permettre d’accroître l’intermédiation bancaire et favoriser l’accès des emprunteurs aux fonds prêtables (Venet ,1994). Mais l’approche de McKinnon et Shaw a négligé un des aspects structurels les plus caractéristiques des économies en voie de développement : l’existence du secteur financier informel. Pour les tenants de la libéralisation financière, le dualisme financier n’est qu’un avatar de la répression financière. La Banque Mondiale (1989) confirme ce point de vue en affirmant que l’existence du marché informel est souvent un signe de la répression financière, mais que le secteur financier informel perdra de son importance avec la libéralisation financière. La remise en cause du lien entre répression financière et l’existence d’un secteur financier non officiel est à la base des critiques apportées par les néo-structuralistes aux thèses de McKinnon et Shaw. L’école néo-structuraliste prend spécifiquement en compte l’existence de marché financier informel et leur attribue une grande efficacité en terme allocation des ressources. Taylor (1983) et Van Winjbergen (1983) ont contesté le bien fondé de la libéralisation financière. En s’appuyant sur une vision structurelle de l’économie, ils ont estimé qu’une politique de libéralisation financière ne conduirait qu’à un ralentissement de la croissance économique. Pour eux, les prêts sur les marchés informels apparaissent comme une alternative aux insuffisances des services bancaires. Ils estiment que le secteur non officiel est par nature, plus efficace que le secteur bancaire. L’une des critiques formulées par les néo-structuralistes à l’encontre de la libéralisation financière concerne surtout les réserves obligatoires du secteur bancaire, qui représentent une certaine fraction des dépôts. Les réserves obligatoires constituées par les banques sont 16 dans les modèles néo-structuralistes, un obstacle à l’intermédiatio n financière, en ce sens qu’elles réduisent l’offre réelle totale de crédit, (Venet ,1994). Les modèles néo structuralistes reposant sur l’efficacité du secteur informel dans l’allocation des ressources et la constitution systématique des réserves obligatoires par le secteur bancaire pose également certains problèmes qui conduisent à la remise en cause de cette théorie. Il s’agit de : • l’efficacité attribuée au secteur informel quant à l’allocation des ressources est mise en cause. En effet, Christensen (1993) a montré que le secteur financier informel n’exerce pas réellement une activité d’intermédiation financière. Il est rare de trouver des intervenants du marché financier informel effectués à la fois les opérations de mobilisation de l’épargne et de fina ncement (prêts et investissements) grâce à la transformation des ressources courtes en emplois longs. Généralement les prêts sur le marché financier informel sont de faibles montants et de courte durée et constate souvent sur ce marché une relative spécialisation de l’activité : la collecte de l’épargne ou l’activité de prêts. • La constitution de réserves obligatoires par le secteur bancaire, qui selon Kapur (1992) constituent un gage de liquidité à court terme et donc, accroissent la sécurité du système et si le secteur informel veut connaître la même sécurité il doit lui aussi constituer des réserves. Toutefois il faut souligner les avantages principaux du secteur informel : sa bonne implantation géographique dans les zones où il est difficile au secteur bancaire officiel de s’implanter en raison des coûts ; l’absence d’asymétrie d’information entre prêteurs et emprunteurs dans la mesure où les prêts ne sont accordés qu’à des individus membres de la communauté (village, quartier) où l’information circule très vite ; enfin la faiblesse du risque d’aléa de moralité car le mauvais débiteur risquent l’exclusion pure et simple de la communauté. Face à la défaillance des systèmes officiels et à l’insuffisance des systèmes informels, on constate la prolifération des SFD qui sont les seules institutions ayant un objectif de développement. Elles ont un poids important en termes de nombre de guichets et d’emprunts mais faibles en termes d’épargne et de crédit (entre 0,5 % et 4 %) du crédit bancaire maximum au Bénin. (Hugon, 1996). 17 3.2. Accessibilité des femmes aux services financiers des SFD Au lieu d’étudier l’impact sur la croissance économique, l’investissement, etc., on peut mesurer les effets de la libéralisation financière à travers l’accessibilité des populatio ns, en particulier les femmes, aux services financiers offerts par les SFD. Le taux d’accessibilité des femmes aux services financiers peut être considéré comme un bon indicateur pour analyser les effets de la libéralisation financière sur les défavorisés. L’accès aux services financiers (crédit et épargne) par les femmes peut être défini ici comme le fait que les femmes bénéficient des services d’épargne et de crédit auprès des SFD. La microfinance étant un moyen clé de lutte contre la pauvreté, elle favo rise le renforcement des capacités des femmes. L’accès des femmes aux services financiers est nécessaire en ce sens qu’il permettra aux femmes de mener une activité génératrice de revenus et d’acquérir ainsi leur autonomie financière. Beaucoup de travaux empiriques se sont intéressés à l’accès des femmes aux services financiers des SFD. La Banque Mondiale (1996) dans une étude sur la pérennité des systèmes financiers décentralisés a montré que les femmes représentent 61% de la clientèle de l’échantillon. Dans l’échantillon, 63% de toutes les ONG sont à dominante féminine, ainsi que 30% des coopératives d’épargne et de crédit. Cependant ces structures sont de taille beaucoup plus petites que celles à dominante masculine. Le nombre médian de leurs prêts est de 1778 contre 2928 pour les structures à dominante masculine. Une étude menée sur 25 institutions de financement en Afrique de l’Ouest montre que les femmes représentent 54% de la clientèle, et que sur 13 ONG de l’échantillon, 10 servent en majorité les femmes. Mais, les institutions qui concentrent leurs efforts sur la clientèle féminine se caractérisent par l’octroi d’un plus faible montant de crédit (Banque Mondiale, 1997). Au Bénin la participation des femmes au réseau FECECAM est très récente (Fruman, 1997). Ceci est possible grâce à l’introduction du programme de Tout Petit Crédit aux Femmes (TPCF) en 1993. Ce programme consiste à octroyer des prêts de montants faibles (20 000 18 à 60 000 francs CFA) à des femmes membres d’un groupe. Beaucoup de femmes bénéficient des crédits individuels, après être passées par le programme TPCF. En juillet 1996, les femmes représentaient 45% des bénéficiaires de crédit du réseau pour 36,8 % de l’encours des prêts. En matière d’accès au crédit et de recouvrement des prêts par les femmes un exemple est souvent cité en modèle : Le cas de la Grameen Bank au Bangladesh qui fournit des crédits à des milliers de pauvres des campagnes, pour la plupart des femmes et recouvre environ 90 % de ses prêts (Banque Mondiale, 1994). Des travaux empiriques (Banque Mondiale, 1994) sur l’accès au crédit et à l’épargne par les femmes dans d’autres pays de la sous- région montrent que au Burkina Faso les femmes n’ont qu’un accès très limité au crédit institutionnel (seulement 2 des 74 groupements considérés dans le cadre de l’étude ont pu se procurer des fonds auprès de la Caisse Nationale de Crédit) mais ont un accès relativement satisfaisant aux crédits consentis par les ONG et les petits projets. Tandis qu’au Mali la mise en œuvre d’un mécanisme permet aux femmes d’avoir accès au crédit institutionnel ; il s’agit du Centre d’Assistance Coopérative (CAC), un canal par lequel, aussi bien les groupements d’hommes, les groupements de femmes que les groupements mixtes accèdent au crédit de la Banque Nationale