Avis du Conseil national des villes (CNV) sur "les émeutes urbaines

Transcription

Avis du Conseil national des villes (CNV) sur "les émeutes urbaines
Avis du Conseil National des Villes
sur "les émeutes urbaines de novembre 2005"
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Novembre 2006
«Plus l’adolescent a peur, plus il est tenté de faire peur pour dissimuler son anxiété.
La destruction est la créativité de celui qui se sent impuissant ».
Philippe Jeammet, chef du département de psychiatrie, Institut mutualiste Montsouris - 2006
Avertissement
Le CNV, renouvelé en mars 2006, a décidé de commencer ses travaux en
étudiant les évènements de novembre 2005 pour les comprendre et en tirer les
leçons. Il a travaillé en interne - beaucoup de membres du CNV ayant été, de
par leurs fonctions, personnellement confrontés à ces évènements - et il a
entendu des personnalités connues pour leur expérience et leur expertise1. Il a
consacré une séance spéciale à l’un de ses membres, Pierre Cardo2, députémaire de Chanteloup-Les-Vignes, qui avait présidé un groupe de travail du CNV
après les émeutes de 1991, pour entendre les constats d’alors et faire des
comparaisons avec la situation de 2005.
Le CNV achève ce travail collectif, renforcé dans la conviction que, si la réalité des
inégalités n’est sans doute pas à l’origine de ces évènements, la prise de conscience s’est
accrue et elle ne peut-être ignorée par les pouvoirs publics.
Les maires des villes touchées tirent depuis de nombreux mois la sonnette d’alarme sur
le fait que les mesures prises au lendemain des émeutes de 2005 ne sont pas à même de
réduire les difficultés dans lesquelles ils se débattent et que la situation reste explosive.
« Le sentiment prévaut dans les quartiers concernés que tout est pareil et que rien n’a
changé ».
La recrudescence d’incidents graves entre les jeunes et la police, et les nombreux articles
de presse, à la veille de « l’anniversaire » de ces évènements, viennent rappeler que les
causes de ces émeutes n’ont pas trouvé de solutions et que le risque de répétition est
toujours le même.
Le CNV souhaite rappeler aussi que ces phénomènes d’émeutes urbaines ne sont
malheureusement pas apparus en 2005, mais se reproduisent régulièrement depuis 1981
dans notre pays. Toute l’ambition de la politique de la ville, depuis le discours du
Président de la République à Bron en 1988, a été de réduire ces phénomènes en
apportant les réponses appropriées. Force est de constater que nous n’y sommes pas
encore parvenus.
1
2
Voir liste en annexe.
Par ailleurs toujours membre du Conseil national des villes
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Avis du CNV sur les émeutes urbaines de novembre 2005
Sommaire
1. Introduction
2. Les faits
3. Le bilan chiffré
4. Le profil des jeunes arrêtés en novembre.
4.1. L’éclairage du département des Yvelines
4.2. L’éclairage du département de Seine-Saint-Denis
5. Les principaux enseignements sur les émeutes
6. Quel est l’arrière-plan général de ces émeutes urbaines ?
6.1. Des inégalités sociales et territoriales qui s’accentuent entre ZUS
et avec les autres territoires
6.2. Des professionnels en difficulté dans les ZUS
6.3. Des moyens financiers ne permettent pas de répondre aux besoins
dans les ZUS
7. Les propositions du CNV
7.1. Une politique ambitieuse de réussite scolaire et éducative
7.2. Le traitement du noyau dur de la délinquance
7.3. Une présence policière renouvelée dans son organisation
et sa déontologie
7.4. L’accueil des immigrés et la gestion de l’immigration
en lien avec les collectivités locales
8. Conclusions
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1- Introduction
Les quartiers les plus pauvres de nombreuses communes françaises ont connu en
novembre 2005 des violences collectives sans précédent par leur répartition sur le
territoire et par leur simultanéité. Violences graves par leur nature et leur ampleur :
incendies de véhicules, d’école, de crèche ou d’équipements municipaux, attaques parfois
contre les personnes, notamment les forces de protection civile mais surtout durs
affrontements avec les forces de l’ordre ; graves aussi par leur coût économique ; graves
enfin au plan symbolique. Ces « émeutes urbaines » ont marqué profondément les
esprits. Les acteurs impliqués dans les politiques de développement urbain et social ont
ressenti un sentiment d’impuissance, voire d’échec, face à des phénomènes dont
l’ampleur marque l’insuffisance des moyens dont ils disposent localement pour résoudre
des problèmes structurels de grande pauvreté et d’exclusion dans certains quartiers.
Tous ont vérifié avec amertume la justesse des alarmes et avertissements qu’ils
adressent depuis longtemps aux pouvoirs publics
Plusieurs mois après ces événements, les membres du groupe de travail et les personnes
auditionnées sont unanimes pour estimer que ces émeutes pourraient se reproduire et
que les mesures gouvernementales et locales prises ne suffiront pas à empêcher leur
reproduction tant les difficultés vécues par les habitants de ces quartiers sont graves, les
causes à l’origine de ces difficultés sont multiples et complexes, et les solutions pour
éviter qu’ils ne se reproduisent sont encore à inventer ou à compléter.
