penser la terre - paula de la cruz textiles
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PENSER LA TERRE A vision of earth 224 224 PARIS BADEN-BADEN AMAZONIE PENSER LA TERRE PARIS BADEN-BADEN AMAZONIE YOUR PERSONAL COPY Décembre 2015 Couv 224 Dos 12.5-EASY.indd Toutes les pages BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 10/11/2015 11:20 AFMAG224_001.402023_AFMAG224_MAG.4169124.pgs 10.11.2015 11:21 CM00 - HR 207.5x260.0mm Contributeurs Livia Firth Texte pour «Embrasser la terre». Directrice artistique de Eco-Age, une société de consultant en développement durable et créatrice du Green Carpet Challenge®. Sa citation préférée : deux lui tiennent à cœur. L’une de Martin Luther King qui dit que nous commençons à mourir le jour où nous gardons le silence sur ce qui nous importe. Et l’autre était sur un autocollant qu’on lui a donné il y a des années à Venice Beach : «Arrête de râler et lance une révolution». On ne peut pas sous-estimer l’impact d’une prise de parole ou d’une mini-révolution quotidienne, qui démarre par ce que l’on mange ou ce que l’on porte. Text for “Embracing the Earth.” Creative Director of Eco-Age, the sustainability brand consultancy and founder of the Green Carpet Challenge®. Her favorite quote: There are two quotes which she keeps to heart. One is from Martin Luther King, who once said that we start to die the day that we become silent about the things that matter to us. And the other is from a sticker someone handed her on Venice Beach years ago which read “Stop bitching and start a revolution.” She passionately believes in being vocal and taking action, starting with what you eat and what you wear. Paula de la Cruz Texte, illustration et photo pour «Margaret l’Amazone». Journaliste horticole et illustratrice botanique. Trois synonymes de ce reportage : forêts sous les eaux, dessiner des orchidées depuis un canoë, dormir dans un hamac. Et un souvenir : naviguant sur les eaux calmes et noires, elle a eu le vertige en regardant le refet des arbres. On ne lui enlèvera pas de l’esprit que c’était comme marcher sur la cime des arbres… Un livre à emporter : In Search of Flowers of the Amazon Forest de Margaret Mee. Un flm à (re) voir : Flor da lua de Malu de Martino, un documentaire sur Margaret Mee. Text, illustrations and photographs for “Margaret Mee, the Amazonian.” Horticultural journalist and botanical illustrator. Three experiences synonymous with this trip: fooded forests, sketching orchids from a canoe, sleeping in a hammock. A memory: navigating on water so calm and black she got vertigo watching the refection of trees. She kept thinking it was like walking on treetops… A book to bring: In Search of Flowers of the Amazon Forests, by Margaret Mee. A movie to watch: a documentary about Margaret Mee—Flor da lua by Malu de Martino. Vincent Mercier Photo pour «Paris touche terre en 10 raisons». 100% photographe, depuis toujours, partout, tout le temps ; l’architecture, le paysage, des portraits ; des publications dans AD, Elle Décoration et The Good Life… Trois synonymes de ce reportage : étonnant, rassurant, engageant. Et un souvenir : l’instant où l’ibis rouge s’est posé à mes côtés dans la serre tropicale à Vincennes, magique, fragile, essentiel. Un livre à emporter : Le Manuel du guerrier de la lumière de Paulo Coelho. Photo for “Paris: cultivating the future, 10 highlights.” Three words synonymous with the article: surprising, reassuring, compelling. A memory: when a red ibis landed next to me in the tropical greenhouse of Vincennes; magical, fragile, essential. A book to bring: Manual of the Warrior of Light by Paulo Coelho. © Maxime Antonin - Will Whipple - Vincent Mercier - Romas Foord François Simon Texte pour «Baden-Baden, en excellents thermes». Il jongle avec les méridiens et les mots, en fait une marelle soyeuse : terre/ciel… Trois synonymes de ce reportage : apaisement, sérénité, serviette éponge. Et un souvenir : le regard de Sarah Moon est une sorte d’énigme poétique que les mots ont un mal de chien à suivre. Ce fut un encouragement constant. Un flm à (re)voir : L’Année dernière à Marienbad (Alain Resnais, 1961). Text for “Baden-Baden, thermal energy.” Three ideas synonymous with this article: soothing, serenity, terry towel. And a memory: Sarah Moon’s eye is like a poetic enigma that words have a devil of a time trying to follow. It was a constant encouragement. A flm to see: Last Year at Marienbad (Alain Resnais, 1961). 