info . tabac.ca - New Brunswick Anti Tobacco Coalition
Transcription
info . tabac.ca - New Brunswick Anti Tobacco Coalition
info.tabac .ca numéro 84 octobre 2010 Revue pour un Canada sans fumée Les distributeurs de cigarillos aromatisés contournent la nouvelle loi fédérale JOE STRIZZI A fin de contourner la loi fédérale de 2009 interdisant la vente de « petits cigares » et de cigarettes aromatisés, le distributeur des cigarillos Prime Time, Casa Cubana, a lancé ses nouveaux petits cigares Prime Time Plus. Selon le site Internet de l’entreprise, « Les cigares Prime Time ont été modifiés afin d’être conformes à 100 % à tous les règlements et exigences, et de permettre la poursuite de la vente de cigares aromatisés en accord avec l’esprit de la nouvelle loi. » L’autre principal distributeur canadien, Distribution G.V.A., a mis en marché de nouveaux petits cigares aromatisés Honey T, qui sont désormais sans filtre. Dans un communiqué émis le 24 juin, la ministre fédérale de la Santé, Leona Aglukkaq, a affirmé que certaines sociétés de tabac ne respectent pas l’esprit de la loi et qu’elle verra à en colmater les brèches. « Non seulement ces agissements contreviennent-ils à la loi, mais ils compromettent la santé des jeunes du Canada. Nous résoudrons cette question et nous continuerons de faire en sorte que les enfants du Canada soient protégés contre les dangers du tabagisme. » Dans une déclaration écrite, le premier ministre Stephen Harper a promis le 4 juillet de faire appliquer la loi : « La conformité à ces règles sera surveillée, de même que leur mise en application, et ce, de façon très nette. Le respect de l’esprit de la loi sera aussi surveillé et la loi sera réexaminée, si cela s’avère nécessaire. » L’esprit de la loi Le 5 juillet dernier, les cigarettes et cigarillos aromatisés ont été retirés des tablettes partout au Canada. Il s’agissait de la dernière étape de mise en place des modifications appor- Le marché noir perd encore du terrain À force de saisies et de condamnations, la contrebande du tabac diminue. Néanmoins, les réserves mohawks restent au-dessus des lois. 6 Les cigarillos sont simplement devenus de petits cigares sans filtre, mais avec les mêmes arômes attrayants, tels que cerise, fraise et pêche. tées par le Parlement fédéral à la Loi sur le tabac par l’adoption unanime de la Loi restreignant la commercialisation du tabac auprès des jeunes. Le raffermissement des restrictions applicables à la publicité des produits du tabac est entré en vigueur le 8 octobre 2009, date où la nouvelle loi a reçu la sanction royale. Depuis le 6 avril 2010, la vente au détail, y compris dans les boutiques hors taxes, de petits cigares et feuilles d’enveloppe en paquets de moins de 20 unités n’est plus permise. Depuis le 5 juillet 2010, la vente au détail, y compris dans les boutiques hors taxes, de petits cigares et SOMMAIRE À quand les terrasses sans fumée ? Déjà 20 % des Canadiens ont droit aux terrasses de bars et de restaurants sans fumée. Mais pas encore un seul Québécois. 10 Il y a moins de fumeurs 4 Fardeau du tabagisme pour le trésor public 5 La chicha populaire parmi les jeunes 8 Cigarettiers américains impunis 8 Pénitenciers sans tabac 9 2 CIGARILLOS info·tabac .ca no 84, octobre 2010 M. Cunningham assure que les compagnies de tabac savaient pertinemment qui elles visaient en proposant des produits aromatisés au chocolat ou à la vanille. Il s’agissait d’une nouvelle tactique de marketing de leur part. De plus, ces produits aromatisés sont tout aussi dangereux que la cigarette, ajoute-t-il, parce qu’ils contiennent de la nicotine, d’où un risque d’accoutumance. Le premier à contourner la loi feuilles d’enveloppe comprenant un additif banni (soit tous les additifs aromatisants sauf le menthol et certains autres additifs) est interdite. Les autres produits du tabac, comme les (gros) cigares et les produits de tabac non combustible, ne sont pas touchés par la loi. Les modifications à la Loi sur le tabac définissent le petit cigare comme un rouleau ou article de forme tubulaire qui remplit les conditions suivantes : 1) il est destiné à être fumé; 2) il comporte une tripe composée notamment de tabac naturel ou reconstitué; 3) il comporte soit une sous-cape et une cape, soit une cape, qui sont composées notamment de tabac naturel ou reconstitué; 4) il comporte un bout-filtre de cigarette ou pèse au plus 1,4 gramme, sans le poids des embouts. La définition légale vise aussi les produits du tabac que des règlements désignent comme de petits cigares. Casa Cubana semble avoir été la première compagnie à profiter officiellement de la brèche. Ses nouveaux cigares Plus ont été juste assez modifiés pour se conformer à la nouvelle loi. Le poids des cigares Prime Time Plus dépasse le seuil de 1,4 g prévu, et la compagnie peut dire qu’ils sont dépourvus de bout-filtre de cigarette. « Parce que les Prime Time Plus ont un poids de plus de 1,4 g et n’utilisent pas de filtre de type cigarette, ils ne sont dorénavant plus considérés comme des “petits cigares”», clame le site de Casa Cubana, lequel précise que lesdits cigares ne sont désormais « assujettis à aucune limitation sur les quantités minimales de transaction, les formats d’emballage ou les saveurs ». Le Prime Time Plus est offert en paquets rigides à couvercle articulé de 10 cigares (cartouche de 10 x 10), 20 cigares (cartouche de 10 x 20) et à l’unité (Ouest du Canada seulement) (voir note 1). Il existera toutefois en moins de saveurs, soit cerise, raisin, vanille, pêche, rhum et fraise. Des groupes de lutte contre le tabagisme, dont la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac (CQCT), affirment que seule une interdiction de l’arrivée de nouveaux produits du tabac peut éviter de telles situations. « Il est troublant de voir à quel point l’industrie du tabac parvient à dénicher des failles ou à contourner les règlements en modifiant ses produits et son marketing. En lui permettant de mettre de nouveaux produits et de nouvelles marques sur le marché, les gouvernements lui donnent essentiellement la possibilité de s’adapter aux nouvelles mesures en les contournant », explique Flory Doucas, codirectrice de la CQCT. Protéger les jeunes De l’huile sur le feu Les modifications apportées en 2009 ont pour but d’offrir une protection globale aux jeunes Canadiens. Les résultats de l’Enquête sur le tabagisme chez les jeunes menée en 2008-2009 ont été publiés à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac du 31 mai 2010. Ils démontrent que 9 % ou 250 000 jeunes de la sixième à la douzième année avaient fumé au moins un cigarillo au cours du dernier mois. De plus, 85 % des jeunes qui ne fument que le cigarillo se croient non-fumeurs, comparativement à 33 % de ceux qui ne fument que la cigarette. Comme dans le cas de la consommation de cigarettes, on constate que la prévalence croît selon l’année scolaire. Parmi les jeunes en dixième, onzième ou douzième années, 35 % déclarent avoir déjà fumé le cigarillo. Rob Cunningham, analyste principal des politiques à la Société canadienne du cancer, applaudit les efforts qui ont mené à la nouvelle Loi sur le tabac. « Sans elle, bon nombre de jeunes se laisseraient tenter par les produits aromatisés de ce genre, alors qu’ils n’auraient peut-être jamais essayé la cigarette ordinaire, dit-il. Le geste de Casa Cubana est odieux, et il est clair qu’ils ont l’intention de poursuivre leur efforts de recrutement des jeunes. » Le jour même de l’entrée en vigueur de la dernière modification à la Loi sur le tabac, l’Association canadienne des dépanneurs en alimentation (ACDA) a dénoncé le fait que l’on vende des cigarillos aromatisés sans taxes dans les réserves autochtones du Québec et de l’Ontario. Au cours de la campagne électorale de 2008, le premier ministre Stephen Harper avait promis d’interdire les arômes de cigarillos attirants pour les jeunes. Note 1 : En vertu de la loi québécoise, une vente de cigarillo n’est permise qu’avec une vente totale de 10 $ en produits du tabac, ce qui décourage la vente à l’unité. info·tabac .ca no 84, octobre 2010 CIGARILLOS 3 la santé s’interrogent sur sa motivation. « L’industrie des produits du tabac et ses hommes de paille tentent de façon astucieuse de faire oublier au public et aux politiciens que les enfants ont initialement découvert les cigarillos aromatisés parce que des fabricants dûment autorisés les ont mis en marché et que les détaillants les ont placés bien en vue sur leurs comptoirs durant des années », ajoute Flory Doucas. Contrebande dans certains dépanneurs Flory Doucas et Heidi Rathjen, codirectrices de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac L’ACDA soutient que certains fournisseurs de