2. Les faits
Les émeutes dites du mois de novembre 2005 se sont déclenchées le 27 octobre 2005
suite au décès dramatique de deux jeunes gens de Clichy-sous-Bois morts électrocutés,
un troisième étant gravement brûlé, alors qu’ils étaient poursuivis par la police. Ces
morts ont mobilisé en réaction un premier cercle de jeunes gens révoltés qui ont incendié
des véhicules et des poubelles, puis lancé des projectiles sur les pompiers et les policiers,
enfin ont recherché l’affrontement avec les CRS. Le lancement d’une grenade
lacrymogène à l’entrée de la mosquée de Clichy-sous-Bois a été ressenti comme une
provocation supplémentaire en plein ramadan. Mais alors que la tension baissait à Clichysous-Bois, l’embrasement s’est étendu à d’autres cités et à d’autres villes et des
affrontements importants ont opposé force de l’ordre et émeutiers. Cette extension à de
nombreuses cités par « solidarisation » autour des jeunes gens de Clichy-sous-Bois et
aussi par « émulation» a eu lieu également dans un climat de « radicalisation »
alimentée par les propos du ministre de l’Intérieur quelques jours auparavant à
Argenteuil.
De l’avis de tous les observateurs locaux, ces éléments se sont conjugués pour initier un
rapport direct d’affrontement entre les jeunes – qui exprimaient d’abord leur rage en
s’attaquant aux biens de leurs voisins et à la présence de l’Etat dans les quartiers et
voulaient aussi en découdre avec le premier policier de France – et les forces de sécurité.
Ces violences collectives se sont durcies au fil des jours et se sont étendues à trois cents
communes de France…
Le mardi 8 novembre, l’état d’urgence a été décrété. Le premier Ministre a annoncé – le
même jour – différentes mesures dont la restauration de la contribution financière aux
associations dans les quartiers sensibles. Mais les tensions restaient vives, diminuant en
Île-de-France, s’amplifiant en province. Des manifestations ont été organisées à l’appel
des mairies et des associations pour dire « non aux violences ». Cette mobilisation des
élus et des associations, qui se sont interposés et ont joué la médiation au plan local, a
largement contribué à la baisse de la tension. Le 14 novembre, le Président de la
République s’est adressé aux Français et a prorogé l’état d’urgence pour trois mois.
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3. Le bilan chiffré3
• 10 000 véhicules privés ont été incendiés, 144 véhicules RATP « caillassés » dont 10
bus et RER attaqués par des engins incendiaires, une centaine de véhicules de la Poste
ont été incendiés et touchés.
• 233 bâtiments publics ont été touchés selon le ministère de l’intérieur (bâtiments
scolaires, bibliothèques, postes…) et 74 bâtiments privés ; une centaine d’entreprises ont
été touchées à des titres divers selon le bilan de la chambre de commerce et d’industrie
de Paris.
• 18 lieux de culte ont subi des dommages.
• 11 500 policiers et gendarmes ont été mobilisés et 217 ont été blessés.
• Le coût estimé selon la Fédération française des sociétés d’assurance et la société
d’assurance mutuelle des collectivités locales s’élève entre 200 et 250 millions d’euros.
• 4 770 jeunes ont été interpellés, 763 ont été écroués dont 108 mineurs.
4. Le profil des jeunes arrêtés en novembre 2005.
Les données du département des Yvelines et du département de Seine-Saint-Denis
4.1. L’éclairage du département des Yvelines
Un profil a été établi par la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) des
Yvelines, département touché principalement entre le 3 et le 15 novembre 2005.
121 personnes ont été arrêtées et les interpellations ont été ciblées pour arrêter des
personnes pour lesquelles des procédures judiciaires permettaient d’attester de la
culpabilité. Il s’agit d’hommes majoritairement (119 sur 121), pour moitié des majeurs et
pour moitié des mineurs. La tranche d’âge 18/21 est la plus représentée. 95% sont de
nationalité française. 81% des interpellés habitaient le quartier. L’immense majorité vit
dans un logement HLM chez ses parents, les fratries sont nombreuses. 26 étaient déjà
connues des services de police. 59 des personnes interpellées étaient intégrés dans un
lycée, un collège, une formation.
Parmi les 59, 10 ont fait l’objet d’une investigation plus détaillée et des informations sur
leur parcours scolaire recueillies. Cette recherche a montré que leurs parcours
présentaient des résonances avec le parcours délinquant. Ces élèves ou anciens élèves
sont présentés comme insolents, violents, perturbateurs. Les explications données dans
leurs procès verbaux d’audition font apparaître comme motivation des actes : la rivalité
clanique et médiatique entretenue entre cités, l’aspect ludique, le défi à l’autorité, la
volonté de marquer son territoire, une haine très forte contre les représentants de l’Etat
– notamment la police –, du pouvoir, de la société occidentale.
Tous les quartiers sensibles des Yvelines ont été touchés par les violences et les villes où
les investissements pour la rénovation urbaine ont été lourds ont aussi connu des
violences très fortes.
3
"Données du ministère de l'Intérieur, ministère de la Justice, ministère de l'Education nationale, de la
Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), de la Société d'assurance mutuelle des collectivités
locales (SMACL), de la CCI de Paris...."
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4.2. L’éclairage du département de Seine-Saint-Denis
Un travail de synthèse a également été conduit dans le département de la Seine-SaintDenis. Il en ressort que sur 300 arrestations, 248 personnes ont été déférées. Les autres
ont été relâchées faute de faits attestés. 122 étaient majeures et 62% n’étaient pas
connues pour des antécédents judiciaires. Une forte proportion des mineurs déférés (85)
était en situation de décrochage familial et scolaire qui aurait justifié des signalements et
des prises en charge.
