Joachim Soulières - Les coïncidences ont-elles un sens

Joachim Soulières - Les coïncidences ont-elles un sens ou sont-elles le fruit du hasard ? - Besoindesavoir
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Publié le 08/05/2012
Vous pensez à un être cher disparu, et quelques secondes plus tard, vous entendez sa chanson favorite à la radio ?
Vous vous dîtes : « Il faut que j’appelle mon amie Valérie ». Le téléphone se met à sonner. Surprise : C’est elle !
D’étranges coïncidences s’invitent régulièrement dans nos vies. Certaines sont sans conséquence, d’autres, plus
troublantes, modifient en un rien de temps notre destin : Une rencontre qui change tout, un livre qui nous ouvre les yeux…
On parle alors de synchronicité.
Une chose est sûre : ces moments, suspendus dans le temps, restent des énigmes.
Joachim Soulières, psychologue, diplômé de l’université de Montréal, auteur et chercheur indépendant en parapsychologie, s’est penché sur le sujet.
Dans son livre Les Coïncidences, publié aux éditions Dervy, il nous rapporte des histoires vécues saisissantes et dresse un panorama des recherches
scientifiques actuelles.
Qu’est-ce qu’une coïncidence ? Quelles sont les différentes catégories de coïncidences ?
Joachim Soulières : J'aimerais bien pouvoir vous répondre simplement, mais nos connaissances sur le sujet sont incomplètes et... contradictoires !
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Beaucoup de gens parlent de « coïncidence » comme ils diraient « c'est le hasard », afin de minimiser certaines bizarreries. Certains y voient d'autres choses,
plus ou moins paranormales.
Mon parti consiste à prendre comme point de départ des expériences énigmatiques où un événement dans le monde extérieur va croiser la trame de notre vie,
sans qu'on ne perçoive directement comment s'est fait le raccord.
Cette expérience est universelle et très fréquente. Parfois l'énigme se résout, et parfois elle persiste.
Les auteurs qui m'ont précédé ont fait un gigantesque travail de collecte de ces expériences, puis de tri et de théorisation.
Le célèbre romancier Arthur Koestler a ainsi pu mettre les témoignages récoltés par sa fondation à la disposition des chercheurs. L'écrivain Brian Inglis s'est
appuyé sur ce matériel pour distinguer 14 catégories de coïncidences.
Ce qui m'a tout particulièrement intéressé, ce sont ces expériences qui impliquent des processus difficilement assimilables à la perception extra-sensorielle ou
à la psychokinèse, telles que les étudient habituellement les parapsychologues (ce dont j'avais parlé dans mes précédents livres dans la même collection, sur
La voyance et les Maisons hantées et poltergeists).
Souvent, on dit : « Le hasard fait bien les choses »
On trouve par exemple ces rencontres qui nous conduisent à s'exclamer familièrement que « le monde est petit », comme, lorsque des amis tombent l'un sur
l'autre à l'improviste, loin de chez eux, sans s'être concertés.
La parapsychologie explique difficilement comment des individus sont spontanément dirigés l'un vers l'autre.
Koestler avait également popularisé une coïncidence « farceuse » qu'il appelait « l'Ange des bibliothèques » : ce phénomène donne l'impression qu'une
intervention extrahumaine, qu'une aide cachée, nous permet rapidement d'accéder à une information au milieu d'un tas d'ouvrages.
Il arrive que le livre s'extraie lui-même du rayon; ou qu'on l'ouvre par hasard à la bonne page; ou encore qu'on y trouve la réponse à une question que l'on se
posait uniquement dans la tête. Parler d'une intervention « angélique » reste néanmoins une métaphore.
Plus étonnant, on trouve le « restaurateur de propriété » lorsqu'un objet que nous pensions perdu recroise notre route, après un parcours si alambiqué qu'il
suggère une organisation d'ordre supérieur – et là encore, cette interprétation est à prendre avec des pincettes.
Malgré les différences entre ces catégories, il est toujours possible d'y voir une unité sous-jacente : les coïncidences seraient des expériences d'attractions :
attractions de rencontres, de phénomènes physiques, de connaissances, de comportements, de solutions à des problèmes, d'événements partageant le même
thème... Malheureusement, le terme d'attraction a été galvaudé par ceux qui pensaient en connaître les lois.
Quelles interprétations donnons-nous aux coïncidences ?
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Joachim Soulières : Il faut déjà comprendre que toute expérience de coïncidence est une interprétation : votre voisin n'y verra pas nécessairement la même
chose.
