Armes, production et commerce d`

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Armes, production et commerce d`
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09/12/2010 |
Armes, production et commerce d'
Jusqu'aux années 1860 et contrairement au reste de l'Europe, les cantons, puis la Confédération n'eurent pas
de production d'Armes, spécialisée ou manufacturière, faute d'une demande forte et d'un cadre politicoinstitutionnel veillant à un Armement unifié. Dans le commerce d'armes, les importations primèrent dès les
guerres de Bourgogne (1474-1477) et la Suisse n'eut de balance positive que dans les années 1915-1918,
1923-1959, 1972-1977 et 1988. Jusqu'à la fin du XIXe s., la demande intérieure était si faible et irrégulière que
seule une production occasionnelle, décentralisée et artisanale, a pu se développer afin de satisfaire des
demandes locales. Ni le mercenariat, ni les sociétés de Tir ne modifièrent cet état de fait. Les tireurs, vu leur
respect de la tradition, n'avaient guère besoin d'armes modernes; les entrepreneurs militaires et les
mercenaires économisaient sur l'équipement, qu'ils devaient payer eux-mêmes et se procurer, dès le milieu
du XVIIe s., à l'étranger, auprès de leurs employeurs. L'exportation, bien faible, et le transit furent fortement
réduits du XVe au XIXe s., d'abord par la Diète, puis par le Conseil fédéral.
1 - Avant 1800
Armures et armes blanches étaient produites dans les cantons par des forgerons (Artisanat des métaux). Leur
fabrication n'occupa jamais une place importante et fut fortement concurrencée dès le XIVe s. par la
Lombardie (Milan), de 1470 à 1600 par la Bavière (Nuremberg, Augsbourg, Kempten et Passau) et par
Solingen (Rhénanie-du-Nord-Westphalie). Cette dernière place livra des baïonnettes dès le XVIIIe s. Les armes
à feu individuelles provenaient initialement de Brescia, dont l'importance se maintint pour les cantons
catholiques et les Grisons jusqu'en 1770, date à laquelle commencèrent les importations de fusils de SaintEtienne. De 1540 à 1590, les cantons protestants se procurèrent leurs arquebuses et leurs mousquets
principalement à Nuremberg et à Augsbourg, dès 1590 à Suhl (Thuringe), de 1630 à 1770 occasionnellement
dans cette ville mais surtout à Liège (qui resta fournisseur jusqu'en 1870). Jusque vers 1600, on importait
arquebuses et mousquets entiers, par la suite seuls les canons et les culasses, qui étaient montés et ajustés
par des armuriers indépendants ou par les employés des Arsenaux. Dans le Jura, où aucun règlement
corporatif n'interdisait d'exercer occasionnellement le métier d'armurier, ce travail fut aussi exécuté par des
horlogers, des serruriers, des forgerons et des ferronniers. Après 1710-1720 la demande diminua fortement.
Les arsenaux se contentèrent de transformer de vieux mousquets à mèche en fusils à platine à silex, de sorte
que l'armurerie périclita. Seule Berne, qui suivait une politique mercantiliste, tenta de développer une
production avec la manufacture de fusils d'Emanuel Wurstemberger, fondée à Worblaufen en 1713 et liquidée
en 1721. Au milieu du siècle, son plus important fournisseur sera Abraham Jaquet, de Vallorbe.
Au XVe s., l'artillerie était souvent butin de guerre. Les villes confédérées se procuraient des canons en
Lombardie et à Nuremberg, parfois elles passaient commande à des fondeurs itinérants originaires de ces
mêmes régions, puis à des fondeurs de cloches locaux. Seuls les Füssli purent se maintenir durablement dans
cette activité en produisant avant tout des canons et des mortiers (XVIe-XVIIe s.). Au XVIIIe s., des fondeurs
suisses connurent un succès européen, notamment les frères zurichois Johann Jakob et Johann Balthasar
Keller en France, le Schaffhousois Andreas Schalch en France et en Angleterre et cinq générations de la
famille Maritz de Berthoud, en France, aux Pays-Bas et en Espagne. En Suisse même, la production resta tout
à fait marginale. La fonderie Schalch à Schaffhouse ferma ses portes en 1752. Berne, le canton le plus actif,
fit refondre de vieux canons par Samuel Maritz, actif à Genève dès 1744, et par la fonderie de Friedrich Jakob
Bär à Aarau. Dès 1770, Berne, Zurich, Fribourg, Schaffhouse et Obwald commandèrent ces travaux à
Strasbourg, les autres cantons renonçant aux modernisations.