Parmi les jeunes scolarisés, plus de la moitié accusait un retard de plus de deux ans au
regard du cycle d’enseignement. Beaucoup de parents se sont manifestés auprès des
services éducatifs au moment des déferrements et ont demandé des conseils et des
mesures éducatives. Plus de la moitié des personnes interpellées n’avait aucune activité
professionnelle ou sociale.
Ces données sont fragmentaires et elles demanderaient à être systématisées – avec les
mêmes cadres d’observations – et comparées, tout en ayant à l’esprit que les sources
policières et judiciaires sont insuffisantes pour décrire la réalité d’ensemble. Cependant
elles fournissent des tendances d’ensemble qui confirment les interrogations sur la
probable corrélation entre l’enfermement territorial, le déficit scolaire, l’absence de
formation professionnelle et le passage à l’acte violent.
5. Les principaux enseignements sur les émeutes
D’autres émeutes ont eu lieu en France – et notamment en 1991 – avant celles de
novembre 2005. Le CNV regrette que des études sur le profil des émeutiers et sur leur
situation n’aient pas été conduites de façon scientifique. Une cartographie précise des
événements à l’échelle du territoire est en cours d’élaboration et les premières analyses
ne sont pas encore connues. Les données manquent pour faire un diagnostic objectif,
complet et partagé. Même si les recherches engagées depuis novembre 2005 sont plus
nombreuses que par le passé, elles restent insuffisantes.
• Les émeutes de novembre 2005 montrent qu’au-delà des groupes de jeunes impliqués
dans ces violences, il y a dans ces quartiers une partie significative de la population qui
est en décrochage, en perte de repères, en désespérance, en manque de perspectives
d’avenir, en déficit de reconnaissance, de respect, d’écoute.
Ces émeutes ont rappelé le grave mal-être de jeunes – souvent français mais
d’origine immigrée – et leur absence de place dans la société. Mal-être accentué
par leurs difficultés pour s’exprimer et communiquer. L’enfermement et l’isolement dans
lequel ils se trouvent, l’absence de reconnaissance de leurs potentiels, de leur culture et
de celle de leurs parents, renforcent leur sentiment d’hostilité et d’abandon par la
collectivité.
• Il a été dit dans un premier temps que ces violences étaient des violences « sans
revendication », des violences de colère et de frustration. Mais les explications sont
certainement beaucoup plus complexes : entre des logiques de concurrence entre cités,
une dimension ludique, une agressivité latente contre la police et les institutions encore
présentes, un sentiment d’absence d’avenir. Il n’y a pas une vérité sur ces violences mais
plutôt des visions en concurrence, et privilégiées en fonction des places, des histoires et
des fonctions de chacun. Le CNV estime que si ces émeutes apparaissent « sans
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leader et sans programme4 », elles ne sont pas sans revendication. Il y a bien
une revendication sous-jacente à ces émeutes : ces jeunes n’acceptent pas l’absence
de perspectives professionnelles et sociales. Certains revendiquent un avenir de
Français à part entière, d’autres se réfugient dans l’ethnicisation et la posture de
« victime ».
• Des déclarations officielles ont mis en cause la responsabilité des familles, leurs
carences éducatives et la polygamie. Pourtant dans de nombreux quartiers, les
adultes ont joué un rôle de pacification pendant les violences, des groupes de
parents5, de citoyens se sont mobilisés pour calmer les choses grâce au
dialogue et en s’interposant entre les forces de police et les jeunes. Cette
dimension citoyenne doit être particulièrement relevée.
• La mort des deux jeunes gens de Clichy-sous-Bois a suscité immédiatement une forte
empathie, avec un effet de rumeur immédiat de cités à cités. Les téléphones portables
dont sont munis tous les jeunes ont facilité la propagation de ces rumeurs, les
échanges d’informations, la mobilité et la mise en scène de leur participation
aux évènements.
En outre, ces émeutes urbaines ont fait l’objet d’une couverture médiatique sans
précédent : la recherche par les médias (télévision au premier rang) du « sensationnel
» a joué un rôle certain d’entraînement et incontestablement introduit une surenchère
entre cités.
• La politique de la ville a été, une nouvelle fois, accusée d’avoir échoué. Les
crédits spécifiques, limités, ont souvent suppléé les crédits de droit commun
(mal répartis et trop peu utilisés pour les quartiers) et n’ont pas été à la hauteur de ce
qu’ils auraient dû être pour réduire les inégalités et favoriser la mobilité.
Pourtant, les communes qui ont un tissu associatif ou des personnalités sur
lesquelles s’appuyer, ont connu un retour au calme plus rapide. Le CNV l’a
souligné depuis 2000, les financements des associations de proximité ont été
dramatiquement réduits ces dernières années et beaucoup d’associations ont dû cesser
leur activité.
4
Selon une note de la direction centrale des renseignements généraux.
Même si un sentiment diffus de « compréhension » quant aux raisons de la révolte de leurs enfants était
palpable.
5
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6. Quel est l’arrière-plan général de ces émeutes urbaines ?
6.1. Des inégalités sociales et territoriales qui s’accentuent entre ZUS
et avec les autres territoires
Le rapport 2005 de l’Observatoire national des ZUS, qui présente un bilan des écarts sur
la base des indicateurs définis par la loi de programmation et d’orientation pour la ville et
la rénovation urbaine, aborde la question de la diversité des ZUS.
