Portrait dans Liberation vendredi 08 fevrier. - Live

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Portrait dans Liberation vendredi 08 fevrier. - Live
08 FEV 13
Quotidien Paris
OJD : 113108
Surface approx. (cm²) : 678
N° de page : 40
11 RUE BERANGER
75154 PARIS 3 - 01 42 76 17 89
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PORTRAIT BARBARA CARLOTTI
Cette auteurecompositrice,
élégante
et fluide,
partageuse et
transversale,
estnominée
deux f ois
aux victoires
de la musique.
Malice pleine de grâce
ATMOSPHERIQUES
8917425300504/XVR/ATA/1
Eléments de recherche : BARBARA CARLOTTI : chanteuse, passages significatifs
08 FEV 13
Quotidien Paris
OJD : 113108
Surface approx. (cm²) : 678
N° de page : 40
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projet autour de l'architecture. Elle a participé à une création
radiophonique portée sur scène. Elle signe les textes et la musique d'un conte érotique sous forme de livre disque avec
lle est élégamment mise, d'une sophistication sim- l'auteur de BD Christophe Blain. Et elle fait chanter l'excenple, d'une classe flagrante. Ses longs cheveux paille trique Philippe Katerine sur son dernier opus... Elle résume :
coulent sur des épaules habillées de noir. On la com- «La musique, ça se partage. C'est dans la rencontre avec les
plimente sans malice. Elle répond sans rougir : autres et leur musicalité que j'enrichis mon travail. »
«J'ai toujours été unpeufemme, jamais vraiment une gamine. » C'est avec son troisième album sorti en début d'année, le rePlus tôt, elle avait pourtant glissé : «J'ai 38 ans, mais j'ai tou- marquable et remarque l'Amour, l'Argent, le Vent, que cette
jours l'impression d'en avoir 14. » Telle est Barbara Carlotti : nouvelle grande dame de la scène française est entrée dans
simple et complexe, inquiète et joyeuse, dense et légère, la lumière. Et a enfin reçu l'écho mérité. Barbara Carlotti y
sérieuse et déconneuse. Une sorte d'oxymoron multifacettes. signe les textes et les musiques nées sur ses claviers. Son
En cet après-midi de mi-décembre, la chanteuse au timbre écriture, élégante et fluide, convoque des ambiances et des
profond et singulier, qui vient d'être récompensée du grand thématiques variées (l'amour évidemment, le doute, la nuit,
prix 2012 de l'Académie Charles-Gros, s'est posée sur le ve- l'attente, les excès, le voyage...). Produites au cordeau,
lours rouge d'un café lounge parisien. Elle attend qu'on l'ap- ses compositions, nourries de ses voyages au Brésil, au Japon
pelle aux balances du duo qu'elle formera le soir même aux et en Inde, visitent nombre de styles, entre chanson et
Folies-Bergère avec Dominique A pour célébrer les 20 ans de new wave, pop et orientalisme... Le fruit d'une curiosité
carrière du brillant chauve. Barbara Carlotti est rompue à cet musicale apparue très jeune. «Ado, je reprenais des chansons
exercice collaboratif et transversal. Michel Delpech l'a invitée de Dylan et de Higelin avec despotes. J'écoutais aussi énorméà chanter un titre sur un de ses albums. Elle s'est produite ment la radio. Mon premier disque acheté, c'est La Notte,
à la demande d'Olivier Libaux dans la pièce ImbécQe aux côtés la Notte d'Etienne Dahu, /'avais ll ans. J'étais dingue de sa
de JP Nataf, Philippe Katerine et Helena Noguerra. La choré- musique. Je le suis toujours. C'est aussi le premier concert auquel
graphe Julie Desprairies l'a fait danser et chanter pour un j'ai assisté.» Pour le deuxième, sa grande soeur l'emmène
Par PHILIPPE BROCHEN
Photo HUGUES LAWSON-BODY
E
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Eléments de recherche : BARBARA CARLOTTI : chanteuse, passages significatifs
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voir Iggy Pop, où elle se fait piétiner. No fun. Elle se met ensuite à des choses plus noires - loy Division, Dépêche
Mode -, puis découvre la musique industrielle et psyché. Que
sort-il de ce juke-box humain ? Une femme fatale figurant
une sorte de Marianne Faithfull dean, de Nico en moins dark,
de Françoise Hardy en moins rose et - par la grâce d'un caméléonisme prénominal? - une nouvelle Barbara espiègle
et joyeuse.
La Carlotti, elle, est née à Clamart, dans les Hauts-de-Seine,
d'un père directeur export chez Polaroid et d'une mère kiné.
