PORTRAIT Catherine Tilmant

Transcription

PORTRAIT Catherine Tilmant
portrait
catherine
Ombre
et lumière
Catherine Tilmant est maquilleuse.
C’est un drôle de métier,
maquilleuse. Personnage de
l’ombre, on vous demande de
mettre de la lumière sur les
visages, de raviver l’éclat d’une
femme d’âge mûr, de
transformer un bellâtre en
monstre de foire et une fraîche
demoiselle à la peau de pêche
en mégère édentée au visage
parcheminé.
Quelle mascarade !
Pourtant, elle aime bien ça,
Catherine. Surtout lorsqu’il faut
créer des gueules pas possibles,
Tilmant
«
Le Conte d’hiver » de Dominique Serron, « Le
Cercle de craie caucasien » de Benno Besson, «Zingaro»
de Bartabas, « Les Bains » et « SC35c » de Jean-Michel
Frère, « Le vélo de Ghislain Lambert » de Benoît
Mariage, « La chanson-chanson » de Xavier Diskeuve…
A chaque fois, on trouve la petite touche de Catherine
Tilmant, ici pour le maquillage, là pour les costumes ou
l’habillage. Une intervention parfois discrète mais toujours appréciée, pour une artiste secrète mais colorée.
Les prémices
« J’ai deux sœurs. Petites, on n’arrêtait pas de se déguiser. Dans les
greniers de notre ferme, à Rhisnes,
on avait une manne remplie de
postiches et de fringues de ma
mère et de ma grand-mère. Au
milieu de la pièce, on avait aménagé un grand lit de ballots cerné
d’un rideau de velours rouge. C’était notre « club » où
l’on organisait des trucs hallucinants avec des copains
dans une ambiance… très théâtrale ! »
Effets spéciaux
« J’ai tâté un peu de la photo, un peu de l’étalage
aussi. Puis j’ai suivi des cours de maquillage à Bruxelles
où j’ai appris à créer des effets spéciaux, du style féerique au plus gore, de l’elfe à l’accidenté de la route :
cicatrice, faux nez, fausses oreilles… ».
En coulisses
« Pendant six mois, j’ai suivi la tournée en France et en
Allemagne de Benno Besson pour « Le Cercle de Craie
caucasien ». C’était fou ! Il y avait 150 costumes, autant
de masques ! Ces gens-là sont des magiciens. Ils vous
fabriquent une parure de Peau d’âne en quelques
heures, démontent, remontent les décors en un rien de
temps… Un boulot de dingue ! En tant qu’habilleuse,
on a la chance d’être très proche des comédiens. On vit
leur stress et leurs petits rituels juste
avant l’entrée en scène, on partage leurs
états d’âme entre deux actes, on entend
les réactions du public. Zingaro, c’était
une belle expérience aussi. On vivait
dehors, en pleine nature, avec la troupe
et les chevaux. Le matin je croisais les
écureuils en grimpant à la Citadelle»
Une histoire
triste qui finit bien
« Lors d’un cours d’illustration aux B’Ateliers, j’ai travaillé
sur un album pour enfants. Une histoire de petit lapin,
livré à lui-même, qui préfère la nature à l’école. Sur les
conseils de Laurence Afano, j’ai présenté le projet à
l’éditeur Baronian, qui a apprécié le côté spontané et
la fraîcheur des dessins. Et voilà, le livre va sortir prochainement. J’ai juste dû changer la fin, que l’éditeur
trouvait trop triste. Mais je réécrirai des histoires de solitude. Car ça fait partie de l’enfance et de la vie, la tristesse ! Il faut pouvoir l’accueillir, composer avec elle ! »
imaginer des êtres fabuleux ou
un rien monstrueux.
C’est comme pour les costumes,
Beaux-Arts
plus c’est fou, plus c’est déjanté,
« Je continue à suivre les cours de peinture aux
plus elle aime. Y a que pour ses
Beaux-Arts. C’est important pour moi, l’approche de la
histoires d’enfant qu’elle préfère
couleur. On apprend à poser les lumières, à marier
la simplicité et la douceur.
les tons, à exploiter sa folie aussi… Le théâtre, le
cinéma, le livre, la peinture, tout se tient. C’est chaque
fois une histoire à raconter, avec des mots, des
images, des couleurs. Mon but, c’est de pouvoir me
donner à fond dans la peinture, réaliser de grandes
toiles inspirées des contes et des fables ».
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déc 2002 namur magazine