Des événements qui font chez vous énigmes seront peut-être absolument absurdes pour une autre personne.
Les expériences de coïncidence poussent à l'extrême le phénomène psychologique rencontré avec d'autres expériences exceptionnelles, comme la télépathie
ou l'impression de hantise.
Très vite, notre modèle de la réalité devient trop étroit pour pouvoir encore rendre compte de notre vécu. Souvent c'est là que les gens bifurquent, qu'ils fuient
l'explication de type hasard, chance ou coïncidence... Koestler compare cet impact sur notre vie à celui d'une pluie de météores dans un ciel serein.
Il existe de nombreuses interprétations religieuses ou spirituelles, en termes de destinées, providences divines, interventions extrahumaines... Mais depuis le
XXème siècle, on voit émerger des interprétations moins ancrées sur le surnaturel, comme le « hasard objectif » d'André Breton, le pape du surréalisme.
Les parapsychologues iront même plus loin en théorisant les coïncidences comme des effets matériels d'une attitude psychique (généralement en-deçà de la
conscience).
Mais la question fondamentale reste la même : dans quels univers de tels phénomènes sont-ils possibles ?
Il y a des univers « tout faits », décrits par des traditions religieuses et qui intègrent, à leur manière, ces anomalies. Mais avec les progrès scientifiques, et
notamment la physique quantique, il y a de plus en plus de tentatives pour inclure les coïncidences dans notre univers, comme autant de démonstrations des
liens naturels entre psyché et matière.
Quelles sont les « fausses coïncidences » ?
Joachim Soulières : Comme je le disais, toute expérience de coïncidence est d'abord une interprétation. La communauté des psychologues travaille d'ailleurs
sur ce principe : ramener toute coïncidence à une perception biaisée, enrichissant de « liens » des événements objectivement « déliés ».
Ce type d'illusion se rapproche d'une tendance appelée « apophénie », dont l’extrémité pathologique est bien visible dans les psychoses paranoïaques ou dans
les schizophrénies.
La rationalité de l'individu y est alors débordée par des rapports non motivés entre des événements banals. Sauf que les psychologues savent maintenant que
l'apophénie est présente aussi chez des sujets sains. Ce n'est donc pas entièrement négatif.
Certains pensent que cette capacité – qui aurait une base neurologique – pousse à voir des formes là où il y a du flou et de l'ambigu ; mais donnerait aussi
l'avantage d'identifier plus aisément des séquences au milieu d'un groupe de données, ce qui permettrait d'adapter son comportement en conséquence.
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Les coïncidences de Joachim Soulières publié aux éditions Dervy. Dans la même collection, il est l’auteur de La voyance, Les enfants et le
paranormal et Maisons hantées et poltergeists (avec Louis Benhedi).
De curieux enchaînements d’événements…
D'autres chercheurs pointent également les faiblesses humaines lorsqu'il s'agit d'évaluer spontanément des probabilités. Ainsi, certaines coïncidences
apparaissent comme des « agglomérats » d'événements peu probables s'enchaînant dans différents contextes. Mais cette Loi des séries ne constitue pas
nécessairement une coïncidence énigmatique.
L'adage qui veut que « la foudre ne tombe pas deux fois au même endroit » est tout simplement faux, puisque, sur un plan statistique, selon la Loi des grands
nombres, cela reste tout à fait possible !
Souvent, nous avons du mal à prendre connaissance de tous les paramètres.
Le problème du discernement des « vrais » et « fausses » coïncidences se dissout si on s'astreint à ramener à soi-même, en toute humilité, nos expériences de
coïncidences énigmatiques. C'est d'abord un message qu'il est important que nous comprenions, pour nous-mêmes, avant d'être une vérité dont il faudrait
persuader les autres.
Les coïncidences semblent mettre à mal la notion de causalité. Les coïncidences auraient-elles un sens ?
Joachim Soulières : Les coïncidences mettent à nu cet espace intermédiaire entre « hasard » et « sens ». On ne peut pas trancher de façon générale. Ce sont
toujours des révocations locales des lois valables partout ailleurs. Mais si les coïncidences sont autant d'exceptions, cela reste une question de perspective,
suivant la façon dont l'évènement nous concerne.
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La causalité ne peut jamais être totalement exclue. En fait, au lieu d'opposer le hasard et les coïncidences, on peut plutôt penser qu'ils se combinent, que les
coïncidences s'appuient sur des phénomènes indéterminés.