de Développement Agricole (BNDA). En ce qui concerne le Bénin, les femmes représentent une clientèle de plus en plus privilégiée par certains SFD. L’approfondissement du système financier à travers l’émergence des SFD a favorisé leur rapprochement des populations défavorisées en l’occurrence les femmes. En moyenne au cours des quatre dernières années les femmes occupent 40,84% de la clientèle des SFD. L’évolution du nombre de femmes membres 19 des SFD est présentée dans le tableau 1. Tableau 1 : Evolution du nombre de femmes membres des SFD 1997 1998 1999 2000 Total bénéficiaire 272 824 291 857 341 458 403 342 Nombre de femmes 134 223 123375 116381 154 787 49 42 34 38,4 Pourcentage Source : Banque de données sur les SFD, PA-SMEC 1999 : Statistique des SFD du Bénin au 31 décembre 2000, Cellule Micro finance. Comme l’indique le tableau on note au cours des années une diminution des femmes ayant bénéficié des services financiers respectivement de 49% en 1997 à 38,37% 2000. Cela témoigne de l’existence d’un certain nombre de barrières qui réduisent leur accès aux services financiers. Au nombre de celles-ci on peut noter les difficultés qu’elles rencontrent pour faire face à l’échéancier de remboursement, comme par exemple, prêter de l’argent chez les usuriers afin de respecter l’échéance, les pressions qu’elles subissent en cas du non respect de l’échéancier de remboursement. Ces difficultés sont de nature à décourager souvent celles qui s’apprêtent à solliciter également des crédits. Il existe néanmoins au Bénin des SFD qui ne prêtent qu’aux femmes (ASSEF par exemple), mais dans ce cas aussi, quelques problèmes demeurent. Si l’ASSEF octroie parfois aux femmes des crédits sans garantie initiale, les délais de remboursement très courts (15 jours à 1 mois) ne leur permettent pas de rentabiliser les crédits obtenus. L’accessibilité des femmes aux services financiers des SFD peut être également apprécié par le taux de pénétration féminine qui est le rapport du nombre de femmes bénéficiaires de crédits par rapport à la population féminine tel que donné dans le Tableau 2. 20 Tableau 2 : Evolution du taux de pénétration féminine Année Nombre de femmes bénéficiaires Population féminine 3 Taux de pénétration (%) 1997 134223 2872800 4,7 1998 123375 3078000 4,0 1999 116381 3129300 3,7 2000 154 787 3129300 4,9 Source : Banque de données sur les SFD ; PA-SMEC 1999 : Statistique des SFD du Bénin au 31 décembre 1997,19898 1999 et 2000; Cellule Micro finance. Ce taux très faible (4,7 %) en 1997 est en baisse (3,7%) en 1999, malgré l’émergence des SFD qui s’occupent exclusivement des femmes. En moyenne le taux de pénétration féminine de 1997 à 2000 est de 4,3 %. Mais en dépit de cet intérêt accordé aux femmes, certains facteurs limitent leur accès aux services financiers. Les exigences traditionnelles d’octroi de crédit et la possession d’un compte d’épargne dans l'institution financière. L’attribution de crédit est souvent précédée de formalités administratives qui sont supposées limiter l’aléa moral et la sélection adverse. A cela s’ajoute, le temps d’attente avant de pouvoir bénéficier d’un crédit. C’est à dire qu’il y a généralement une longue période d’attente entre le dépôt des dossiers pour la demande de crédit et l’obtention effective de crédit par les bénéficiaires, ce qui ne permet pas toujours à ces dernières d’utiliser les crédits aux fins auxquelles ils sont destinés. L’exclusion de la majeure partie de la population du système bancaire a conduit à la création d’autres organisations institutionnelles (SFD) pour pallier les insuffisances du secteur bancaire en matière d’offre de services financiers aux défavorisés, et en particulier les femmes. Ces formes nouvelles d’organisation devraient conserver les 3 En considérant que les femmes représentent 51,03% de la population totale, selon projections de l’enquête sur l’Emploi du temps 1998(RDHB, 1998) 21 caractéristiques positives du secteur informel tout en assurant son intégration au secteur officiel. Au nombre de ces caractéristiques, il y a la souplesse, la rapidité relative et la proximité. A cela s’ajoute l’importante richesse des liens interpersonnels qui sont à la base de l’efficacité des groupements 4 . Ces nouvelles organisations d’épargne et ou de crédit fonctionneraient de manière similaire à des groupements informels misant sur la solidarité et la mutualité. C’est cette philosophie qui sous-tend la création et l’émergence des Systèmes de Financement Décentralisé dans les pays de l’UEMOA. Ces institutions qui visent l’éradication de la pauvreté et le renforcement de la capacité financière des pauvres, ont non seulement une fonction d’intermédiation financière (en offrant des services d’épargne et ou de crédit) mais aussi une fonction d’intermédiation socioéconomique. Lesdites institutions mettent en œuvre certaines prestations qui visent à organiser et à structurer leurs membres ou clients, ainsi qu’à les former, pour accroître leurs compétences dans de nombreux domaines notamment la gestion, la finance, la santé, l’éducation, etc. (Soulama, 2000). On distingue trois types de SFD au Bénin : • • • Les SFD de type mutuelles ou coopérative d’épargne et de crédit ; Les SFD de type crédit direct ; Les ONG ou projet à volet crédit. Les trois types de SFD varient beaucoup par la taille et la composition de leur clientèle comme le montre le Tableau 3. 4 Les femmes qui autrement n’auraient pas accès au crédit en raison des coûts de transactions élevés qu’entraînent une multitude de petits prêts pour les SFD et du manque de garanties individuelles se mettent en association pour demander de gros crédits et constituer une caution solidaire qui peut aussi remplacer un certain nombre de garanties. 22 Tableau 3:Taux d’accessibilité des femmes selon les différents types au Bénin en 2000 SFD Nombres de membres ou clients Dont femmes %de femmes Mutuelles ou coopératives d’épargne et de crédit FECECAM CBDIBA FENACREP CAISSE CODES CBEC ASSEF CECA Convergence 2000 CMMB ASOPRIB CPDyP MC MDB 300 847 16 663 34 356 227 121 11 055 304 1823 318 1337 697 54 3003 96271 6769 11 465 101 37 11 055 279 1331 112 436 321 10 1098 31,99 40,62 33,37 44,49 30,57 100 91,77 73,01 35,22 32,61 48,05 18,51 38,56 Total 370 805 129 285 34,86 17 030 721 5631 13794 294 4223 80,99 40,77 74,99 4897 3085 62,99 28 279 21 396 75,66 Crédit direct PADME PAPME VITAL BENIN FICA Total FINANCE ONG et projet à volet crédit ADIL AIJPD ID IAMD 198 41 2536 1483 115 40 2522 1429 58,08 97,56 99,44 96,35 Total 4258 4106 96,43 TOTAL SFD 403 342 154 787 38,37 Source : Elaboré à partir des statistiques de Banques de données sur les SFD (2000), Cellule Microfinance et données sur le réseau ASSEF au 31 mars 2000 Ainsi, les SFD de types mutuelles ou coopératives d’épargne et de crédit touchent 91,93 % de l’ensemble de la clientèle des SFD. Par contre les femmes ne représentent que 34,86 % de leur clientèle. Les SFD de type crédit direct ne touchent que 7,01% de l’ensemble de la clientèle des SFD. Mais ils constituent l’une des catégories de SFD à 23 dominance féminine car 75,66% de leur clientèle sont constituées de femme. Les ONG et projet à volet crédit, qui constituent la troisième catégorie des SFD touchent seulement 1,05% de l’ensemble de la clientèle féminine, avec une clientèle féminine de 96,43% en 2000. Au 31 décembre 2000, en considérant les SFD les plus importantes, la clientèle féminine s’élève à 154 787 soit 38,37% de l’ensemble de la clientèle des SFD. L’intérêt de certains SFD pour la clientèle féminine s’explique par le fait que les femmes constituent une cible privilégiée des programmes de lutte contre la pauvreté. De plus ces types de SFD n’exigent pas souvent des garanties mais qu’elles préfèrent les cautions solidaires, de plus les crédits octroyés sont des crédits directs qui n’exigent pas d’épargnes préalables. 