cigarettes des réserves se croient au-dessus des lois : ils vendent d’importantes quantités de cigarettes non taxées à des acheteurs non autorisés, offrent leur produit à des mineurs et proposent des cigarillos aromatisés, contrevenant ainsi à la nouvelle loi. Une semaine avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi, un enquêteur privé embauché par l’ACDA a visité et filmé des vendeurs de tabac travaillant dans les réserves. L’une des deux vidéos diffusées par l’organisation au début de juillet montrait une jeune fille de 15 ans faisant son entrée dans 10 boutiques de tabac de la réserve des Six Nations en Ontario. Elle s’est procurée des produits du tabac dans huit d’entre elles sans difficulté et sans qu’on lui demande de s’identifier. L’autre vidéo, tournée dans les réserves de Kahnawake et Kanesatake au Québec, montre qu’on y vend des produits du tabac, dont des cigarillos aromatisés, à une fraction du prix demandé dans les dépanneurs, le tout sans taxes. « Pour la première fois, nous montrons à la population canadienne que cette vente irresponsable de tabac de contrebande, faite à grande échelle dans les réserves autochtones, est une véritable honte nationale causée et tolérée par le gouvernement », déclare le vice-président principal Michel Gadbois. Or, si l’ACDA semble vouloir éliminer énergiquement la concurrence du marché noir, les groupes de promotion de Parallèlement, 22 dépanneurs de Montréal et des environs font l’objet de poursuites de Revenu Québec depuis qu’une succession de descentes de police a mis au jour un réseau de contrebande de cigarillos, le 16 juin. Le Service de police de la Ville de Montréal signale que 17 suspects ont été arrêtés lors du premier coup de filet à toucher des réseaux de contrebande de ce type de produits du tabac qui n’est pas fabriqué dans des réserves amérindiennes. La police ajoute que, depuis plusieurs années, les dépanneurs en question vendaient ces produits de contrebande en provenance de l’Ontario à leur prix de détail normal. Chaque magasin est passible d’une amende d’au moins 3000 $ en plus de devoir rembourser les taxes sur le tabac applicables et non payées, de même que les taxes de vente provinciales (Québec) non prélevées, et des pénalités. Aucun propriétaire n’a cependant été détenu. Le quotidien Winnipeg Free Press a également rapporté que des dépanneurs vendaient encore des cigarillos aromatisés lors de la visite de quelques points de vente en juillet, une fois l’interdiction en vigueur. Les employés ont alors confirmé que les consommateurs pouvaient s’y procurer des cigares miniatures aromatisés. Dans tous les cas, les cigarillos n’étaient pas visibles, mais entreposés avec d’autres produits du tabac non aromatisés. Il suffisait d’en faire la demande. Selon une vidéo produite pour l’ACDA, on continue à vendre des cigarillos non taxés dans les réserves mohawks de Kahnawake et Kanesatake. 4 SONDAGE info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Le nombre de fumeurs a diminué au Canada en 2009 Au Québec, la prévalence semble avoir continué de baisser Selon les plus récentes données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes (ESCC) de Statistique Canada, publiées le 15 juin, il y avait, au sein de la population canadienne de 12 ans et plus, 278 900 fumeurs de moins en 2009 qu’en 2008. Après avoir semblé arrêtée dans son recul en 2007 et 2008, la prévalence du tabagisme au Canada a repris sa lente tendance à la baisse. 23,0 % des Canadiens de 12 ans et plus fumaient en 2003, et ce taux a atteint 20,1 % en 2009. Au Québec, le nombre estimé de fumeurs a également diminué en 2009 par rapport à 2008, mais la diminution nette de 42 800 fumeurs y est trop petite pour être jugée significative par Statistique Canada, contrairement à l’impressionnante diminution nette de 108 600 fumeurs qui avait été observée en 2008. 26,0 % des Québécois de 12 ans et plus fumaient en 2003, contre 22,5 % en 2009. 1 499 500 personnes fumaient au Québec en 2009, selon l’ESCC. Déclin inégal L’évolution des comportements est souvent indiscernable d’une année à l’autre. Aucun recul significatif de la proportion de fumeurs n’a été observé au Québec entre 2008 et 2009, sauf chez les hommes de 35 à 44 ans. Par contre, lorsqu’on compare les observations de l’ESCC de 2009 avec celles réalisées six ans plus tôt, il appert que la cigarette a clairement perdu de la faveur chez les personnes de 12 à 19 ans et chez celles de 35 à 44 ans, pendant qu’elle maintenait la proportion de ses adeptes dans les autres groupes d’âge. Au Canada dans son ensemble, c’est au sein de toute la population de 12 à 44 ans que le tabac fumé a perdu de la faveur par rapport à 2003, tandis qu’il la gardait chez les hommes et femmes de 45 ans et plus. Visages du tabagisme actif Dans la population québécoise de 20 à 34 ans, ce sont encore 35,8 % des hommes et 26,2 % des femmes qui fument régulièrement. Ces proportions sont respectivement de 29,9 % et de 23,0 % au Canada dans son ensemble. Le portrait y est globalement le même : c’est chez les personnes de 20 à 34 ans qu’on observe la plus forte proportion de fumeurs. Dans l’ensemble du pays, Statistique Canada estime qu’il y a 1 765 300 personnes adeptes de la fumée de tabac qui ont entre 20 et 34 ans, soit presque cinq fois plus que le nombre des fumeurs et fumeuses âgés de 12 à 19 ans. Accablant résultat de l’ESCC : en 2009 au Québec, environ 36 % des jeunes hommes de 20 à 34 ans étaient fumeurs. En 2009, au Canada dans son ensemble, les hommes étaient proportionnellement plus nombreux à fumer que les femmes, dans tous les groupes d’âge, sans exception. Au Québec, un groupe d’âge s’est distingué en 2009, pour la première fois depuis que l’ESCC est menée. Chez les 35 à 44 ans, les femmes sont plus nombreuses à fumer que les hommes (23,3 % contre 21,4 %). Tabagisme passif dans les lieux publics De 2003 à 2009, dans l’ensemble du pays, le nombre de personnes exposées à la fumée secondaire du tabac dans Deux enquêtes, un constat % 26 Pourcentages de fumeurs, au Québec et au Canada 25 24 23 22 ← ESCC Québec ← ESCC Canada 21 20 19 18 17 16 ← ← ESUTC Québec ESUTC Canada 15 De 2004 à 2009, selon deux enquêtes de Statistique Canada Contrairement à l’Enquête sur la surveillance de l’usage du tabac au Canada (ESUTC), réalisée à tous les six mois pour le compte de Santé Canada à partir d’une entrevue téléphonique d’environ 9700 personnes de 15 ans et plus dans les dix provinces canadiennes, l’ESCC est réalisée une fois par an auprès d’un échantillon de 65 000 personnes de 12 ans et plus, interrogées au téléphone ou rencontrées à domicile, dans les dix provinces et les trois territoires. Les questions sur l’usage du tabac sont les mêmes dans les deux enquêtes de Statistique Canada, mais les résultats diffèrent puisque la méthode utilisée pour sonder la population n’est pas la même. L’ESCC, menée depuis 2001, produit généralement des estimations du taux de prévalence du tabagisme plus élevées que celles de l’ESUTC. Les résultats de cette enquête pour la première partie de 2009, rendus publics en février 2010, indiquent que 18 % de la population québécoise de 15 ans et plus fumait la cigarette. Ce taux était de 17 % pour l’ensemble canadien. Les deux séries de sondages révèlent cependant des tendances identiques dans l’hygiène des Canadiens aussi bien que des Québécois : le tabagisme a lentement décru depuis 2003 et n’a jamais été aussi bas. FINANCES PUBLIQUES 5 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 des lieux publics a diminué, à mesure que diverses interdictions d’y fumer entraient en vigueur dans toutes les provinces canadiennes. En 2003, 19,7 % des personnes de 12 ans et plus déclaraient avoir été exposées à la fumée secondaire de tabac dans un lieu public au cours du mois précédant l’appel ou la visite des chercheurs de Statistique Canada. En 2009, cette proportion était de 10,0 %. L’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes établit qu’en six ans, le nombre des personnes involontairement exposées à la fumée de tabac dans des lieux publics est passé 3,99 millions à 2,26 millions de Canadiens de 12 ans et plus. Le progrès est plus remarquable au Québec, où la proportion des personnes exposées à la fumée secondaire du tabac dans un lieu public a chuté de 27,2 % à 7,9 % de la population de 12 ans et plus. Il faut noter que l’entrée en vigueur de l’interdiction de fumer dans les restaurants et les bars y date du 31 mai 2006. Statistique Canada estime qu’en 2009, 408 400 Québécois étaient encore exposés, de gré ou de force, à la fumée de tabac dans des endroits publics. Ce nombre inclut notamment des serveuses et serveurs des terrasses de restaurants. L’ESCC permet