Cet aspect de la discussion est très complexe, car on a souvent une vision naïve de ce qu'est la causalité. Or, les physiciens travaillent avec différents types de
causalité.
Il y a même des chercheurs qui discutent actuellement autour des notions de rétro-causalité ou de double causalité (tel Philippe Guillemant, du CNRS,
lui-même auteur d'un ouvrage sur les coïncidences), alors que c'était auparavant un domaine étudié uniquement par quelques parapsychologues aventureux.
De même, savoir si les coïncidences ont un sens, c'est une question à deux niveaux. Certes, les coïncidences « font sens », de façon très singulière, pour au
moins un individu. Et ce vécu doit être pleinement écouté et respecté, car il peut quelquefois avoir un effet bénéfique.
Toutefois, à un autre niveau, cela nous invite à nous interroger sur ce qu'est le « sens », la « signification », et la manière dont ce processus viendrait même
façonner des phénomènes physiques.
Plusieurs chercheurs pensent qu'il s'agirait d'une forme d'information qui ne correspond pas aux signaux physiques classiques, quand bien même nous
baignons dedans.
Par exemple, votre Smartphone robotisé peut communiquer avec vous, mais il ne va pas vraiment comprendre ce que vous dîtes. Votre autoradio peut
sauvegarder votre station de radio préférée, mais il lui manque cette sensibilité qui lui permettrait d'établir ses propres préférences.
Pourquoi les coïncidences significatives, que nous appelons « synchronicités », sont-elles si marquantes ?
Joachim Soulières : C'est le psycho-analyste Carl Gustav Jung, en dialogue avec le prix Nobel de physique Wolfgang Pauli, qui ont imposé le terme de «
synchronicité » comme un premier modèle scientifique pour expliquer les coïncidences à partir de ce que l'on connaissait alors de la psychologie des
profondeurs et de la physique quantique.
Depuis, ce dialogue perdure, notamment en Allemagne où plusieurs livres s'en inspirent. Mais Jung a surtout mis en avant des exemples issus de sa pratique
clinique, de façon assez sélective.
En fait, toutes les « synchronicités » ne sont pas si marquantes. C'est d'autant plus intéressant : en réalité, des coïncidences surviennent très fréquemment,
sans que nos vies soient systématiquement bouleversées.
Ce qui marque dans les coïncidences, c'est en premier lieu le conflit avec nos visions du monde habituelles. Mais si on dépasse cet aspect, par exemple
lorsque l'on adhère à d'autres systèmes de pensée, on se rend compte que les synchronicités dévoilent la voie d'un changement, d'une transformation.
Le sens, auparavant mis en suspens – par exemple, avec une question qui nous préoccupe ou un dilemme - va trouver un écho via le monde extérieur.
Cette nouvelle observation va modifier le système qui la reçoit : il ne sera plus jamais comme avant. Cela va d'un petit changement, comme retrouver une
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information, un objet ou une personne; à une transformation individuelle, en ayant l'impression d'avoir été guidé par un univers avec lequel nous sommes
entrés en résonance.
Il peut donc y avoir des coïncidences très marquantes et d'autres moins – mais toutes ont le « changement » comme processus central. Les témoignages que
j'ai recueilli et que j'expose dans la première partie du livre montrent cette diversité.
La parapsychologie scientifique s’intéresse à la synchronicité. Quels sont les résultats des études menées sur ce thème ?
Joachim Soulières : C'est la partie que j'explore plus particulièrement, car elle n'a pas vraiment été exposée en langue française.
Il faut savoir que Jung et Pauli n'ont pas modélisé la synchronicité qu'à partir de témoignages, ils ont aussi cherché à la provoquer de manière expérimentale.
Et d'autres tentatives ont été faites par la suite par des parapsychologues qui ont essayé d'adapter le cadre du laboratoire à des phénomènes si complexes.
Coïncidences et phénomènes '' PSI ''
Cela fait maintenant une vingtaine d'années que plusieurs expérimentations, encore connues que des seuls spécialistes, montrent des phénomènes « psi » se
rapprochant étrangement des coïncidences.
Ainsi, l'équipe du psychologue britannique David Luke a demandé à des sujets de participer à une simple expérience de psychologie. Sauf que d'autres tâches
étaient prévues, à leur insu !
L'une des tâches cachées consistait à deviner de façon prémonitoire quelle image allait être sélectionnée aléatoirement par un ordinateur; l'autre tâche était
contingente à la précédente, puisqu'elle proposait aux sujets un jeu agréable ou désagréable en fonction de leurs précédents résultats.