4. Méthodes d’analyse Un modèle en deux étapes sera utilisé pour estimer d’une part les facteurs qui influencent la probabilité d’accès des femmes au crédit et d’autre part d’analyser l’impact de l’accès à l’épargne et au crédit sur l’activité des femmes. 4.1 Modèle Nous faisons l’hypothèse que certaines variables socioéconomiques et culturelles constituent les obstacles à l’accès à l’épargne et au crédit par les femmes et que l’accès à l’épargne et au crédit affecte de façon fondamentale le niveau d’activité des femmes. Il faut donc estimer dans un cadre de sélectivité endogène, un modèle en deux étapes correspondant aux deux groupes de femmes : celles qui ont accès aux services financiers (ACCESS) auprès des SFD et celles qui n’y ont pas accès. Cela équivaut d’une part, à déterminer les facteurs influençant la probabilité d’accès des femmes aux services 24 financiers des SFD, et d’autre part analyser l’impact de l’accès à l’épargne et au crédit sur l’activité des femmes. Pour ce faire nous utiliserons la méthode en deux étapes de Heckman (1979). La première étape du modèle consiste à déterminer suivant un choix binaire (probit) les facteurs influençant la probabilité qu’une femme accède aux services financiers. ACCESS = Aβ + u (1) où ACCESS est une variable latente inobservée qui désigne l’accès de la femme aux services financiers. ACCESS=1 si la femme a accès aux services financiers d’une SFD, si ce n’est pas le cas ACCESS=0, A est un vecteur de variables susceptibles d’affecter la probabilité d’accès des femmes aux services financiers. La nature de la variable ACCESS (0 ou 1) entraîne un problème d’hétéroscédasticité au niveau des résidus. La variance dépend en effet de l’observation et par conséquent les estimateurs obtenus avec les MCO ne sont efficaces. Ces estimateurs sont biaisés. Pour que les estimateurs recouvrent leurs propriétés optimales, nous utilisons le modèle Probit qui consiste à associer au modèle la fonction densité cumulée de la loi normale. Probit permet ainsi d’obtenir des estimateurs efficaces et consistants (Maddala, 1983) La seconde étape du modèle consiste à une partition endogène de l’échantillon (un sous échantillon comprend les femmes qui ont accès aux services financiers et le second celles n’y ont pas accès) et analyser dans chaque sous échantillon l’impact de la proximité et de l’accessibilité des SFD sur les femmes. Le chiffre d’affaires et l’épargne sont utilisés respectivement comme les variables dépendantes de mesure de l’impact de crédit sur l’activité des femmes et de l’accès de ces dernières à l’épargne. 25 Le manque de ressources financières explique souvent le faible niveau d’activité de certaines femmes et l’incapacité d’autres à entreprendre des activités économiques. L’objectif du crédit étant de comb ler ce déficit chez les femmes, il importe alors d’apprécier l’utilisation qui est faite du crédit obtenu, c’est à dire s’il influence effectivement leur activité économique. Nous choisissons le chiffre d’affaires (CAFF) pour apprécier l’impact du crédit sur l’activité des femmes en supposant que si elles utilisent le crédit pour financer leur activité, leur chiffre d’affaires devraient s’accroître, toutes choses étant égales par ailleurs. Le crédit étant un facteur dont la perspective constitue un motif d’épargne pour les femmes, l’équation d’épargne (EPARG) nous permet d’analyser l’accès à l’épargne des femmes ayant obtenu le crédit. Si X est l’ensemble des variables qui expliquent le chiffre d’affaires et Y l’ensemble des variables explicatives de l’épargne, les équations empiriques se présentent comme suit : CAFF = Xα + µ (2) EPARG = Yλ + ε (3) µ et ε sont des termes d’erreur. La procédure en deux étapes de Heckman (1979) nous permet d’obtenir les différents paramètres à interpréter. Dans un premier temps, le modèle de choix binaire (1) est estimé et les valeurs obtenues du vecteur β sont utilisées pour calculer les vecteurs des ratios inverses de Mill : LAMBDA 1 = φ/ψ quand ACCESS=1 et LAMBDA 2 = φ/(1 - ψ) quand ACCESS=0. φ et ψ sont respectivement la densité et la distribution cumulée issues de l’estimation de l’équation (1). Dans un second temps, les équations (2) et (3) sont estimées pour chaque sous-groupe de femmes en introduisant comme régresseurs LAMBDA 1 pour ACCESS=1 et LAMBDA 2 pour ACCESS=0. Les régresseurs LAMBDA 1 et LAMBDA 2 permettent d’éviter le biais de sélection (Heckman, 1979). 26 Ce dispositif sélectif est justifié méthodologiquement, car les femmes qui ont accès aux services financiers et celles qui ne l’ont pas font face à des contraintes différentes même si les fonctions de revenus et d’épargne peuvent avoir des formes fonctionnelles identiques. Les paramètres sont donc supposés varier d’un sous groupe à un autre. Il existe deux façons de procéder. La première consiste à inclure des variables muettes dans un modèle estimé sur l’échantillon total afin de saisir les influences de l’accessibilité des femmes aux services financiers. Cette méthode comporte une difficulté : Dans le cas où tous les paramètres sont affectés, il faut introduire une variable muette pour chacun d’eux. Ce qui conduit à la deuxième méthode, c’est à dire des régressions séparées pour chaque groupe de femmes : ACCESS=0 et ACCESS=1 qui permettraient de saisir les différences en terme de réponse. L’intérêt de cette méthode est qu’elle permet d’obtenir des estimateurs qui ne souffre d’aucun biais. Elle permet de régler directement à l’aide des Ratio de Mills les problèmes d’hétérostédasticité et d’autocorrélation dans les équations du chiffre d’affaires et de l’épargne (voir Heckman, 1979). 4.2. Application empirique La forme fonctionnelle de l’équation ACCES est : ACCESS = c1 + c 2 * AGE + c3 * DIST + c4 * CAPINI + c5 * TMEN + c6 * GARANTIE + c 7 * HEND + c8 * TINT + c9 * SITMAT + c10 * EDUCAT1 + c11 * GROUP (4) + c12 * APPUI + c13 * TRANS + e Où ACCESS, la variable dépendante désigne l’accès au crédit et à l’épargne. C’est une variable binaire qui prend la valeur 1 si la femme a accès aux services financiers des SFD et 0 sinon. Les ci sont les paramètres de l’équation à estimer. 27 Les variables explicatives sont respectivement : AGE qui est l’age de la femme, le signe attendu de cette variable est positif car on estime que la femme âgée pourrait faire une bonne utilisation du crédit obtenu ; DIST qui est la distance du domicile au SFD, le signe attendu est négatif car l’accès au SFD deviendra difficile si le domicile des femmes est éloigné des SFD ; CAPINI est le capital initial de la femme, le signe attendu est négatif car plus les femmes disposent d’un capital initial moins elles exprimeront un besoin de financement ; TMEN est la taille du ménage, le signe est positif car la taille du ménage est très importante dans les cha rges à supporter par les femmes, ce qui nécessite effectivement une assistance à ces dernières afin de vaincre la pauvreté ; GARANTIE est une variable qui traduit le fait que la femme considère la garantie comme une contrainte ou non, le signe attendu est négatif ; HEND est une variable socioculturelle qui exprime la honte de s’endetter, c’est à dire si la femme a honte de s’adresser à une institution de micro finance pour demander un crédit, le signe attendu est négatif ; TINT est l’appréciation que les fe mmes ont du taux d’intérêt pratiqués par les SFD, c’est à dire, si la femme estime que le taux d’intérêt est élevé ou non le signe attendu est négatif ; SITMAT est la situation matrimoniale le signe attendu peut être positif ou négatif ; EDUCAT est le niveau d’éducation de la femme le signe attendu est positif car le niveau d’éducation est déterminant dans les formalités à remplir afin d’obtenir le crédit ; GROUP est la variable