Petites et très petites entreprises : besoins de
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Petites et très petites entreprises : besoins de
PETITES ET TRÈS PETITES ENTREPRISES : ÉTUDES ET RECHERCHES BESOINS DE RECRUTEMENT ET PRATIQUES DÉDIÉES DE PÔLE EMPLOI ÉTUDES ET RECHERCHES SEPTEMBRE 2014 / N°1 STATISTIQUES, ÉTUDES ET ÉVALUATIONS ÉTUDES ET RECHERCHES ÉTUDES ET RECHERCHES PETITES ET TRÈS PETITES ENTREPRISES : BESOINS DE RECRUTEMENT ET PRATIQUES DÉDIÉES DE PÔLE EMPLOI MARIE-JOSÉ RABNER, ALEXIS GAIGNON DIRECTION DES STATISTIQUES, DES ÉTUDES ET DE L’ÉVALUATION ÉTUDES ET RECHERCHES 6 RÉSUMÉ 8 . OBJECTIFS ET 1 MODALITÉS DE L’ÉTUDE 91.1 UNE STRATÉGIE DE SERVICES RENFORCES EN DIRECTION DES PETITES ET TRES PETITES ENTREPRISES 9 1.2 QUELQUES DONNEES DE CADRAGE 122. LES PRATIQUES DE RECRUTEMENT DES TPE-PE : PRINCIPAUX CONSTATS 13 2.1 LES TPE-PE : DES PRATIQUES SPECIFIQUES DE RECRUTEMENT 13Les établissements de plus de 20 salariés et/ou de création récente sont ceux qui recrutent le plus souvent 13Une dynamique de recrutement différenciée selon les secteurs d’activité 13Les chefs d’entreprise assument souvent seuls le rôle du recruteur et privilégient les « savoir-être » des candidats 14Les canaux de recrutements privilégiés portent sur le bouche à oreille, les relations personnelles ou professionnelles 14Les TPE-PE sont aussi des entreprises facilitant l’insertion et la réinsertion 14Les conditions de travail et d’emploi peuvent freiner les recrutements 152.2 LES PETITES STRUCTURES SOLLICITENT PEU LES PROFESSIONNELS DE L’EMPLOI MALGRÉ L’IMPORTANCE DE LEURS ATTENTES 15Seul un tiers des TPE-PE font appel à un professionnel de l’emploi 16 Le recours à Pôle emploi est largement dominant 182.3 DES BESOINS DIFFERENCIES SELON LA TAILLE DE L’ÉTABLISSEMENT ET LE TYPE DE PROFESSIONNEL DE L’EMPLOI SOLLICITE ÉTUDES ET RECHERCHES 203. DES ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES DE PÔLE EMPLOI EN DIRECTION DES PETITES ENTREPRISES 21 3.1 FACILITER LE RECRUTEMENT 21La création d’un « Pôle Artisans » et de services dédiés par l’agence locale Pôle emploi de Lyon Vaise 21Un accompagnement collectif des demandeurs d’emploi organisé par domaine d’activité lié aux petites entreprises 22Un service d’appui personnalisé pour le recrutement d’apprentis dans les TPE-PE 23Un appui au recrutement de jeunes issus de l’apprentissage par un suivi partagé et la mise en place de parrainages 24 3.2 ANTICIPER LES BESOINS EN RECRUTEMENT 24 La formation de candidats aux métiers de la sécurité 25Un job dating ciblé sur le secteur de la coiffure facilitant l’anticipation des besoins de recrutement 26Une gestion partagée des offres d’apprentissage avec la Chambre de métiers et de l’artisanat 273.3 LEVER LES PREJUGES DEFAVORABLES À PÔLE EMPLOI : UNE OPÉRATION DE COMMUNICATION VISANT UN CLUB DE TPE-PE 273.4 FACILITER LE TEMPS PARTAGE ET LA MULTIACTIVITÉ AU TRAVERS DE GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS ÉTUDES ET RECHERCHES 1 SURTITRE RÉSUMÉ F ace à la montée du chômage, Pôle emploi a opté pour une stratégie de déclinaison de ses services selon le principe de faire plus pour ceux qui en ont le plus besoin. C’est dans ce cadre, qu’une offre de services dédiée plus particulièrement aux très petites entreprises fait l’objet d’une expérimentation en 2013/2014. Afin de faciliter cette expérimentation, des pratiques innovantes ont été observées dans quelques régions et une enquête statistique a été menée auprès d’un échantillon d’établissements de moins de 50 salariés de manière à mieux identifier ceux qui recourent aux services de Pôle emploi, de comprendre leurs attentes mais aussi, à l’opposé, d’appréhender les motifs de ceux qui ne font pas appel au service public de l’emploi. Ces travaux ont notamment permis d’établir qu’une minorité des petites et très petites entreprises (TPE-PE) sollicitent un professionnel de l’emploi pour leurs recrutements (37%). Celles qui y ont recours sont le plus souvent des établissements de taille relativement importante (au-delà de 10 salariés) et de création récente (moins de 3 ans). De plus, la grande majorité des établissements faisant appel à un professionnel de l’emploi se tournent exclusivement vers Pôle emploi (les trois quarts). En revanche, lorsque les TPE/PE recrutent sans l’intermédiaire d’un professionnel, les canaux utilisés sont principalement le « bouche à oreille » et les relations personnelles. Les attentes spontanées des employeurs se tournant vers Pôle emploi se situent avant tout sur la sécurisation du recrutement, constituée des éléments en amont de la procédure : description du poste, définition du profil recherché, rédaction de l’offre, information sur les aides et mesures et recherche des candidats. Cependant l’observation des pratiques dédiées aux très petites entreprises montre que Pôle emploi est en capacité de satisfaire une gamme de besoins plus étendus. Les actions dédiées de Pôle emploi trouvent leur efficacité en grande partie dans un travail en réseau sur le territoire avec les TPE-PE, souvent facilité par un partenariat avec les fédérations professionnelles, les clubs d’employeurs, les chambres de métiers et de l’artisanat et les chambres de commerce et d’industrie. Ce travail en réseau permet de mieux connaître les employeurs, de recueillir plus efficacement leurs offres, de travailler avec eux sur les évolutions des métiers, les transferts de compétences, les créations et reprises d’activités. Il permet également de diffuser une image positive de Pôle emploi parmi les TPE/PE et d’optimiser la mobilisation des ressources de Pôle emploi à l’échelle du territoire. 1. OBJECTIFS ET MODALITÉS DE L’ÉTUDE Le contexte de crise économique des dernières années, marqué par les destructions d’emploi et la réduction des embauches, a provoqué une hausse significative du chômage. Les conseillers de Pôle emploi ont ainsi été soumis à une mobilisation accrue au service des demandeurs d’emploi, au détriment de la relation avec les entreprises. En cohérence avec les objectifs fixés par le plan stratégique de moyen terme « Pôle emploi 2015 », une nouvelle orientation a été retenue visant à renforcer les relations avec les entreprises mais en priorisant les cibles. Pôle emploi s’engage désormais à agir tout particulièrement en direction des entreprises dont le recrutement apparait complexe pour l’une ou pour l’autre des raisons suivantes : l’entreprise est faiblement outillée pour gérer la procédure de recrutement et/ou les caractéristiques de l’offre au regard de la demande d’emploi présentent des écarts nécessitant une intervention renforcée. Les petites et très petites entreprises répondent à ces deux critères et constituent donc la cible de cette étude, qui vise à apprécier leurs pratiques actuelles de recrutement, leurs attentes vis-à-vis de Pôle emploi et à repérer quelques actions spécifiques et/ou innovantes réalisées localement en direction des TPE/PE (cf. encadré 1 pour la présentation de la méthode retenue). Enfin, cette étude doit permettre d’alimenter les bases d’une expérimentation qui pose le principe de services dédiés aux TPE afin d’augmenter la proportion de demandeurs d’emploi placés auprès des TPE et d’améliorer la satisfaction de leurs besoins de recrutements. 9 OBJECTIFS ET MODALITÉS / ÉTUDES ET RECHERCHES 1.1 UNE STRATÉGIE DE SERVICES RENFORCÉS EN DIRECTION DES PETITES ET TRÈS PETITES ENTREPRISES La convention tripartite 2012–2014, signée entre l’Etat, l’Unedic et Pôle emploi pose le principe d’une modulation des services en direction des employeurs. « Pôle emploi 2015 » fait référence aux actes métiers qui peuvent être proposés dans le cadre de la mobilisation d’une offre de service pour les employeurs qui en ont le plus besoin : aide à la définition du poste, aide à la rédaction de l’offre, présélection de candidats, appui à la conduite d’entretien, information sur le potentiel des ressources disponibles sur le bassin d’emploi, mesures d’adaptation au poste de travail. Du fait du gisement d’offres potentielles qu’elles représentent et de la faiblesse des moyens dont elles disposent pour gérer leurs ressources humaines, les Très Petites Entreprises (TPE occupant moins de 10 salariés) sont une des cibles identifiées pour la délivrance de services renforcés. C’est pourquoi le principe d’une expérimentation d’une offre de service dédiée aux TPE a été retenu et mis en œuvre en 2013/2014. En amont de cette expérimentation, Pôle emploi s’est interrogé sur la place occupée par les TPE-PE1 dans ses relations avec les entreprises, la spécificité de leurs besoins et la nature des services qui leurs sont rendus. La cible retenue pour cette étude est constituée des établissements de moins de 50 salariés. 1.2 QUELQUES DONNÉES DE CADRAGE En novembre 2011, 5 788 300 entreprises et 6 966 400 établissements2 sont recensés en France. 