aussi de constater que la population adolescente est exposée en plus forte proportion que les adultes à la fumée secondaire du tabac dans des lieux publics, notamment extérieurs. En 2009, 18,1 % des Canadiens de 12 à 19 ans et 19,1 % des Québécois aux mêmes âges déclaraient s’être trouvés dans cette situation malsaine. – par Pierre Croteau L’ESCC interroge les adolescents dès l’âge de 12 ans. En 2009, 84,7 % des Québécois de 12-19 ans se sont déclarés non-fumeurs. Moins de tabagisme, davantage de lits d’hôpitaux disponibles En 2008, le traitement des maladies dues au tabagisme représentait au moins 32,6 % du coût des journées complètes d’hospitalisation dans les grands hôpitaux de courte durée du Québec, autrement dit, à l’origine d’une dépense additionnelle d’au moins 928,7 millions de dollars par an. Voilà ce que révèle une étude réalisée par quatre experts économiques du Groupe d’analyse Inc., pour le compte de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac (CQCT), qui l’a rendue publique le 16 août. Pierre-Yves Crémieux, Lisa Pinheiro, Marissa Ginn et Michel Cloutier, les quatre analystes, précisent qu’ils n’ont pas mesuré l’impact total du tabagisme actif sur le système hospitalier. Bien qu’une somme de 928,7 millions $ peut déjà paraître énorme, les soins de courte durée à leur tour ne représentent qu’environ les deux tiers du coût total des soins hospitaliers, lesquels comprennent aussi les soins de longue durée et les soins en consultation externe. De plus, l’estimation du Groupe d’analyse ne prend en compte que les journées complètes d’hospitalisation, et exclut donc les courtes visites, telles que les visites à la salle d’urgence pour des crises d’asthme qui n’entraînent pas de nuit à l’hôpital. Enfin, les résultats du groupe d’experts sont uniquement basés sur le nombre de fumeurs et anciens fumeurs dans la société, et ne tiennent pas compte des nombreuses victimes du tabagisme passif, par exemple parmi les non-fumeurs conjoints d’un fumeur. Crémieux, Pinheiro, Ginn et Cloutier jugent que leur estimation des coûts de l’utilisation des soins hospitaliers dus au tabagisme est prudente. Fumée et paradoxe « Même à maladies égales, le tabagisme est associé à des séjours hospitaliers plus longs pour les fumeurs actuels et les anciens fumeurs [que pour les non-fumeurs de toujours] », observent les quatre analystes de la firme de consultants. Leur étude montre aussi que de soigner les anciens fumeurs suppose à peu près autant de journées d’hos- Le traitement des maladies causées par le tabac coûte cher au trésor public. pitalisation et d’occupation de lits que de soigner les fumeurs. Ce paradoxe s’explique par le fait qu’une importante partie des anciens fumeurs hospitalisés sont des personnes qui ont arrêté de fumer justement à cause d’une maladie grave. Lorsqu’on tient aussi compte du fait que les anciens fumeurs sont maintenant plus nombreux dans la société que les fumeurs, on comprend que les fumeurs qui réussissent à abandonner le tabac réduisent tout de même leur risque d’aboutir prématurément ou souvent à l’hôpital, ce que de nombreuses études médicales ont prouvé par ailleurs, notamment en rapport avec les crises cardiaques. « Ce ne sont pas que les fumeurs qui sont victimes des produits de l’industrie du tabac, mais tous les Québécois qui font face à des temps d’attente excessifs ou des séjours interminables sur les civières dans les couloirs des urgences, dus en grande partie au fardeau du tabac sur le système de santé », a déclaré Flory Doucas, porte-parole de la CQCT. L’industrie du tabac réussit encore à recruter 650 jeunes Québécois chaque semaine, souligne la CQCT. – par Pierre Croteau 6 CONTREBANDE info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Première remontée des ventes légales depuis 1996 selon Santé Canada Plusieurs fumeurs sont revenus aux cigarettes taxées en 2009 et 2010 PIERRE CROTEAU Milliards de cigarettes D ans son rapport financier du deuxième trimestre de 2010, publié le 22 juillet dernier, Philip Morris International (PMI) affirme avoir vendu, au Canada, 18,7 % plus de cigarettes que l’an passé, tout en observant une légère érosion de sa part du marché. PMI est le deuxième plus grand fournisseur légal au pays, à travers sa filiale Rothmans, Benson and Hedges et des dizaines de milliers de dépanneurs et autres points de vente légaux. PMI, qui au Canada vend notamment les marques de cigarettes Craven A, Mark Ten, Belmont, Accord, Benson & Hedges, et Québec Classique, invoque de nouveau les mesures prises par les pouvoirs publics contre la contrebande pour expliquer la croissance globale de CANADA QUÉBEC Évolution du marché légal des cigarettes, au Québec et au Canada, de 1993 à 2009 Source: Santé Canada son volume de ventes au pays. C’est le quatrième rapport de suite où la plus grande multinationale du tabac au monde et experte du marketing avance une pareille explication de la hausse de son volume de ventes au Canada. British American Tobacco, le premier fournisseur des fumeurs canadiens, à travers sa filiale Imperial Tobacco Canada et le réseau commercial légal, affirme dans son rapport financier du premier semestre de 2010, paru le 28 juillet : « La croissance du volume [vendu] a été réalisée en profitant d’une réduction significative du commerce illicite [des cigarettes] résultant des mesures coercitives appliquées par les autorités ». C’est la deuxième fois en six mois que le fournisseur des marques Player’s, Peter Jackson, Du Maurier, Matinée, Viceroy et Vogue, entre autres, mentionne une réduction du commerce illégal. Le marché noir a perdu des clients PHOTO GRC Même s’ils n’interviennent pas dans les quatre réserves amérindiennes qui alimentent la contrebande dans l’est du pays, les corps policiers multiplient les arrestations et saisies lors de la distribution et la revente. Selon les données de Santé Canada sorties en juillet, il y a eu pendant l’année 2009 une augmentation de 3,9 % du nombre total de cigarettes vendues à travers le circuit de distribution légal. Au Québec, le volume des ventes légales a crû de 10,8 % en 2009 par rapport à 2008. Au Québec comme au Canada, c’était la première fois depuis 1996 que le nombre des cigarettes vendues après avoir été taxées en conformité des lois augmentait. Aucune baisse des taxes sur le tabac n’a pourtant été consentie par les gouvernements au Canada au cours des dernières années; des provinces et des territoires ont même accru leurs charges fiscales contre le tabac. Au Québec, où le montant total des taxes provinciale et fédérale n’a pas bougé depuis décembre 2003, le prix moyen au détail des cigarettes vendues dans le réseau légal a monté en 2009 et de nouveau durant la première partie de 2010, selon les données de Statistique Canada. Cela n’empêche pas certains dépanneurs de dénoncer l’alourdissement des taxes plutôt que la gourmande politique de prix des cigarettiers. Durant l’année 2009 comme durant le premier semestre de 2010, au Québec, le prix des cigarettes sur le marché légal y a même monté plus rapidement que l’indice d’ensemble des prix à la consommation (IPC). Il ne semble donc pas que ce soit de soudaines aubaines pour les fumeurs qui aient stimulé tout d’un coup les ventes de cigarettes taxées. Murray Kaiserman, qui dirige le bureau de la recherche sur le tabagisme à Santé Canada, et Rob Cunningham, qui analyse les politiques de santé publique pour la Société canadienne du cancer, croient que l’augmentation du nombre de cigarettes vendues en 2009 est un signe que des fumeurs qui s’approvisionnaient auparavant sur le marché noir sont de retour dans les points de vente légaux. CONTREBANDE 7 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Les fumeurs continuent de décrocher Selon les données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes (ESCC) de Statistique Canada, sorties à la fin de juin, le nombre de fumeurs a encore diminué en 2009 au Canada. Le nombre d’adeptes de la cigarette n’a jamais été aussi bas, tant au Québec que dans l’ensemble du pays. En parallèle, Santé Canada affirme ne pas avoir observé de changement statistiquement significatif dans la consommation quotidienne moyenne des fumeurs. En résumé, il est difficile d’expliquer autrement que par le recul de la contrebande la poussée des ventes de cigarettes taxées en 2009. La lutte contre le marché noir aidant, il s’est vendu 11 % plus de cigarettes taxées au Québec en 2009, et ce, même si le tabagisme continue à baisser. Les ventes au noir restent un grave souci Vic Toews, Keith Ashfield et Jean-Pierre Blackburn, trois ministres du gouvernement Harper, ont tenu une conférence de presse à Montréal le vendredi 28 mai. C’était pour promettre trois choses : la Gendarmerie royale du Canada mettra sur pied une escouade de lutte contre la contrebande du tabac au sein de son unité mixte d’enquête sur le crime organisé; l’Agence des services frontaliers du Canada établira un service de chiens détecteurs de tabac à Montréal et à Vancouver; et l’Agence du revenu du Canada lancera une campagne publicitaire multimédia de 5 millions $ pour sensibiliser la population canadienne aux répercussions négatives de l’achat de cigarettes de contrebande. Après l’allocution des ministres, la presse a pu admirer le flair de deux chiens renifleurs employés dans les aéroports. En considérant que le tabac de contrebande voyage plutôt par voie terrestre et sur les cours d’eau que par les airs, un journaliste a demandé si un chien saurait détecter du tabac à l’intérieur de conteneurs en métal étanches, et la réponse du maître-chien et agent des Services frontaliers, bien que finalement positive, a paru très mal assurée. La réponse du ministre Blackburn a été encore moins concluante à une question de journaliste sur la volonté du gouvernement de faire fermer les fabriques canadiennes de cigarettes sans licence, fabriques établies sur des réserves amérindiennes que la police fédérale continue d’identifier depuis plusieurs années comme la principale source des produits de contrebande en Ontario et au Québec. L’Association canadienne des dépanneurs en alimentation (ACDA) s’est montrée satisfaite des mesures annoncées, le jour même de la conférence de presse. En revanche, quelques heures plus tard, la Coalition nationale contre le tabac de contrebande, un regroupement d’associations diverses suscité et animé par l’ACDA, a exprimé clairement sa déception qu’après des années de stratégies et de promesses du gouvernement, aucune usine de cigarettes fonctionnant sans permis n’ait été fermée au Canada. Régler le problème à la source Commentant lui aussi les annonces faites par les ministres, François Damphousse, de l’Association pour les droits des non-fumeurs (ADNF), a déploré le fait que le gouvernement fédéral ne s’emploie pas plus précisément à couper les approvisionnements en matières premières des fabriques illégales. Que des usines illégales de cigarettes soient sur des réserves amérindiennes est une réalité qui crée peut-être une difficulté politique, mais les fabriques de filtres ou de papier à cigarette de même que les champs de tabac sont en grande partie en dehors de ces minuscules territoires. En plus de remarquer la lenteur administrative des autorités fédérales, François Damphousse est déçu que les trop maigres sommes versées par les grands cigarettiers en amendes (amendes pour avoir alimenté la contrebande du début des années 1990) aient surtout servi jusqu’ici à « indemniser » des cultivateurs de tabac faisant semblant de se retirer du marché (voir notre reportage en page 12 du numéro 83), ou servent bientôt à payer de la publicité contre le marché noir. Aux yeux de l’ADNF et des autres groupes pour le contrôle du tabac, l’argent des amendes devait plutôt servir, tel que promis depuis plusieurs années, à mener une lutte plus efficace contre les sources des produits de contrebande. Le 28 mai à Montréal, trois ministres fédéraux ont annoncé des mesures mineures pour combattre le marché noir du tabac. On reconnaît Jean-Pierre Blackburn (au lutrin, Anciens combattants), Vic Toews (Sécurité publique) et Keith Ashfield (Revenu national). 8 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Près du quart des jeunes ont essayé la chicha L’usage du narguilé, aussi appelé pipe à eau ou chicha, est plus une expérience de jeune adulte privilégié que de jeune adulte à revenu modeste, plus une expérience de fumeur de cigarette que de nonfumeur, et plus un usage de jeune ne vivant pas chez ses parents que l’inverse. En outre, le narguilé est davantage populaire chez les personnes de 18 et 19 ans que chez celles de 21 à 24 ans, chez les jeunes anglophones que chez leurs homologues allophones ou francophones, et auprès des jeunes hommes que des jeunes femmes. Voilà quelques aspects d’un portrait de jeunes fumeurs nord-américains de pipe à eau qu’ébauchent E. Dugas, M. Tremblay, N. C. P. Low, D. Cournoyer et J. O’Loughlin dans l’édition en ligne du 10 mai dernier de la revue Pediatrics. 23 % des 871 participants qui ont retourné le questionnaire à l’équipe de recherche québécoise ont déclaré avoir fait usage d’une pipe à eau au cours de la dernière année. Le questionnaire avait été posté en 2007 à 1208 personnes ayant participé depuis 1999 à l’étude Nico, lancée initialement auprès de 1293 élèves de dix écoles secondaires, dans divers milieux socio-économiques et linguistiques de la région de Montréal. Les scientifiques croient que la popularité croissante de la chicha s’explique en partie par de dangereux mythes au sujet de sa relative innocuité. Ce qui se consume dans un narguilé est une pâte faite de matières végétales, ordinairement du tabac, et de glucides, souvent de la mélasse, ce mélange étant accompagné d’une pastille de charbon pour le faire brûler. La fumée dégagée par le tout est inhalée à travers un boyau après avoir barboté dans de l’eau souvent parfumée. Une seule bouffée offre autant de monoxyde de carbone et de particules fines qu’une cigarette entière. – par Pierre Croteau La juge Gladys Kessler Cour suprême des États-Unis La Cour suprême des États-Unis refuse d’entendre les appels sur le jugement Kessler Les cigarettiers américains ont violé la loi sur les rackets mais ils n’ont pas d’amende à payer. Point final. Le 28 juin dernier, la Cour suprême des États-Unis a refusé d’entendre un appel du gouvernement fédéral américain et simultanément un appel des cigarettiers concernant tous deux le jugement rendu le 17 août 2006 par la juge Gladys Kessler, de la Cour fédérale du District de Columbia, à Washington. Le plus haut tribunal des États-Unis met ainsi le point final à une saga judiciaire commencée 11 ans plus tôt. Dans un jugement de 1653 pages, qui venait temporairement clore des procédures entamées par la Procureure générale des ÉtatsUnis en 1999, la juge Kessler affirmait en août 2006 que les grands cigarettiers ont mis en marché et vendu leurs produits mortels avec zèle et tromperie dans l’unique but d’accroître leurs profits, et ce, sans aucun égard pour la condition humaine et pour les coûts sociaux exigés par ce succès. « Pendant plus de 50 ans, les [cigarettiers accusés] ont menti, fait de fausses déclarations et trompé le public américain […] sur les effets dévastateurs du tabagisme et de la fumée de tabac dans l’environnement », écrivait la magistrate. La juge Kessler précisait que les cigarettiers « ont supprimé des recherches, détruit des documents et manipulé les taux de nicotine pour augmenter et perpétuer la dépendance, en plus de cacher la vérité sur les cigarettes légères et à faible teneur en goudron afin de décourager les fumeurs d’abandonner le tabac. » Malgré ce verdict accablant, le jugement Kessler avait aussi statué que les firmes coupables ne devaient pas un sou pour leur violation passée de la loi sur les organisations malhonnêtes et les rackets. L’appel des cigarettiers visait donc à laver leur réputation et contestait le verdict de 2006, alors que l’appel du ministère fédéral de la Justice contestait la sentence et visait à récupérer une partie ou la totalité des 289 milliards de dollars initialement réclamés aux fautifs. En vain. D’importants constats du jugement Kessler ont toutefois figuré en bonne place dans le préambule justificatif de la Family Smoking Prevention and Tobacco Control Act adoptée par le Congrès en juin 2009. – par Pierre Croteau (avec Josée Hamelin) PROTECTION DES NON-FUMEURS 9 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 La Cour d’appel maintient l’interdiction de fumer dans les prisons fédérales Depuis maintenant plus de deux ans, il n’est plus permis de fumer où que ce soit dans les pénitenciers sous l’autorité du gouvernement fédéral canadien, et cela va continuer. Dans un jugement unanime rendu le 21 juin, les juges Nadon, Pelletier et Trudel de la Cour d’appel fédérale ont renversé un jugement de la Cour fédérale en première instance et validé la directive 259 du Service correctionnel du Canada (SCC) en vigueur dans tous les pénitenciers fédéraux depuis le 2 juin 2008. Cette directive interdit aux détenus d’y posséder du tabac et à quiconque de fumer dans le périmètre des établissements de détention, y compris dans les espaces découverts, par exemple dans la cour de la prison. En octobre 2009, le juge Martineau de la Cour fédérale avait déclaré nulle ladite directive du SCC, tout en autorisant le maintien de son application dans l’attente d’un possible