evaluation des risques sanitaires liés aux piscines

Transcription

evaluation des risques sanitaires liés aux piscines
Air Pur - N°80 - 2011
EVALUATION DES RISQUES SANITAIRES
LIÉS AUX PISCINES
Carole CATASTINI1,
Estelle WESTERBERG1 ,
Marie-Pierre SAUVANT-ROCHAT2, Eric BEN-BRIK3,
Laurent BEUGNET3,
Jean-Luc BOUDENNE3,
Pierre-Jean CABILLIC3,
Gérard CABRIEL3,
Paul CHAMBON3,
Dany CHEVALIER3,
Joseph DE LAAT3,
Françoise ENKIRI3,
Fabien GÉRARDIN3,
Bertrand GOMBERT3,
Alcime LE GUENNIC3,
Jean-François MÉRIC3,
Maurice MILLET3,
Juliette MOUQUET3,
Daniel PERDIZ3,
Sylvie RAUZY3,
Claire RICHARD3,
Robert TARDIF3,
Bernard TRIBOLLET3,
Pascale PANETIER1
collectif et sportif ne sont pas réglementés actuellement.
Une actualisation de la réglementation prenant en compte
notamment le développement des nouvelles pratiques
aquatiques est nécessaire.
ANSES, Direction de l'évaluation des risques
Unité Eaux, 27-30 avenue du Général Leclerc,
94701 Maisons-Alfort
Dans ce cadre, les ministères en charge de la santé et de
l'environnement ont demandé à l'Anses de dresser un état des
lieux des piscines ayant pour objectif la détection d'éventuels
nouveaux risques sanitaires. Les conclusions des travaux
menés par l’Agence ont été publiées en juin 2010 et ont porté
sur les piscines réglementées au sens de l'article D1332-1 du
code de la santé publique, c’est-à-dire des bassins alimentés
par l'eau du réseau de distribution publique et destinés à un
usage sportif ou de loisir.
1 Présidente du groupe de travail « Evaluation des risques sanitaires liés aux piscines »
2 Membre du groupe de travail
« Evaluation des risques sanitaires liés aux piscines » - [email protected]
1 En 2007, le parc français comptait 840 000 piscines enterrées et
503 000 piscines hors sols, ce qui place la France au deuxième
rang mondial en nombre de piscines, derrière les Etats-Unis.
Parmi ces piscines, plus de 16 000 étaient classées établissements
recevant du public (ERP) et soumises à un contrôle et un suivi
sanitaire. Un recensement effectué en 2006 par le ministère
chargé des sports dénombrait 1 980 piscines municipales.
Datant de 1981, le contexte règlementaire associé aux piscines
porte uniquement sur la qualité de l’eau des bassins. La qualité
de l’air, l’hygiène des sols et des surfaces des piscines à usage
Depuis les années 80, par soucis d’économie d’énergie, les
apports d’air neuf dans les piscines ont été réduits et l’air
présent après déshumidification est désormais recyclé.
Ces nouvelles techniques ont été facilitées du fait d’une carence
règlementaire en terme d’apport d’air neuf dans les piscines.
Rapidement le constat a été fait d’une nette dégradation de
la qualité de l’air dans ces piscines entraînant de nombreuses
plaintes de la part des baigneurs mais également et surtout
de la part du personnel des piscines.
Les analyses d’air ont également confirmé l’état de dégradation
de la qualité de l’air dans ces établissements.
La généralisation, ces dernières années, des piscines « sport
et loisirs » et l’apparition de bassins ludiques avec une
introduction d’air dans l’eau (bassins à remous, bassins avec
des équipements d’introduction d’air dans l’eau : canon à eau,
banquette massante…) a nettement amoindri la qualité de
l’air dans les piscines.
L’eau d’alimentation de ces bassins, leur circuit hydraulique,
mais également les baigneurs, l’air, les produits et procédés
de traitements ou de tout autre élément entrant dans
l’environnement de la piscine peuvent être sources de dangers
physico-chimiques et/ou microbiologiques. Les travaux de
l’Agence ont porté essentiellement sur les dangers liés aux
contaminations apportées par les baigneurs, aux produits et