Elle a grandi dans cet «endroit neutre, pas très typé nifriqué»
aux côtés de deux soeurs et d'un frère. Elle ne garde pas de
souvenirs précis de son enfance. Pas plus qu'elle ne donne
d'importance aux dates de sa vie. «Depuis toujours, ma memoire s'efface au fur et à mesure. C'est parce que je ne regarde
pas derriere. Je préfère me projeter, car le futur m'inquiète.
J'ai besoin de prévoir, défaire, de remplir ce vide qui m'angoisse.
Je veux que le mouvement ne s'arrête pas. » Elle se souvient
quand même de ses vacances passées invariablement dans
le centre de la Corse, près de
Corte, dans le village de sa EN 7 DATES
grand-mère paternelle où ses
parents possèdent une mai- 2 juillet 1974 Naissance
son. «C'était îa liberté. Avec a Clamart (Hauts-de-Seine).
mes cousins, on courait par- 2OO2 Commence à chanter
tout.» Gamine, elle se rap- dans les bars,
pelle quand même avoir f ait 2005 Mini-album
du solfège
à sa demande, et Chansons avec Bertrand
, . &
, * Burgalat (Microbe),
du piano «parce que ma mere
^ Lej L for(.sés>
enjouait quand elle etait jeune ,.r a , bum (4AD-Beggars).
etqu'fl;y enavaitunàlamai- 2oo8 L'Idéal, 2e album
son». Elle ajoute : «J'adorais UAD-Beggars).
çamême sije trouvais ça diffi- 2012 /.'/Amour, /'Argent,
cik. » Elle arrête et s'y remet 'e Vent, 3e album
à 15 ans, en section jazz. (Atmosphériques).
Après son bac littéraire 8 février 2013 En lice aux
- «j'ai eu 16 en philo, j'étais victoires de la musique,
superfière,
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,,,, car c'était
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.ma ma,
du public»
et «revelation
fiere préférée»-, elle quitte la scene»
maison familiale «par goût
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d'indépendance», pour une
chambre minuscule à Paris qu'elle paie en faisant des menages, gardant des malades et servant dans une chaîne de
restauration rapide. «J'ai été virée parce qu'ils me trouvaient
trop rêveuse. »
Elle est alors en fac de médiation culturelle, «car ily avait de
l'histoire del'artà haute dose», et décroche une maîtrise. Avant
de reprendre en deuxième année de musicologie, où elle étudie le jazz vocal, les chants lyrique et baroque, avec Monteverdi comme messie. «Tous les sfyies m'intéressaient, je suis
curieuse et touche-à-tout. J'ai aussi fait des arts plastiques. »
Elle dit en se marrant : «Je voulais être peintre, écrivain, je voulais tout faire ! L'art, e 'était mon truc. Voilà, e 'est ça ; je voulais
être artiste !» Elle deviendra d'abord manageuse de groupes
et attachée de presse, avant de déployer ses ailes de chanteuse
en 2002 avec ses compositions qu'elle défendra dans les bars.
Trois ans plus tard, elle autoproduit, avec l'aide de Bertrand
Burgalat, le mini-album qui la lance dans le grand bain.
Jolie transition : Barbara Carlotti adore nager, «mais en hiver
en piscine, ça perd un peu de son sens». Elle se balade aussi
volontiers à vélo, prend des cours de danse voguing, lit
les poèmes de Baudelaire et des surréalistes comme Tristan
Tzara, les romans d'Eric Reinhardt, et mate des Fassbinder,
Pasolini ou Cronenberg... dans le 25 m2 du XIe arrondissement parisien où elle vit seule, sans même un chat - «c'est
trop petit». Fascinée par la matière sonore et la voix, elle
adore également fouiner dans les archives de FINA et confesse qu'elle aurait aimé faire de la radio. «Ça ne m'étonne
pas, dit Dominique A. C'est à l'évidence quelqu'un de bosseur,
d'exigeant, d'amoureux du détail. Sa musique est un tout, on
y sent une recherche d'absolu, une quête forte, presque plus rigoriste que hédoniste. On la devine prête à tout y sacrifier. » Et le
Nantais de lâcher : «Je ne sais pas si elle sait où elle va, mais
elle y va.»
L'interview s'achève. Très légèrement taquin, on souligne
une dernière fois sa fière allure et sa blondeur éclatante.
Elle remercie en riant : «Quand on est chanteur, U faut se mettre
en scène et avoir une image. En permanence. On est sur scène
ce qu 'on est dans la vie. Même sije n 'allais pas mettre ma robe
cape pour cette rencontre. » Ravie de sa malice et de son effet,
elle tourne ses hauts talons vers les Folies-Bergère. •*•
Eléments de recherche : BARBARA CARLOTTI : chanteuse, passages significatifs