qui rend compte de l’effet du groupement c’est à dire d’être si la femme est me mbre d’un groupement ou non, le signe attendu est positif car le fait d’appartenir à un groupement leur permettra de surmonter un certain nombre d’obstacles tels que la garantie, les difficultés liées aux formalités à remplir ; APPUI regroupe un ensemble de caractéristiques qui traduisent l’assistance avant et après crédit, il permet d’apprécier la perception des femmes face à l’appui apporté par les SFD avant et après accès aux crédits le signe attendu est positif ; CTRANS est l’ensemble des coûts de transaction ils désignent les dépenses liées aux formalités administratives et le cas 28 échéant, les pots de vin ainsi que les dessous de table face à l’impossibilité de pouvoir mesurer de façon exhaustive ces coûts, un variable binaire est introduite pour appréhender la perception des femmes vis-à-vis de ces coûts le signe attendu est négatif. Un signe positif indique la variable mise en cause accroît la probabilité d’accès des femmes aux services financiers, alors que le signe négatif indique que la variable mise en cause réduit la chance d’accès des femmes aux services financiers Les formes fonctionnelles retenues pour l’estimation de l’épargne et du chiffre d’affaires sont identiques. Ce choix est justifié par le fait que l’épargne réalisée dépend des marges bénéficiaires et donc du niveau de l’importance de l’activité menée. Les deux équations ont donc dans le cadre de cette étude les mêmes variables explicatives. Les formes fonctionnelles semi- log5 se présentent donc comme suit : Log ( EPARGN ) = b1 + b2 * AGE + b3 * DIST + b4 * CAPINI + b5 * TMEN + b6 * AGRI + b7 * ANIM + b8 * COM + b9 * MOUL + b10 * ART + b11 * TRANSFO (5) + c12 * LAMBDA + u et, Log (CAFF ) = d1 + d 2 * AGE + d 3 * DIST + d 4 * CAPINI + d 5 * TMEN + d 6 * AGRI + d 7 * ANIM + d 8 * COM + d 9 * MOUL + d10 * ART + d 11 * TRANSFO + d12 * LAMBDA + u (6) Les bi et di sont les paramètres de l’équation à estimer, les variables Log(EPARG) et Log(CAFF) sont les variables dépendantes qui désignent le logarithme de l’épargne et du chiffre d’affaires, tandis que AGRI, ANIM, COM, MOUL, TRANSFO désignent respectivement agriculture, production animal, commerce, moulin, et transformation qui 5 Le Log devant variable dépendante, consiste à ramener les variables du modèle à la même échelle, mais la présence des variables muettes dans le modèle ne le permet pas, ce qui fait que nous avons fait recours au modèle semi – log qui consiste à linéariser uniquement la variable dépendante. 29 représentent les secteurs d’activité des femmes et LAMBDA le ratio inverse de Mills. Les signes attendus de ces variables explicatives sont présentés en annexe 3. 4.3. Données Les données 6 utilisées dans le cadre de cette étude sont des données transversales en coupe instantanée. Il s’agit de données d’enquête collectées auprès de 1000 femmes menant une activité génératrice de revenus. L’échantillon comporte aussi bien des femmes ayant accès aux services financiers (51 %) que des femmes n’y ayant pas accès (49 %). Les zones d’enquête retenues sont les départements du Littoral et du Zou, un questionnaire a été remplis par chaque femme à raison de 500 femmes dans chaque département. Les femmes évoluent dans plusieurs secteurs d’activité (annexe 2) ; elles se retrouvent en majorité dans l’agriculture, (35,6 % dans le Zou) et dans le commerce (38,8 % dans le Zou et 67,6 % dans le Littoral). L’enquête a duré deux mois (de juin à juillet 2001). Quelques statistiques descriptives des données d’enquête sont présentées dans le Tableau 4. Tableau 4 : Description des variables quantitatives Variables Caff Eparg Dist Tmen Age Capini ACCESS = 0 Moyenne Min Max 334566 3600 3000000 16439 100 200000 6008 200 30000 4,91 1 21 37,85 19 66 346081 2500 3500000 ACCESS = 1 Moyenne Min Max 593442 20000 6000000 45178 400 200000 3063 10 5000 5,46 1 13 39,33 17 57 294541 4000 2500000 Moyenne 468130 31289 4478 5,20 38,61 319039 TOTAL Min Max 3600 6000000 100 200000 10 30000 1 21 17 66 2500 3500000 Source : Données d’enquête L’analyse de ces données montre qu’en moyenne, le chiffre d’affaires est plus important chez les femmes ayant bénéficié des services financiers que chez celles qui 6 L’étude n’a pas pris en compte les information liées à la demande de crédit c’est à dire les informations obtenues à l’aide de la question 3.3, cela est liée surtout à la contrainte de page. Nous estimons utiliser ces informations pour une étude ultérieure sur l’analyse de la demande de crédit féminin. Ce qui devrait exiger toute une revue de littérature et un modèle sur la fonction de demande de crédit. 30 n’en ont pas bénéficié. L’épargne réalisée au niveau des femmes ayant accédé aux services financiers est également plus élevée et représente près du triple de l’épargne des non bénéficiaires. La distance entre le domicile et l’institution de financement est plus élevée chez les femmes n’ayant pas bénéficié de crédit que chez les femmes ayant accès aux services financiers. En moyenne, les femmes menant une activité génératrice de revenus sont jeunes (39 ans). Cet âge moyen est d’environ 38 chez les femmes ne bénéficiant des services financiers et de 40 ans chez les autres. Le fait le plus curieux cependant, est de constater que si l’épargne et le chiffre d’affaires sont plus important chez les femmes ayant accès aux services financiers que chez les femmes n’y ayant pas accès, les dernières disposent en moyenne d’un capital initial plus important que les premières. Cela est sans doute dû au fait que la plupart des femmes qui demandent le crédit sont celles qui éprouvent un besoin de financement. Par ailleurs, selon les données d’enquêtes, en moyenne 80% des femmes estiment que les conditions d’accès au crédit sont contraignantes. Ainsi le délais d’attente, les garanties, l’épargne avant et après le crédit, le délais de remboursement constituent toujours des barrières structurelles pour les femmes. Enfin, au niveau de la quasi totalité des SFD, il faut remarquer que les femmes et les hommes sont soumis aux mêmes conditions d’accès. Donc, il n’y a pas de conditions particulières pour les femmes en ce qui concerne l’accès aux services financiers, mais seulement que l’on note dans l’espace des SFD au Bénin deux qui s’ouvrent exclusivement aux femmes. Notons toutefois que le travail présente une limite majeure. En effet l’étude aurait pu s’intéresser à l’impact de la libéralisation financière sur l’accès au crédit et à l’épargne par les femmes dans tout le secteur financier, mais faute d’avoir des informations 31 relatives à l’accès aux services financiers des femmes auprès des banques, il n’est pas possible de prendre en compte tout le système monétaire et financier. C’est pourquoi l’étude est limitée au cas spécifique des SFD. 5. Résultats 5.1. Accès aux services financiers par les femmes L’analyse des facteurs qui influencent la probabilité d’accès des femmes aux services financiers est mis en évidence par l’estimation de l’équation ACCESS. Nous avons fait l’hypothèse que certaines variables socioéconomiques telles que la honte de s’endetter, la situation matrimoniale, et l’éducation influencent l’accès des femmes au crédit à l’épargne. Les résultats de l’estimation sont présentés dans le Tableau 5. Tableau 5 : Résultats de l’estimation de l’équation Probit de l’accès aux services financiers Variables Coefficients Constante Age Capital initial Distance du domicile à l’IF Taille du ménage Garantie Honte de s’endetter Appréciation du taux d’intérêt Situation matrimoniale Education primaire Groupement Appui Coûts de transaction -1,406 +0,0107 -2,40E0-7* -0,000122* +0,127578* -0,889163* -0,405178* +0,601699* -0,712354* +0,218879 +2,869784* +0,860003* -0,516376* McFaden R2 = 0,53 Pourcentage