aux sous-produits de désinfection.
De nombreuses études ont montré que les biocides désinfectants
utilisés dans les piscines peuvent réagir avec les composés
organiques présents dans l’eau (squames, cheveux, etc.) et
former de très nombreux sous-produits de désinfection dont
23
Air Pur - N°80 - 2011
la toxicité n’est pas toujours connue ni évaluée.
Certains d’entre eux sont présents en forte concentration
dans l’air comme les trihalométhanes (THM) ou font l’objet
d’une attention particulière (ex : la trichloramine) compte tenu
des effets sur la santé qu’ils engendreraient (voir l’article de V.
Bessonneau et al. dans ce numéro). En effet, plusieurs études
ont montré que la présence de chloramines dans l’air des
piscines est associée à une augmentation de la prévalence
des manifestations allergiques (conjonctivites, rhinites,
laryngites, etc.) et de l’asthme chez les nageurs de haut niveau
et le personnel. Pour rappel, l’exposition aux chloramines est
reconnue depuis 2003 comme maladie professionnelle au
titre du tableau n°66 du régime général de la sécurité sociale.
La caractérisation du risque basée sur les scénarii d’exposition
établis par l’Agence n’a pas mis en évidence de risque pour la
santé des baigneurs ni du personnel pour les THM. Cependant
les calculs de risques relatifs au chloroforme ont été établis à
partir d’une concentration moyenne en chloroforme mesurée à
une hauteur de 1,5 m au-dessus de l’eau. Or le nageur respire
dans une couche d’air située environ à 20 cm au-dessus de
la surface de l’eau. Une étude a démontré qu’il existe un
gradient de concentration en chloroforme entre 0 et 20 cm
au dessus de la surface de l’eau selon un rapport de près de
100. Si cette hypothèse était confirmée, le risque calculé serait
alors sous-estimé.
Les calculs du risque n’ont pas pu être réalisés pour la
trichloramine. En effet la valeur toxicologique de référence
existante pour la voie respiratoire n’a pas été retenue.
Cependant et afin de limiter l’exposition des baigneurs et
du personnel aux sous-produits de désinfection, l’Agence
recommande que la qualité de l’air, l’hygrométrie et la
température ambiante soit maîtrisée. A cet effet, la ventilation
est le principal moyen de gestion disponible.
Actuellement, les piscines sont considérées comme des locaux
à pollution non spécifique au sens de l’article R4222-3 du code
du travail (Code du travail, 2009).
Compte tenu des dangers chimiques identifiés et de leurs
pathologies associées ainsi que des résultats de l’évaluation
des risques physico-chimiques et microbiologiques, l’Agence
recommande que les piscines soient considérées comme
un local à pollution spécifique, au titre du même article du
Code du Travail. Dans ce cas, il est recommandé un débit de
renouvellement d’air minimum de 60 m3.h-1 par occupant.
Par ailleurs, dans les piscines désinfectées au chlore, l’Agence
recommande la mesure de la trichloramine dans l’air deux fois
par an, dont l’une au moins en hiver avec un seuil de 0,3 mg.m-3.
S’agissant des THM totaux, l’Agence recommande que soit
étendue à toutes les piscines la valeur limite de 100 µg.L- 1,
actuellement en vigueur dans les piscines équipées de
déchloraminateurs et proposée par l’OMS pour l’eau potable et
une valeur guide de 20 µg.L-1 à l’instar de la norme allemande.
24

Documents pareils

conseil superieur d`hygiene publique de france

conseil superieur d`hygiene publique de france déchloramination des eaux de piscines publiques (mentionnés ci-après dans l’avis par le terme « déchloraminateurs UV ») est soumise à autorisation du ministre chargé de la santé après avis du Conse...

Plus en détail