93% de ces établissements comptent moins de 50 salariés, parmi lesquels 68% sont des établissements de 0 salarié. Si les TPE (occupant moins de 10 salariés) emploient en moyenne trois salariés, près d’un tiers n’en emploient qu’un seul3. Seulement 6% de l’ensemble des établissements ont déposé au moins une offre d’emploi à Pôle emploi au cours des 12 derniers mois et 80% d’entre eux ont moins de 50 salariés. Sur les 3 millions d’offres enregistrées par Pôle emploi, au cours des 12 derniers mois, plus de la moitié (56%) concerne des établissements de moins de 50 salariés4. 1. Il n’y a pas de définition légale du terme TPE en France, ce terme n’est pas labellisé. La notion de TPE renvoie le plus souvent à la taille de l’entreprise. La pratique la plus habituelle est de nommer : • Les très petites entreprises (TPE), entreprises de 0 à 19 salariés dans lesquelles on identifie les micro-entreprises (pour certains les 0 salarié, pour d’autres les 0 à 2 salariés, pour d’autres encore les 0 à 3 salariés mais plus généralement de 0 à 9 salariés). • Les PME dont le nombre de salariés restent en deçà de 250. • Les grandes entreprises (250 salariés et plus). Les termes PME (Petites et Moyennes Entreprises) et PE font l’objet d’une recommandation de l’Union européenne en date du 3 avril 1996. Cette recommandation précise que « lorsqu’il est nécessaire d’établir une distinction entre une petite et une moyenne entreprise, la petite entreprise est définie comme une entreprise employant moins de 50 personnes, dont le chiffre d’affaire annuel n’excède pas 7 millions d’euros, dont le total du bilan annuel n’excède pas 5 millions d’euros et qui respecte le critère d’indépendance ». 2. Les données présentées ici sont sur l’ensemble des établissements et ne se restreignent pas aux « mono établissements ». 3. Source : Dares, enquête Acemo de mars 2012. 4. Les données sont issues d’une extraction des systèmes d’information de Pôle emploi à fin novembre 2011. Ainsi la période d’étude considérée est entre le 1er décembre 2010 et le 30 novembre 2011. 10 ÉTUDES ET RECHERCHES / OBJECTIFS ET MODALITÉS Les TPE de moins de 10 salariés représentent un gisement d’emplois important : ainsi 45% des Déclarations Préalables A l’Embauche (DPAE) en 2012 ont été enregistrées par des TPE (cf. graphique 1). Les établissements de moins de 10 salariés recrutent en proportion un peu moins de demandeurs d’emploi en CDI que ceux occupant 10 à 49 salariés mais autant que ceux de plus grande taille. Le constat est proche concernant les CCD d’au moins 6 mois (cf. tableau 1) Pour les entreprises de moins de 20 salariés, atteindre le taux d’embauche de demandeurs d’emploi en contrats durables (CDD de 6 mois et plus, CDI) à la hauteur de ce qui est observé dans les entreprises de 20 à 49 salariés, permettrait l’insertion d’environ 100 000 demandeurs d’emploi5. GRAPHIQUE 1 RÉPARTITION DES DÉCLARATIONS PRÉALABLES À L’EMBAUCHE SELON LA TAILLE DES ÉTABLISSEMENTS ENTRE MARS ET NOVEMBRE 2012 15,6% 0 salarié 29,2% 1 à 9 salariés 9,5% 10 à 19 salariés 14,0% 20 à 49 salariés 26,2% 50 salariés et plus non renseigné 5,5% SOURCE : DONNÉES DPAE –ACOSS / CCMSA 5. Nous avons rapporté le nombre de DPAE dont bénéficient les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi à l’ensemble des DPAE sur la période considérée. Ainsi par exemple pour les établissements de 0 à 19 salariés, la proportion moyenne de demandeurs d’emploi ayant une DPAE d’au moins 6 mois est de 36%. Alors que la proportion équivalente pour les établissements de 20 à 49 salariés est de 43%. En appliquant ce dernier taux à l’ensemble des DPAE enregistrées dans les établissements de moins de 19 salariés, on obtient un surplus de 35 000 DPAE bénéficiant à des demandeurs d’emploi. Un même calcul est effectué pour les CDI, ce qui conduit à un accroissement global des recrutements potentiels d’environ 100 000 demandeurs d’emploi. 11 OBJECTIFS ET MODALITÉS / ÉTUDES ET RECHERCHES TABLEAU 1 PART DES DEMANDEURS D’EMPLOI DANS LES EMBAUCHES SELON LA DURÉE DU CONTRAT ET LA TAILLE DE L’ENTREPRISE ENTRE MARS ET NOVEMBRE 2012 NATURE ET DURÉE DU CONTRAT TAILLE DE L’ENTREPRISE TOTAL CDD < 1 mois CDD 1 à 6 mois CDD 6 mois et + CDI 0 salarié 49% 40% 34% 27% 44% 1 à 9 salariés 49% 42% 36% 29% 46% 10 à 19 salariés 47% 43% 39% 34% 44% 20 à 49 salariés 46% 42% 43% 33% 44% 50 salariés et plus 43% 39% 37% 29% 41% Total 47% 41% 37% 29% 44% SOURCE : DONNÉES DPAE – PÔLE EMPLOI / ACOSS / CCMSA ENCADRÉ 1 MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE Ces travaux se sont développés selon 2 axes complémentaires : le premier a visé à mieux connaitre le profil des TPE-PE et l’offre de service globale en leur direction, le second s’est attaché plus particulièrement aux actions spécifiques qui sont mises en œuvre sur les territoires en direction de ce type d’entreprises. En complément, ont été mobilisés différents travaux existants sur les pratiques de recrutement des TPE-PME6. • Des travaux sur le profil des TPE-PE et sur l’offre de service globale qui leur est délivrée Afin de mesurer la perception de l’offre de service de Pôle emploi en direction des petites et très petites entreprises et d’appréhender leurs attentes et leurs besoins dans leur relation avec Pôle emploi, une enquête téléphonique a été réalisée auprès de 3 432 établissements en décembre 2012. L’enquête a couvert l’ensemble des services de Pôle emploi en direction des entreprises et ses différents modes de délivrance : prospection, conseils dans la rédaction de l’offre, suivi rapproché pour les métiers en tension, conseils divers, diffusion de l’offre, présélection de candidatures, aides et mesures, suivi dans la prise de poste. Elle a visé notamment à : - apprécier les attentes et besoins des entreprises quand aux services délivrés par Pôle emploi ; - r epérer et quantifier les modalités de contact avec Pôle emploi (courrier, mail, téléphone, visite…) et leur satisfaction par rapport à ces contacts ; - a pprofondir la question des actions menées par Pôle emploi et leur utilité pour les entreprises ; - é tudier les modes de recrutements utilisés par les entreprises et identifier les difficultés de recrutements auxquelles elles peuvent être confrontées. L’enquête a porté sur un échantillon de mono-établissements de moins de 50 salariés en activité entre décembre 2010 et novembre 2011. En raison de leurs spécificités, les secteurs des métiers du spectacle, de l’intérim, de l’enseignement, et de l’administration en ont été écartés. Par ailleurs les établissements de 0 salarié sans aucune DPAE lors des 12 derniers mois n’ont pas été retenus en raison de leur manque de potentiel de recrutement. • Des travaux sur les actions dédiées aux TPE-PE Des observations ont été menées dans 6 régions (Centre, Champagne Ardenne, Lorraine, Nord Pas-de-Calais, Pays de la Loire, Rhône-Alpes) pour caractériser des actions spécifiques et innovantes qui ont été déployées à la fois pour répondre aux besoins des TPE/PE et dans la perspective du placement durable de demandeurs d’emploi. Des entretiens semi-directifs ont été conduits en face-à-face avec les acteurs et les bénéficiaires de ces initiatives de février à mars 2013. Ainsi ont été interrogés d’une part des directeurs territoriaux, des directeurs d’agence locale, des responsables d’équipe de production (REP), des psychologues du travail et des conseillers à l’emploi et d’autre part des chefs d’entreprises, des représentants de Chambres de Métiers et de l’Artisanat, des représentants locaux des fédérations d’employeurs et de clubs d’entreprises. Les observations régionales ont fait l’objet d’une courte monographie mettant en évidence la valeur ajoutée et les conditions de réussite des actions innovantes. 6. Voir notamment Gestion des hommes et formation dans les très petites entreprises Elyes Bentabet, Stéphane Michun, Philippe Trouvé Etude n°79. Céreq janvier 1999. 2.LES PRATIQUES DE RECRUTEMENT DES TPE-PE : PRINCIPAUX CONSTATS Les travaux d’E. Bentabet, S. Michun et Ph. Trouvé7 relèvent l’importance des TPE dans les flux d’emplois. En effet, celles-ci contribuent massivement au dynamisme du marché du travail et ce, de plusieurs manières : entre autres, par les flux incessants de créations et de disparitions de TPE et par le processus de croissance de certaines TPE de création récente. E. Bentabet8 montre aussi que durant les périodes de récession économique, les TPE-PME sont à même d’atténuer les destructions d’emplois opérées par les grandes entreprises, tandis qu’au cours des périodes de reprise, la croissance de l’emploi est concentrée dans les grandes entreprises. L’enquête téléphonique, réalisée en 2012, confirme ces travaux et révèle un potentiel global de recrutement important : 62% des TPE-PE interrogées déclarent avoir recruté dans les 24 derniers mois, et 31% avoir l’intention de le faire dans les 12 prochains mois. Cependant ces résultats varient sensiblement selon les caractéristiques de l’entreprise. 7. Cf. Gestion des hommes et formation dans les très petites entreprises étude n°72 Céreq janvier 1999. 8. Cf. Très petites, petites et moyennes entreprises : entre tradition et innovation – une recension des travaux du Céreq (1985-2007). 