De même, une étude récente6 sur les zones urbaines sensibles en Île-de-France montre
qu’elles présentent des réalités diverses qui peuvent être classées en six groupes dont
trois, particulièrement défavorisés, sont concentrés en Seine-Saint Denis où :
• le taux de chômage était de 13,3 % au 3ème trimestre 2005 pour l’ensemble du
département contre 9,5 % en Île-de-France et 9,6 % pour la France entière. Il peut
atteindre près de 25 % dans certaines villes et 50 % dans les ZUS. Au plan national en
2004, le taux de chômage de 20,7 % dans les ZUS était le double de la moyenne
nationale (10,3 %),
• le taux de chômage des jeunes s’élevait en 2004 à 36 % dans les ZUS contre
environ 20 % au niveau national ; ce taux est certainement sous-évalué, les
professionnels de l’emploi constatant la non inscription très importante des jeunes des
ZUS à l’Agence locale pour l'emploi (ALE) ;
• 18 % des personnes qui résident en Seine-Saint-Denis appartiennent à un foyer qui vit
en dessous du seuil de pauvreté, alors que cette proportion n’atteint pas 10 % dans les
autres départements franciliens. 6 % des habitants vivent du RMI (la moyenne étant de
3 % pour l’Île-de-France),
• la part des ménages non imposés est de 57 % en moyenne dans l’ensemble des ZUS
du territoire, pour 40 % au niveau national,
• une forte proportion d’étrangers, très majoritairement non européens : 16,5 %
dans l’ensemble des ZUS contre 5,6 % en France. Cette proportion s’élève à 22 % en Îlede-France et à 26 % en Seine-Saint-Denis. Mais si l’on prend les immigrés récemment
arrivés7, cette proportion s’élève à 40 % dans les ZUS de Seine-Saint-Denis et à 24 %
dans l’ensemble des ZUS contre 7,6 % sur l’ensemble du territoire.
Ce tableau dressé n’est pas nouveau8, mais il confirme les éléments sociaux durables et
cumulatifs qui composent la crise urbaine profonde dans laquelle la France est installée
et qui sont constitutifs de l’antagonisme profond qui s’est instauré entre les habitants des
cités et les autres. La mobilité résidentielle a transformé le peuplement des ZUS en y
accentuant le poids des personnes les plus fragiles. Cette mobilité, qui s’est nettement
réduite depuis quelques années, exerce un fort effet de sélection : les plus fragiles ont
plus de chances d’arriver en ZUS et de s’y maintenir, renforçant ainsi un fort sentiment
d’enfermement, voire d’assignation à résidence.
6
"Les zones urbaines sensibles franciliennes : des réalités diverses", par Françoise Jacquesson, Insee Ile-deFrance, n° 271 – Août 2006.
7
Chiffre que l’on peut approcher en prenant le nombre d’habitants des ZUS dont la personne de référence dans
le ménage est étrangère.
8
Il est, avec des chiffres et des indicateurs, très proche du bilan dressé en mots et descriptions par les
membres du groupe de travail mis en place par le CNV à l’issue des émeutes de 1991.
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6.2. Des professionnels en difficulté dans les ZUS
Si nombre d’indicateurs témoignent des difficultés économiques et sociales des habitants
dans les ZUS, d’autres sont significatifs des difficultés des professionnels qui y travaillent.
Prenons, par exemple, la situation des enseignants : la part des enseignants de moins de
30 ans dans les collèges en ZUS s’élève à 25 % (44 % en Seine-Saint-Denis) contre
18 % en dehors ; de même, la part des enseignants en poste depuis 2 ans ou moins
dans les collèges en ZUS s’élève en moyenne à 37 % (46 % en Seine-saint-Denis).
Ces caractéristiques se retrouvent également dans les écoles : le nombre de professeurs
de moins de 30 ans est également très élevé : 28 % en moyenne dans les ZUS de SeineSaint-Denis, ce chiffre pouvant atteindre 45 % dans certaines ZUS.
On retrouve cette même jeunesse et « instabilité » dans la police nationale : le rapport
sur le service public en Île-de-France montrait qu’environ 60 % des policiers de SeineSaint-Denis demandaient leur mutation tous les ans (seuls 25 % l’obtenaient) ; l’âge
moyen de l’ensemble des policiers (du directeur départemental au gardien de la paix) de
ce même département s’établissait à 27 ans en 2002.
Les chiffres concernant les autres corps de métiers ne viendraient que renforcer encore
ces données : que ce soit à La Poste ou à l’ANPE, le turn-over est très important. De
même, les collectivités ont du mal à trouver des cadres chevronnés.
Ces constats, auxquels d’autres pourraient s’ajouter, sont symptomatiques des difficultés
rencontrées par les professionnels dans les zones urbaines sensibles.
6.3. Des moyens financiers ne permettent pas de répondre aux besoins
dans les ZUS
Les différentes études concernant la politique de la ville, en particulier le rapport
remarqué du Conseil d’analyse économique « Ségrégation urbaine et intégration
sociale9 » chiffre le montant des crédits pour la politique de la ville à 0,36 % du PIB. Ils
estiment qu’ils devraient s’élever à un moins 1 % du PIB, c’est-à-dire qu’ils devraient
être multipliés par trois.