jugement en appel. Le SCC avait alors aussitôt interjeté appel du jugement, notamment au motif que c’était au groupe de prisonniers et à leur avocat, Julius Grey, qu’aurait dû incomber l’obligation de faire la preuve du caractère illégal de la directive, appliquée dans l’intention de protéger de manière efficace et sécuritaire la santé des non-fumeurs parmi les détenus, le personnel, les bénévoles et les visiteurs des établissements carcéraux. Au Québec, si un accusé est condamné à deux ans ou plus, il ira dans une prison fédérale sans fumée. Mais dans l’attente de son procès ou s’il est condamné à moins de deux ans, il se fera enfumer dans une prison provinciale, comme ses gardiens. travailler régulièrement dans des espaces enfumés et malsains. La nouvelle politique appliquée depuis juin 2008, au contraire, a été saluée par le Syndicat des agents correctionnels canadiens (SACC-CSN). Liberté fondamentale ? Me Julius Grey n’a pas réussi à relancer le tabagisme dans les prisons fédérales. La Cour d’appel fédérale a donné raison au SCC en affirmant notamment que le juge Martineau n’avait pas, lors du premier procès, à substituer son opinion à celle du commissaire du Service correctionnel sur la nécessité d’interdire le tabac partout dans le périmètre des lieux de détention. Restait à vérifier si le commissaire avait l’autorité légitime pour établir une directive semblable, notamment en vertu de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Les trois juges de la Cour d’appel fédérale ont statué que oui. Des alternatives impraticables Les juges ont constaté que dès l’été 2007, avant même d’appliquer la nouvelle politique sur le tabac, le Service correctionnel avait expliqué à tous les intéressés son expérience avec d’autres règles en matière de tabagisme, lesquelles s’étaient toutes avérées aussi inefficaces que génératrices de problèmes de sécurité. C’est ainsi que la permission de posséder du tabac donnait lieu à des vols de tabac et d’articles de fumeur, ainsi qu’à d’importants trafics entre détenus, à des actes violents, à du tabagisme discret à l’intérieur, et à une pluie de sanctions disciplinaires contre les délinquants. Obligés de surveiller des détenus encore autorisés à fumer en certains endroits des établissements carcéraux, les agents du SCC non-fumeurs se plaignaient d’être parmi les derniers travailleurs à devoir Les Cours fédérales, aussi bien en appel qu’en première instance, ne se sont pas prononcées sur la question de savoir si la directive antitabac du SCC violait un droit des détenus qui pourrait être protégé par la Charte canadienne des droits et libertés. Pour que le débat à tenir devant un tribunal porte sur le droit constitutionnel de posséder du tabac dans un pénitencier et d’y fumer dans la cour, il aurait fallu que le groupe de prisonniers et leur avocat avisent non seulement le gouvernement fédéral, mais aussi les procureurs généraux des provinces, ce qu’ils ont omis de faire. La Cour d’appel a rappelé à ce sujet l’existence d’un jugement de la Cour suprême, rédigé par le juge Sopinka, qui stipule en substance que le pouvoir des tribunaux d’invalider des lois et des règlements en vertu de la Constitution ne peut pas s’exercer dans un pays démocratique sans que tous les gouvernements susceptibles d’être affectés par l’issue d’un procès en cette matière aient eu l’occasion de soutenir la pertinence de la loi ou du règlement contesté. – par Pierre Croteau Depuis juin 2008, l’usage du tabac est interdit dans les pénitenciers fédéraux, même dans les espaces découverts. 10 TABAGISME PASSIF info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Une place au soleil pour les non-fumeurs À quand les terrasses de bar et de restaurant sans fumée ? JOE STRIZZI C e sont maintenant les Médecins pour un Canada sans fumée (MCSF) qui pressent les pouvoirs publics d’interdire que l’on fume sur les terrasses de bar et de restaurant. L’hiver dernier, lors de la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac, c’était le Conseil québécois sur le tabac et la santé qui demandait au gouvernement du Québec que la prochaine Loi sur le tabac étende aux terrasses la protection des non-fumeurs. En restauration, travailleurs et clients continuent d’être exposés à des taux élevés de fumée secondaire de tabac. Les MCSF demandent aux gouvernements provinciaux et aux administrations municipales d’éliminer la fumée des terrasses de bar et de restaurant, et ce, rapidement. « Les chercheurs canadiens ont réuni des preuves concluantes de la nécessité de garder les terrasses de restaurant sans fumée si l’on veut protéger les travailleurs et le public, affirme Neil Collishaw, directeur de la recherche de l’organisme. Or, huit Canadiens sur dix résident dans une collectivité où de telles mesures ne sont toujours pas en place. » Seulement le cinquième des Canadiens sont protégés de la fumée de tabac dans les bars et les restaurants extérieurs. Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard et l’Alberta, le territoire du Yukon, plusieurs villes de Colombie-Britannique, d’Ontario et d’Alberta, auxquelles s’ajoutent diverses municipalités plus petites de partout au Canada, ont des lois qui protègent de la fumée secondaire ceux qui se trouvent sur une terrasse de restaurant. Réunis, ces intervenants peuvent se targuer de contribuer ainsi à protéger 6,8 millions de citoyens canadiens. D’un autre côté, 24,7 millions de citoyens canadiens vivent dans des régions où cette protection ne leur est pas offerte. En tant que regroupement de médecins qui cherchent à réduire les maladies liées au tabac, en luttant contre le tabagisme actif et contre l’exposition à la fumée secondaire, les MCSF soutiennent que la situation doit changer, compte tenu de la dangerosité de la fumée secondaire. Terrasses enfumées et malsaines Durant des heures, le personnel des terrasses enfumées doit respirer des substances cancérogènes. La fumée secondaire correspond à la fumée exhalée par le fumeur ou produite par une cigarette qui se consume lentement. Elle contient quelque 4000 produits chimiques, dont plus de 60 sont connus pour causer le cancer. Les autorités médicales, dont l’Organisation mondiale de la santé, affirment qu’il n’existe pas de niveau d’exposition sécuritaire à la fumée secondaire. En 1992, l’Environmental Protection Agency des États-Unis a classé la fumée secondaire parmi les substances cancérogènes de classe A, soit la catégorie la plus dangereuse. Bien des gens croient à tort que la fumée secondaire ne pose pas de risque pour la santé lorsqu’on est à l’extérieur, puisqu’elle se dissipe alors tout simplement dans l’atmosphère ou que le vent la disperse. Or, après avoir examiné un grand nombre d’études, les MCSF concluent que, dans les faits, en l’absence de vent, la fumée de cigarette s’élève dans les airs puis retombe, saturant la zone environnante de fumée secondaire. Lorsqu’il y a un vent léger, la fumée de cigarette peut se déplacer dans de multiples directions, exposant les personnes sur son chemin. En vertu de divers facteurs (dont le nombre de fumeurs et de cigarettes consommées), les non-fumeurs peuvent se retrouver exposés à autant de fumée secondaire à l’extérieur, comme sur une terrasse de restaurant, qu’ils l’étaient autrefois à l’intérieur lorsqu’il était permis de fumer dans les restaurants. À Victoria, en Colombie-Britannique, des chercheurs ont mesuré la concentration de fumée du tabac présente dans divers lieux publics fréquentés par des fumeurs, notamment des La sortie des Médecins pour un Canada sans fumée coïncidait avec le 4e anniversaire de la mort de Heather Crowe, une serveuse de restaurant non fumeuse, mais décédée du cancer du poumon. Lors de sa maladie, Mme Crowe a milité contre le tabagisme passif. TABAGISME PASSIF 11 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Neil Collishaw terrasses de bar et de restaurant et des cafés-terrasses. Des statistiques descriptives (dont les dimensions du fumoir extérieur, le pourcentage de l’aire couverte, le pourcentage d’aire cloisonnée, le nombre moyen de clients, le nombre moyen de cigarettes grillées et la proximité moyenne des cigarettes de chaque endroit) ont été enregistrées et converties en moyennes. Les résultats de l’étude, intitulée Environmental Tobacco Smoke in Indoor and Outdoor Public Places et menée par les services de santé britanno-colombiens en 2006, démontrent que la proximité de fumeurs expose une personne à des taux de fumée similaires, qu’elle reste à l’extérieur ou qu’elle se trouve durant une même période de temps dans un débit de boissons enfumé. Dans les deux cas, l’exposition excède les normes d’hygiène acceptées. Une étude comparable, menée cette fois en 