40 224AFM038040-ES.indd 40 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 10/11/2015 13:00 AFMAG224_040.402023_AFMAG224_MAG.4169424.pgs 10.11.2015 13:03 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman L’orchidée Scuticaria, courante dans les clairières amazoniennes d’altitude. The Scuticaria orchid, commonly found in clearings at higher altitudes in the rainforest. 146 224AFM146159-ES.indd 146 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:04 AFMAG224_146.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:09 CM00 - HR 195.0x260.0mm © Otis Imboden / National Geographic Creative La botaniste Margaret Mee avec des femmes maku, Brésil, juillet 1967. Botanist Margaret Mee with Maku Indian women, Brazil, July 1967. Margaret l’Amazone TEXTE, ILLUSTRATION ET PHOTO Paula de TRADUCTION Laurent Slaars la Cruz 147 224AFM146159-ES.indd 147 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:04 AFMAG224_147.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman Une ferme à l’ombre des palmiers açaï sur les rives du Rio Negro, près de Novo Airão. Farm with açaï palms on the bank of the Rio Negro, near Novo Airão. u cours des années 1960 et jusqu’en 1988, Margaret Mee, célèbre illustratrice botanique britannique, a exploré les forêts inondées d’Amazonie tout au long du Rio Negro, le plus grand feuve à eaux noires du monde, à la recherche de leur flore extraordinaire. Pour l’archipel fuvial des Anavilhanas (la plus grande étendue d’eau douce du globe) et ses environs, cette période fut marquée par un phénomène de déforestation sans précédent. Les illustrations de Margaret Mee, ses croquis et ses carnets, dont la plupart sont aujourd’hui conservés à Kew Gardens ou par quelques collectionneurs particuliers, opposaient alors les merveilleuses beautés d’un des milieux naturels les plus riches de la planète aux ravages dûs à la main de l’homme. Journaliste horticole et illustratrice botanique, Paula de la Cruz est partie à la découverte des feurs qui ont inspiré les planches de Margaret Mee, en se penchant plus particulièrement sur l’une d’entre elles : la rare et insaisissable Selenicereus wittii (reine-de-la-nuit), une variété de cactus qui ne feurit que le temps d’une nuit, une fois tous les deux ou trois ans. N otre bateau s’éloigne paisiblement du petit ponton de Novo Airão, une ville située à 195 km au nord-ouest de Manaus, sur le Rio Negro. Après quelques tambaquis grillés en guise de déjeuner et une brève escale de ravitaillement, je ne suis pas fâchée de laisser derrière moi la terre ferme et la chaleur suffocante de l’après-midi, que remplace désormais la brise fraîche montant du feuve. Insensiblement, la lumière commence à se teinter d’un bleu de cobalt nuancé de rouge, qui ne fait que rendre plus lumineuse encore l’incroyable gamme de verts de la forêt d’Anavilhanas. Mon compagnon de voyage n’est autre que Gilberto Castro, connaisseur passionné des grands espaces amazoniens, qui accompagna Margaret Mee pour sa dernière exploration dans les environs, en mai 1988, six mois avant l’accident de voiture qui devait lui coûter la vie dans la campagne anglaise. Quelque peu marqué par les ans, le teint hâlé par une vie passée à arpenter les contrées subtropicales, Gilberto ressemble à l’un de ces personnages louches imaginés par John le Carré. L a chaleur étouffante, d’une lourdeur presque tangible, arrive dans la conversation. «Margaret paraissait frêle et chétive, mais elle restait des heures à peindre en plein soleil, se souvient-il. Son esprit la conduisait là où son corps ne pouvait manifestement plus aller.» Nous continuons de descendre le fleuve en direction de la petite maison de Gilberto, que Margaret avait une fois utilisée comme base arrière pour explorer les igarapés environnants, ces canaux naturels inondés à la saison des hautes eaux entre avril et juillet, et qu’assèche totalement la décrue du fleuve entre septembre et janvier. Je tente quelques questions sur les essences d’arbres, mais Gilberto est loin d’être impressionné. «Autrefois, ces forêts renfermaient des arbres magnifiques, m’explique-t-il, mais la plupart ont été coupés pour le bois. Une grande partie de ceux que vous voyez ici sont de pousses récentes». Les populations locales, comme les caboclos (métis descendant d’indigènes et de colons portugais), vivent de tout ce qu’elles peuvent tirer de la forêt, abattant des arbres jusque dans les zones protégées. Margaret appréciait les caboclos parce qu’ils savaient où poussaient les plantes qui l’intéressaient, tout en leur reprochant ce rapport vorace à leur propre nature. S urplombant la canopée, les gigantesques palmiers buriti semblent veiller sur toute vie prenant forme sous leurs palmes. Leurs fruits huileux, riches en vitamine A, sont l’une des principales sources de nourriture de la région amazonienne. Éparpillées entre les buriti, d’autres variétés de palmiers, les açaï ou les jauari, hérissés d’épines, sont utilisées pour la fabrication de paillasses et de hamacs. Gilberto pointe le doigt vers 148 224AFM146159-ES.indd 148 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:04 AFMAG224_148.