Pour compenser la faiblesse des moyens financiers, les acteurs doivent multiplier les
recherches de financement. Outre la complexité du montage des dossiers pour la
recherche de financements, la multiplicité des appels d’offre, les conditions d’éligibilité et
les cahiers des charges qui diffèrent suivant l’institution sollicitée (Europe, Etat, Région),
les professionnels doivent entrer dans la logique de chaque institution au risque de faire
perdre son sens au projet et de ne pas répondre aux besoins des habitants.
Ces premiers enseignements sur les émeutes, comme les données factuelles rassemblées
ici permettent au CNV de pointer, une nouvelle fois, les dysfonctionnements structurels
et institutionnels qui constituent l’arrière-plan de ces émeutes. Ce constat des limites de
la politique de la ville et de sa nécessaire refondation avait été fait lors des Assises de la
Ville en avril 2005. Il reste totalement d’actualité.
Le CNV ne se prononce pas dans ce document sur l’ensemble des réponses que le
gouvernement a voulu apporter dans les semaines et les mois qui ont suivi les émeutes
de novembre 2005, il l’a fait en particulier dans deux avis (sur la création de l’ANCSEC et
sur le plan prévention de la délinquance). Mais ses membres ne sont pas convaincus que
ces réponses soient à la hauteur du fossé qui sépare ces jeunes et ces quartiers du reste
de la société française.
9
2004.
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7. Les propositions du CNV
En étudiant les émeutes de novembre 2005 et les leçons qui peuvent en être tirées, le
CNV est conscient qu’il ouvre le champ de toutes les grandes questions contenues dans
la politique de la ville. Il s’est volontairement limité, dans l’exercice présent, à cibler des
propositions en liens immédiats avec l’analyse qu’il fait des événements. Mais la politique
de la ville n’a pas vocation à suppléer le droit commun. Et ces émeutes sont aussi
l’expression du décrochage des politiques de droit commun tant en termes d’organisation
du service public que des moyens qui lui sont attribués.
Le droit commun face au renforcement de la ségrégation urbaine et à la réalité
de la différenciation territoriale doit être ré-interpellé autour des 4 politiques
régaliennes qui sont le socle du pacte républicain :
- solidarité nationale et péréquation financière,
- éducation nationale,
- police et gendarmerie nationales,
- justice.
Ce sont donc bien les critères d’intervention de ces politiques publiques développées par
l’Etat, assises essentiellement sur des critères démographiques, qui doivent être
redéfinis. Non seulement, ces politiques ne réduisent plus les écarts, mais elles creusent
encore les inégalités, entraînant la démobilisation des agents et services concernés et un
sentiment d’injustice accru des habitants. C’est toute la réforme de l’Etat et de l’équité
des politiques publiques régaliennes qui est là posée.
Le CNV souhaite mettre l’accent sur quatre « chantiers » déterminants qui lui paraissent
directement liés aux émeutes de 2005 et devoir faire l’objet de transformations
importantes et surtout d’innovations.
7.1. Une politique ambitieuse de réussite scolaire et éducative
– et notamment la prise en charge des jeunes en échec scolaire ou exclus du
système scolaire
De trop nombreux jeunes sortent de l’école sans qualifications, voire sans savoir lire,
écrire, compter, communiquer. D’autres sont exclus de l’école ou s’en absentent sans
être véritablement inquiétés ou recherchés. Parmi les jeunes impliqués dans les violences
urbaines, un bon nombre est dans cette situation et reste sans solution.
Des divergences importantes sont apparues au sein du CNV sur l’analyse de cette
situation et sur les solutions possibles. Toutefois, deux questions sont apparues à tous
comme décisives : l’absence de mixité sociale dans les écoles des cités et le trop
grand nombre d’élèves en échec scolaire.
Concernant la mixité, le lien est naturellement établi entre une politique du logement qui
concentre au même endroit des habitants connaissant un cumul de handicaps et la
ségrégation qui règne au sein des établissements… L’élaboration des projets urbains
devrait systématiquement s’accompagner d’une réflexion concomitante sur le « devenir
social » des quartiers et penser ensemble l’organisation urbaine et la lutte contre la
ségrégation par l’école, les projets de réussite éducative, la localisation des
établissements et la carte scolaire.
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La carte scolaire a fait l’objet de discussions ; les quelques expériences de
désectorisation menées montrent que les familles les mieux informées profitent de la
mobilité pour accéder à une meilleure offre éducative, tandis que les familles qui ne le
sont pas restent ségréguées.