2007 par le Roswell Park Cancer Institute de Buffalo, donne des résultats similaires. « Dès qu’il se fume ne seraitce que trois cigarettes, la qualité de l’air est très similaire, que l’on soit sur une terrasse (où il est permis de fumer) ou dans l’un de ces locaux où il n’y avait autrefois aucune interdiction de fumer », explique Richard Stanwick, médecin hygiéniste en chef à la Vancouver Island Health Authority. Les fumoirs extérieurs de restaurants et autres établissements nuisent également aux personnes à l’intérieur. Là où il est permis de fumer dehors, la fumée extérieure se glisse à l’intérieur, selon une étude faite par Kennedy, Travers, Hyland et Fong. L’équipe de chercheurs de Waterloo (Ontario) a fait des expériences sur les effets de seulement huit cigarettes sur une terrasse de restaurant type dépourvue de toit, de murs, d’auvents et de parasols. Ils ont répété leur expérience 46 fois à des moments où le régime des vents différait; invariablement, ils ont constaté une dégradation considérable de la qualité de l’air sur la terrasse lorsqu’on y fumait. L’étude, intitulée Tobacco Smoke Pollution on Outdoor Public Places, a permis de constater la présence de quatre fois plus de particules atmosphériques chargées de produits chimiques causant le cancer ou des maladies du cœur que sur une terrasse où il est interdit de fumer. « Nous savons désormais qu’il ne suffit pas d’interdire de fumer à l’intérieur des restaurants : l’extérieur doit lui aussi être sans fumée », résume Neil Collishaw. Ces études ne sont pas les seules au Canada. Des chercheurs de l’Université Stanford, en Californie, concluent, dans le numéro de mai du Journal of the Air and Waste Management Association, qu’un non-fumeur assis à quelques pieds d’une cigarette dont la fumée se dirige vers lui est fort probablement exposé, par moments, à un niveau considérable de contaminants atmosphériques. Une étude menée en Irlande en 2005 par Mulcahy, Evans, Hammond, Repace et Byrne, et publiée dans la revue Tobacco Control, permet de constater que le personnel de bars dotés d’un fumoir extérieur et exposé à aucune autre fumée secondaire présente néanmoins un taux de nicotine dans le sang beaucoup plus élevé que celui qui travaille dans un bar sans fumoir extérieur. Progrès en vue L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) menée par Statistique Canada montre que le nombre de Canadiens qui affirment avoir été Selon une méta-analyse américaine, les interdictions de fumer abaissent d’environ 20 % le nombre des admissions à l’hôpital pour crise cardiaque. exposés à la fumée secondaire dans des lieux publics au cours du dernier mois a diminué de moitié entre 2003 et 2009, passant de 3,99 millions (20 % des personnes de 12 ans ou plus) à 2,26 millions (10 %) en 2009. « D’énormes progrès ont été réalisés depuis que la ville de Victoria (C.-B.) est devenue en 1999 la première entité juridique à interdire que l’on fume dans les bars, restaurants, salles de bingo et autres bâtiments publics, signale M. Collishaw. Or, il nous reste encore à protéger les travailleurs et le public. » Une méta-analyse, publiée en septembre 2009 par Lightwood et Glantz dans Circulation, la revue de l’Association américaine du cœur, passe en revue les résultats d’une vingtaine d’études distinctes menées dans un grand nombre de villes et régions en Europe et en Amérique du Nord. Les chercheurs constatent que la mise en 12 TABAGISME PASSIF place d’interdictions de fumer en milieu de travail et ailleurs a entraîné, dans l’année qui a suivi, une réduction des admissions à l’hôpital à la suite d’une crise cardiaque; plus précisément, elles ont diminué de 20 %, et ce pourcentage s’améliore avec le temps. Une équipe du Research Institute for a Tobacco Freee Society de Dublin, en Irlande, s’est penchée sur l’exposition à la fumée environnementale du tabac dans les 42 brasseries de la ville. On a ainsi évalué 73 travailleurs de bar, qui se sont portés volontaires pour participer à l’étude. Selon les résultats publiés dans l’American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine en 2007, l’interdiction de fumer en milieu de travail a amélioré la qualité de l’air dans les brasseries de même que la santé des travailleurs de bar, puisqu’on constate une réduction de 83 % de la pollution atmosphérique et de 80 % des agents cancérogènes, de même qu’une amélioration des fonctions respiratoires des travailleurs. « Ces résultats confirment qu’une démarche qui consiste à interdire entièrement le tabagisme en milieu de travail permet de réduire l’exposition des travailleurs », atteste le chercheur principal, Luke Clancy. Les MCSF ont présenté leur demande d’une protection accrue des travailleurs de la restauration en mai dernier. Ils l’ont fait le jour du quatrième anniversaire du décès de Heather Crowe, une non-fumeuse qui gagnait sa vie comme serveuse à Ottawa et dont le cancer du poumon a été associé à l’exposition à info·tabac .ca no 84, octobre 2010 la fumée de cigarette au travail. Cette dernière avait mené avec succès une campagne en vue de faire modifier la loi afin qu’elle protège les travailleurs de la restauration et d’ailleurs de l’exposition à la fumée. « D’ici à ce que les milieux de travail extérieurs soient également sans fumée, les travailleurs de la restauration continueront d’être victimes de lois qui les exposent à des taux de produits chimiques cancérogènes plus élevés que ce que permet la loi dans tout autre secteur », fait remarquer Collishaw. Protégeons nos jeunes Les MCSF désirent également protéger les jeunes de la fumée de cigarette dans les lieux publics. « Près de deux fois plus d’enfants [12-19] que de citoyens en général risquent d’affirmer être exposés à la fumée secondaire dans les lieux publics», affirme Neil Collishaw. « Parce que leur organisme est encore en développement, l’exposition à la fumée de cigarette pourrait être particulièrement nocive chez les jeunes », ajoute le directeur de la recherche des MCSF. Ce dernier fait remarquer que les chercheurs ont décelé un grand nombre de maux liés aux effets de la fumée secondaire sur les enfants, notamment l’augmentation du taux de maladie cardiaque et d’insuffisance respiratoire. De plus, les filles exposées à la fumée secondaire au moment du passage à la puberté, lorsque les tissus mammaires se développent, sont plus à risque de souffrir d’un cancer du sein précoce. Que cela soit à l’intérieur ou à l’extérieur, les enfants sont particulièrement vulnérables à la fumée de tabac, à cause de leur respiration rapide et de leur croissance. Exposition à la fumée secondaire dans les espaces extérieurs Dans son traité sur les avantages des réglementations interdisant l’usage du tabac dans les espaces extérieurs (Benefits of smoke-free regulations in outdoor settings), publié en 2006, le biophysicien James Repace rapporte que la fumée du tabac contient au moins 172 substances toxiques, dont trois polluants d’air extérieur réglementés, 33 polluants d’air dangereux, 47 substances chimiques classées comme déchets dangereux, et 67 agents cancérogènes connus pour les humains et les animaux. La fumée d’une seule cigarette peut être détectée à une distance de 7 à 10 mètres, selon la direction et la vitesse du vent. Par conséquent, la fumée secondaire peut parcourir aisément cette distance pour atteindre les personnes sur une plage, dans un parc ou sur un terrain de jeu. Les observations de James Repace révèlent également qu’à proximité d’un lieu extérieur où la cigarette est permise, la fumée secondaire contient des niveaux de polluants d’air presque aussi élevés que ceux de la fumée secondaire en milieu intérieur. Le California Air Resources Board (CARB) a mesuré en 2006 les concentrations de nicotine dans la fumée secondaire à l’extérieur, là où les gens s’agglomèrent pour fumer, près des entrées d’une aérogare, d’un collège, d’un édifice gouvernemental, d’un édifice à bureaux et d’un parc d’attractions. Cette recherche a montré que les personnes qui se trouvent dans ces lieux extérieurs sont exposées à des niveaux de fumée aussi denses qu’en milieu intérieur. Klepeis, Ott et Switzer ont mesuré les concentrations de particules respirables de la fumée du tabac à des terrasses extérieures, sur le trottoir près d’un aéroport et au centre-ville, et dans les parcs. Ils ont également mené des expériences contrôlées sur la fumée secondaire en milieu intérieur et extérieur. Leur analyse en temps réel des particules de fumée de tabac dans les espaces extérieurs, rapport publié en 2007 (Realtime measurement of outdoor tobacco smoke particles) dans le Journal of the Air and Waste Management Association, indique que les concentrations de parti- TABAGISME PASSIF 