de prédictions correctes Total 82,37 ACCESS = 1 81,96 ACCESS = 0 82,82 Observations avec ACCESS = 0 Observations avec ACCESS = 1 Total observations 419 449 868 * Significatif au seuil de 5 % Source : résultat de l’estimation donnée d’enquête 32 T de Student -4.54 +1,62 -2,11 -6,91 +3,97 -5,58 -2,85 +3,53 -5,04 +1,48 +11,41 +5,29 -2,85 Les résultats suggèrent que les variables utilisées conviennent pour répartir les femmes en deux catégories celles ayant accès au crédit et à l’épargne et celles n’y ayant pas accès. Le pouvoir explicatif du modèle est assez élevé au regard des pourcentages de prédictions correctes La proportion de prédictions correctes est de 82,37% pour l’ensemble, en ce qui concerne les sous échantillon, elles est de 82,82% pour ACCESS=0 et 81,96% pour ACCESS=1. Ce qui témoigne d’une bonne adéquation du modèle. Les résultats du Tableau 5 montrent que l’âge et le niveau d’éducation primaire ne sont pas statistiquement significatifs. Autrement dit l’âge et le niveau d’éducation primaire ont une influence négligeable sur la probabilité d’accès des femmes aux services financiers. Les mêmes résultats montrent que au seuil de 5% , les principaux déterminants de la probabilité d’accès des femmes au crédit et à l’épargne sont le capital initial; la distance, la taille du ménage, la garantie, la honte de s’endetter, l’appréciation du taux d’intérêt, la situation matrimoniale l’appartenance à une mutuelle, les coûts de transaction et l’appui des institutions financières. On remarque que les coefficients des variables capital initial, distance, garantie, honte de s’endetter, situation matrimoniale et coûts de transaction sont négatifs et affectent ainsi négativement la probabilité d’accès aux services des institutions financières. Ainsi par exemple, toute chose étant égale par ailleurs, la probabilité pour qu’une femme accède au crédit ou à l’épargne est d’autant plus faible que l’institution financière est éloignée du domicile de la femme. De même, la probabilité qu’une femme accède au crédit est moins forte lorsqu’on exige une garantie préalable aux femmes. Néanmoins l’effet additionnel de l’«appartenance à une mutuelle» sur la variable garantie affecte positivement la probabilité d’accès des femmes au crédit et à l’épargne voir Tableau A5 en annexe). Donc le fait d’appartenir à une mutuelle permet de surmonter la. 33 contrainte de garantie individuelle à la faveur des cautions solidaires que constituent les groupements, la honte de s’endetter affecte négativement la chance d’accès au crédit par les femmes ; cela s’explique par le fait que les mœurs dans certaines régions interdisent à la femme de s’endetter. Malgré les efforts de sensibilisation, certaines pesanteurs sociales demeurent toujours vivaces. Il faut remarquer qu’une variable binaire sur la variable honte de s’endetter permet de nuancer ce résultat. En effet les femmes membres d’un groupement ont plus honte de demander un crédit que les demandeurs individuels (voir Tableau A5, en annexe), ce résultat s’explique par le fait que les femmes considèrent l’acte de prêt pour financer leur activité comme un secret entre elles et le prêteur et ne doit pas être connu d’autres personnes. Alors que être membre d’un groupement signifie que les autres membres du groupement sont également informé du prêt. Par ailleurs la probabilité d’accès au crédit des femmes est d’autant plus faible qu’elles disposent d’un capital initial élevé. Ce résultat est curieux car on devrait s’attendre plutôt à ce que celles qui disposent d’un capital initial important aient plus facilement accès au crédit puisqu’elles sont plus aptes à présenter des garanties. Le signe négatif du coefficient est donc inattendu. Mais cela peut s’expliquer par le fait que les femmes qui disposent d’un capital important ne ressentent pas la nécessité d’emprunter et donc ne demande pas de crédit. Il est également important de noter que la chance d’accès au crédit et à l’épargne des femmes mariées est faible puisque le coefficient affecte négativement la probabilité d’accès. Cela est sans doute dû au fait que les femmes mariées sont moins libres pour entreprendre et doivent chaque fois prendre l’avis de leur mari avant de prendre la décision d’emprunter, ce qui n’est pas toujours aisé. Le fait que certains maris, surtout en milieu rural, éprouvent une réticence à voir leurs femmes devenir financièrement indépendantes est une explication plausible. Le signe positif de l’appréciation du taux d’intérêt indique que les taux d’intérêt pratiqués par les SFD affectent positivement la probabilité d’accès au crédit et à l’épargne des femmes et de ce fait augmente leur chance 34 d’accès au crédit et à l’épargne. Le signe positif du coefficient est contraire au signe attendu. Par ailleurs, les effets marginaux7 indiquent la variation de la probabilité d’accès consécutive à une modification des facteurs. Ainsi, toutes choses étant égales par ailleurs, une réduction de la distance augmente la probabilité d’accès de 0,012%. La réduction de la distance entraîne une faible variation de la probabilité d’accès au crédit. Or il devrait en être autrement car elles devraient avoir accès aux SFD sans difficulté et en tout temps. Il en résulte que l’accessibilité est peu liée à la proximité. Car au-delà de la distance, les femmes disposent peu de temps à la fin de la journée pour effectuer des dépôts. Alors qu’au même moment les tontiniers ambulants passe devant leur étala ge pour collecter leur épargne. Mais un assouplissement des garanties et une réduction des coûts de transactions (simplification des formalités à remplir à tous les niveaux, transparence dans l’octroi des crédits) augmentent respectivement la probabilité qu’une femme accède aux services financiers de 58,8% et 39,9%. Ces résultats indiquent que les garanties et les coûts de transaction constituent de véritables facteurs limitant l’accès des femmes aux services financiers. Les autres variables (la taille du ménage, le taux d’intérêt le groupement et l’appui) exercent une influence positive sur la probabilité d’accès aux services financiers. Le nombre de personnes dans le ménage augmente également la probabilité d’accès au crédit car plus les charges augmentent, plus les femmes ressentent le besoin d’entreprendre pour y faire face. On remarque enfin que le fait de pouvoir bénéficier d’un appui de la part de l’institution financière, le fait d’appartenir à un groupement augmentent les chances d’accéder au crédit à l’épargne. 7 Effet marginal = (1-eβ )*100, où β désigne le coefficient estimé. 35 5.2. Le chiffre d’affaires Afin d’apprécier l’impact du crédit sur l’activité des femmes nous présentons les résultats de l’analyse de régression multiple pour les deux groupes de femmes (ACCESS=1 et ACCESS=0) dans le Tableau 6. La variable dépendante est le chiffre d’affaire des femmes. Tableau 6 : Coefficients de l’estimation de l’équation du chiffre d’affaires ACCESS=1 Variables Constante Age Distance Capital initial Taille du ménage Agriculture Production animale Commerce Moulin Artisanat Transformation Ratio de Mill Coefficients +11,68* -0,004 -8,26E-05* +1,51E-06* +0,036 -0,304* +1,592* +0,960* +0,453* -0,195 +0,207* +0,182 ACCESS=0 T stat +54,17 -0,987 -6,521 +16,05 +1,784 -2,455 +6,217 +8,441 +2,811 -1,505 +2,101 +1,009 R2 = 0,66 Moyenne = 12,29 Coefficients +10,78 +0,004 -5,43E-07 +7E-07 -0,079 +0,340 +0,118 +2,332 +0,992 +1,305 +1,357 +0,055 T stat +38,54 +0,687 -6,530 +6,214 -3,558 +2,349 +0,277 +5,394 +2,791 +6,077 +9,201 +0,223 R2 = 0,58 Moyenne = 11,06 * Niveau de significativité : 5 % Source : Résultat d’estimation, données d’enquête Pour les femmes ayant accès au crédit (ACCESS=1), les variables : distance capital initial, taille du ménage, agriculture, production animale, commerce, moulin et transformation ont un effet statistiquement significatif sur le chiffre d’affaire Quant aux femmes n’ayant pas accès au crédit, les variables indépendantes statistiquement significatives sont : la distance, le capital initial, la taille du ménage, l’agriculture, le commerce, le moulin et la transformation. La distance affecte négativement le chiffre d’affaires des femmes aussi bien chez les femmes bénéficiaires d’un crédit que chez celles qui n’en ont pas bénéficié. Au-delà de l’éloignement des SFD, cela s’explique surtout par l’état des infrastructures routières. 