Enfin, l’audition de la Fondation 93 a souligné trois grands principes d’innovation en
matière de pratiques éducatives que le CNV reprend à son compte :
• l’ambition des projets : plus la population ciblée est en difficulté et plus le projet doit
être ambitieux. Il faut être à la fois capable de traiter le quotidien des populations mais
être capable de s’extraire du quotidien pour éveiller le désir et la construction d’un autre
avenir,
• le principe de questionnement : pour développer la capacité d’enquête, de mise en
relation, la recherche de solutions et d’alliances, la rencontre de personnalités qui
peuvent renseigner,
• le principe de restitution : des scientifiques, des autorités publiques devraient être
capables de venir entendre ceux qui se sont mis au travail…
Le CNV propose :
• de développer et répartir l’offre scolaire d’excellence (langues rares, horaires
aménagés, classes européennes, classes préparatoires, etc…) entre les villes riches et les
villes pauvres (cette offre est actuellement concentrée dans les villes riches) ; et
d’articuler – c’est un préalable – cette démarche d’implantation avec une politique
d’habitat et de transport qui combatte la ségrégation urbaine ;
• d’engager une large concertation, notamment avec les organisations
syndicales et les représentants des parents d’élèves, sur :
- les temps et modalités de présence des enseignants dans les établissements, afin de
favoriser l’organisation de projets entre enseignants, et de faciliter les relations entre les
enseignants ou les autres personnels et les élèves ;
- le « mouvement » afin que ne soient pas exclusivement nommés dans les écoles en
difficultés des enseignants débutants et pour favoriser les affectations des professeurs
« expérimentés » sur la base du volontariat et en fonction du projet d’établissement ;
• d’organiser un suivi personnalisé des élèves déscolarisés pour construire,
avec chacun d’eux, un projet d’insertion sociale et professionnelle adapté : rescolarisation, apprentissage, formation… Des initiatives existent (dispositifs relais, écoles
expérimentales, espace dynamique d’insertion…) qu’il faudrait multiplier ; et de favoriser
une pédagogie qui reconnaisse la diversité des élèves, leurs capacités intellectuelles,
manuelles, techniques et qui développe la construction de projets d’intérêt collectif. De
même, il est indispensable de renforcer les moyens existants en secteur public de
pédopsychiatrie pour répondre aux besoins des jeunes en souffrance ;
• d’engager un débat public sur l’organisation claire d’une mobilité et d’une
mixité des élèves.
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7.2. Le traitement du noyau dur de la délinquance
– et particulièrement des mineurs
Il y a de l’avis d’une majorité des membres du CNV une évolution et un durcissement de
la délinquance. Le problème de la non-réponse, « faute d’outils », à la délinquance des
mineurs ne peut rester en l’état. Car elle entraîne la récidive des mineurs,
l’incompréhension voire l’exaspération des habitants, le sentiment d’impuissance et
d’inutilité chez les policiers. Si l’emprisonnement n’est pas la solution, le retour dans la
rue ne l’est pas non plus.
Une mobilisation doit s’engager pour résoudre – et pas simplement de manière
répressive – cette délinquance et sa récidive qui est sous-évaluée dans l’esprit de
nombreux responsables et porte principalement sur les épaules des habitants qui en sont
les premières victimes.
Cette situation révèle un manque d’objectifs et d’organisations partagés de la part de la
justice et de la police, un manque d’effectif d’éducateurs, alors que les mesures
d’assistance éducatives progressent. Elle révèle également une structuration insuffisante
des réponses en « milieu ouvert » et de collaboration avec les familles et les partenaires
locaux (rappel à la loi, travail d’intérêt général, centre éducatif renforcé, par exemple).
Le CNV s’est prononcé au mois de juin 2006 sur le projet de Plan de prévention de la
délinquance, devenu projet de loi sur la Prévention de la délinquance et voté en première
lecture par le Sénat. Dans la continuité de son analyse et de ses propositions,
Le CNV propose :
• qu’un groupe permanent 10, dans le cadre du contrat local de sécurité, soit mis
en place dans toutes les communes qui garantirait : la prise en charge de tout jeune
en ayant besoin et l’information des parents ; la désignation d’un référent clairement
identifié par le mineur et les autres professionnels ; la pluridisciplinarité du travail
(policier, judiciaire, éducatif, social, scolaire, médical) ;
• que soit créée une instance de recours dans le cas du rejet du mineur par
l’institution d’accueil pour trouver une solution mieux appropriée et qu’il ne reste
pas sans solution ;
• d’actualiser l’évaluation du travail réalisé depuis plusieurs années en matière
de structures éducatives coercitives : centres éducatifs fermés (CEF), centres de
placement immédiat (CPI), etc… ces méthodes nouvelles étaient-elles pertinentes,
doivent-elles être développées ? A quel prix ? De même la restitution écrite des activités
au sein du Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) et, en
synthèse et croisement inter-communal, au sein du Conseil départemental devrait être
organisée ;
• que la police investisse pleinement son rôle d’acteur social : de nombreuses
interventions de police ne font pas l’objet de procédures et sont simplement inscrites sur
la main courante. Elles ne sont dès lors pas exploitées (ni connues des juges) alors
qu’elles révèlent des dysfonctionnements sociaux ou des enfants ou des jeunes en
souffrance. Une meilleure circulation de l’information (par le biais notamment de
travailleurs sociaux installés dans les locaux de police) et la cohérence entre les prises en
charge et les intervenants sont plus que jamais nécessaires.
10
Cette proposition était déjà contenue dans le rapport Cardo de 1991.
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7.3. Une présence policière renouvelée dans son organisation
et sa déontologie
Malgré le choix du ministère de l’intérieur de privilégier l’investigation et une forme de
police active dans la rue plutôt qu’une police de proximité au sens traditionnel du terme,
ces émeutes ont montré les faiblesses de l’organisation des forces de l’ordre qui –
excepté à Paris – ont eu des difficultés à déployer des effectifs importants et dans un
temps court sur l’ensemble du territoire. Dans les premiers jours, une inadéquation entre
les moyens et la mission était patente en région Île-de-France (CRS inclus). Or, lors de
tels événements, la rapidité d’intervention et la capacité de dispersion des personnes
sont essentielles.
Au quotidien, les policiers ont le sentiment qu’eux seuls représentent encore dans les
banlieues un minimum d’autorité. Leur présence et leurs interventions dérangent et
provoquent souvent de violentes réactions de rejet. Ce refus de l’autorité (ou de la
puissance publique) s’exerce de plus en plus radicalement à leur égard et à l’égard des
autres présences vécues comme contraignantes (école, gardiens d’immeubles, pompiers)
et génère les mêmes actes de violences.