13 PRATIQUES DE RECRUTEMENT / ÉTUDES ET RECHERCHES 2.1 LES TPE-PE : DES PRATIQUES SPECIFIQUES DE RECRUTEMENT LES ÉTABLISSEMENTS DE PLUS DE 20 SALARIÉS ET/OU DE CRÉATION RÉCENTE SONT CEUX QUI RECRUTENT LE PLUS SOUVENT L’analyse des réponses à l’enquête statistique montre assez logiquement que, parmi les TPE-PE, ce sont les établissements qui ont le plus de salariés qui recrutent davantage. Ainsi, les établissements de 20-49 salariés sont ceux qui ont recruté le plus souvent (81%), tandis que ceux de 1 à 9 salariés ont le moins embauché (53%). Par ailleurs, ce sont plus souvent les établissements récents qui déclarent avoir recruté : 64% de ceux ayant une ancienneté inférieure à 3 ans contre 53% pour les plus de 15 ans. En moyenne, 31% des TPE-PE déclarent avoir l’intention de recruter dans les 12 prochains mois. Mais ces perspectives de recrutement s’ordonnent également selon la taille et l’ancienneté de l’établissement : en particulier, ceux créés depuis 8 à 15 ans sont proportionnellement les moins nombreux à déclarer vouloir recruter dans les 12 prochains mois, à l’inverse de ceux créés depuis moins de 3 ans. UNE DYNAMIQUE DE RECRUTEMENT DIFFÉRENCIÉE SELON LES SECTEURS D’ACTIVITÉ Sur la période étudiée, le secteur agricole voit ses perspectives de recrutement se maintenir, alors que celui de la construction les revoit sensiblement à la baisse (Cf. tableau n°2). À noter que les scores élevés observés dans le secteur agricole sont liés à la forte part de l’emploi saisonnier. LES CHEFS D’ENTREPRISE ASSUMENT SOUVENT SEULS LE RÔLE DU RECRUTEUR ET PRIVILÉGIENT LES « SAVOIR-ÊTRE » DES CANDIDATS Confirmant ici les résultats d’autres travaux menés auprès des TPE, les observations témoignent du fait que, le plus souvent, les TPE-PE se caractérisent par l’absence de compétences dédiées à la gestion des ressources humaines : le chef d’entreprise est souvent le seul recruteur9. Les chefs d’entreprises interrogés déclarent recruter généralement « à l’instinct », en privilégiant le critère du « savoir-être » et délèguent rarement l’entretien d’embauche. TABLEAU 2 LES RECRUTEMENTS ET LEURS PERSPECTIVES SELON LE SECTEUR D’ACTIVITÉ DANS LES TPE-PE SECTEURS D’ACTIVITÉS Agriculture, sylviculture et pêche Industrie manufacturières, industries extractives et autres Construction Commerce de gros et de détail, transports, hébergement et restauration Information, communication, activités financières, immobilières Activités scientifiques et techniques-services administratifs et de soutien Administrations publiques, enseignement, santé humaine et action sociale Autres activités de services RECRUTEMENT DANS LES 24 DERNIERS MOIS RECRUTEMENT DANS LES 12 PROCHAINS MOIS 68% 65% 56% 59% 68% 61% 77% 61% 46% 38% 23% 29% 33% 34% 37% 32% SOURCE : ENQUÊTE PÔLE EMPLOI 9. Voir notamment les travaux de Bentabet, Michun et Trouvé : Gestion des hommes et formation dans les très petites entreprises. Etude n°72 janvier 1999. 14 ÉTUDES ET RECHERCHES / PRATIQUES DE RECRUTEMENT Si la majorité d’entre eux disent n’éprouver aucune difficulté face à la technicité d’un recrutement, certains admettent être mal à l’aise pour mener l’entretien d’embauche, en particulier pour les recrutements d’apprentis car ils ne peuvent pas s’appuyer sur l’expérience du candidat. De manière générale, la prudence prédomine dans les comportements de recrutement. En effet, suite à un mauvais recrutement et en dépit d’un besoin identifié, les responsables d’entreprise renoncent souvent à embaucher en raison d’un risque non négligeable de mise en péril de leur entreprise. LES CANAUX DE RECRUTEMENTS PRIVILÉGIÉS PORTENT SUR LE BOUCHE À OREILLE, LES RELATIONS PERSONNELLES OU PROFESSIONNELLES Plus la taille de l’établissement est modeste, plus souvent le recruteur s’appuie sur le bouche à oreille (64% pour les 0 salarié et 50% pour les 20-49 salariés) et/ou fait appel à ses relations personnelles (respectivement 49% et 21%) pour trouver et embaucher des candidats. Les employeurs recrutent habituellement par cooptation et sur candidatures spontanées. Ainsi 39% des TPE-PE qui n’ont pas fait appel à un professionnel de l’emploi ont pris conseil auprès de leurs relations professionnelles. LES TPE-PE SONT AUSSI DES ENTREPRISES FACILITANT L’INSERTION ET LA RÉINSERTION Les chefs d’entreprise de petites structures sur des secteurs en tension recrutent souvent des candidats parmi les personnes les plus éloignées de l’emploi (jeunes, séniors, personnes de faible niveau de qualification, demandeurs d’emploi de longue durée). Au 31 décembre 2011, près de 8 % des salariés de TPE ont été recrutés en contrat aidé, soit trois fois plus qu’au sein des entreprises de plus grande taille10. Les contrats d’apprentissage (69%) et de professionnalisation (14%) sont les plus représentés au sein de ces contrats aidés. Les TPE-PE jouent ainsi un rôle important dans la primo-insertion des jeunes, entre autres au travers de l’apprentissage pour lequel des agences de Pôle emploi proposent des actions innovantes décrites plus loin, tout comme dans le recrutement ou le maintien dans l’emploi de séniors. Là encore des agences de Pôle emploi mettent en place des actions spécifiques, par exemple dans les secteurs de la coiffure ou celui de la sécurité qui n’hésitent pas à recruter des séniors. LES CONDITIONS DE TRAVAIL ET D’EMPLOI PEUVENT FREINER LES RECRUTEMENTS Les difficultés de recrutement des TPE-PE sont en partie liées à des conditions d’emploi ou de travail souvent moins attractives que celles proposées dans les entreprises de plus grande taille. On peut citer : • des salaires horaires relativement bas en comparaison des entreprises de plus grande taille11 ; • un recours fréquent au temps partiel et aux contrats de courte durée faute de pouvoir financer un poste à temps plein ; • un développement moindre de la formation continue dans les structures de moins de 10 salariés ; • des contraintes horaires parfois fortes sous forme de travail de nuit et/ou de week-end ; et imposant une mobilité qui exige permis et véhicule personnel car une TPE, le plus souvent, ne possède pas de véhicules à la disposition des salariés pour des déplacements professionnels. Ces difficultés participent à créer, dans certains secteurs professionnels, une rotation importante des salariés. Pour le même type de raison, les postes sur des métiers en tension s’avèrent plus difficiles à pourvoir dans les TPE-PE. Enfin, bien que les petites structures constituent une voie importante d’insertion professionnelle, es observations de terrain réalisées mettent parfois en évidence des réticences vis-à-vis de l’embauche de jeunes demandeurs d’emploi. 10. Cf. Dares Analyses : L’emploi dans les très petites entreprises en décembre 2011. N° 096, décembre 2012. 11. Cf. les aides publiques aux TPE 2ème partie. A LETOWSKI/ P. TROUVE. 15 En effet à des territoires mal desservis en transports en commun freinant la mobilité géographique s’ajoute une défiance fréquente des employeurs vis-à-vis de ce public en lien avec leur manque de motivation (réelle ou supposée) ou leur faible maîtrise des codes sociaux, ainsi qu’en témoignent des représentants de fédérations professionnelles auprès d’acteurs de Pôle emploi. 2.2 LES PETITES STRUCTURES SOLLICITENT PEU LES PROFESSIONNELS DE L’EMPLOI MALGRE L’IMPORTANCE DE LEURS ATTENTES Contrairement aux entreprises dotées d’un service RH, en capacité de planifier les recrutements, expérimenté dans la rédaction et la publication des offres, disposant d’un fichier étoffé de candidatures, les petites structures recrutent généralement dans l’urgence pour répondre le plus souvent à des commandes et ne peuvent s’appuyer sur une expertise constituée dans la conduite des recrutements. Le périmètre d’un poste en TPE-PE englobe souvent des activités et fonctions variées, rendant ainsi difficiles l’évaluation et l’expression du besoin en recrutement. L’enquête auprès des TPE-PE permet de mettre en évidence que 45% des recruteurs auraient souhaité une aide pour la description du poste et 48% pour la rédaction de l’offre. Plus largement, 60% des responsables de TPE-PE interrogés (66% pour les 0 salariés) parmi ceux ayant déjà recruté auraient souhaité recevoir des conseils sur la publication de leurs offres d’emploi. PRATIQUES DE RECRUTEMENT / ÉTUDES ET RECHERCHES SEUL UN TIERS DES TPE-PE FONT APPEL À UN PROFESSIONNEL DE L’EMPLOI Pour autant, les TPE-PE sollicitent peu les professionnels de l’emploi lors de leurs recrutements, qu’il s’agisse de Pôle emploi, des sociétés d’intérim, des cabinets de recrutement, de l’APEC, de Cap emploi, des missions locales ou d’autres types d’acteurs du marché du travail. Deux tiers (63%) des établissements de moins de 50 salariés ayant recruté dans les 24 derniers mois déclarent n’avoir pas eu recours à un professionnel de l’emploi. Parmi eux, 13% estiment avoir rencontré des difficultés lors de leur procédure de recrutement. Cette proportion atteint 51% pour les établissements de 10 à 19 salariés et