Stress, dépression, suicide au travail: les entreprises tardent à agir

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Stress, dépression, suicide au travail: les entreprises tardent à agir
AFP - samedi 28 avril 2007, 13h44
Stress, dépression, suicide au travail: les
entreprises tardent à agir
Les risques "psycho-sociaux", stress ou dépression, qui
conduisent parfois au suicide, sont insuffisamment pris en compte
par les entreprises, ont estimé des professionnels de santé à
l'occasion de la Journée mondiale de la santé et de la sécurité au
travail samedi.
Les suicides de trois salariés du technocentre de Renault à
Guyancourt (Yvelines) en quatre mois, ceux de quatre agents de
la centrale EDF de Chinon en deux ans, ou encore plus
récemment celui d'un ouvrier de PSA Peugeot-Citroën sur son
lieu de travail à Mulhouse, ont mis sur le devant de la scène un
phénomène qui existe depuis longtemps, souligne Dominique
Chouanière, médecin épidémiologiste et chef du projet "stress au
travail" à l'INRS (Institut national de Recherche et de Sécurité).
"Avant, les médias en parlaient moins, mais nous avions déjà ce type d'information, évoquant
des cas de suicides répétitifs au sein d'entreprises", souligne-t-elle.
La France n'a pas de chiffres officiels sur le nombre de suicides liés au travail. "Rien que sur
le nombre de suicides sur le lieu de travail, on devrait au moins avoir des données précises.
Mais ce n'est pas le cas, car ces décès sont très faiblement déclarés en accident du travail",
souligne Mme Chouanière.
Même constat pour Christian Larose, vice-président du Conseil économique et social (CES),
qui "suit le problème depuis des années". Dans une étude réalisée à titre personnel, il a évalué
"entre 300 et 400 cas par an" le nombre de suicides liés au travail.
Ce chiffre est certainement sous-évalué, estime-t-il, ce que confirme Mme Chouanière, qui se
dit "effarée par la façon dont les entreprises dénient la part du travail responsable d'un
suicide", imputant souvent le drame à une personnalité fragile du salarié.
Le suicide d'un salarié, mais aussi l'absentéisme, un turn-over important, un mal-être ambiant,
ou des cas de violences, sont pourtant des signaux d'alerte d'une situation de travail très
dégradée, qui demande une réponse d'urgence, souligne la chef de projet de l'INRS.
Il doit aussi y avoir une réponse de prévention, avec dans l'entreprise de véritables
engagements pour agir sur les sources du problème : organisation du travail, modes de
relation, gestion des ressources humaines, explique-t-elle.
Selon l'OMS, la France est le troisième pays, derrière l'Ukraine et les Etats-Unis, où les
dépressions liées au travail sont les plus nombreuses, souligne l'Union nationale des cliniques
psychiatres privées (UNCPSY, 160 cliniques privées). Selon elle, "la prévention de la santé
mentale au travail est encore balbutiante".
"On a de plus en plus de patients en état d'épuisement professionnel, qui viennent consulter
tardivement, pour des raisons d'anxiété par rapport à leur travail, d'angoisse de perdre leur
emploi", souligne Olivier Drevon, médecin psychiatre et vice-président de l'UNCPSY.
"Ils arrivent souvent après un passage à l'acte", qui peut être une tentative de suicide, ou un
débordement du comportement, des violences, des conduites addictives (alcool, drogue,
médicaments), explique-t-il.
Ces cas sont "en augmentation", souligne-t-il, et touche toutes les catégories : cadres, mais
aussi caissières, ingénieurs, chauffeurs de bus...
A l'occasion de la journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, samedi, le Bureau
international du travail (BIT) à Genève a estimé dans un rapport publié vendredi que deux
millions deux cent mille personnes meurent chaque année dans le monde de maladies ou
d'accidents liés au travail.

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