Néanmoins, au premier plan des doléances exprimées après les émeutes par les jeunes
qui se sont exprimés lors du tour de France d’AC-le feu que le groupe de travail a
auditionné, figurent « les pratiques policières au quotidien » et la dénonciation de
contrôles d’identité estimés abusifs – en région parisienne, comme en province. Le
contrôle d’identité est devenu symbolique de la difficile relation entre les jeunes des cités
et le contrôle étatique, symbolisé par la police. Il est perçu par les jeunes comme une
affirmation excessive d’autorité, souvent vexatoire et parfois humiliante.
Si la tâche des policiers est particulièrement difficile face à la fréquente agressivité des
jeunes, ces représentants de l’Etat doivent avoir un comportement irréprochable. La
doctrine en matière de contrôles d’identité doit leur être rappelée et mise en œuvre avec
discernement. Il est souligné la nécessité d’employer dans les cités des policiers aguerris
et bien formés.
Enfin, le CNV constate que le projet de loi prévention de la délinquance (voté en
première lecture par le Sénat) demande une mobilisation nouvelle et des mesures
apportées par de nombreux ministères mais dit peu de choses sur la manière dont le
ministère de l’intérieur lui-même pourrait faire évoluer ses pratiques et ses moyens.
Dans la logique de son avis sur le Plan de Prévention de la Délinquance,
le CNV propose :
• la création d’une police de proximité qui ne se fasse pas au détriment des missions
d’investigation ;
• une réforme des structures policières locales et une ré-attribution des effectifs
pour une police capable :
- d’améliorer la prise en compte des jeunes en réaffirmant l’importance des brigades des
mineurs,
- d’être plus réactive aux plaintes et à leur exploitation,
- d’être proactive dans ses missions de protection des citoyens en identifiant plus
clairement les référents en charge d’un territoire donné,
- d’établir des relations de confiance avec la population ;
• le rappel de la doctrine concernant les contrôles d’identité, dont la finalité n’est
pas le contrôle social ;
• une réflexion sur les modes d’affectation des policiers : la présence de policiers
plus âgés et aguerris dans les secteurs difficiles permettrait peut-être d’apaiser les
tensions. Les jeunes sont certes formés, mais ils n’ont pas l’expérience professionnelle et
personnelle permettant de démêler les situations conflictuelles, tendues et dangereuses.
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7.4. L’accueil des immigrés et la gestion de l’immigration
en lien avec les collectivités locales11
Les quartiers les plus pauvres des villes sont les premiers lieux d’accueil des familles qui
arrivent en France et deviennent souvent, pour de nombreuses années, le lieu de
résidence des familles installées. Le contrat d’accueil et d’intégration ne répond pas aux
besoins de formation à la citoyenneté et aux modes de vie en France, ni aux besoins
linguistiques. Sa mise en place a entraîné une forte diminution des moyens financiers
pour les actions existantes. Certains groupes fondamentalistes tirent profit de cette
absence et de cette vacuité.
Nous connaissons mal les évolutions des populations et leurs modes de pensée… des
clichés sont véhiculés sur les habitants des cités et c’est source de malentendus voire de
conflits, alors qu’il s’agit souvent de gens « dépaysés » qui peinent à percevoir nos
usages et à les comprendre.
Au-delà des rattrapages économiques, de logement, éducatif, l’enjeu pour ces quartiers
et leurs habitants est donc aussi culturel.
Le CNV propose :
• que la nouvelle agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (dans
laquelle est fusionné l’ancien FASILD), l'ANCSEC, ré-apprécie ses priorités au regard
de la dernière étude de l’Insee qui démontre la concentration des immigrés
dans trois régions principales et qu’elle redéploie ses priorités, ses effectifs et ses
moyens pour faire face aux besoins, avec les collectivités territoriales concernées, tout en
recherchant un accueil plus solidaire et plus varié sur l’ensemble du territoire ;
• que l’on garantisse une offre de services suffisante pour les nouveaux
arrivants en matière de formation linguistique, d’initiation à l’histoire, aux modes de vie,
aux droits et devoirs dans notre pays ;
• que soit créé un lieu ou un pouvoir d’interpellation des autorités locales pour
recentrer leur attention sur les difficultés qui naissent autour des conflits liés à
l’hospitalité et ses usages, la vie de voisinage ;
• que soient favorisés des projets locaux qui permettent :
- de réunir des modèles positifs d’intégration et d’émancipation et d’imaginer des projets
conjointement avec eux ;
- de recréer de la mixité filles-garçons ;
- de faire le choix de vivre en France.
11
« Trois régions métropolitaines rassemblent près de 60% des immigrés en 2004/2005. Près de quatre
immigrés sur dix résident en Ile-de-France où un habitant sur six est immigré. Rhône-Alpes et Alpes-Côte
d’azur suivent loin derrière (entre 9 et 10% dans chacune des régions. ». In. Enquêtes annuelles de
recensement 2004 et 2005. Insee - août 2006
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8. Conclusions
Pour conclure, le CNV souligne que l’ensemble de ces propositions, dans ces quatre
domaines déterminants et « sensibles », se doivent d’être abordées dans leur complexité
et politiquement. Les projets et leurs contenus doivent avoir la primauté sur les
dispositifs ou les structures. Il s’agit de chantiers qui ne peuvent se cantonner à une
gestion « administrative » ou procédurale.
