AVIS du CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL
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AVIS du CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL
CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL D’AQUITAINE Séance plénière du 12 décembre 2007 ________ AVIS du CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL REGIONAL D’AQUITAINE Plan de Réduction et d’Élimination des Déchets Dangereux en Aquitaine Vu le rapport transmis par Monsieur le Président du Conseil Régional d’Aquitaine relatif au Plan de Réduction et d’Élimination des Déchets Dangereux en Aquitaine (PREDDA). Vus les avis des Commissions « Développement régional et Programmations » et « Finances régionales et Territoires», Vu l’avis de synthèse de la Commission « Cadre de vie et solidarités », En tout premier lieu, le Conseil Economique et Social Régional d’Aquitaine exprime sa satisfaction de voir enfin abouti ce Plan de réduction et d’élimination des déchets dangereux en Aquitaine (PREDDA). Dès 19941 puis de nouveau en 2001, dans un avis sur la gestion des déchets en Aquitaine2, le CESR appelait à la définition et à la mise en œuvre d’un tel plan au niveau régional. L’Aquitaine accuse en effet un retard manifeste et préoccupant en la matière, d’abord en raison de la nécessité d’une gestion rigoureuse et raisonnée de ce problème, au moins conforme à la législation existante depuis 1992 et renforcée depuis, ensuite en raison du caractère tardif du Plan régional d’Elimination des Déchets Industriels Spéciaux élaboré sous l’égide de l’Etat et adopté en 1997 puis de l’annulation de celui-ci par le Tribunal Administratif en 2000. C’est donc déjà conscient de la réalité des besoins et des risques inhérents à la gestion des déchets dangereux que le CESR a examiné le projet de PREDDA. Il apprécie tout particulièrement l’exemplarité et la qualité de la démarche de concertation retenue par le Conseil Régional, associant les différentes parties prenantes, qui a débouché sur l’élaboration de ce Plan. Il souligne par ailleurs la qualité des informations fournies dans les documents (rapport environnemental et projet de plan), en dépit du caractère très technique du sujet. Le CESR souligne le caractère juridique particulier de ce plan. En effet, malgré son opposabilité, les orientations du PREDDA ne peuvent véritablement s’imposer aux acteurs concernés. Autrement dit, si son contenu doit être pris en compte dans les choix opérés en matière de gestion des déchets dangereux en région, les acteurs auxquels il s’adresse ne sont pas tenus de les réaliser. Tout au plus, les opérateurs ne peuvent mettre en œuvre des projets ou mesures qui n’auraient pas été prévus dans le PREDDA. 1 Rapport et avis du CESR d’Aquitaine sur « Entreprises et environnement : pour un développement éco-industriel de l’Aquitaine » d’avril 1994 2 Rapport et avis sur « la gestion des déchets en Aquitaine » d’octobre 2001 Page 1 1. ETAT DES LIEUX Le diagnostic sur le gisement et les capacités de traitement de déchets dangereux en Aquitaine révèle quelques particularités : - Un volume identifiable de déchets dangereux de 300 000 tonnes par an, comprenant des déchets non diffus (265 000 tonnes au total) produits par les principales unités industrielles en région (chimie, traitement de déchets, métallurgie …), 33 600 tonnes de déchets dangereux diffus (flux collectés, dont huiles usagées, piles et accumulateurs, déchets d’équipements électriques et électroniques) générés par les ménages, l’agriculture (emballages vides de produits phytosanitaires et produits phytosanitaires non utilisés), les entreprises commerciales et artisanales, les entreprises du BTP et les établissements d’enseignement. A ceci, il faut ajouter 12100 tonnes de déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI), dont 1800 tonnes en flux diffus (y compris à domicile ou en auto-traitement). - Toutefois, malgré la qualité des informations apportées et le souci d’exhaustivité recherché, une partie de ce diagnostic repose encore sur des estimations incomplètes, s’agissant notamment du gisement de certaines catégories de déchets dangereux diffus (produits par les établissements d’enseignement-recherche, par l’agriculture, par l’usage des équipements électroniques et déchets d’activités de soins …). Les volumes mentionnés concernent ici le plus souvent les flux collectés et sont par conséquent sousestimés. Le CESR considère que l’amélioration de la connaissance sur la réalité de ce gisement et de ces flux doit constituer une priorité. - Le cas particulier du Crétacé 4000, correspondant au système de gestion très particulier d’un flux de rejets ou déchets industriels qui échappe aux orientations du PREDDA et reste sous la vigilance de l’Etat. Le CESR insiste sur la nécessité d’une observance et d’un contrôle très stricts