témoigne de leur embarras notamment quant à la définition du profil recherché. Les facteurs qui semblent jouer en faveur du recours aux professionnels de l’emploi sont multiples (37% des établissements en moyenne sont concernés). Ainsi, plus l’entreprise est récente et son effectif important, plus ce recours sera fréquent : 60% des entreprises de 20 à 49 salariés, ayant une ancienneté inférieure à 3 ans ont sollicité un professionnel de l’emploi contre seulement 28% des établissements de 0 salarié créés il y a plus de 15 ans12. Les établissements les plus susceptibles de faire appel à un professionnel de l’emploi sont ceux qui comptent 10 salariés ou plus, qui ont été créés récemment (moins de 3 ans) et majoritairement dans le secteur tertiaire (dans les secteurs des « Autres services », des « Administrations publiques », de l’enseignement, de la santé humaine et de l’action sociale). En outre, toutes choses égales par ailleurs, la probabilité de faire appel à un professionnel de l’emploi augmente sensiblement lorsque le contrat proposé est à temps plein (8 points de plus qu’un temps partiel), de même lorsqu’il s’agit d’un contrat aidé (22 points de plus qu’un contrat classique ou en alternance) (cf. Graphique 2)13. Par ailleurs, un établissement ayant des perspectives de recrutement à moyen terme (12 mois) voit sa probabilité de faire appel à un professionnel augmenter de 18 points. 12. Ces constats se retrouvent dans d’autres travaux, comme l’enquête OFER de la DARES 13. Il s’agit des caractéristiques du dernier recrutement opéré au cours des 24 mois précédant l’enquête. 16 ÉTUDES ET RECHERCHES / PRATIQUES DE RECRUTEMENT GRAPHIQUE 2 PROBABILITÉ DE FAIRE APPEL À UN PROFESSIONNEL DE L’EMPLOI -4,3 0 salarié vs 1-9 salariés 9,7 10-19 salariés vs 1-9 salariés 20-49 salariés vs 1-9 salariés Établissements créés depuis : 14,6 12,2 Moins de 3 ans vs Entre 3 et 8 ans Entre 8 et 15 ans vs Entre 3 et 8 ans -9,5 Plus de 15 ans vs Entre 3 et 8 ans -3,6 Agriculture, sylviculture et pêche vs Commerce -3,6 Industrie manufacturière, industries extractives et autres vs Commerce -1,0 Construction vs Commerce -3,8 Information,communication,activités financières, immobilières vs Commerce 5,4 Activités scientifiques et techniques - services administratifs et de soutien vs Commerce 5,3 Administrations publiques, enseignement, santé humaine et action sociale vs Commerce 11,3 6,8 Autres activités de services vs Commerce Temps partiel vs Temps plein -8,3 21,9 Contrat aidé vs Contrat classique ou alternance 18,1 Recrutement dans les 12 prochains mois vs Pas de recrutement prévu -15,0 -10,0 -5,0 0,0 5,0 10,0 15,0 20,0 25,0 SOURCE : ENQUÊTE PÔLE EMPLOI MODÉLISATION DE TYPE RÉGRESSION LOGISTIQUE ; LES RÉSULTATS FIGURANT SUR LE GRAPHIQUE SONT TOUS STATISTIQUEMENT SIGNIFICATIFS AU SEUIL DE 5% Lecture : « toutes choses égales par ailleurs » un établissement de 20-49 salariés a une probabilité de faire appel à un professionnel de l’emploi plus forte de 14,6 points par rapport à un établissement de 1-9 salariés. Variables de contrôle : tranche d’effectif, ancienneté de création, secteur d’activité, temps de travail du contrat recherché, type de contrat recherché, perspectives de recrutement dans les 12 prochains mois Les écarts sont mesurés par rapport à un établissement de référence ayant entre 1 et 9 salariés, créé entre 3 et 8 ans, dont le secteur d’activité est celui du commerce, ayant recruté avec un contrat classique (ou en alternance) à temps plein, et n’ayant pas prévu de nouveau recrutement dans les 12 prochains mois. Sa probabilité d’avoir fait appel à un professionnel de l’emploi pour son dernier recrutement s’élève à 30%. À noter que le fait que le dernier recrutement ait porté sur un emploi de cadre (ou de profession libérale) versus un emploi d’ouvrier, d’employé ou de technicien n’est pas significatif au plan statistique. LE RECOURS À PÔLE EMPLOI EST LARGEMENT DOMINANT Parmi les professionnels de l’emploi, Pôle emploi est de loin le premier opérateur auquel les TPE-PE ont recours. Qu’il s’agisse d’un recours exclusif ou d’un recours combiné avec celui à un autre professionnel de l’emploi, au total 85% des établissements déclarant avoir sollicité un professionnel de l’emploi ont recours à Pôle emploi. Si l’on se limite au recours exclusif à Pôle emploi, cela porte sur les trois-quarts des établissements. Les facteurs jouant en faveur du recours exclusif à Pôle emploi sont relativement proches de ceux mis précédemment en évidence (cf. graphique 3). Toutes choses égales par ailleurs, la probabilité d’avoir recours exclusivement à Pôle emploi est accrue dans le cas d’un établissement récent (moins de 3 ans), relevant des services, prévoyant un recrutement au cours des 12 prochains mois, recrutant un ouvrier, un employé ou un technicien (constat absent du modèle précédent) et ayant recours à un contrat aidé. 17 PRATIQUES DE RECRUTEMENT / ÉTUDES ET RECHERCHES La hausse ou la baisse des effectifs jouent toutes deux en faveur du recours à Pôle emploi. En revanche, ni le temps plein ou le temps partiel, ni la taille de l’établissement ne semblent influer de façon significative sur le fait de faire appel à Pôle emploi, contrairement aux résultats sur le recours général à un professionnel de l’emploi. Enfin, soulignons que les TPE-PE ayant sollicité un professionnel autre que Pôle emploi, invoquent principalement comme raison leur insatisfaction vis-à-vis du service public de l’emploi. Les employeurs concernés déclarent avoir précédemment fait appel à ses services, et considèrent que le recrutement sera plus rapide via un autre professionnel (notamment l’intérim). GRAPHIQUE 3 PROBABILITÉ DE FAIRE APPEL EXCLUSIVEMENT À PÔLE EMPLOI Établissements créés depuis : 7,4 Moins de 3 ans vs Entre 3 et 8 ans -9,5 Entre 8 et 15 ans vs Entre 3 et 8 ans -3,3 Plus de 15 ans vs Entre 3 et 8 ans -4,9 Agriculture, sylviculture et pêche vs Commerce -2,4 Industrie manufacturière, industries extractives et autres vs Commerce -1,2 Construction vs Commerce Information,communication,activités financières, immobilières vs Commerce 2,4 Activités scientifiques et techniques - services administratifs et de soutien vs Commerce 2,3 9,5 Administrations publiques, enseignement, santé humaine et action sociale vs Commerce 6,4 Autres activités de services vs Commerce Cadre ou profession libérale vs Ouvrier, employé, technicien -13,6 14,2 Contrat aidé vs Contrat classique ou alternance 4,9 Regroupement de plusieurs profession vs Une seule profession au sein de l'établissement 5,2 Sans objet vs Stabilité 3,6 Hausse effectif vs Stabilité 8,6 Baisse effectif vs Stabilité 8,2 Recrutement dans les 12 prochains mois vs Pas de recrutement prévu -20,0 -15,0 -10,0 -5,0 0,0 5,0 10,0 15,0 20,0 SOURCE : ENQUÊTE PÔLE EMPLOI Lecture : « toutes choses égales par ailleurs » un établissement appartenant au secteur de l’administration publique a une probabilité d’avoir fait appel à Pôle ’emploi plus forte de 9,5 points par rapport à un établissement du secteur du commerce. Variables de contrôle : identiques à celles utilisées dans le modèle dont les résultats sont présentés dans le graphique 2. Les écarts sont mesurés par rapport à un établissement de référence créé entre 3 et 8 ans, dont le secteur d’activité est celui du commerce, ayant recruté avec un contrat classique (ou en alternance), dont les effectifs n’ont pas évolué depuis 2 ans et n’ayant pas prévu de nouveau recrutement dans les 12 prochains mois. Sa probabilité d’avoir fait appel à Pôle emploi pour son dernier recrutement s’élève à 22%. 18 ÉTUDES ET RECHERCHES / PRATIQUES DE RECRUTEMENT 2.3 DES BESOINS DIFFERENCIES SELON LA TAILLE DE L’ETABLISSEMENT ET LE TYPE DE PROFESSIONNEL DE L’EMPLOI SOLLICITE Si trois quarts (73%) des établissements de 20 à 49 salariés déclarent n’avoir bénéficié d’aucune aide pour leur processus de recrutement et indiquent ne pas en souhaiter, ce constat n’est valable que pour la moitié (51%) des « 0 salarié ». Presque la moitié (48%) des établissements sollicitant Pôle emploi déclarent des besoins spécifiques lors de la phase de recrutement, cette proportion chutant à 17% parmi ceux qui font appel à un autre professionnel. Pour la plupart des services, les établissements de petite taille sont plus nombreux à exprimer un besoin d’appui. Toutefois la sélection des candidats et l’entretien d’embauche semblent principalement préoccuper les établissements de plus grande taille (Cf. tableau 3). Pour les employeurs faisant exclusivement appel à Pôle emploi, c’est sur les phases initiales du recrutement que le service public de l’emploi est le plus attendu : de la description du poste à la publication de l’offre, en passant par l’information sur les aides et mesures. Si les observations de terrain indiquent que les employeurs préfèrent d’abord assurer un recrutement de qualité plutôt que chercher des informations sur les aides et mesures, l’enquête révèle que 65% d’entre eux auraient néanmoins souhaité en bénéficier (cf. tableau 4). Inversement, pour