Riffs Hifi 26.05.2012

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Riffs Hifi 26.05.2012
LE JOURNAL DU JURA SAMEDI 26 MAI 2012
26 RIFFS HIFI
GONZO METAL La vie avec Metallica, Motörhead et Slayer
Comme dirait Satan,
un suppôt et après au lit...
PATRICK DUJANY
A quelques jours du grand raout
maelströmique qui verra notamment Metallica, Slayer et
Motörhead mettre à feu et à sang
la banlieue sud-ouest de Bienne
(en l’occurrence Yverdon), il me
paraissait urgent de me confesser
dans Le JDJ avant de couler pour
l’éternité dans les bains sulfureux
de la cité thermale. Oui, Seigneur, pardonne-moi, j’ai osé
rencontrer Metallica! Ce fut à
l’occasion d’un entretien réalisé
pour le compte de la 3 à l’automne 98.
Les 4 Horsemen sortaient alors
«Garage Inc», un dispensable album de reprises. Je me retrouvai
ainsi parachuté par ma chaîne à
Paname afin de poser quelques
questions au batteur Lars Ulrich.
Paris, 20 novembre 98, 10h14.
Au rez-de-chaussée, un parterre
de journalistes en pâmoison
s’échine à se faire grimper l’adrénaline en dissertant sur la dernière daube de l’ensemble. Forcément la meilleure, puisque c’est
la dernière! Tout autour, un essaim d’attachés de presse donne
ses ordres façon caporal. C’est
mon tour. Je me détache de la
meute et me présente au cerbère
en suintant mon trac.
Puis s’enchaînent 30 secondes
d’ascenseur qui semblent durer
des lustres. En parlant de lustre,
y’en a un énorme, en cristal, qui
m’accueille de façon oppressante
dans le couloir de la chambre du
batteur de Metallica, le cogneur
Lars Ulrich.
– 15 minutes! m’assène le milicien de la maison de disques.
Je pénètre dans la suite. Lars est
en position du lotus sur un
énorme canapé 19e. Il est pieds
nus et mange une pomme.
– Salut! Moi c’est Lars. Tu veux
boire quelque chose?
Acemoment-là,j’ailechoixentre une eau plate, une eau gazeuse et un cola allégé. Mes pensées se troublent soudainement:
Metallicola, le metal allégé !
Pas le temps de gamberger, Lars
commence son monologue et j’ai
à peine le temps d’enclencher
mon enregistreur que déjà il
m’explique à quel point son recueil de reprises pourries est génial. Moi, j’écoute son grand déballage egotripé sans pouvoir en
placer une. Nom de Toi, Mon
Dieu, mais qu’est-ce que je fous
là? 10 ans plus tôt, j’aurais vendu
ma mère et donné mon père
pour avoir l’occasion d’interviewer Metallica.
Et là, je bois de l’eau en écoutant
le batteur me raconter ses banalités façon footballeur après un
match. Je crois que c’est à cet instant précis que j’eus préféré me
taper 7 heures de TGV pour boire
une bière avec Mireille Mathieu.
En ce qui concerne Slayer, je les
ai croisés pour la première fois à
Vernier sur Rock à la fin des années 90. Lorsqu’ils débarquèrent
dubitatifs dans cette salle plutôt
vétuste, leur première question
fut: «C’est à quelle heure le mariage?»
Puis crevant la dalle après des
heures de tour bus, ils demandèrent à pouvoir aller croûter dans
leurs loges. Lesquelles renfermaient un buffet géant de toutes
les spécialités du terroir romand.
Y’avait même du gravier de Frinvillier!
Avec un dédain fortement gravé dans le mépris, les Californiens se cassèrent de la salle. J’appris par hasard beaucoup plus
tard qu’ils s’étaient barrés au
McDrive du coin!
Le rappeur Akenathon et le nouveau maillot orange de l’OM. LDD
Robben Ford et Michael Landau aux guitares et voix, Jimmy Haslip à la
basse et Gary Novak à la batterie, ça ressemble furieusement à quatre
branleurs qui continuent de jazzrocker à la manière des glorieuses
seventies. Sauf que ces gangsters ont tout compris, tout joué, digéré et
fusionné. Et qu’ils produisent une musique incomparable, novatrice, qui
sonne de la première à la dernière note, groove, respire, laisse des espaces
et envoûte. Ni jazz, ni rock, ni pop. Mieux. Il y a de la magie dans ce
quartet improbable. Et de l’endurance puisqu’ils sortent un deuxième opus,
«Bullet» (Musikvertrieb). Dommage qu’ils n’aient pas été invités aux grands
raouts suisses de l’été. Les oreilles de nos grands organisateurs ne sontelles pas assez affûtées pour déceler les joyaux actuels ou les CV de ces
renégats pas assez sexy pour attirer leurs regards? En tout cas, ils seront en
Allemagne et en Hollande en juillet. W PAK
Enfin une femme qui sait chanter!