des règles de sécurité et de gestion des risques inhérents à ce type d’installation. Dans un souci de transparence et d’information, il demande à ce que le Conseil Régional, via la Commission consultative, soit destinataire des résultats des contrôles et évaluations effectués sous l’autorité de l’Etat. - L’importance du flux régional de déchets dangereux traité hors de la région, soit près de 119 000 tonnes (dont 32 000 tonnes à l’étranger). Plus de la moitié de ce flux (65 000 tonnes) est stocké dans des centres spécialisés. Parallèlement, 120 000 tonnes de déchets industriels spéciaux sont traitées dans les installations spécialisées en Aquitaine, dont la moitié en provenance d’autres régions ou pays (Espagne, Belgique). Ces trafics génèrent un transport de matières dangereuses facteur de pollutions (dont gaz à effet de serre) et de risques. Cela amène en outre à constater que l’Aquitaine est une région exportatrice nette de déchets dangereux, dépendante par conséquent des capacités et des conditions de stockage disponibles dans d’autres régions. - Les difficultés particulières d’identification et de gestion des sols pollués (219 sites répertoriés en Aquitaine). - Les activités liées à la collecte, au transit et au traitement des déchets dangereux alimentent un ensemble de savoir faire et l’activité d’un tissu d’entreprises, dont certaines ont développé des technologies innovantes (ex : torche à plasma). Ce secteur d’activité est encore potentiellement créateur d’emplois, compte tenu des besoins recensés, comme en témoigne le projet de création d’une unité de démantèlement de navires porté par Veolia et Europlasma sur le site de Bassens. - Des performances en matière de collecte, de valorisation ou de traitement très inégales selon les catégories de déchets et encore très modestes pour les déchets dangereux diffus (ménagers, du commerce et de l’artisanat, BTP…) par rapport aux gisements estimés, soulignant ainsi les risques parfois élevés de dégradation des milieux naturels et pour la santé humaine. Page 2 2. TENDANCES ET SCENARIOS Les projections tendancielles présentées dans le projet de plan à horizon 2015 paraissent relativement mesurées, sur les bases actuelles de connaissance des flux. Néanmoins, il conviendrait d’anticiper à plus long terme les effets liés aux évolutions démographiques d’une part (accroissement de la population, vieillissement), du tissu productif régional d’autre part et technologiques, susceptibles d’influer sur les volumes et la dangerosité des catégories de déchets concernées par ce plan. Toutefois, les projections avancées dans l’hypothèse d’une non application des orientations du plan proposé sont suffisamment explicites pour inciter à la mise en place des mesures préconisées. A ce propos, le CESR considère avec intérêt les scénarios ou variantes de solutions utilement mentionnés dans le rapport environnemental du PREDDA, notamment au regard des incidences environnementales des différentes hypothèses. 3. ORIENTATIONS Sur la base de ces éléments, le CESR souscrit aux orientations du PREDDA, à savoir : Le caractère déterminant des solutions préventives, permettant de réduire à la source la production de déchets dangereux. Cela concerne à la fois l’amélioration des process de production industriels pour les déchets non diffus et la sensibilisation des acteurs (ménages, agriculteurs, commerçants et artisans, professionnels, enseignants…) dans le cas des déchets diffus (dont DASRI), notamment en favorisant le tri sélectif. Le CESR approuve la principe d’élaboration d’un plan régional de prévention dont il appelle la définition dans les meilleurs délais. Il considère ici l’opportunité pour la Région de renforcer sa participation à des programmes de recherche-développement, intéressant les technologies propres ou l’amélioration des procédés culturaux en agriculture par exemple. A ce niveau, le CESR accorde une importance particulière à l’information et aux moyens de diffusion des savoir faire sur les meilleures technologies disponibles (BAT, BREF). Dans le même esprit, l’intérêt des mesures visant à développer les procédés de valorisation des déchets relevant de flux non diffus, par exemple en mobilisant de nouvelles technologies ou en veillant au développement de la collecte des déchets diffus. Ce dernier aspect suppose un partenariat étroit avec les autres collectivités territoriales (Conseils généraux et collectivités locales) et une mobilisation des branches professionnelles les plus directement concernées. S’agissant des déchets d’activités de soins à risques infectieux, dans la perspective d’une augmentation de la demande de soins, le CESR soutient l’objectif d’un développement de la collecte des DASRI diffus et du regroupement, en veillant à la fiabilité du système retenu compte tenu de la nature des risques