les entreprises faisant appel à d’autres professionnels14 que Pôle emploi, les besoins exprimés sont davantage orientés sur la fin du processus de recrutement : de la sélection du candidat à la rédaction du contrat et la déclaration d’embauche. Dès lors, l’orientation stratégique de « Pôle emploi 2015 » qui prévoit de proposer un service renforcé aux TPE et PE semble répondre aux attentes des entreprises, particulièrement dans les étapes en amont du recrutement. TABLEAU 3 BESOINS DE SERVICES D’AIDE AU RECRUTEMENT SELON LA TAILLE DES TPE-PE (EN % DU NOMBRE D’ENTREPRISES DE LA TAILLE CONSIDÉRÉE) BESOIN POUR : la description du poste la définition du profil recherché le choix du contrat la rédaction de l'offre la publication de l'offre l'information sur les aides et mesures la sélection des candidats l'entretien d'embauche la rédaction du contrat la déclaration d'embauche l'intégration du salarié 0 salarié 1-9 salariés 10-19 salariés 20-49 salariés Total 51% 50% 31% 54% 66% 71% 38% 14% 31% 30% 16% 45% 43% 31% 49% 60% 65% 44% 18% 27% 27% 18% 42% 41% 26% 41% 56% 54% 51% 22% 19% 14% 21% 32% 33% 17% 36% 50% 54% 53% 19% 17% 12% 16% 45% 43% 30% 48% 60% 65% 45% 18% 26% 25% 18% SOURCE : ENQUÊTE PÔLE EMPLOI 14. APEC, cabinets de recrutement, sociétés d’intérim, Cap emploi, Missions locales, maisons de l’emploi, ceci étant éventuellement couplé avec le recours à Pôle emploi 19 PRATIQUES DE RECRUTEMENT / ÉTUDES ET RECHERCHES TABLEAU 4 BESOINS DE SERVICES D’AIDE AU RECRUTEMENT SELON QUE LES TPE-PE S’ADRESSENT À PÔLE EMPLOI OU À D’AUTRES PROFESSIONNELS DE L’EMPLOI (EN % DU NOMBRE D’ENTREPRISES CONCERNÉES) BESOIN POUR : la description du poste la définition du profil recherché la rédaction de l'offre la publication de l'offre l'information sur les aides et mesures la sélection des candidats l'entretien d'embauche le choix du contrat la rédaction du contrat la déclaration d'embauche l'intégration du salarié Autre que Pôle emploi Pôle emploi seulement 38% 38% 30% 34% 52% 45% 28% 34% 39% 34% 11% 43% 40% 47% 61% 65% 40% 15% 28% 24% 24% 16% SOURCE : ENQUÊTE PÔLE EMPLOI Enfin, l’enquête statistique comme les entretiens de terrain convergent vers une attente de spécialisation et de professionnalisation accrues du conseiller référent exprimées par les employeurs. Les TPE-PE attendent d’une part un interlocuteur identifié (60 %) et d’autre part une grande réactivité de la part du professionnel de l’emploi auquel elles s’adressent. Les observations de terrain témoignent également que les employeurs sont nombreux à souhaiter être aidés par un conseiller au fait de leurs problématiques sectorielles. 3. DES ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPECIFIQUES DE PÔLE EMPLOI EN DIRECTION DES PETITES ENTREPRISES S’il n’existe pas d’offre de services spécifique de Pôle emploi pour les TPE-PE, des initiatives locales pour répondre à leurs besoins sont mises en œuvre souvent avec succès. Certaines d’entres elles sont présentées ci-après. Les initiatives observées peuvent être regroupées en fonction de leurs objectifs : • faciliter le recrutement ; •a nticiper les besoins en recrutement sur des secteurs d’activité en tension ; • lever les préjugés ; • favoriser le temps partagé. 21 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHES 3.1 FACILITER LE RECRUTEMENT Il s’agit d’actions qui, soit simplifient la démarche de recrutement, soit aident et confortent l’employeur dans son choix, ou encore améliorent le rapprochement entre demandeurs d’emploi et employeurs sur des offres d’apprentissage. LA CRÉATION D’UN « PÔLE ARTISANS » ET DE SERVICES DÉDIÉS PAR L’AGENCE LOCALE PÔLE EMPLOI DE LYON VAISE Cette action repose sur une conseillère ayant précédemment acquis une expertise dans le domaine de l’artisanat et qui se consacre à temps plein aux relations avec ce type d’entreprise. Elle est donc disponible pour répondre aux demandes des artisans qui ont besoin d’être renseignés et accompagnés dans leurs recrutements, le plus souvent urgents. Les artisans bénéficient de tous les moyens de contact direct avec la conseillère (ligne directe, fax et adresse électronique). Sa compétence géographique couvre l’ensemble du département. Les artisans demandent d’abord à cette interlocutrice de connaitre leur secteur d’activité, les conditions d’exercice du métier et de son évolution. Aussi fait-elle régulièrement des stages chez les artisans pour mieux connaître leurs besoins. Elle travaille étroitement avec les autres conseillers sur le sourcing15 des candidatures. Elle présente des CV et organise les entretiens entre employeurs et candidats16. En 3 mois, après une campagne de mailing, elle a géré plus de 1000 contacts et organisé plus de 200 recrutements. Elle présente le « pôle Artisans » à toutes les fédérations professionnelles et consacre une journée par semaine à la réception sans rendezvous des artisans. Les témoignages recueillis semblent attester que cette offre de service permet au Pôle emploi local d’être reconnu par les artisans comme un interlocuteur incontournable. Les artisans demandent un appui rapproché et personnalisé, sur un éventail relativement étendu de services : du dépôt de leur offre jusqu’au recrutement, en passant par un conseil au recrutement et par l’aide au choix du contrat. Le rapport coût-efficacité de cette organisation, fondée sur l’affectation d’un conseiller à temps plein, semble meilleur que celui d’une organisation mobilisant plusieurs conseillers en temps partagés, moins disponibles et moins compétents sur les problématiques à traiter. En particulier, les mises en relation entre offres et demandes sont mieux maîtrisées par un agent dédié qui connaît le secteur d’activité plutôt que par plusieurs conseillers qui ne maîtrisent pas ou peu ce même secteur professionnel. À noter enfin que le travail en réseau avec les artisans et leurs organisations professionnelles facilite la circulation de l’information sur les services proposés par Pôle emploi, permet de collecter des offres nouvelles et d’accroître les opportunités de placement des demandeurs d’emploi. UN ACCOMPAGNEMENT COLLECTIF DES DEMANDEURS D’EMPLOI ORGANISÉ PAR DOMAINE D’ACTIVITÉ LIÉ AUX PETITES ENTREPRISES Dans le cadre initial du plan « demandeurs d’emploi de longue durée », le directeur de l’agence de Lyon Vaise a également mis en place des accompagnements internes collectifs sous formes de clubs. Selon les acteurs de terrain, si l’accompagnement individuel permet un taux de sortie du chômage à 3 mois à hauteur de 35%, l’accompagnement collectif présente un taux de sortie entre 60% et 70%. 15. Sourcing (ou identification en français), terme anglais utilisé en gestion des ressources humaines pour décrire un processus qui a pour objectif d’identifier des candidats correspondant aux profils recherchés par l’employeur. 16. Les TPE témoignent de leur difficulté à recruter des jeunes dont l’investissement professionnel pose souvent problème : retards récurrents, absentéisme, quasi-absence de repères sociaux. Les chefs d’entreprise se déclarent prêts à recruter rapidement et à former mais « pas à réinitialiser » le candidat sur sa présentation et sur son comportement. Il s’agit là d’une des difficultés les plus importantes pour les conseillers. Pour ne pas perdre la confiance et les offres des TPE sans services RH, ils doivent être vigilants sur les candidatures non adaptées « je tente malgré mon absence de diplôme ou mon inexpérience ». C’est pourquoi la conseillère du Pôle Artisans présélectionne elle-même les candidatures. ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHE L’agence a développé une gestion des portefeuilles de demandeurs d’emploi par secteur. Par exemple, un conseiller qui gère le secteur de la mécanique auto anime le club des demandeurs d’emploi de la mécanique automobile et se met en lien avec la conseillère dédiée aux artisans pour placer ses mécaniciens. Se sont ajoutés un club « Nettoyage », un club « Sécurité » et un club « Secrétariat » qui se réunissent une fois toutes les 1 ou 2 semaines et qui visent notamment le placement dans le tissu des petites entreprises. Les demandeurs d’emploi de ces clubs travaillent en groupe sur les outils de recherche d’emploi. Des employeurs viennent parfois présenter leur entreprise et proposer des postes. Cette méthode a l’avantage d’être à la fois plus efficiente par son organisation (accompagnement de plusieurs demandeurs d’emploi en même temps) et plus responsabilisante pour le conseiller vis-à-vis des relations à établir avec les employeurs. UN SERVICE D’APPUI PERSONNALISÉ POUR LE RECRUTEMENT D’APPRENTIS DANS LES TPE-PE À l’occasion de l’organisation d’un forum de l’alternance, les acteurs de l’A2S17 de l’Artois se sont mobilisés pour inciter les chefs de petites et très petites entreprises à recruter des apprentis ou des personnes en contrat de professionnalisation. Les employeurs de petites structures rencontrent en effet des difficultés particulières liées soit à leur manque d’expertise dans le recrutement, soit au manque d’information sur le comportement au travail de jeunes dépourvus d’expérience préalable. De plus, ils ont tendance à privilégier des critères liés aux savoir-être et à la motivation des candidats, plus difficilement objectivables. 