36 Par contre, le capital initial a une influence positive aussi bien pour ACCESS=0 que pour ACCESS=1. C’est-à-dire que plus les femmes disposent d’un capital initial important, plus elles seront amenées à développer leurs activités, et à réaliser un chiffre d’affaires important. On remarque également que la taille du ménage a un effet bénéfique sur le chiffre d’affaires pour les femmes ayant bénéficié de crédit, mais son impact est négatif pour ACCESS=0. L’effet positif de la taille du ménage au niveau de ACCESS=1 est sans doute dû à un besoin de main d’œuvre consécutif à l’obtention du crédit et à l’augmentation subséquente du niveau d’activité. En ce qui concerne le type d’activité menée, la production animale, le commerce, le moulin et les activités de transformation influencent positivement le chiffre d’affaires. Cela suggère que le crédit sera plus utilisé effectivement par les femmes évoluant dans ces secteurs d’activité pour financer leur activité. Ce résultat semble être intuitif, il est vrai que l’un des secteurs d’activité où les femmes ont une capacité managériale est celui du commerce. L’influence négative de la variable agriculture des femmes ayant accès au crédit peut vouloir dire que dans ce secteur, les crédits ne sont pas utilisés pour financer réellement leur activité agricole, cela est surtout lié au délai d’acquisition du crédit. Le plus souvent les crédits sont mis à la disposition des femmes à un moment qui ne correspond pas à la période agricole, ce qui expliquerait le détournement de crédit pour d’autres fins. Il faut cependant faire remarquer que la variable artisanat n’est pas statistiquement significative pour les femmes ayant accès au crédit. Autrement dit le crédit a une influence négligeable sur l’activité des femmes évoluant dans le secteur de l’artisanat. Ce résultat est inattendu car dans ce secteur les femmes ont généralement 37 besoin de moyens pour s’équiper dans les matériaux de travail. Ce résultat inattendu peux s’expliquer par le retard dans l’octroi de crédit et le faible montant des crédits accordés aux femmes. 5.3. L’épargne L’un des objectifs de ce travail est d’analyser la mobilisation de l’épargne des femmes par les SFD. La quasi-totalité des femmes étant privées des circuits bancaires pour les épargnes qu’elles réalisent, en raison surtout du dépôt minimal (250 000 F CFA dans certaines banques) pour ouvrir un compte d’épargne et de la distance qui les sépare des banques. Il apparaît nécessaire de s’intéresser à la mobilisation de l’épargne des femmes à la faveur de la proximité et l’accessibilité des SFD. L’analyse de l’épargne des femmes est faite grâce aux résultats de l’analyse de régression multiple pour les deux groupes de femmes (ACCESS=1 et ACCESS=0). La variable dépendante est l’épargne des femmes. Les SFD considèrent le crédit comme un facteur dont la perspective constitue un motif d’épargne pour les femmes, pour ce faire, l’épargne réalisée par les femmes ayant obtenu le crédit (ACCESS=1) est drainé vers les circuits financiers des SFD. L’équation d’épargne consiste donc à analyser la constitution d’épargne au niveau des deux groupes de femme (Tableau 7). 38 Tableau 7 : Coefficients de l’estimation de l’équation de l’épargne ACCESS=1 Variables Constante Age Distance Capital initial Taille du ménage Agriculture Production animale Commerce Moulin Artisanat Transformation Ratio de Mill Coefficients +10,21 -0,036* +1,9E-05 +6,4E-07* -0,017 -0,529* +0,869* +1,603* +1,741* +0,596* +0,915* +0,686* ACCESS=0 T stat +33,75 -5,540 +1,069 +4,875 -0,616 -3,047 +2,422 +10,04 +7,703 +3,278 +6,619 +2,706 R2 = 0,43 Moyenne = 9,91 Coefficients +7,508 -0,010 -2,83E-05* +6,07E-07* -0,043 +0,428* +2,259* +3,291* +0,371 +2,257* +1,209* -0,514* T stat +26,54 -1,705 -3,366 +5,326 -1,942 +2,929 +5,250 +7,526 +1,034 +10,39 +8,105 -2,029 R2 = 0,60 Moyenne = 7,87 *Niveau de significativité : 5 % Les effets des variables distance et taille des ménages sur l’épargne ne sont pas statistiquement significatifs pour les femmes ayant accès aux services financiers des SFD. Autrement dit ces deux variables n’influence pas la mobilisation de l’épargne des femmes par les SFD, par exemple, les femmes ayant obtenu de crédit ont l’obligation d’effectuer des dépôt auprès des SFD afin de bénéficier éventue llement d’autre crédit . La régression montre également que toutes les autres variables de l’équation d’épargne influence l’épargne de ce groupe de femme. Au niveau des deux groupes de femmes l’épargne est influencée par certains facteurs de manière dive rse : La variable agriculture influence négativement l’épargne pour les femmes ayant obtenu le crédit, l’influence est positive pour les femmes n’ayant pas obtenu. Ce résultat suggère que dans le secteur agricole, les femmes ayant obtenu le crédit ne réalisent pas d’épargne, ce qui montre la difficulté des SFD de mobiliser l’épargne des femmes de ce secteur d’activité ayant accès à leur service ; Le capital initial 39 exerce une influence positives sur l’épargne, cela suggère que l’épargne des femmes sera élevé, lorsque le capital initial est plus important. Ceci est vrai aussi bien pour ACCESS=1 que pour ACCESS=0. Ce qui montre la nécessité pour les SFD d’octroyer des crédits aux femmes afin d’accroître leur capital initial ; La production animale, le commerce, l’artisanat, les activités de transformation et le moulin ont tous une influence positive sur la réalisation de l’épargne dans les deux groupes de femmes, cela suggère que non seulement les femmes de ces secteurs d’activités réalisent d’épargnes mais que les SFD mobilisent l’épargne de celles ayant accès à leurs services, mais par contre l’épargne réalisée par celles n’ayant pas accès aux services des SFD est drainée vers les tontiniers ambulants mais le coefficient de la variable moulin n’est pas significatif pour les femmes n’ayant pas bénéficié de crédit, mais il est significatif pour les femmes ayant bénéficié de crédit et a une influence positive sur l’épargne. Ce résultat permet de tirer l’enseignement suivant : les femmes de ce secteur n’ayant pas bénéficié de crédit sont indifférentes à la réalisation de l’épargne. Au regard de ces résultats, Les variables utilisées (chiffre d’affaires et épargne) pour apprécier l’impact de la libéralisation financière à travers l’avènement des SFD sur l’accès au crédit et à l’épargne des femmes au Bénin peuvent s’apprécier à deux niveaux. Au niveau de l’effet du crédit sur l’activité des femmes, le chiffre d’affaires permet de mesurer l’influence du crédit sur le niveau d’activité des femmes, autrement dit voir, si le crédit a été effectivement utilisé par les femmes l’ayant obtenu pour financer leur activité. Mais les coefficients des variables de sélectivité endogène (LAMBDA 1 et LAMBDA 2 ) qui ont permis la partition endogène de l’échantillon ne sont pas significatifs dans les équations du chiffre d’affaires. En ce qui concerne l’épargne, elle nous a permis d’analyser la mobilisation par les SFD de l’épargne des femmes ayant accès au crédit. On remarque que les coefficients des variables de sélectivité (LAMBDA 1 et LAMBDA 2 ) sont 40 significatifs dans l’équation de l’épargne pour les deux groupes de femmes (ACCESS=0 et ACCESS=1). En conclusion, on pourrait dire que la proximité et l’accessibilité des SFD aux populations ont permis effectivement de mobiliser l’épargne réalisée par les femmes de certains secteurs d’activité. 