Le CNV souhaite insister fortement sur l’esprit et la méthode qui devraient être employés
pour agir, comme il l’avait déjà fait en novembre 2005 dans un communiqué rendu
public :« Le débat ne peut-être mené en chambre ni entre spécialistes patentés. Ni les
habitants des quartiers, ni les jeunes des villes, ni la plupart des acteurs de terrain ne
comprendraient une réponse qui ne se présenterait que comme un train de mesures plus
ou moins répressives ou d’opportunités ».
Les actions soutenues par l’Agence nationale de rénovation de l’habitat (ANRU) sur
l’amélioration du cadre de vie, du logement, de l’espace public, qui mobilisent de
puissants moyens, ne vont pas régler les questions identifiées de décrochage, de perte
de repères, d’échec scolaire, d’inégalités, de discriminations. Elles doivent cependant
contribuer positivement à l’amélioration de la vie des habitants de ces cités et constituer
un signe fort de la volonté de transformation. Il faut aussi penser le projet urbain, le
projet social et le projet économique comme relevant d’une même démarche de projet,
sauf à affaiblir le sens et l’impact d’actions pensées trop sectoriellement et de mettre en
cause leur efficacité.
Néanmoins, répondre aux émeutes urbaines va bien au-delà : cela exige de mobiliser les
moyens de droit commun pour faire face aux problèmes de l’ensemble du territoire et de
réformer des « systèmes » qui produisent eux-mêmes pour partie les difficultés :
- financements inadaptés aux besoins des territoires ;
- loi lolf – qui sous-couvert de rationalisation budgétaire – fait disparaître l’idée de solidarité
nationale - et affecte les moyens sans prendre en compte l’investissement dans un projet
partenarial ;
- affectation des personnels sans projet d’institution, d’établissement, ni territorial…
- mise en place d’une stratégie de suivi pour une égalité des chances dans l’accès à
l’emploi.
Les émeutes de novembre 2005 sont un symptôme fort. Le piège serait que l’on reste
dans une logique purement répressive ou en prenant des mesures sans efficacité directe
avec les problèmes posés. On produirait de la violence contre de la violence et une
spirale d’aggravation. Le piége serait aussi de penser que les problèmes des cités ou
territoires pauvres doivent être réglés à part – et que les solutions qui valent pour les
villes riches ne valent pas pour les villes pauvres et leurs populations.
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Liste des participants au groupe de travail12
Co-présidentes
• Mme. Bénédicte MADELIN, directrice de Profession Banlieue
• Mme. Françoise NICOLAS, maire de Vandœuvre-les-Nancy, première vice-présidente de
la communauté urbaine du Grand Nancy
Personnalités auditionnées
• Mr. BERESTESKY, directeur de la Fondation 93
• Mr. Pierre CARDO, Député-Maire de Chanteloup-Les-Vignes, président du rapport CNV
« Mouvements collectifs »
• Mme. INCORVAIA, responsable Boutique de quartier Paul Bert, à Aubervilliers
• Mr. Yazid KHERFI, co-auteur de l’ouvrage « Quand les banlieues brûlent - Retour sur les
émeutes de novembre 2005 », ancien membre du CNV
• Mme. Marie-Anne GALAZKA, directrice du service DEFI, communauté d’agglomération
de Clichy-sous-Bois/Montfermeil
• Mr. Samir MIHI, porte parole du collectif AC-le feu
• Mme. Catherine MONTIEL, commissaire divisionnaire, chef d’état-major de la sécurité
publique des Yvelines
Membres du CNV
• Mme. Colette CASSINI, principale du collège des Pyramides à Evry
• Mr. Pierre CARDO, député des Yvelines, maire de Chanteloup-les-Vignes
• Mme. Marie-Pierre de LIEGE, secrétaire générale du CNV
• Mr. Jean FREBAULT, président de la 5ème section du conseil général des Ponts et
chaussées
• Mr. Jean-Amédée LATHOUD, procureur général, cour d’appel de Versailles
• Mr. Xavier LEMOINE, maire de Montfermeil, président de la communauté
d’agglomération
• Mr. Claude MARIUS, chargé de mission UNSA
• Mme. Etiennette MONTANANT, secrétaire fédérale FSU
• Mr. Jean-Marie PETITCLERC, directeur de l’association « Le Valdocco », membre du CES
de l’ANRU
• Mr. François PUPPONI, maire de Sarcelles
• M. Luc RUDOLPH, directeur des services techniques et logistiques, président de l’ATSC,
Ministère de l’intérieur (Police Nationale)
• M. Etienne VARAUT, représentant l’inter-réseau des professionnels du développement
social et urbain (IRDSU)
Coordonnatrice et rapporteur : Mme Claudine BANSEPT, chargée de mission CNV
Invités du CNV
• Mr. Pierre-Marie ADAM, directeur du cabinet de Mme Françoise Nicolas, maire de
Vandœuvre-les-Nancy
• Mr. Jean-Loup DRUBIGNY, directeur du programme « URBACT »
• Mr. Sylvain GUILLOT, assistant de Mr. Maurice Charrier, maire de Vaulx-en-Velin,
vice-président du CNV
• Mr Eric LENOIR, chargé de mission, délégation interministérielle à la ville
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Séances du 12 mai, 19 Juin, 14 septembre, 16 octobre 2006.
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