17. Agence de Services Spécialisés 22 Dans ce contexte, ces employeurs préfèrent parfois renoncer à embaucher plutôt que se tromper, car une erreur de recrutement peut mettre en péril leur entreprise. Forts de ces constats, plusieurs acteurs de cette A2S disposant d’une expérience préalable dans le champ des relations aux entreprises et l’identification des compétences ont conçu un Service d’Appui au Recrutement Personnalisé : le SARP. Ce service vise à répondre aux objectifs suivants : • faire exprimer les attentes des chefs d’entreprise sur les spécificités du poste à pourvoir et le profil attendu du candidat ; • faire hiérarchiser leurs attentes par les recruteurs ; • centrer l’entretien sur les compétences personnelles et sociales du candidat ; • améliorer le sourcing des candidats par les conseillers de Pôle emploi ; • faciliter l’échange entre le recruteur et le candidat • et enfin diminuer les risques d’insatisfaction de l’employeur au regard du recruté et de Pôle emploi. Ce service permet la traduction des attentes subjectives d’un employeur en critères objectifs de recrutement au travers de 2 supports : le guide de questionnement remis au conseiller et le guide d’entretien destiné à l’employeur (cf. encadré 2). La démarche est rythmée par 4 étapes : le recueil des informations auprès des employeurs grâce au guide de questionnement (1h) ; l’échange entre le conseiller qui remet le guide complété et le psychologue du travail (30 minutes) ; l’analyse du guide par le psychologue (1h30) ; enfin, la remise de la grille d’entretien à l’employeur avec une notice d’utilisation. 23 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHES ENCADRÉ 2 LES OUTILS DU SARP Le guide de questionnement remis au conseiller est un outil de communication qui doit permettre à l’employeur de s’exprimer librement sur ses attentes par rapport au poste et au candidat. Il doit faciliter la détection et la compréhension de ses difficultés face à un recrutement (première embauche notamment). Cet outil appréhende la culture de l’entreprise (règles, habitudes, …) et identifie ses enjeux. Il vise également à décrire le poste et ses activités, les attentes de l’employeur ainsi que les compétences professionnelles et personnelles attendues chez les candidats. Le guide de questionnement est un cadre de référence : il permet une identification des compétences transversales (« soft skills18 ») pour chaque poste spécifique à chaque entreprise. Il permet la traduction des attentes implicites (subjectives) en facteurs explicites et mesurables (objectif). Ce guide de questionnement se compose de 5 séries de questions : des questions ouvertes (ex. à quoi repérez-vous un bon apprenti ? à quoi mesurez-vous qu’un salarié n’est pas fait pour le poste ?), les questions liées au poste, les questions ayant trait à l’apprenti, les questions traitant de l’apprentissage et enfin une conclusion qui définit les 5 critères les plus importants pour l’employeur. La grille d’entretien destinée à l’employeur est élaborée par un psychologue du travail après un travail d’analyse du guide de questionnement et propose des questions simples, factuelles et compréhensibles par un jeune candidat encore inexpérimenté et favorisant une expression libre. Généralement, l’employeur s’approprie toutes les questions dans l’ordre qui lui convient. Il note les réponses de chaque candidat. Tous les employeurs qui ont bénéficié du SARP l’ont utilisé pendant leurs entretiens et tous ont recruté, sauf un dont l’entreprise a déposé le bilan. Les candidats recrutés comme apprentis travaillent toujours au sein de la même entreprise. Certains employeurs se sont appuyés sur la grille d’entretien pour recruter un nouveau salarié sur le même type de poste, afin notamment de mieux caractériser et objectiver la personnalité des candidats. Les employeurs témoignent d’un recrutement sécurisé. Selon eux, la grille d’entretien leur a permis de se sentir plus autonomes, plus méthodiques dans leurs échanges avec les candidats. Par ailleurs, ils ont un sentiment d’équité de traitement entre les candidats puisque le questionnaire est identique. Cette grille permet aussi de déléguer l’entretien comme dans le cas suivant : un employeur, dans l’impossibilité de se rendre sur le forum, a confié la grille d’entretien à « son bras droit » qui a pu ainsi recruter à la place du chef d’entreprise. Le SARP est un outil de fidélisation des entreprises clientes et permet une montée en compétence des conseillers sur différents secteurs professionnels et sur la connaissance de l’entreprise. UN APPUI AU RECRUTEMENT DE JEUNES ISSUS DE L’APPRENTISSAGE PAR UN SUIVI PARTAGÉ ET LA MISE EN PLACE DE PARRAINAGES Des actions sont menées par les deux partenaires de l’accord signé entre la Chambre de métiers et de l’artisanat (CMA) et de la Direction Territoriale du Loir-et-Cher. Dans le cadre des suivis post apprentissage, les jeunes diplômés sont contactés par la CMA pour identifier leur situation et des EMTPR (Evaluation en Milieu de Travail Préalable au Recrutement)19 peuvent alors être proposées aux jeunes sans emploi. De plus, la CMA, la CGPME (Confédération générale des petites et moyennes entreprises) et la Direction territoriale de Pôle emploi ont conclu un accord pour développer et porter un projet régional expérimental de parrainage. Il s’agit de 500 chefs d’entreprise bénévoles qui vont chacun parrainer jusqu’à 3 diplômés de l’apprentissage dans l’objectif de leur créer un réseau et de leur permettre de mieux candidater sur un poste. Ce parrainage prend la forme d’un accompagnement du jeune dans sa présentation, son orientation et dans l’acquisition de certains codes sociaux en entreprise. 18. Les soft-skills sont les compétences que la personne met en œuvre en dehors des compétences techniques (hard skills) propres à son métier. Elles sont également souvent appelées compétences sociales. 19. Cette prestation permet de tester un candidat en situation réelle de travail dans une entreprise. La durée de cette évaluation peut aller jusqu’à 40 heures sur 5 jours. Un tuteur, collaborateur de l’entreprise, sera chargé de vérifier ses compétences en lui confiant des tâches à réaliser. A l’issue de l’évaluation, l’employeur peut décider de recruter le candidat ou non. ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHE 24 3.2 ANTICIPER LES BESOINS EN RECRUTEMENT Pour les TPE-PE, les difficultés de recrutement sont récurrentes dans certains secteurs d’activité. C’est pourquoi des initiatives locales telles que la mise en place d’un vivier de candidats formés et disponibles, l’orientation d’apprentis vers des métiers en tension, ou encore des rencontres régulières entre employeurs et demandeurs d’emploi participent de l’anticipation et d’une meilleure satisfaction des besoins de recrutement. LA FORMATION DE CANDIDATS AUX MÉTIERS DE LA SÉCURITÉ Dans la sécurité, dont la règlementation est de plus en plus exigeante, les TPE/PE sont relativement nombreuses même si on observe fréquemment une croissance de la taille de ces entreprises. De nombreux auto-entrepreneurs travaillent dans ce secteur d’activité. Les offres de postes à pourvoir dans ce secteur d’activité sont récurrentes et presque toujours urgentes. Les entreprises de la sécurité recrutent un nombre important de demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi comme des travailleurs handicapés, des séniors ou des demandeurs d’emploi de longue durée. Ce secteur souffre néanmoins d’un fort turn over des salariés (30% en moyenne) qui s’explique notamment par des salaires horaires bas (9,45 € selon la convention collective), des contraintes fortes comme le travail de nuit et/ou de week-end, une mobilité exigeant permis et véhicule, une réglementation qui évolue et une forme d’usure au travail concernant notamment la surveillance de magasins. Bien que les métiers concernés ne soient pas véritablement en tension, les employeurs s’accordent pour témoigner de leur difficulté à recruter des agents de sécurité. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation : en particulier les demandeurs d’emploi ne souhaitent plus travailler comme agent de surveillance de magasin ou n’ont pas obtenu le renouvellement de leur carte professionnelle. L’agence locale de Metz Blida est organisée par secteur professionnel dont celui de la sécurité. Une conseillère gère seule ce secteur d’activité. Par sa connaissance des métiers, des activités, des employeurs du bassin et de l’organisation professionnelle de la sécurité privée, elle est devenue spécialiste de ce domaine tout en ayant d’autres activités au sein de l’agence. Cette conseillère anticipe les besoins en recrutements de ces employeurs, en intervenant sur 3 champs complémentaires : • Elle identifie les demandeurs d’emploi inscrits sur le métier « agent de sécurité », s’assure de leur motivation et les propose à ses différentes entreprises clientes. • En l’absence de demandeurs d’emploi formés et habilités, elle propose et organise avec l’employeur et en collaboration étroite avec l’Organisme Paritaire Collecteur Agréé (OPCA), une Préparation Opérationnelle à l’Emploi (POE)20 individuelle ou collective selon les besoins des recruteurs. Si une offre prévoyant une présélection des candidats est déposée, la conseillère procède elle-même au sourcing. Les postulants sont reçus en entretien par l‘organisme de formation qui va essentiellement tester leur motivation. Lorsque toutes les conditions sont satisfaites, les candidats retenus ont la garantie d’être recrutés à l’issue de la POE. • La conseillère constitue un vivier de candidats formés et habilités : face aux difficultés récurrentes de recrutement, elle organise un « réservoir » de demandeurs d’emploi immédiatement employables dans les métiers de la sécurité, grâce aux achats de formations par Pôle emploi et aux formations financées par la Région. La procédure comporte plusieurs étapes successives (cf. encadré 3). 20. La POE permet la mise en place d’une formation de préparation à la prise de poste. Elle permet de résorber l’écart entre les compétences du candidat retenu et les compétences requises par le poste. 25 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHES Selon la conseillère, ce dispositif et sa connaissance du secteur lui ont permis de placer près de deux fois plus de demandeurs d’emploi qu’auparavant. Sur la base de la relation de confiance ainsi établie, certains employeurs proposent en retour de prendre dans leur société des demandeurs d’emploi pour les remotiver ou pour une évaluation en milieu de travail. ENCADRÉ 3 LA CONSTITUTION D’UN VIVIER DE CANDIDATS FORMÉS À LA SÉCURITÉ Tout demandeur d’emploi ayant le projet professionnel de travailler dans le secteur de la sécurité se voit remettre par son conseiller un questionnaire. Les réponses au questionnaire sont analysées par la conseillère. Les demandeurs d’emploi sélectionnés sont convoqués pour une information collective au cours de laquelle sont présentés les différents métiers, le contenu de la formation obligatoire et les conditions d’obtention de la carte professionnelle provisoire. Si les demandeurs d’emploi n’ont pas déjà réalisé une Evaluation en Milieu de Travail (EMT)21 ou s’ils n’ont pas été orientés sur le projet suite à des prestations telles que Confirmer son Projet Professionnel (CPP)22 ou Cap Projet23, ils seront positionnés sur la Méthode de Recrutement par Simulation (MRS)24 métier agent de sécurité. Ceux qui auront réalisé avec succès la MRS, seront reçus en entretien de motivation par l’organisme de formation. L’entrée en formation est assujettie à l’obtention de la carte professionnelle provisoire. A l’issue de la formation, un bilan est organisé par l’organisme de formation. Pour garantir le retour à l’emploi, la conseillère a obtenu que les formations incluent différentes qualifications de sorte que les demandeurs d’emploi puissent travailler sur toutes les activités de la sécurité. Des chefs d’entreprises interviennent au sein de l’organisme de formation pour présenter leur société et les postes à pouvoir. Les candidats restent peu de temps sans emploi et pour les rares qui n’auraient pas été retenus, la conseillère organise un accompagnement renforcé pour détecter les difficultés apparues lors de l’entretien de recrutement. Cette opération s’étend sur environ 5 mois. UN JOB DATING CIBLÉ SUR LE SECTEUR DE LA COIFFURE FACILITANT L’ANTICIPATION DES BESOINS DE RECRUTEMENT La coiffure est un secteur qui présente des particularités de recrutement. En effet, les employeurs n’ont pas nécessairement recours au CV, bien qu’il faille préalablement vérifier que le candidat soit titulaire d’un CAP ou d’un brevet professionnel. Le recrutement se réalise essentiellement en fonction du « savoir-être » du postulant et de l’intuition du recruteur. Pour rendre son action efficace, le directeur de l’agence de Lyon Vaise a souhaité organiser un job dating à l’échelle de l’agglomération dans laquelle il se trouve. Pour cela, il a regroupé 2000 établissements et plus d’une centaine de demandeurs d’emploi. Cet aménagement nécessite la collaboration des agences ayant en portefeuille des salons de coiffure et les demandeurs d’emploi inscrits sur ce métier. Le directeur de l’agence locale a rencontré les différents syndicats de la coiffure pour mieux connaitre cette profession comme pour en identifier les besoins. Depuis septembre 2010, un job dating est organisé trimestriellement le lundi, jour de fermeture des salons de coiffure. ENCADRÉ 4 L’ORGANISATION DU JOB DATING Avant chaque job dating, un mail est envoyé à tous les coiffeurs pour les informer de la possibilité de rencontrer des candidats durant une matinée. Ainsi à chaque job dating, 10 à 20 recruteurs se présentent à l’agence et les demandeurs d’emploi sont convoqués chaque demi-heure par vague de 40. En complément, le directeur d’agencer reçoit individuellement chaque candidat dont il vérifie la disponibilité, la présentation et la motivation. Il transmet par mail le CV de ces personnes à environ 200 adresses de salon de coiffure qui vont, selon leurs besoins, contacter alors directement le chercheur d’emploi. 20. La POE permet la mise en place d’une formation de préparation à la prise de poste. Elle permet de résorber l’écart entre les compétences du candidat retenu et les compétences requises par le poste. 21. EMT : prestation dont l’objectif est de permettre à un demandeur d’emploi de vérifier en entreprise ses compétences et ses capacités professionnelles par rapport à un emploi recherché ou de découvrir les conditions d’exercice d’un métier envisagé. 22. CPP : prestation d’orientation professionnelle dont l’objectif est d’amener la personne à sécuriser une piste professionnelle dans la perspective d’un retour rapide à l’emploi. 23. Prestation d’orientation dont l’objectif est d’amener la personne ayant un besoin d’orientation ou de réorientation professionnelle identifié par Pôle emploi à définir au moins un projet professionnel. 24. La MRS permet d’élargir le champ des candidatures en se fondant sur l’évaluation des habiletés et de la motivation des candidats à tenir un poste de travail. 26 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHE Depuis la mise en œuvre de cette action le nombre de demandeurs d’emploi inscrits dans les métiers de la coiffure a diminué de moitié au niveau de l’agglomération. Le taux de placement serait près de 3 fois supérieur à celui de l’ensemble de la région. Si les personnes qui sont en situation de chômage de longue durée (par manque de réseau ou par déqualification due à un éloignement prolongé de l’activité professionnelle), l’agence propose leur CV à plusieurs entreprises qui ont des organismes de formation rattachés. Si le savoir-être correspond à l’employeur, ces DELD sont généralement recrutés, y compris les seniors. Désormais, la fédération fait le relai entre les coiffeurs et l’agence locale et transmet toutes les offres d’emploi déposées par ses adhérents. Depuis, la collaboration se poursuit sur deux thèmes : d’une part le transfert de compétences des coiffeurs vers d’autres professions comme la représentation ou la vente chez les fabricants, les grossistes en produits cosmétiques, les grandes surfaces, et d’autre part la création ou la reprise de salons de coiffure pour lesquelles la fédération propose de se porter caution auprès de banques. UNE GESTION PARTAGÉE DES OFFRES D’APPRENTISSAGE AVEC LA CHAMBRE DE MÉTIERS ET DE L’ARTISANAT Une « bonne pratique » anticipant le recrutement de futurs apprentis s’est développée au travers d’un partenariat qui s’est construit au fil du temps entre la Chambre de métiers et de l’artisanat (CMA) départementale et la Direction territoriale de Pôle emploi du Loir-et-Cher. Ce partenariat a pour objectif d’assurer un développement de l’apprentissage et de favoriser l’emploi des apprentis. Une convention a été signée entre Pôle emploi et la CMA. Cette convention engage Pôle emploi à communiquer à la CMA les offres relatives à l’apprentissage dont elle dispose de même que la CMA doit transmettre toutes les offres dont elle a connaissance aux agences de proximité. Le Centre d’Aide à la Décision (CAD) de la CMA s’engage aussi à transmettre les coordonnées du candidat retenu. Les deux organismes informent les entreprises concernées de cette démarche. Ce mode de fonctionnement assure la transparence des offres et évite les doublons. La relation partenariale entre la CMA et Pôle emploi est assurée à la fois au niveau local par un conseiller dans chacune des 4 agences du département et au niveau territorial par un chargé de mission. Le dépôt des offres d’apprentissage commence en mars, l’entrée en apprentissage chez un employeur peut débuter en juillet et la formation théorique