6. Implications de politique économique Les résultats obtenus permettent de dégager quelques implications de politiques qui contribueront à améliorer l’accès des femmes aux services financiers. Certaines variables socio-économiques entravent l’accessibilité d’une majorité des femmes aux services financiers même si la libéralisation financière a permis d’accroître le nombre de bénéficiaires d’une façon générale. Parmi les barrières d’accès aux services financiers identifiées par la présente étude, les plus pertinentes sont la distance, la garantie et les coûts de transaction. Les résultats ont montré d’une part que la variable garantie affecte négativement la probabilité d’accès aux services financ iers et d’autre part que l’effet additionnel de la variable groupement sur la variable garantie influence positivement la probabilité d’accès; ce qui suggère que pour surmonter les obstacles relatifs à la garantie, qu’il faut encourager les femmes à appartenir à des groupements afin de bénéficier de la caution solidaire. Les coûts de transactions affectent négativement la probabilité d’accès aux services financiers. Ce qui signifie que pour accroître l’accès des femmes aux services financiers, qu’il faut simplifier et alléger les formalités à remplir à différents niveaux et promouvoir une bonne gouvernance au sein des SFD, afin d’éviter quelques pratiques( les pots de vin ) qui ne sont pas de nature à inciter les femmes à s’adresser aux SFD. 41 L’agriculture affecte influence négativement le chiffre d’affaires. Ce qui ne nous renseigne pas de façon explicite sur l’usage qui est fait du crédit obtenu par les femmes évoluant dans le secteur agricole, mais néanmoins, pour que les femmes du secteur agricole utilise effectivement le crédit pour financer leur activité il est nécessaire de rendre compatible la période d’octroi de crédit aux femmes dans le secteur agricole avec la période de la production agricole. L’un des facteurs qui affecte la probabilité d’accès aux crédits est surtout la honte de s’endetter. Cela suggère que, pour les femmes le crédit est un acte honteux et qu’une politique efficace pour accroître l’accès des femmes consistera surtout à sensibiliser les femmes sur la culture de crédit. Par ailleurs parmi les différents types de SFD qui octroient de crédit, il est à remarquer que les SFD de types crédit direct et ONG et projet à volet crédit sont les principaux partenaires des femmes en matière de crédit. Pour ce faire pour accroître effectivement le nombre de femmes pouvant bénéficier de crédits, la Cellule de Microfinance doit favoriser la création des SFD de type crédit direct et ONG et projet à volet crédit. 7. Conclusions Cette étude s’est attachée à analyser les réformes du marché monétaire au Bénin, pour mettre en évidence l’évolution des réformes du marché et évaluer l’impact de ces réformes sur l’accès au crédit et à l’épargne des SFD par les femmes au Bénin. Les analyses économétriques ont permis d’identifier les facteurs qui affectent la probabilité d’accès des femmes aux services financiers des SFD et ensuite d’analyser l’impact de la proximité et de l’accessibilité des SFD sur le chiffre d’affaires, l’épargne des femmes. Les meilleurs partenaires des femmes en matière de services financiers sont les SFD et dans une certaine mesure les tontiniers ambulants surtout dans la mobilisation de 42 l’épargne des femmes qui n’ont pas accès aux services financiers des SFD. Cependant, si beaucoup de femmes accèdent aux services financiers, des SFD, les problèmes de garanties et de coûts de transaction constituent toujours les principaux obstacles à l’accès au crédit, à ces obstacles s’ajoute la honte de s’endetter des femmes qui constitue une contrainte culturelle à l’accès au crédit. On remarque néanmoins qu’en ce qui concerne les garanties il y a une différence significative entre les femmes membres d’un groupement et celles n’appartenant pas à un groupement. Ainsi pour accroître les chances des femmes d’accéder aux services financiers, il est utile de favoriser le cautionnement solidaire et d’alléger les démarches nécessaires à l’obtention du crédit. Enfin cette étude montre également l’impact de l’accès aux services financiers sur le niveau d’activité et l’accès à l’épargne à travers le chiffre d’affaires et l’épargne réalisée. Car les femmes ne continueront de demander les services financiers que si cela les aide vraiment à créer de la valeur ajoutée. D’une manière générale, les femmes ayant bénéficié d’un crédit ont vu leur niveau d’activité s’améliorer. Par ailleurs il serait intéressant de déterminer les facteurs qui affectent l’accès des femmes aux services bancaires, afin de mettre en œuvre des stratégies pouvant permettre aux femmes de bénéficier de gros crédit et également les facteurs favorisant l’impact nocif du crédit sur l’activité des femmes dans le secteur agricole. 43 Bibliographie Assidon E., 1996, "L’Approfondissement Financier : Epargne et Crédit Bancaire". Revue Tiers-Monde. N° 145. Janvier- mars. p.76 Banque Mondiale, 1989, World Development Report. (New-York, Oxford: Oxford University Press). Banque Mondiale, 1994, "Les Femmes Rurales du Sahel et leur Accès à la Vulgarisation Agricole : synthèse d’étude sur cinq pays". Septembre. AFSAG. Banque Mondiale, 1996, "Sustainable Banking with the Poor". Inventaire mondial des institutions de microfinance. Pérennité des Systèmes financiers Décentralisés. Juillet. Banque Mondiale, 1997, "Inventaire des Institutions de Microfinance en Afrique de l’Ouest et du Centre". Pérennité des Systèmes financiers Décentralisés. Janvier. Banque Mondiale, 1999, "Stratégie de la Banque Mondiale pour le Développement de la Microfinance et des Services Financiers en Milieu Rural et aux PME en Afrique Subsaharienne". Groupe secteur privé et finance Région Afrique. Christensen,.G., 1993, "The Limits to Informal Financial Intermediation". World Development. Vol 21, n°5. 721-731. Diogo, A. et Dadjo, J., 1997, "Systèmes de Crédit et d’Epargne pour les Femmes à la Base", Groupe d’études genre et développement. SN/V-DED. Juillet. Cotonou, Bénin. Fruman, C., 1997, "Pérennité des Systèmes Financiers Décentralisés : Etude de cas en microfinance Bénin FECECAM". Avril. (Washington D.C. : Banque Mondiale). 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BIBE : Banque Internationale du Bénin BIPEN : Bilan et Perspectives de l’Economie Nationale BOA : Bank Of Africa CBDIBA: Centre de Développement des Initiatives à la Base CEBEC : Caisse Béninoise de Crédit Agricole CECA : Caisse d’Épargne et de Crédit Autogéré CEFRED : Centre d’Etude, de Formation et de Recherche en Développement CLCAM : Caisse Locale de Crédit Agricole Mutuel CMMB : Caisse du Mouvement Mutualiste Béninois CODES : Cercle des Opérateurs pour le Développement Economique et Social COOPEC : Coopérative d’Epargne et de Crédit CPDyP : Centre de Promotion des Dynamiques Populaires FECECAM : Fédération des Caisses d’Epargne et Crédit Agricole Mutuel FENACREP: Fédération Nationale des Caisses Rurales d’Épargnes et de Crédit FICA : Financière Coopérative Agricole IAMD : Institut Africain d’Application des Méthodes de Développement ID: Institut de Développement IF : Institution de Financement INSAE : Institut Nationale de la Statistique et de l’Analyse Economique MC : Mutualiste Chrétienne MDB Mutuelle pour le Développement à la Base MFE : Ministère des Finances et de l’Economie ONG : Organisation Non Gouvernementale PADME: Association pour la Promotion et l’Appui au Développement des Micro-entreprises PAPME : Programme d’Appui aux Petites et