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm L’orchidée Cattleya comprend une soixantaine d’espèces allant du vert à l’orangé, en passant par le violet. There are some 60 species of the Cattleya orchid, ranging from green to orangeish or purple in color. 149 224AFM146159corr2-ES.indd 149 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 10/11/2015 12:59 AFMAG224_149.402023_AFMAG224_MAG.4169425.pgs 10.11.2015 13:04 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman La prolifique orchidée Dichaea aux tiges plates et abondamment feuillues. The prolific Dichaea orchid with flat stems and abundant foliage. 150 224AFM146159corr2-ES.indd 150 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 10/11/2015 12:59 AFMAG224_150.402023_AFMAG224_MAG.4169425.pgs 10.11.2015 13:04 CM00 - HR 195.0x260.0mm le sommet d’un palmier açaï où un japiim au plumage jaune et noir et aux yeux bleus s’est mis à chanter. À l’approche de notre destination, le soleil inonde le ciel d’un rouge cuivré qu’on dirait emprunté aux eaux du feuve. Seule la forêt sépare de son trait ombreux ces deux images en miroir. Nous tendons nos hamacs sur le pont du bateau et, avant même que l’obscurité soit totale, les murmures de la forêt m’endorment comme une berceuse. D ès le lever du soleil, Gilberto et moi sautons dans un canoë pour explorer de plus près les igarapés avoisinants. L’eau sombre est si vitreuse et immobile que tout un entrelacs de troncs, de lianes et de broméliacées géantes s’y refète dans un noir d’encre comme sur un test de Rorschach. Si je dirige mon regard vers l’avant, l’impression de fotter sur le sommet de la canopée me donnerait presque le vertige. Un couple d’ibis d’un vert irisé rompt ce silence que seuls peuvent inspirer les mystères de la nature ou de la religion. Nous nous enfonçons à travers un igarapé étroit et sombre, à la recherche du cactus que Gilberto a repéré grâce à son GPS, et que nous trouvons entortillé autour du tronc lisse d’un pracaxy : son feuillage prend naissance sous la surface de l’eau et s’élève sur quelques mètres au-dessus de nos têtes. Les feuilles de la Selenicereus wittii sont d’un vert profond, nuancé de carmin aux endroits les plus exposés. Non loin des trois gros boutons, une feur refermée a dû s’épanouir la nuit précédente. Margaret Mee avait recherché ce cactus pendant près de dix ans avant d’en découvrir plusieurs spécimens en 1977. La plupart étaient presque fanés, mais l’un d’eux portait un fruit qui permit de déterminer sa période de foraison. En mai 1988, lors de sa dernière expédition, elle trouva un spécimen qui arborait dix-sept boutons, et attendit jusqu’à minuit pour avoir le privilège d’en peindre un dès son ouverture. «On est tous allés dormir vers une heure du matin, se souvient Gilberto, mais Margaret est restée à peindre jusqu’au petit jour». Dans ses carnets, elle décrit avec soin le moment fugace et extraordinaire où la corolle blanche s’ouvre presque d’un coup, révélant une grande feur au parfum suave. «Tous les autres boutons se sont ouverts en l’espace de quelques jours, a-t-elle noté. La nature n’est jamais lente ni hésitante à se reproduire, même dans ce qu’elle nous réserve de plus rare et de plus subtile.» Je passe le reste de la journée sur le bateau, à dessiner. «Margaret ne terminait jamais une peinture in situ», explique Malena Baretto, son ancienne voisine de Santa Teresa (le quartier bohème de Rio de Janeiro), devenue par la suite son élève et amie. «Elle réalisait d’abord un croquis au crayon qu’elle rehaussait à la gouache, mais elle achevait toujours ses peintures chez elle. Pour elle, peindre était également un exercice de mémoire». L e lendemain matin, nous quittons la maison de Gilberto par le Rio Cueiras et décidons d’explorer un igarapé particulièrement étroit qui relie le Cueiras au Rio Negro. Des strates de pollen jaune scintillent à la surface de l’eau dès qu’un rayon de soleil s’infiltre à travers les branchages. Nous laissons derrière nous un arapari colonisé par d’opulentes orchidées Brassavola et Scuticaria. Une odeur de pomme et de thé s’intensifie à mesure que la température s’élève. Alors que nous passons sous la voûte majestueuse que forme au-dessus