13 info·tabac .ca no 84, octobre 2010 cules détectées dans la fumée secondaire en milieu extérieur sont comparables à celles de la fumée secondaire en milieu intérieur. Selon le rapport final d’une étude californienne sur les risques de l’exposition à la fumée secondaire pour la santé intitulée Health effects of exposure to environmental tobacco smoke, les enfants sont particulièrement sensibles aux effets de la fumée secondaire en raison de leur rythme respiratoire plus rapide, de leur surface pulmonaire relativement plus grande que celle des adultes, et de leur immaturité pulmonaire. De plus, les nourrissons et les enfants ne sont pas en mesure de choisir leur environnement et ne peuvent éviter l’exposition à la fumée secondaire. Par conséquent, les enfants inhalent un pourcentage plus élevé de toxines que les adultes. Pour ces raisons, la direction de la santé publique d’Halifax croit qu’il est particulièrement important d’interdire l’usage du tabac dans les lieux où des enfants sont présents. En outre, les autorités de la capitale néo-écossaise croient que voir les adultes fumer peut amener les enfants à associer l’usage du tabac aux activités agréables de plein air. En fumant dans un parc, on associe le tabagisme aux activités agréables de plein air, déplore la Société canadienne du cancer. Des parcs et espaces municipaux sans tabac « L’exposition à la fumée secondaire peut être aussi nocive à l’extérieur qu’à l’intérieur », soulignent les responsables de la santé publique sur le site en ligne de la Ville d’Ottawa. Les autorités municipales de la capitale fédérale encouragent les gens à se lever et à quitter un lieu où ils peuvent être exposés à la fumée secondaire. « Ces personnes ne devraient pas rester assises là et respirer la fumée secondaire, car elles mettent leur santé à risque », déclare Krista Oswald, responsable du programme municipal de lutte contre le tabagisme. « Nous disposons de résultats de recherches confirmant l’effet nocif de la fumée secondaire sur la santé. […] Ces recherches portent sur des échantillons d’air provenant de terrasses à Vancouver et aux États-Unis », affirme Mme Oswald (lire ci-contre à propos de ces études). Plus de 30 municipalités au Canada ont mis en œuvre une certaine forme de réglementation sur l’usage du tabac dans des espaces découverts. En plus d’Ottawa, c’est notamment le cas de Toronto, d’Halifax et de Vancouver. Dans cette ville, le Vancouver Park Board a voté unanimement l’interdiction de l’usage du tabac dans plus de 200 parcs municipaux et sur toutes les plages municipales, à partir du 1er septembre. D’autres municipalités ont également adopté des mesures, telles que les villes de Collingwood et de New Tecumseh en Ontario, où l’usage du tabac est interdit dans les terrains de jeux ou près de ces terrains; la ville de Saint-Albert en Alberta, où il est banni sur le lieu d’un événement public en plein air; de même que celles de Moncton, au NouveauBrunswick, et de Statford, à l’Île-du-Prince-Édouard, où le tabac est proscrit sur les terrains de sport municipaux. Au Québec depuis mars 2010, la ville de L’Ancienne-Lorette, en banlieue de Québec, interdit de fumer dans ses parcs et terrains de jeux. La Société canadienne du cancer soutient depuis longtemps la désignation d’espaces extérieurs sans fumée, comme les parcs et les terrains de jeux. « L’usage du tabac en plein air produit de la fumée posant les mêmes risques pour La ville de Vancouver a banni l’usage du tabac dans ses parcs. De même que L’Ancienne-Lorette, en banlieue de Québec. la santé que la fumée secondaire à l’intérieur », publie la Société sur son site internautique. « Entre autres, la Société s’inquiète de l’exposition des enfants au comportement de fumeurs adultes dans les lieux destinés aux jeunes comme les terrains de jeu. En plus d’enseigner aux enfants que le tabagisme est acceptable, ce comportement les expose inutilement aux risques pour la santé de la fumée secondaire. » L’Unité de recherche sur le tabac de l’Ontario estime que la fumée secondaire cause le décès d’au moins 1000 Canadiens chaque année, et que plus de 7 800 décès pourraient y être associés. Pour sa part, l’Association pulmonaire a souvent fait le lien entre les crises d’asthme et les lieux publics extérieurs enfumés. – par Joe Strizzi 14 BRÈVES Héros de la santé publique Rob Cunningham, le conseiller stratégique de la Société canadienne du cancer en matière de lutte contre le tabagisme; Louis Gauvin, le coordonnateur de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac jusqu’à l’an passé; et Garfield Mahood, le directeur exécutif de l’Association pour les droits des non-fumeurs, se partagent en 2010 le titre de Héros de la santé publique attribué annuellement depuis 2005 par l’Association canadienne de santé publique (ACSP). Ce n’est pas la première fois que l’ACSP, fondée il y a un siècle, et peuplée de moult partisans de la médecine sociale et préventive, reconnaît le travail des artisans de la lutte contre le tabagisme pour leur contribution à l’allongement de l’espérance de vie et à l’amélioration de la qualité de vie. C’est ainsi qu’entre autres, l’œuvre d’un Ken Kyle, jadis conseiller de la Société canadienne du cancer, et celle d’un Neil Collishaw, l’actuel directeur de la recherche des Médecins pour un Canada sans fumée, ont aussi été reconnues, respectivement en 2009 et en 2006. On peut parier que l’année 2010 ne sera pas la dernière où la vénérable ACSP salue le feu sacré d’adversaires de la fumée. Cofondateur de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, Louis Gauvin a été consacré « héros de la santé publique » par l’Association canadienne de santé publique. info·tabac .ca no 84, octobre 2010 Rendez-vous en Afrique Le coup d’État de l’hiver dernier au Niger avait un moment fait craindre que la troisième Conférence internationale francophone sur le contrôle du tabac (CIFCOT) puisse être déplacée au Burkina Faso voisin, repor tée, ou annulée. Or, la CIFCOT-3 doit se tenir comme prévu à Niamey, capitale et métropole du Niger, du 25 au 28 septembre. Le programme des échanges ainsi que d’autres renseignements sont disponibles en ligne. (Voir www.cifcot.org) Les deux premières CIFCOT s’étaient tenues à Montréal en 2002 et à Paris en 2005. Grâce à Louis Gauvin, qui a été l’initiateur de ce genre de rencontres, Info-tabac offrira une couverture de la 3e conférence francophone dans sa prochaine édition. Psychiatrie sans fumée Dans un texte paru en juillet dans l’American Journal on Addictions, neuf chercheurs canadiens et états-unien demandent que l’usage du tabac soit exclu des institutions psychiatriques, et déplorent que, depuis trop longtemps, le tabac ait été toléré, bien qu’il soit la première cause de décès parmi les personnes souffrant de toxicomanies ou de troubles du comportement. Taryn Moss, Peter Selby et leurs confrères appellent les hôpitaux à imiter le Centre for Addiction and Mental Health de Toronto, qui s’est proclamé « sans fumée » plus tôt cette année. Au Québec, le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, l’Hôpital de Lanaudière, à Joliette, celui de Sorel-Tracy, celui de Ste-Agathe-des-Monts, l’Hôpital Jean-Talon, l’Hôpital Louis-H. Lafontaine, et l’Institut Philippe-Pinel, à Montréal, ainsi que la Cité de la Santé de Laval, parmi d’autres, ont une unité psychiatrique, ou sont des établissements spécialisés, où il est interdit de fumer. De son côté, la Maison l’Alcôve, à St-Hyacinthe, traite des personnes toxicomanes ou psychologiquement dépendantes du jeu, dans un environnement sans fumée. La recherche scientifique a montré que les chances de réussir son sevrage du tabac ou d’une autre drogue sont meilleures quand toutes les dépendances problématiques sont combattues en même temps. Jeunes vendeuses de pain à Niamey. Malgré les difficultés économiques et politiques, le Niger accueille la CIFCOT-3. Cesser de fumer fait diminuer le stress Auprès de 469 fumeurs qui avaient été hospitalisés à la suite d’un infarctus du myocarde ou pour la réalisation d’un pontage coronarien, trois chercheurs de l’Institut Wolfson de médecine préventive de l’Université Queen Mary de Londres ont recueilli des données sur le niveau de stress ressenti. Les 41 % des patients qui continuaient de s’abstenir de fumer un an après leur hospitalisation ont ressenti une réduction de stress significativement plus grande que les autres patients, rapportent P. Hajek, T. Taylor et H. McRobbie. Au sortir de l’hôpital, il n’y avait pas de différence entre le niveau de stress ressenti par les futurs non-fumeurs et le niveau de stress ressenti par ceux qui allaient demeurer fumeurs, et il n’y avait pas non plus de différence dans leurs