Céline Dion vous rend amok. Shakira aussi gaga que la Lady. Vous
n’avez jamais compris pourquoi certains trouvent belle la voix d’Amy
Winehouse. Alors, il est grand temps de découvrir Beverly Jo Scott,
Américaine exilée en Belgique. Après son hommage à Joplin («Planet
Janis», où elle faisait encore mieux que son idole, elle publie
«Collection» (Disques Office), double best of où elle reprend même
«C’est extra» de Ferré. Et si The Voice, c’était elle et elle seule? W PABR
JOE BONAMASSA
Stakhanoviste fou, mais surtout bon gratteur
Lemmy, de Motörhead: ce jour-là, il était pas de bonne humeur... LDD
J’ai gardé le meilleur pour le
dessert. Belgique, festival de
Dour, juillet 2000. Lemmy est en
traindesetaperunflipperdansle
paddock à canasson qui sert de
loges. La boule lui file entre les
manettes. Tout en jurant comme
un charretier, il adresse aux journaleux baveux que nous sommes
quelques doigts d’honneurs plutôt bien sentis vu leur couleur.
«Lemmy donne pas d’interview»,
déclamesansrireundesorganisateurs du festival qui aimerait
qu’on foute la paix au flippé. Tout
à coup, sur ma gauche, une blondasse avec d’énormes cernes
passe devant moi, le regard aussi
vide que son verre. Il s’agit de
Myckee D, le batteur de
Motörhead.
Moi j’ai deux godets dans les pognes, portant celui de mon pote
Frank parti aux gogues. Allez je
tente le coup:
– Une bière, mec?
Le frappeur de Motörhead n’hésite pas une demi-croche. Il saisit
ma binche.
– Dis Myckee je sais que
Motörhead donne pas d’interview, mais je suis fan et je bosse
pour une radio suisse et je….
– 5 minutes, pas une de plus!
S’ensuivirent 300 secondes
parmi les plus passionnantes de
l’histoire du rock. Enfin, je le suppose, car je ne remarquai point
que je n’avais plus de batterie
dans mon enregistreur. L’échec
complet.
Comment? Vous voudriez que
je vous raconte de mémoire. Désolé, j’étais bien trop cuit à la
belgecesoir-là.Bon,c’estpastout
ça mais j'ai un festival à préparer
d’ici mercredi. Alors comme dirait Satan, un suppôt et au lit! W
Akhenaton et le maillot de la discorde
il rend hommage à un groupe de
supporters marseillais influent,
les South Winners. Quant au
bleu et au blanc, les couleurs
historiques de l’OM, elles ont
été snobées par «AKH». Suffisant pour se mettre à dos une
bonne partie de la Canebière.
Les South Winners, qui ne
sont aujourd’hui plus en odeur
de sainteté du côté du stade Vélodrome, se distinguèrent du-
Quatre renégats pour une échappée belle
BERVERLY JO SCOTT
HIP-HOP ET FOOTBALL Le leader du groupe IAM a dessiné le chandail de l’OM
Akhenaton, leader du groupe
de rap marseillais IAM, a conçu
le maillot «Third» de l’Olympique de Marseille, une tunique
que les joueurs porteront la saison prochaine en Coupe d’Europe et lors des matches de
Coupe de France.
L’honneur suprême pour ce
fan historique de l’OM. Maillot
réversible baptisé la «Face B»,
d’un côté noir, de l’autre orange,
RENEGADE CREATION
rant la saison 1989/90 lors d’un
déplacement à Paris face à l’ennemi juré du PSG. Pour souligner leur opposition au groupe
fasciste présent dans la tribune
«Boulogne» du Parc des Princes, les South Winners avaient
alors retourné leurs bombers
noirs – que portaient aussi les
skinheads à l’époque – en signe
de désapprobation.
Multiculturels, Akhenaton et
ses acolytes du groupe IAM ont
depuis toujours combattu le racisme et tous ceux qui en propagent les idéologies, n’hésitant
d’ailleurs pas à descendre dans
les rues de Marseille pour y traquer les «fachos», à témoin les
paroles du morceau «Nos heures de gloire»: «Pendant nos
heures creuses, on allait esquinter
du skin...»
En créant ce maillot réversible,
Akhenaton a ainsi voulu retranscrire son aversion du racisme et
du non-respect d’autrui. «Nos
cœurs sont orange comme au couchant sont les flots, les couleurs
sont celles de nos valeurs et de nos
idéaux...», peut-on lire sur la
Face B du maillot. S’il est loin de
faire l’unanimité à Marseille, là
où les supporters tiennent plus
que tout aux couleurs originelles ciel et blanc, le réversible a
connu un lancement pour le
moins chaotique.