de nos têtes la ramure des fromagers géants, je pourrais presque toucher les racines des philodendrons qui prospèrent sur leur tronc. Nous débouchons ensuite dans une sorte de clairière aquatique bordée d’arbres morts, pareils à ceux que Margaret représenta recouverts d’orchidées. Un cattleya violet s’accroche au sommet, mais la plupart des branches ont été colonisées par des anthuriums au parfum délicatement vanillé. Au milieu de cet inextricable entremêlement de branches et de lianes, nous apercevons les grappes forales d’une orchidée Dichaea, suspendues au-dessus de nous comme de petits soufflets d’accordéon. «Lorsqu’elle représentait la forêt à l’arrière-plan de ses peintures, Margaret faisait en sorte de replacer les espèces dans leur habitat naturel», précise Tony Morrison, qui l’accompagna dans sa quête de la reinede-la-nuit et édita ses carnets et souvenirs. «Son talent était double. Il lui suffsait d’observer une plante pour la dessiner parfaitement et rendre fdèlement la riche harmonie de ses couleurs.» A vant d’atteindre Manaus, nous faisons une halte à proximité d’une petite plantation de palmiers açaï, où s’épanouissent d’innombrables orchidées Galeandra. La chaleur accablante rend encore plus appréciable la fraîcheur acidulée du jus de cupuaçu (un proche cousin du cacao) qui nous est offert. En remontant dans le canoë pour la dernière fois, je me rends compte que je n’ai guère passé de temps sur la terre ferme, ces derniers jours, et qu’elle ne m’a pas manqué. Il en va de même pour ce lézard que je vois sauter le long de notre embarcation à la poursuite d’une araignée. Je ne sais si je reverrai un jour la feur nocturne de la Selenicereus wittii, mais une chose me paraît certaine : si j’ai pu contempler les merveilles forales des Anavilhanas, c’est en partie grâce aux efforts incessants de Margaret Mee pour les préserver. «Je sais que mon travail ne mourra pas avec moi, avait-elle prédit au cours de sa dernière expédition en Amazonie. Où que je me trouve, je tenterai d’infuencer ceux qui détruisent notre planète, afn qu’ils lui laissent une chance de survivre». Palmiers açaï (Euterpe oleracea), buriti (Mauritia flexuosa) et jauari (Astrocaryum jauari). Açaï (Euterpe oleracea), buriti (Mauritia flexuosa) and thorny jauari (Astrocaryum jauari) palms. 151 224AFM146159-ES.indd 151 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:05 AFMAG224_151.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman Margaret Mee, the Amazonian T hroughout the 1960s up to 1988, the renowned British botanical illustrator Margaret Mee explored the Amazon’s flooded forests along the Rio Negro—the largest blackwater river in the world—in search of their extraordinary fowers. This was an unprecedented period of deforestation for the Anavilhanas Archipelago—the world’s largest freshwater archipelago—as well as for its environs. Mee’s illustrations, sketches and diaries, which are now mainly at England’s Kew Gardens and with a few private collectors, vividly juxtaposed the beauty of one of the richest environments on earth against the destruction wrought by mankind. As a horticultural journalist and botanical illustrator, Paula de la Cruz set out to discover the fowers that inspired Mee’s botanical illustrations, and one in particular: the elusive moonfower cactus (Selenicereus wittii), which blooms every few years and only for one night. O ur boat departs lazily from a small pier near Novo Airão, a small town 195 kilometers northwest of Manaus, on the Rio Negro. After a lunch of grilled tambaqui fsh and a stop for supplies, I am happy to leave behind the staggering afternoon heat of land for the crisp river breeze. The light has begun to change slowly to a reddish cobalt blue that only makes the forests of Anavilhanas brighter and greener. I am traveling with Gilberto Castro, the same enthusiastic outdoorsman who helped Margaret Mee on her last expedition to this area in May 1988, six months before she died in a car accident back in England. Now older, and permanently tanned from a lifetime spent on the equator, Gilberto has the air of a shady character out of a John le Carré novel. W e discuss the heat, which feels like a solid, palpable element. “Mee seemed frail, but she would stay hours in the sun painting,” he recalls. “Her mind took her where her body obviously couldn’t go.” We continue downriver toward Gilberto’s little house, which Mee once used as a base to explore the surrounding igarapés—channels that are fooded from April to July, during the high-water season, but which are completely dry when the river is