croyances au sujet de la vertu anti-stress du tabagisme. Dans leur article, paru en juin dans la revue Addiction, les chercheurs concluent qu’en dépit de l’effet d’abaissement du stress ressenti à court terme par les fumeurs, continuer de fumer peut détériorer leur état émotif au bout du compte. info·tabac .ca no 84, octobre 2010 15 Protéger ses enfants de la fumée Un environnement sans fumée pour vos enfants. Comment y parvenir ? Tel est le titre d’une vidéo de 22 minutes qui s’adresse aux futurs ou nouveaux parents ainsi qu’à toutes les personnes qui partagent un espace de vie avec de jeunes enfants, y compris de façon occasionnelle. Le documentaire apporte le témoignage de personnes qui ont déjà été aux prises avec le problème du tabagisme passif, et passe en revue les méfaits de la fumée de tabac de même que des stratégies pour s’en protéger. Le film s’accompagne d’un manuel de formation d’une douzaine de pages, où se trouvent aussi des conseils pour l’animation de groupe, avec ou sans la présence d’adeptes du tabac. La petite trousse éducative a été conçue par Louise Choquette et Anne Meloche, respectivement du centre de ressources Meilleur départ - Nexus Santé, et du Centre de formation et de consultation, deux organismes communautaires ontariens, soutenus dans cette initiative par les gouvernements ontarien et fédéral. Une version anglaise sera bientôt disponible. (Voir liens84.htm) Selon les données de la première partie de 2009 de l’Enquête de surveillance de l’usage du tabac au Canada, ce sont 5 % des garçons et des filles de 11 ans et moins au pays qui sont exposés à la fumée secondaire du tabac à leur domicile. Cette proportion atteignait 11 % au Québec. Pour rendre littéralement plus respirable l’atmosphère dans les familles québécoises, le groupe Acti-menu, connu pour son Défi « J’arrête, j’y gagne ! », mène aussi depuis quelques années une campagne intitulée Pas de boucane dans ma cabane. Dans un court documentaire, l’intervenante Anne Meloche explique les méfaits de la fumée de tabac dans les domiciles, en particulier chez les enfants. ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? au?Conseil ? ?québécois ? ? ?sur?le ?tabac ? et?la?santé ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? de ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ?Le?nouveau ? ? ?site ? ? ? ? ? ? ? La ? ?gang ? ? ? allumée ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? sa ? ?rentrée! ? ? ? ? ? fait ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? «?S’informer, ? ? ? échanger, ? ? ? passer ? ? ? ? ? !?» ? ? ? à l’action ? ?C’est ? la?devise ? ?qui ?nous?a ?inspiré ? ?la ? ? ? ? ? ? conception de la ? nouvelle ? ? ? version ? ? ?du ?site?de ?La gang ? ?allumée ? ? qui? a? ? subi une refonte majeure afin de dynamiser sa facture ? ?générale ? ? et?son?ergonomie. ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ?•Cette ? nouvelle ? ? ?mouture ? ?vise ? à?: ? ? ? ? ? ? ? Offrir à l’ensemble des jeunes Québécois de 17 ? ?ans?et?moins ? ?un?site?pour ? se?renseigner ? ? ? et? ? ? ? la lutte ? ? s’exprimer ? ? ?sur?les?enjeux ? ?de ? ? contre ? ? le?tabac. ? ? ? • Susciter l’intérêt des jeunes pour une participation ? ?ponctuelle ? ? ?à des ? actions ? ? sur ? les?enjeux ? ?reliés ? ? à ? ? ? ? ? l’usage ? ?du?tabac ? au ? Québec. ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? • Inciter les jeunes et les adultes qui souhaitent agir, ? ?à choisir ? ? ?comme ? ?moyen ? ?d’action ? ?privilégié ? ? le? ? ? ? ? ? programme ? ? ? La ? gang ? ?allumée ? ? .? ? ? ? ? ? ? • Favoriser la création d’un ? ? ? ? ? ? ? ? mouvement ? ? ? ? québécois ? ? ? ? ? de jeunes contre le tabac. ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? Ce ? site ? renouvelé ? ? ?s’adresse ? ? ?principalement ? ? ? ?aux?jeunes ? ? ? et aux adultes qui souhaitent prévenir le tabagisme au ? ?Québec. ? ?On?y ?aborde ? ?une?variété ? ?de?sujets ? ?tels?que? ? ? l’?industrie ? ? ?du ?tabac ? ,?les ?produits ? ? trompeurs ? ? ? ?, la? ? dépendance , la cessation, l’environnement et la ? ?contrebande ? ? ? ?. ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ?Nous ? avons ? ?tout? mis ? en? œuvre ? ?pour ? que ? les ? jeunes ? ? et? ? les adultes puissent facilement exprimer leurs ? idées ? ? et?échanger ? ? avec ? ?les?autres ? sur ? les ? sujets ? ?et?les? ? ? ?projets ? ?qui?leur ? tiennent ? ? ?à ?cœur. ? Les ? ?divergences ? ? ? ? d’opinions y sont bienvenues! ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? constater par? vous-même, la multitude de ? ?pVenez ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ossibilités offertes par le nouveau site ? lagangallumee.com! ? ? ? ? ? ? ?(mise ? en?ligne ? : le?30?août?2010) ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? Agir ensemble ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? www.cqts.qc.ca ? ? ? ? ? ? ? ? ? Quoi de neuf ? 16 BRÈVES info·tabac .ca no 84, octobre 2010 BRÈVES Info-tabac est publié avec l’appui de Les vues exprimées dans cette revue ne représentent pas nécessairement la position officielle du MSSSQ ou de Santé Canada. Errol Povah milite contre le tabac depuis 30 ans. Une marche pour la santé Errol Povah est en train de parcourir à pied la distance entre Victoria, en Colombie-Britannique, et Montréal, et se dirigera ensuite vers New York. L’homme de 57 ans, qui est originaire de Colombie-Britannique et milite contre le tabac depuis 30 ans, accomplit son Voyage pour un Monde sans tabac de 6300 kilomètres afin de sensibiliser le public à sa cause et de récolter 540 000 $ pour intensifier la guerre contre le tabac. Le périple du président d’Airspace Action on Smoking and Health (AASH) a commencé à Victoria le 31 mai 2010, lors de la 23e Journée mondiale sans tabac de l’Organisation mondiale de la santé. Au rythme moyen de 42 kilomètres par jour, six jours par semaine, Errol Povah, qui a été obligé de prendre une courte pause en Alberta à la fin de juin, prévoit atteindre, au début de décembre, la métropole du Québec. À Montréal, le militant souhaite remettre personnellement un message de son cru à Ian Muir, le président et chef de la direction d’Imperial Tobacco Canada, avant de mettre le cap sur New York, une ville où d’importantes décisions sont prises par des compagnies de tabac. Marjolaine Imbeault, retraitée À la tête depuis mai 2008 du Service de lutte contre le tabagisme (SLCT) du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), Marjolaine Imbeault a pris sa retraite à la fin de juin. Par son ouverture d’esprit, sa rapidité à comprendre les enjeux, et son dévouement, Mme Imbeault s’était gagné l’estime des groupes de santé. Son remplacement intérimaire est assuré par la Dre Marie Rochette, directrice de la prévention des maladies chroniques et des traumatismes au MSSS. Le SLCT est chargé de la coordination du Plan québécois de lutte contre le tabagisme et de l’application de la Loi sur le tabac, laquelle a notamment pour but de protéger les non-fumeurs en maintenant des espaces sans fumée dans les lieux publics et de travail, ainsi que de débanaliser le tabac, notamment par l’interdiction d’exposer les produits du tabac à la vue du public dans les points de vente, et par l’interdiction d’en vendre à des mineurs. Un programme ambitieux pour une équipe d’une cinquantaine de personnes. Dre Marie Rochette assume la direction intérimaire du Service de lutte contre le tabagisme. Publiée cinq fois l’an par l’organisme sans but lucratif du même nom, Info-tabac est distribuée gratuitement aux médias, parlementaires et groupes de santé du Canada français (principalement au Québec). La revue est aussi disponible sur www.info-tabac.ca en formats HTML et PDF. Ce site web dispose d’un moteur de recherche couvrant tous nos textes depuis le premier numéro en 1996. Dépôts légaux : Bibliothèque et archives nationales du Québec ; Bibliothèque et archives Canada, nov. 1996. ISSN 1480-1833. Imprimé en 5 000 exemplaires sur papier 100 % recyclé par Impart Litho, Victoriaville QC. Éditrice : Joanne Brown 514 525-7021, jbrown(a)info-tabac.ca Publicité et commandites : Denis Côté, coordonnateur, 514 525-7025 dcote(a)info-tabac.ca Commentaires et suggestions : Pierre Croteau, rédacteur principal, 514 525-7029, pcroteau(a)info-tabac.ca Révision : Karine Tessier Télécopieur : 514 525-6044 Abonnements : abonne(a)info-tabac.ca ou www.info-tabac.ca/abonne.htm Plus de renseignements sur les sujets de ce numéro sur : www.info-tabac.ca/ liens84.htm Envoi par Postes-publication No 40032064 Images tirées de www.tobaccofreeworld.ca Si non distribuable : Rapportez les coordonnées du destinataire à Info-tabac, bureau 205, 1988 rue Sainte-Catherine Est, Montréal QC H2K 2H7, ou abonne(a)info-tabac.ca