Le premier jet de maillots –
plusieurs milliers d’exemplaires
– contiennent une faute d’orthographe: l’adjectif «orange»,
dans le vers «nos cœurs sont
orange…», est écrit au pluriel
alors qu’il ne s’accorde pas. Une
règle grammaticale décortiquée
par Bernard Pivot himself sur les
réseaux sociaux. Le groupe IAM
viendra par ailleurs «danser le
mia» au Royal Arena festival
d’Orpond, les 17 et 18 août prochains. «On mangeait pas tous les
midis, les pâtes ou le riz c’était les
soirs de fêtes. Sinon c’était döner,
cousin, sauce blanche sans oignons, deux canettes», rappaient
les Marseillais au début des années 80. De là à dire qu’IAM se
déplace encore pour une bouchée de pain... W CYRYLL PASCHE
Il est sur tous les fronts, Joe Bonamassa. Celui du rock avec Black
Country Communion (voir Riffs Hifi d’avril), celui du blues traditionnel
avec la prodigieuse chanteuse Beth Hart. Seul avec son gang, il signe
aujourd’hui «Driving towards the daylight» (Musikvertrieb). Encore du
blues, entre compos personnelles et reprises traditionnelles. La guitare,
au moins, reste au sommet. Encore un effort et ça sera aussi bon que
Stan Webb’s Chicken Shack quand le Stan n’est pas fin bourré... W PABR
HIP-HOP
Jay-Z s’offre une franchise NBA à Brooklyn
Le rappeur Jay-Z a réalisé son rêve: acquérir une franchise NBA de basketball.
Le multimillionnaire bling-bling, né à Brooklyn en 1969, s’est associé au
propriétaire majoritaire de la franchise, le Russe Mikhail Prokhorov, afin de
mettre le grappin sur les moribonds New Jersey Nets. Monsieur Beyoncé n’a
pas perdu de temps avant de relocaliser les Nets dans son quartier natal de
Brooklyn, à quelques paniers à trois points des emblématiques New York
Knicks chers au cinéaste culte Spike Lee. Ce dernier, lui aussi né à Brooklyn,
théâtre de ses principaux films tels que le mythique «Do The Right Thing»
(1989), s’est empressé de remettre les choses au point sur son compte Twitter:
«Ceux qui pourraient penser que je vais encourager les Nets lorsqu’ils
déménageront à Brooklyn sont soit drogués, soit alcooliques!» C’est dit. W CYP
LA PLAYLIST DE...
Mélanie Brenzikofer
[email protected]
L’ESCOUADE «Traverser les bois» («Confidences de mouches»)
Pierre-Yves Theurillat et ses compères nous invitent à travers bois pour y
découvrir la simplicité. Des textes empreints de poésie sur des rythmes
puissants, teintés d’un brin de mélancolie. Un morceau accessible et
profond qui sent le vécu, tout comme les 12 autres titres de l’excellent
album «Confidences de mouches». A écouter sans modération!
LIL WAYNE «How to love» («Carter IV»)
Le temps d’un morceau, le rappeur originaire de La Nouvelle-Orléans
s’éloigne quelque peu de son répertoire habituel. Dans «How to love», Lil
Wayne s’adresse à une femme au passé lourd d’échecs et de
déceptions. Il lui rappelle que malgré tout ce qu’elle a pu vivre, malgré
tous les escrocs qu’elle a rencontrés et qui ont contribué à sa descente
aux enfers, elle reste magnifique et loin d’être ordinaire. Une chanson
qui ne manquera pas de parler à celles qui ont croisé un peu trop
d’escrocs.
SARAH BRIGHTMAN «Kama Sutra» («Live from Las Vegas»)
Avec «Kama Sutra», la chanteuse anglaise nous emmène dans un
univers mystique et envoûtant. On reconnaîtra l’influence d’Enigma, avec
qui elle a collaboré sur de nombreux opus. Bref, «Kama Sutra», c’est une
chanson à écouter après une journée bien (trop) remplie, étendu sur son
canapé ou dans un bon bain chaud. Petite précision, un bon verre de vin
serait un atout supplémentaire!
ALICE COOPER «I am made of you» («Welcome 2 my nightmare»)
«Au début, je n’étais qu’une ombre. Au début, j’étais seul. Au début,
j’étais aveugle, vivant dans un monde dépourvu de lumière. Au début, il
n’y avait que la nuit. J’étais brisé, laissé en morceaux. Et je me sentais
tellement froid à l’intérieur. Alors je vous ai appelé depuis les ténèbres où
je me cachais.» A n’en pas douter, ce morceau est une véritable quête de
rédemption. Mais demeure une question essentielle: à qui Alice Cooper
s’adresse-t-il? W

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