low, from September to January. I inquire about tree species, but Gilberto is unimpressed. “These forests were once populated with magnificent trees,” he explains, “but they have mostly been cut for timber. A lot of what you see here is secondary growth.” Locals, like the Caboclos (people of mixed indigenous and Portuguese descent who make a living from whatever they can get from the forest), cut down trees, even in protected areas. Mee liked Caboclos because they knew where the plants she was interested in grew, but she also regretted their voracious relationship to their own environment. S tanding tall above the forest horizon, buriti palms seem to supervise all life that happens beneath them. Their oily fruits are one of the most important food sources in the Amazon and are high in vitamin A. Sprinkled between buritis, there are açaï and thorny jauari palms, which are used to make mats and hammocks. Gilberto points out a bright yellow and black japiim bird with blue eyes singing on top of an açaï. As we reach our destination, the sun stains both the sky and the Rio Negro copper red, with only a black line of forest separating the two mirror images. We hang our hammocks on the boat’s deck, and right before dark the sounds of the forest are a lullaby easing me to sleep. A s soon as the sun rises, Gilberto and I jump into a canoe to explore the surrounding igarapés. We glide on glassy blackwater so still, it creates a Rorschach blot of trunks, lianas and giant bromeliads. If I focus on the view ahead, I almost get vertigo from a feeling of foating on treetops. A pair of iridescent green ibises breaks this silence that only extraordinary nature, or deep religiosity, can inspire. We penetrate a narrow and very dark igarapé where Gilberto has mapped the moonflower cactus with his GPS, and find it growing around the smooth trunk of a tall pracachy tree, from below water to a few meters above us. The moonfower’s leaves are deep green with tints of crimson where they get more exposed to light. It has three buds and a closed flower, which most probably had opened the night before. Mee looked for a moonfower cactus for almost a decade. She found some specimens in 1977, but most of them were dying, except for one that had a fruit, which made her able to guess its fowering season. In May 1988, she found a plant with about 17 buds, and waited until midnight to paint it. “We all stayed until about 1am,” Gilberto recalls, “but Margaret painted it almost until sunrise.” In her diaries, Mee describes the mesmerizing moment when the white petals of the moonfower began to open quickly, revealing a large and sweetly fragrant fower. All the other buds “opened quickly within a few days of each other,” she noted. Nature is never slow or hesitant to reproduce, even its most delicate and rare beings. I spend the rest of the day sketching on the boat. “Margaret never painted a full plant in situ,” says Malena Barretto, Mee’s disciple and friend since they met as neighbors in 1976, in Santa Teresa, Rio de Janeiro’s bohemian neighborhood. “She sketched with pencil and added some gouache, but Margaret always fnished her paintings at her house,” says Malena. “For her, painting was a memory exercise, as well.” 152 224AFM146159-ES.indd 152 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:05 AFMAG224_152.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm La Selenicereus wittii, variété de cactus aux feuilles vert profond, ne fleurit que le temps d’une nuit. The Selenicereus cactus, with deep green leaves, blooms only for one night. 153 224AFM146159corr2-ES.indd 153 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 10/11/2015 12:59 AFMAG224_153.402023_AFMAG224_MAG.4169421.pgs 10.11.2015 13:03 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman Fromager géant (Bombax munguba). Giant mungubeira (Bombax munguba). Orchidées Brassavola. Brassavola orchids. T he following morning, we leave Gilberto’s house in the afternoon for the Rio Cueiras, and we decide to explore a narrow igarapé that connects the Cueiras with the Rio Negro. Yellow pollen shimmers on the water’s surface with an occasional ray of sun that flters through the trees. We pass an arapari tree ladened with Brassavola and Scuticaria orchids. The scent of apples and tea flls the air, intensifying as the day grows warmer. As we pass under giant mungubeira trees forming arches above us, I can almost touch the roots of philodendrons growing on their canopies. After this, we reach a clearing with a group of dead trees, similar to those Mee portrayed full of orchids. A violet