Nausées et vomissements de la grossesse… une historique actualité

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Nausées et vomissements de la grossesse… une historique actualité
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Nausées
et vomissements
de la grossesse…
une historique
actualité
G. Tordjman*
Ces nausées et vomissements de la grossesse (NVG), malgré leur historique
chronicité, restent des sujets d’actualité
principalement dans trois domaines : leurs
conséquences médico-économiques,
liées à leur prévalence considérable, leur
prise en charge thérapeutique, qui se doit
d’être adaptée à la situation physiologique particulière de la grossesse, et leur
physiopathologie exacte, toujours inexpliquée.
En 1999, aux États-Unis, 12,8 % des
grossesses ont fait l’objet d’une hospitalisation non liée à l’accouchement. Près
d’une fois sur cinq, cette hospitalisation
* Service de gastroentérologie, hôpital
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Q
uatre-vingt pour cent des femmes enceintes présenteront des
nausées et des vomissements au cours de leur grossesse. Ces
symptômes, fréquents au cours du premier trimestre, temporaires et bénins, peuvent, dans 20 % des cas, persister pendant toute la
durée de la grossesse. Dans 0,3 à 2 % des cas, ces vomissements évoluent dramatiquement, avec amaigrissement, déshydratation, cétonurie
et carences vitaminiques ; c’est ce que l’on appelle l’hyperemesis gravidarum (HG), qui est parfois associé à des désordres thyroïdiens, parathyroïdiens ou hépatiques pouvant mettre en jeu le pronostic vital, fœtal
et maternel, en l’absence d’une prise en charge réanimatoire adaptée.
prénatale était liée à des nausées ou à
des vomissements (1). Ce taux d’hospitalisation semble cependant nettement inférieur en Europe. Dans une étude danoise
portant sur 3 675 suivis de grossesse, si
79 % des femmes se plaignaient de NVG,
elles étaient seulement 1% à être hospitalisées pour cette raison, même si ces
symptômes représentaient 28 % des
arrêts de travail (2). Dans cette étude,
le jeune âge maternel et la multiparité
se révélaient des facteurs indépendants
aggravants, alors que le tabagisme et
l’usage de vitamines avant la grossesse
ainsi qu’une activité professionnelle
extérieure constituaient des facteurs
protecteurs. Les conséquences cliniques,
psychologiques et économiques de ces
NVG font discuter une action préventive.
Supplément à La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
L’équipe de Lexington a ainsi étudié pendant 2 ans une cohorte de 428 deuxième
parturientes aux antécédents de NVG au
cours de la première grossesse. Ces
patientes étaient enrôlées dans un programme de prise en charge ambulatoire
associant une assistance médico-psychologique et une pharmacologique sous la
forme de patches de métoclopramide (3).
Cette prise en charge, de 26,8 jours en
moyenne, permettait de manière statistiquement significative d’obtenir une diminution des scores de nausées de 7,8 à
3,9 points, une diminution du taux de
cétonurie à la bandelette d’une croix de
36,2 à 1,4 % et une diminution des hospitalisations ou des consultations urgentes
de 65,4 à 33 %, par rapport à un groupe
contrôle.
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et grossesse
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Cette attitude préventive secondaire
prouve la bonne tolérance et l’efficacité
des antihistaminiques, expliquant leur
large utilisation dans le traitement des
NVG. Ce dernier se doit cependant de
privilégier une diététique adaptée, un
support émotionnel et éventuellement
le recours à des thérapies alternatives.
L’acupuncture, classique ou sous la forme
d’acupression transcutanée par stimulation électrique, s’affiche comme la
méthode non pharmacologique de choix
dans le traitement des NVG (4). Son
action antiémétique semble résulter de
la stimulation de la sécrétion hypophysaire en bêta-endorphine et ACTH,
entraînant une inhibition du centre du
vomissement cérébral et du chemoreceptor trigger zone (5). Ces techniques, certes
un peu obscures pour des non-initiés,
ont le mérite de prouver leur efficacité
dans des études contrôlées, comme celle,
croate, portant sur 36 cas d’HG et montrant une diminution statistiquement
significative des vomissements par acupuncture ou acupression du point Pc6,
par rapport à une technique placebo (6).
Quatre études randomisées contrôlées
contre placebo ont mis en évidence l’efficacité remarquable, similaire à celle de
l’apport de vitamine B6, d’un apport
sous la forme de complément alimentaire de 125 mg/j d’extrait de gingembre
(soit l’équivalent de 1,5 g de gingembre
déshydraté), permettant une diminution
moyenne de 20 % des nausées et de
50 % des vomissements induits par la
grossesse (7). Compte tenu de sa sévérité, l’HG reste l’objet d’une prise en
charge réanimatoire associant réhydratation veineuse, apport de vitamines B6
et B1, afin d’éviter les cas rapportés de
Gayet-Wernicke, et une thérapeutique
médicamenteuse associant plutôt prométhazine et métoclopramide, d’efficacité et de tolérance parfaites, que les
petites doses (5 mg/j) de prednisolone,
d’action plus courte, ou le recours à l’ondansétron, plus coûteux (8).
Les traitements de ces NVG seraient sans
nul doute plus précis s’ils répondaient
aux mécanismes physiopathologiques
exacts de ces troubles, encore mal connus.
La thèse psychologique a encore ses
adeptes, face aux démonstrations réitérées d’une corrélation entre la sévérité des nausées et des vomissements et
les scores de perturbation sociale, d’anxiété et de dépression, prouvant que ces
symptômes sont associés à une augmentation de la morbidité psychiatrique, sans pour autant établir une relation de cause à effet (9). Une revue
récente implique des facteurs gastrointestinaux (dysfonctions neuromusculaires, troubles de la contractilité, etc.)
dans le déclenchement des vomissements de la grossesse (10). La piste
endocrinienne reste la plus sérieusement documentée. Si le déséquilibre de
sécrétion de la bêta-HCG, et plus particulièrement de ses isoformes désialées,
est bien prouvé, le rôle d’une hypersécrétion intra-utero d’estrogènes est
évoqué devant la plus grande fréquence
(OR = 1,8) de naissances de sexe féminin compliquées d’HG (11).
Les nausées et les vomissements de la
grossesse semblent finalement d’origine multifactorielle et répondent peutêtre à une hypothèse évolutionniste
(12). L’augmentation des capacités
olfactives en début de grossesse aurait
primitivement permis, outre d’éviter
de consommer des mets infectés potentiellement dangereux à la phase
d’immunodépression liée à la grossesse,
de maintenir une relation entre la mère
et le fœtus en créant une accommodation maternelle aux antigènes paternels
contenus dans l’unité fœto-placentaire.
L’apparition d’une interface placentaire a fait perdre son intérêt à cet état
hyperolfactif, ne lui laissant que les
désagréments secondaires au dégoût
déclenché par certaines odeurs, notamment de cuisine, expliquant ainsi les
NVG.
■
Supplément à La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
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