Auteur(e): Peter Hug / LD
2 - Après 1800
La République helvétique, les guerres napoléoniennes et la caisse militaire fédérale fondée en 1815 ne
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changèrent rien à la demande très réduite. La Diète n'accorda des subsides qu'en 1831 pour l'achat de
nouvelles carabines et en 1841 pour la transformation de vieux fusils à silex en fusils à percussion. Les
cantons continuèrent à satisfaire l'essentiel de leurs maigres besoins par des importations. Les armureries et
arsenaux montaient toujours les canons et culasses importés, réparaient ou transformaient les fusils. De 1817
à 1833, la Manufacture d'armes du Pont-d'Able près de Porrentruy fabriqua pour Berne des fusils entiers. En
1844, la Société militaire fédérale refusa, sur le conseil du futur conseiller fédéral Friedrich Frey-Herosé, la
création d'une fabrique fédérale et opta pour l'importation, moins chère. Pour les amorces, par contre, la
Diète conféra un monopole à une entreprise créée en 1842 à Deisswil près de Stettlen, installée à Köniz dès
1849. Rattachée dès 1848 au Département fédéral des finances, cette dernière produisit dès 1856 des
détonateurs, réadapta sa production en 1867 en fabriquant des douilles mais perdit son autonomie en 1869.
Des canons furent produits de manière occasionnelle par des fonderies, notamment par l'entreprise Bär à
Aarau, reprise en 1824 par Jakob Rüetschi. Elle produisit 210 canons jusqu'en 1845 puis fut confrontée à des
problèmes de qualité grandissants. En 1867, l'Etat se procura quelques canons auprès des frères Sulzer à
Winterthour, mais se fournit surtout en Allemagne et en Suède. La production de pièces d'artillerie par des
entreprises privées cessa en Suisse, hormis quelques commandes insignifiantes à Sulzer et Von Roll. En
1848-1849, les fabriques de machines Escher, Wyss & Cie à Zurich et Rieter à Töss s'essayèrent sans succès
à la production industrielle de fusils. En 1854 et 1856, le Département militaire fédéral (DMF) et le Parlement
refusèrent à nouveau la création d'une fabrique fédérale en préférant le montage final de pièces importées,
décentralisé dans les arsenaux cantonaux, les ateliers de Jules Manceau à Zofingue et l'entreprise von Erlach
& Co. à Thoune (plus tard W. von Steiger).
Après 1860, le nouveau chef du DMF, Jakob Stämpfli, imposa une politique d'armement nationale. La
Schweizerische Industrie-Gesellschaft (SIG), fondée en 1856 à Neuhausen, profita la première de ce
programme, notamment en 1869-1873 avec le fusil Vetterli. Stämpfli et l'inspecteur fédéral Rudolf Schmidt
instituèrent la production étatique de fusils et fondèrent en 1871 la fabrique fédérale d'armes de Berne. Des
Fabriques fédérales d'armement furent créées par la Confédération à Thoune, Altdorf (UR) et Wimmis. Par
ailleurs, il n'y eut guère d'industrie d'armement privée jusque dans les années 1920 et les exportations
étaient quasi nulles. Pendant la Première Guerre mondiale, seules certaines manufactures horlogères
produisirent pour l'Entente des composants de munitions. Après la guerre, du fait de l'interdiction de
production d'armement en Allemagne et d'une politique pro-industrielle de la Confédération, la technologie
allemande fut importée en Suisse vers 1920, ce qui permit la création d'entreprises exportatrices: dès 1923 la
future Oerlikon-Bührle, dès 1924 la Patronenfabrik Solothurn de von Steiger (dès 1929 filiale du RheinmetallKonzern allemand sous le nom de Waffenfabrik Solothurn) et dès 1921 l'usine d'aviation de Claude Dornier à
Altenrhein (Flug- und Fahrzeugwerke Altenrhein (FFA)). Après 1930, ces exportations suscitèrent de violents
débats politiques. L'échec de la conférence du Désarmement et une initiative populaire pour l'étatisation de
la production d'armement amenèrent à donner en 1938 à la Confédération (art. 41 de la Constitution) la
compétence de contrôler l'industrie privée d'armement et l'exportation de matériel de guerre. Pendant la
Deuxième Guerre mondiale, la Suisse en exporta pour environ un milliard de francs, essentiellement vers
l'Allemagne. En 1943, la Confédération construisit à Emmen une usine d'aviation.
En 1946-1949 une interdiction totale d'exportation fut en vigueur. Avec la guerre froide, les livraisons d'armes
vers des pays non communistes reprirent, notamment par Oerlikon-Bührle, sa filiale Hispano Suiza achetée en
1972 (D.C.A.), la Mowag de Walter Ruf (chars d'assaut) et la SIG (armes de poing). La tentative de développer
des avions de combat échoua dans les années 1950, la production de chars par la Confédération prit fin après
1970. Après le scandale Bührle, une initiative populaire pour interdire l'exportation d'armes échoua de peu en
1972 avec 49,7% de oui. La même année une loi sur le matériel de guerre (entièrement révisée en 1996)
remplaça l'arrêté fédéral de 1949. En 1992 et 1997 la Confédération réglementa l'exportation de biens
utilisables tant pour des buts civils que militaires. Une nouvelle initiative pour interdire l'exportation de
matériel de guerre échoua clairement en 1997 avec seulement 22,5% de oui.
Auteur(e): Peter Hug / LD
Références bibliographiques
Bibliographie
– W.L. Bernecker, T. Fischer, éd., Unheimliche Geschäfte, 1991
– P. Hug, Zur Geschichte des Kriegsmaterialhandels, 1996
– Armement et économie de guerre, 1997
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– S. Hauert, Abraham Jaquet (1724-1773), mém. lic. Lausanne, 1999
– Publ. CIE, 11.
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