Cattleya orchid is holding on just at the top, but most of the branches have been colonized by vanilla-scented anthuriums. Among the anthuriums, we spot a Dichaea orchid, hanging down like a miniature accordion. “Margaret’s paintings with a forest background were most certainly a conscious attempt to place fowers into their native habitats,” explains Tony Morrison, who edited Mee’s diaries and joined her on the moonfower expedition. “Her talent was a combination of being an accomplished draftsperson plus her ability to match colors accurately, just by looking at a plant. B efore reaching Manaus, we stop by a tiny farm planted with açaï palms full of Galeandra orchids. It’s very hot and we welcome a cool glass of tart cupuaçu juice, a relative of cacao. Then we jump into the canoe for the fnal time. I haven’t been on land much for the last few days and now realize I haven’t missed it. Nor does a lizard skipping across the water, as it chases after a spider alongside our canoe. I wonder if I will ever see a moonfower again, but mainly I know that all the fowers I have seen in Anavilhanas are still there in small part because of Mee’s efforts to preserve them. “I know my death will not be the end of my work,” Mee said during her last visit to the Amazon. “Wherever I go, I will try to infuence those who are destroying our planet, so the earth will have a chance to survive.” 154 224AFM146159-ES.indd 154 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:05 AFMAG224_154.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm Le vert profond de la forêt tropicale avant que le coucher de soleil ne l’embrase de couleurs rouges et cuivrées. The shades of green in the forest before sunset, when everything turns copper red. 224AFM146159-ES.indd 155 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/2015 11:05 AFMAG224_155.402023_AFMAG224_MAG.4159319.pgs 09.11.2015 11:10 CM00 - HR 195.0x260.0mm Correspondances comme un roman Otter (La Loutre), le bateau de Gilberto Castro Botanical cruise aboard the Otter Every spring, Gilberto Castro and Dulce Nascimento, a botanical illustrator from Rio de Janeiro, guide guests on botanical journeys to Anavilhanas Archipelago, on Gilberto’s boat, the Otter. The tenday journey follows an itinerary close to the one Margaret Mee took on her last expedition. This is a great opportunity to explore the region in depth, starting in Manaus and ending in Jaú National Park. The Otter is also available for private trips. © Paula de la Cruz - Gilberto Castro - Daniel Pinheiro Tous les ans au printemps, Gilberto Castro et Dulce Nascimento, un illustrateur botanique de Rio de Janeiro, embarquent quelques participants sur l’Otter (le bateau de Gilberto) et les entraînent dans des parcours botaniques à travers l’archipel fluvial des Anavilhanas. L’itinéraire d’une dizaine de jours reprend à peu de choses près celui de la dernière expédition de Margaret Mee. Il n’y a pas de meilleur moyen pour explorer en profondeur la région entre Manaus et le Parc national de Jaú. L’Otter peut également être loué pour des sorties privées. OTTER Tél. +55 92 99148 5957. [email protected] et www.dulcenascimento.com.br Hotel Novotel Manaus est la première étape incontournable pour des raisons aussi bien logistiques que culturelles. Le Novotel est proche du centre historique et son personnel très compétent sollicite les meilleurs opérateurs pour l’organisation des activités. 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Chaque semaine depuis Amsterdam, KLM dessert Manaus (via Rio de Janeiro et São Paulo) par 13 vols en partage de codes avec GOL. Every week from Amsterdam, KLM has 13 fights on a codeshare basis with GOL to Manaus (via Rio de Janeiro and São Paulo). Aéroports d’arrivée Arrival airports — Aéroport de Manaus. À 18 km. Tél. +55 92 3652 1210. — Aéroport de Brasilia. À 11 km. Tél. +55 61 3364 9000. — Aéroport de Cayenne. À 17 km. Tél. +(0)594 29 97 00. Bureaux AIR FRANCE KLM AIR FRANCE KLM offices Aux aéroports. Réservations Bookings — Depuis la France : Tél. 3654. — Depuis l’étranger : Tél. +33 (0)892 70 26 54. Location de voitures Car rental Hertz, à l’aéroport de Manaus. Tél. +55 92 3652 1421. À lire Further reading In Search of Flowers of the Amazon Forests Margaret Mee, Nonesuch Expeditions. The Flowering Amazon: Margaret Mee Paintings from the Royal Botanic Gardens, Kew Natural Wonders Press. À voir Film Margaret Mee e a Flor da Lua, Malu de Martino. 224AFM146159corr-ES.indd 159 BLACK YELLOW MAGENTA CYAN 09/11/15 17:09 AFMAG224_159.402023_AFMAG224_MAG.4167849.pgs 09.11.2015 16:55 CM00 - HR 195.0x260.0mm