En quelque sorte, les sujets devaient inconsciemment peser sur le hasard pour obtenir le meilleur destin possible, et cela sans savoir où, quand et comment
faire.
Il y a quelque chose de vertigineux à s'imaginer que nous pouvons influencer le hasard, au travers de machines si complexes, simplement par un lien de sens
qui nous unira, dans un futur proche, avec leurs productions.
Les résultats obtenus nécessitent encore d'être reproduits par d'autres laboratoires, mais il y a tout un champ fertile pour l'approche scientifique, afin de n'être
plus cantonné aux habituels témoignages qui laissent sans voix, et aux querelles théoriques sans base empirique.
Ce type d'exploration scientifique correspond à l'activité des rares parapsychologues qui obtiennent des crédits de recherche. Savoir qu'ils s'attaquent enfin,
de manière concrète, à la question des coïncidences est un signe positif.
Notre volonté serait-elle à l’origine d’une chaîne causale d’événements ?
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Joachim Soulières : C'est effectivement la question à un milliard, la question à laquelle répondra peut-être le prochain prix Nobel !
Plus sérieusement, il est vrai que le modèle qui ramène les coïncidences à des effets physiques prenant leurs sources dans des attitudes psychiques (plus ou
moins conscientes) nous renvoie à tous ces débats sur le rapport du corps et de l'esprit, de la psyché et de la matière.
On ne peut pas les résoudre en claquant des doigts, et mon livre n'a évidemment pas cette prétention.
Néanmoins, plusieurs des psychologues et parapsychologues sur lesquels je m'appuie proposent des théories testables qui, si elles permettent effectivement de
mieux cerner ce phénomène, ouvrent des pistes pour mieux saisir la place de l'esprit dans l'univers.
Quoi qu'il en soit, il faut se démarquer de ces recettes populaires qui encensent « la volonté » comme pouvoir pour que l'univers vous livre dès demain des
chèques dans votre boîte aux lettres.
Les recherches scientifiques montrent toute la complexité des systèmes dans lesquels ces coïncidences sont possibles : on est loin de généraliser la toutepuissance de l'esprit !
En suivant notre intuition, favorisons-nous la synchronicité ?
Joachim Soulières : Certains vous diront que oui... Mais qui vous expliquera ce qu'est réellement l'intuition ?
Je détaille dans mon livre ce programme de recherche qui vise justement à connaître quelles sont les conditions qui favorisent et quelles sont celles qui
inhibent les coïncidences.
Ces recherches se font sur le terrain expérimental, avec de nombreuses variables psychologiques et physiques. Pourtant, il y a de quoi rester sur notre faim
car très peu de laboratoires consacrent du temps à cette interrogation passionnante.
Ainsi, si on fait correspondre l'intuition au trait de personnalité appelé transliminalité, c'est-à-dire cette tendance à faire passer du matériel psychologique dans
et hors de la conscience, alors il y a effectivement des indices suggérant son importance.
Plus généralement, il faut comprendre que la grande majorité des phénomènes parapsychologiques – dont les coïncidences ne sont qu'un chapitre, ou l'inverse
! - sont basés sur un fonctionnement inconscient.
L'information nous parvient de façon telle qu'elle est habituellement « inaudible ».
Lorsque l'on analyse pourquoi on a réagi de telle façon « intuitive » plutôt que de notre manière habituelle, on va raisonner de travers dans un premier temps,
usant de faux prétextes.
Et ce n'est qu'à la suite d'un long parcours, avec de nombreux allers-retours pour vérifier la valeur de notre intuition, que l'on peut un peu progresser dans
notre manière de nous rendre disponibles à cette information silencieuse et dans notre capacité à la traduire.
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Il semble que de nombreuses voies permettent d'accéder plus aisément à notre intuition, bien que dans cet ouvrage, je les ai traitées comme si elles étaient
équivalentes.
Encore une fois, proposer des recettes me semblait prématuré, même si les livres de cuisine sont à la mode !
Livre : Les Coïncidences, Des témoignages inédits, un point complet sur l’état de la recherche scientifique actuelle» de Joachim Soulières , (Éditions
Dervy - 2012).
Sur le même thème : Et si les coïncidences troublantes avaient un sens ? 9/11 - Quand les théories du complot se nourrissent de coïncidences.
Paranormal sur besoindesavoir.com
Crédits©Dervy.
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