encourus, ainsi que la création d’unités de traitement à proximité des principaux gisements (agglomérations du BAB et d’Agen). Le CESR souligne ici l’intérêt d’un développement d’unités légères de banalisation. Il approuve le principe d’un traitement sur site des sols pollués, sans pour autant exclure la création de biocentres de valorisation des terres polluées, préalablement conditionnée par des études de faisabilité technico-économiques. Le CESR rejoint les objectifs du plan visant à la réduction du transport de déchets dangereux, notamment sur des longs trajets. Dans l’hypothèse où ce transport reste une nécessité, au moins sur courtes distances, il suggère que la variable temporelle soit aussi prise en considération, de telle sorte que le transport s’effectue en dehors des heures ou des jours de grosse affluence sur le réseau routier, afin de limiter les facteurs de risques. En outre, le CESR préconise que soit étudiée, entre autre dans l’hypothèse de création d’unités de stockage, la possibilité d’acheminement par ferroutage mais aussi par voie maritime ou fluviale sous conditions particulières de sécurité. Page 3 Sur la base du diagnostic établi et des éléments relevés dans le rapport environnemental, le CESR confirme la nécessité de création en Aquitaine d’un ou deux CSDU, considérant à la fois la nécessité d’une réduction des transports de matières dangereuses, l’étendue de la région et l’intérêt d’une anticipation des besoins futurs. Sa localisation devra répondre aux exigences mentionnées dans le PREDDA en termes de gouvernance (partenariat public-privé, concertation, information) ainsi qu’aux conditions liées aux caractéristiques du sous-sol, de l’écosystème et de l’environnement social du site d’implantation. Le CESR a déjà eu l’occasion depuis 1994 de souligner les enjeux liés à la création d’un tel équipement. Pour des raisons motivées par les nécessaires garanties associées à ce type d’installation, il considère que la participation des acteurs publics (dont Région) est ici un élément de gouvernance indispensable, comme facteur rassurant et comme garantie supplémentaire. En termes d’information et d’organisation, le CESR appelle des précisions sur la référence à la mobilisation d’un « centre de ressources » régional sur les déchets dangereux, chargé de la centralisation des informations et d’un rôle de veille. Il souscrit aux objectifs visant à une meilleure connaissance des ressources existantes en matière de recherche, à un développement de la formation et d’un réseau de correspondants dans les établissements d’enseignement. Le CESR approuve le maintien de la Commission consultative pour assurer le suivi de la mise en œuvre de ce plan, à laquelle il est associé. Il souligne l’importance du rôle également dévolu au groupe « prévention », chargé notamment de l’élaboration du plan régional de prévention. Le CESR apprécie l’effort de définition et de mobilisation d’indicateurs de suivi, destinés à mieux mesurer les résultats obtenus dans le cadre de la mise en œuvre du PREDDA, mais aussi à mieux évaluer les impacts environnementaux des solutions retenues (suivi environnemental). En termes plus généraux, le CESR insiste sur l’importance des actions de sensibilisation dans la mise en œuvre de ce plan, tant en direction des ménages que des professionnels ou des entreprises et des milieux scolaires et universitaires. Il appelle l’attention du Conseil régional sur la dégradation des conditions de travail des salariés du secteur du traitement des déchets, marquée par un fort accroissement de la fréquence et de la gravité des accidents du travail depuis 2000. Le CESR invite le Conseil Régional à initier une étude plus fine sur les causes de cette dégradation en relation avec l’ARACT et les opérateurs concernés. Enfin, il invite le Conseil Régional et les partenaires associés au sein de la commission consultative à la définition d’un phasage précis pour la réalisation des actions proposées dans le PREDDA. Cette suggestion s’applique tout particulièrement à la création du CSDU. A ce sujet, le CESR souhaite que la forme juridique ET la liste des partenaires de ce projet soient arrêtées au terme de la première année suivant l’adoption du PREDDA. Par ailleurs, il suggère que soient évalués les coûts inhérents aux orientations de ce plan. Le CESR propose que le Conseil Régional, pour sa part, privilégie le soutien aux actions préventives et aux mesures incitatives, en rappelant que le coût du traitement incombe en premier lieu aux producteurs de déchets (application du principe pollueur-payeur). Le financement de ces actions pourrait mobiliser des ressources communautaires (FEDER sur les projets d’innovation et en matière de protection de l’environnement) sur la période 2007-2013. AVIS ADOPTÉ A L’UNANIMITÉ Le Président, Luc PABOEUF Page 4