en Centre de formation des apprentis (CFA) s’engage en septembre. Par ailleurs une information sur l’évolution des métiers du secteur de l’artisanat est assurée par des conseillers de la CMA auprès des conseillers de Pôle emploi. Des informations collectives auprès des jeunes sont organisées 3 fois par an dans les locaux de Pôle emploi et animées par la CMA et le CFA. La CMA organise des visites d’entreprises afin de sensibiliser les jeunes, tandis que Pôle emploi organise des forums auxquels participe la CMA avant l’entrée en apprentissage. L’action menée conjointement est évaluée au travers d’un bilan tant quantitatif (nombre d’offres enregistrées, satisfaites par secteurs d’activité et annulées) que qualitatif (cf. tableau 5). TABLEAU 5 BILAN DES OFFRES D’APPRENTISSAGE COLLECTÉES ENTRE 2004 ET 2012 POUR LE DÉPARTEMENT 2004 2005 2007 2012 Offres d’apprentissage collectées 400 500 630 736 Taux de satisfaction 80% 80% 80% 87% SOURCE : DONNÉES DE LA DIRECTION TERRITORIALE DE PÔLE EMPLOI 27 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHES 3.3 LEVER LES PREJUGES DEFAVORABLES A PÔLE EMPLOI : UNE OPERATION DE COMMUNICATION VISANT UN CLUB DE TPE-PE Dans le cadre d’une démarche de Gestion Territoriale des Emplois et des Compétences (GTEC) associant Pôle emploi et mobilisant un club d’environ 80 entreprises, principalement composé de TPE (artisanat, commerce, hôtellerierestauration) et de PME (métallurgie, plasturgie), l’objectif a été identifié de renforcer les relations des employeurs avec Pôle emploi. Il s’agissait ainsi de répondre aux critiques ou préventions fortes exprimées par les entreprises vis-à-vis de Pôle emploi dont elles ne percevaient pas la valeur ajoutée. C’est pourquoi l’équipe locale de direction de l’agence de Langres a présenté ses services aux employeurs lors d’une soirée « portes ouvertes ». Cette manifestation a permis d’assurer la présence de quinze employeurs. Trois ateliers animés par les conseillers ont été proposés aux employeurs répartis en plusieurs groupes : • Atelier de création d’offre, suivi et rapprochement de l’offre : des simulations d’offres ont été faites, certaines peu renseignées et d’autres très détaillées de façon à leur faire observer les résultats du rapprochement. •A telier de création d’espace employeur avec recherche de profils : les employeurs ont pu créer leur espace personnel et vérifier ainsi la simplicité d’utilisation de l’outil. •A telier de Méthode de Recrutement par Simulation (MRS) qui a suscité un vif intérêt chez les employeurs qui se sont prêtés au jeu. Au travers de ces ateliers, les employeurs ont témoigné du fait que cela leur demandait de réfléchir plus avant sur le contenu du poste ainsi qu’aux compétences attendues. Un effet bouche à oreille parmi les employeurs du territoire a permis d’attirer de nouveaux employeurs vers Pôle emploi et de nouer progressivement des liens de confiance. Si à court terme, les effets sur le recueil d’offres semblent limités, il paraît probable, aux yeux des acteurs de l’agence, que l’amélioration de l’image de Pôle emploi et les « effets de réseau » auprès des employeurs de petites structures devraient porter leurs fruits à moyen terme. 3.4 FACILITER LE TEMPS PARTAGE ET LA MULTIACTIVITE AU TRAVERS DE GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS Cette action régionale des Pays de la Loire s’appuie sur un groupement d’employeurs implanté au niveau national, dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie-restauration, dont 90% des adhérents ont moins de 10 salariés voire moins de 5 salariés. Ce groupement a été créé pour répondre aux difficultés de recrutement et donner une meilleure image du métier. L’action s’inscrit également dans le cadre d’une convention régionale avec les représentants des groupements d’employeurs (cf. encadré 5). ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHE Le groupement d’employeurs recrute ses salariés en CDI et en CDD à temps plein qu’il positionne sur plusieurs entreprises soit en temps partagé hebdomadairement, soit annuellement et dans ce cas, la répartition se fait le plus souvent entre montagne et mer. Le temps partagé annualisé concerne principalement des jeunes qui acceptent cette saisonnalité pendant 4 à 5 ans puis qui cherchent à se stabiliser sur un territoire. Il arrive que certains des salariés se voient proposer un recrutement en CDI par l’un des adhérents. Les salaires proposés sont proches du SMIC mais les déplacements entre les lieux de travail sont défrayés et des primes s’ajoutent au salaire. Les offres sont néanmoins difficiles à pourvoir pour certains postes comme aide cuisinier ou employée d’étage en raison du faible niveau de salaire ou de conditions de travail peu attrayantes. Ce groupement d’employeurs ne présente que des salariés déjà formés initialement ou qui se sont vus proposer soit un « passeport compétence » (acquisition de postures) soit un « passeport formation » (hygiène, utilisation de produits de nettoyage) selon les typologies professionnelles. Ce groupement dépose toutes ses offres auprès de Pôle emploi, le plus souvent sans présélection surtout lorsqu’il s’agit de poste requérant peu de qualification. Le temps partagé se pratique essentiellement sur un même métier. 28 Pour autant la Région, le groupement d’employeurs et Pôle emploi ont mis au point une double formation pour étendre le temps partagé à des professions différentes. Cette double formation permet à des employés d’étage d’occuper un poste de garde d’enfants à domicile dans la seconde partie de journée. Pour rendre possible le temps partagé entre ces 2 activités, le groupement d’employeur s’est adossé à une autre structure qui ne propose que du service à la personne. Le groupement veille à l’homogénéisation des conditions de travail de ses salariés. Lorsqu’il organise du temps partagé entre 2 entreprises dont les conventions collectives sont différentes, le groupement d’employeurs s’assure que le salarié ne soit pas lésé et bénéficie du « mieux disant » au plan de la rémunération. Ainsi, les employés d’étage titulaires d’un certificat de qualification professionnelle (CQP) étant rémunérés au-dessus du SMIC, le groupement veille, pour ceux qui ont obtenu la double qualification, à ce qu’ils soient payés en tant que garde d’enfant, au même tarif que celui d’employé d’étage. Toutes les offres de formations pour cette double qualification ont été transmises à l’agence locale Pôle emploi sainte Thérèse à Nantes, sans demande de présélection de candidats. Un bilan final a été réalisé avec l’ensemble des partenaires et des diplômées (aucun candidat masculin) qui ont toutes trouvé un emploi à l’issue de cette double qualification. 25. Le Centre de Ressources pour les Groupements d’Employeurs est une structure associative régionale qui depuis 2000, dans le cadre de son inscription au Contrat de Projet EtatRégion 2007-2013, est financée pour promouvoir, développer et animer les Groupements d’Employeurs. 29 ILLUSTRATIONS TERRITORIALES D’ACTIONS SPÉCIFIQUES / ÉTUDES ET RECHERCHES ENCADRÉ 5 LA CONVENTION RÉGIONALE AVEC LE CENTRE DE RESSOURCES POUR LES GROUPEMENTS D’EMPLOYEURS Une convention a été signée entre la direction régionale de Pôle emploi des Pays de la Loire et le Centre de Ressources pour les Groupements d’Employeurs (CRGE)25 en juin 2010. Ses objectifs et enjeux sont : - d évelopper et renforcer les relations entre les groupements d’employeurs et les agences de Pôle emploi de façon à faciliter les recrutements des entreprises adhérentes ; - f avoriser l’insertion durable des demandeurs d’emploi en développant la communication des offres vers les agences ; - a ider les groupements d’employeurs à développer leur nombre d’adhérents pour être en capacité d’offrir des emplois à temps plein et durables à leurs salariés à temps partiel et/ou en CDD ; - contribuer à la réussite des plans nationaux d’action en direction notamment des séniors et des jeunes avec peu ou sans expérience ; - c ontribuer à la sécurisation des parcours professionnels des demandeurs d’emploi par la mobilisation des dispositifs de professionnalisation. Les résultats attendus de cet accord pour chacun des signataires sont notamment l’identification d’un interlocuteur dédié par groupement d’employeur sur chaque territoire où il officie et une augmentation du volume d’offres déposées à Pôle emploi par les groupements d’employeurs. L’avenant à cet accord cadre régional, signé en février 2012, prévoit, entre autre, de développer la communication et l’information sur le concept de groupements d’employeurs ; à charge de Pôle emploi d’en faire la promotion auprès des demandeurs d’emploi et employeurs qui offrent des postes à temps partiel. •D irecteur de la publication : Jean Bassères • Directeur de la rédaction : Stéphane DUCATEZ • Réalisation : Service communication siège Retrouvez toutes les statistiques et analyses POLE-EMPLOI.ORG ÉTUDES ET RECHERCHES NOTES Réf. 10046 SEPTEMBRE 2014 ÉTUDES ET RECHERCHES ÉTUDES ET RECHERCHES