Moyennes Entreprises RDHB : Rapport sur le Développement Humain au Bénin RGPH : Recensement Général de la Population et de l’Habitat SFD : Structures de Financement Décentralisées. UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africain VITAL FINANCE BENIN: Volunteers In Technical Assistance FINANCE BENIN 46 ANNEXE 2 : Données Tableau A2 : Répartition des femmes enquêtée selon le type d’activité Secteur ZOU d’activit ACCESS=0 ACCESS=1 AGRI 127 51 ANIM 16 7 COM 120 74 MOUL 5 7 ART 8 30 TRANSFO 22 33 TOTAL 298 202 Source : enquête LITTORAL TOTAL % ACCESS=0 ACCESS=1 TOTAL % 178 35,6 10 8 18 3,6 23 4,6 10 18 28 5,6 194 38,8 149 189 338 67,6 12 2,4 3 12 15 3 38 7,6 15 29 44 8,8 53 1,1 17 40 57 1,14 500 100 204 296 500 100 47 ANNEXE 3 : Définition des variables Tableau A3 : Variables explicatives de l’épargne et du chiffre d’affaires Variables Description AGE Age de la femme. - CAPINI Le capital initial de la femme. + DIST La distance du domicile à l’IF. Elle est exprimée en mètres. - TMEN La taille du ménage qui définit le nombre de personnes dans le ménage. Agriculture. AGRI = 1 si la femme est dans le secteur de - AGRI Signe attendu +/- l’agriculture. ANIM Production animale. ANIM = 1 si la femme est dans le secteur +/- de la production animale. COM Commerce. COM = 1 si la femme est dans le secteur du +/- commerce. MOUL Moulin. MOUL= 1 si la femme possède un moulin +/- ART Artisanat. ART= 1 si la femme est dans le secteur de +/- l’artisanat. TRANSFO Activités de transformation. TRANSFO= 1 si la femme les +/- activités de transformation. LAMBDA Ratio de Mill +/- 48 ANNEXE 4: Estimation Probit avec effet additionnel de la variable groupement Tableau A4: Résultats de l’estimation de l’équation Probit de l’accès aux services financiers avecl’effet additionnels de groupement sur les variables garantie et honte de s’endetter Variables Coefficients Constante Age Capital initial Distance du domicile à l’IF Taille du ménage Garantie Honte de s’endetter Appréciation du taux d’intérêt Situation matrimoniale Education primaire Groupement Appui Coûts de transaction Dummy Goupement*garantie Dummy Groupement*Honte de s’endetter -1,580893* +0,017240* -3,29E-07* -0,000185* +0,139209* -1,346264* -0,224087 +0,969928* -0,802605* +0,189104 +2,492685* +0,641415* -0,866836* +2,48* -1,22* McFaden R2 = 0,56 Observations avec ACCESS = 0 Observations avec ACCESS = 1 Total observations 419 449 868 * Significatif au seuil de 5 % 49 Statistique z -4,913 +2,43 -2,89 -7,86 +3,99 -7,03 -1,39 +5,11 -5,46 +1,28 +8,59 +3,80 +4,23 +5,45 -3,03 ANNEXE 5 : Questionnaires d’enquête Mesdames, dans le cadre d’une étude du programme ELIFID pour analyser l’impact de la libéralisation financière sur l’accès à l’épargne et au crédit par les femmes, nous menons une enquête légère auprès de vous afin d’apprécier l’accès des femmes aux services offerts par les institutions financières. 1. Préliminaires 1.1 Questionnaire N° : /__/__/__/__/ 1.2 Date de l’enquête : /__/__/ /__/__/ 1.3 Département : Commune : /__/__/ Quartier ou village : 2. Renseignements généraux sur les enquêtées 2.1 Age : .. 2.2 Situation matrimoniale : ……………………………… 2.3 Etes vous instruite ? Oui /__/ Non /__/ Si oui,Niveau d’instruction : Primaire /__/ Secondaire /__/ Supérieur /__/ Sinon êtes vous alphabétisé ? Oui /__/ Non /__/ 2.4 Etes vous chef de ménage ? Oui /__/ Non /__/ 2.5 Nombre de personnes à charge : ……………………………. 2.6 Avez-vous honte de vous endetter ? Oui /__/ Non /__/ 2.7 Etes vous membre d’une mutuelle de crédit (groupement) ? Oui /__/ Non /__/ 2.8 Occupez vous un poste de responsabilité ? Oui /__/ Non /__/ 2.9 Si Oui, le (s) quel (s) ………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………… 2.10 Type d’activité menée (cocher les cases correspondantes) - Production agricole /__/ - Production animale /__/ - Petit commerce /__/ - Gestion de moulin /__/ - Artisanat /__/ - Activités de transformation /__/ 2.11 Y a-t-il une agence financière dans votre localité ? Oui /__/ Non /__/ 2.12 Si oui depuis quand ? 2.13 Pourriez-vous mener vos activités sans le crédit ? Oui /__/ Non /__/ 2.14 Disposez-vous de garanties (terre, maison) ? Oui /__/ Non /__/ 2.15 Quelle est la distance qui sépare votre domicile de l’agence ? 3. Relations avec les institutions financières 3.1 Quels sont vos partenaires financiers ? - Parents /__/ - Usuriers /__/ - ONG et Projet de crédit /__/ - Mutuelle ou Coopérative /__/ - Banque /__/ 3.2 Depuis quand collaborez vous avec eux ? ………………………………………………………………………………………… 3.3 Avez-vous déjà demandé un crédit ? Oui /__/ Non /__/ 3.3 Sinon, pourquoi ? - Manque d’information /__/ - Manque de richesse /__/ - Honte de s’endetter /__/ 50 - Risque d’arrestation en cas de non-remboursement /__/ - Longueur en temps et en distance /__/ - Coût de déplacement vers l’établissement de crédit /__/ - Absence de compte d’épargne /__/ 3.4 Si oui, à quelle institution vous êtes-vous adressé ? …………………………… 3.5 Comment avez-vous appris l’existence du SFD ? ……………………………… 3.6 Avez-vous bénéficié d’un crédit ? Oui /__/ Non /__/ Si oui, répondez aux questions 3.6 à 3.15 3.7 Montant demandé : …………. Montant reçu : ………….. Durée du prêt : ……… 3.8 Trouvez vous que le taux d’intérêt est : - Raisonnable /__/ - Elevé /__/ 3.9 A quoi vous a servi le crédit obtenu ? …………………………………………… 3.10 Comment trouvez-vous le temps qui sépare la demande et l’octroi du crédit ? - Raisonnable /__/ - Court /__/ 3.11 Quelles sont les conditions d’accès au crédit ? …………………………………………………………………………………………… 3.12 Que pensez vous de ces conditions d’accès au crédit : - Contraignantes /__/ - Non contraignantes /__/ 3.13 Quels sont les modalités de remboursement ? …………………………………………………………………………………………… 3.14 Remboursez-vous régulièrement vos crédits ? Oui /__/ Non /__/ 3.15 Quelles difficultés rencontrez-vous dans le remboursement des crédits ? …………………………………………………………………………………………… 3.16 Que pensez vous du délai de remboursement des crédits ? - Bon /__/ - Mauvais /__/ 3.17 Sinon, quels sont les problèmes que vous avez rencontrés - Problème d’information /__/ - Qualité de dossier /__/ - Garantie /__/ - Niveau du taux d’intérêt /__/ - Délai de remboursement trop court /__/ - Autres (préciser) ……………………………… 3.18 Les formalités remplies pour obtenir le crédit sont : Simples /__/ Complexes /__/ 3.19 Avez-vous des problèmes pour vous déplacer vers l’IF ? Oui /__/ Non /__/ 3.20 Avez-vous été obligée de donner des pots de vin ? Oui /__/ Non /__/ 4. Effets du crédit et de l’épargne sur la rentabilité de l’activité menée 4.1 Quel est votre capital initial ? ……………………………………. 4.2 Quelle est votre chiffre d’affaires ? - Avant le crédit : ……………. - Après le crédit : ……………. 4.3 Votre activité vous permet-elle d’épargner ? Oui /__/ Non /__/ 4.4 Où gardez-vous votre épargne ? - Maison /__/ - Tontinier /__/ - Coopérative ou mutuelle d’épargne et de crédit /__/ - Banque /__/ 4.5 Pourquoi avez-vous préféré cette option ? …………………………………………………………………………………………… 4.6 Quel est le montant de votre épargne mensuelle ? 51 - Avant le crédit : ………………….. - Après le crédit : …………………. 4.7 Quelle est votre appréciation du montant minimum pour ouvrir un compte d’épargne ? - Elevé /__/ - Raisonnable /__/ 4.8 Quelles sont les conditions pour ouvrir un compte d’épargne ? …………………………………………………………………………………………… 4.9 Que pensez vous de ces conditions ? - Contraignantes /__/ - Non contraignantes /__/ 4.10 Que pensez vous du taux de rémunération des dépôts ? - Incitatif /__/ - Non incitatif /__/ 4.11 Quels sont les problèmes que vous rencontrez au moment des dépôts ? - Distance /__/ - Difficulté d’épargne (niveau d’activité insuffisant) /__/ - Absence d’institution de financement /__/ - Montant minimum élevé /__/ 5. Que faut il faire selon vous pour accroître le nombre d’épargnant et de bénéficiaire de crédit ? Nom de l’enquêteur : 52