Télécharger La Lettre - Académie d`Agriculture de France
Transcription
Télécharger La Lettre - Académie d`Agriculture de France
La lettre de l’Académie Académie d’Agriculture de France N°5 Janvier 201 2010 Éditorial Agenda du 1er trimestre 2010 2010 Les défis du 21ème siècle 6 janvier : Séance d’installation du nouveau Bureau. 13 janvier : La réduction des risques en agriculture après 2013. 20 janvier : Les insecticides en élevage. 27 janvier : Relations France-Ukraine dans le domaine de l'agriculture et de l'élevage. 3 février : Le loup en France. 10 février : Évolution et avenir de l’enseignement supérieur agronomique et vétérinaire. 10 février : Lignines. 10 mars : Biocarburants de seconde génération. 17 mars : Quelques enseignements d'un récent voyage d'études en Chine. 23 mars : Séance commune avec l’Académie des Sciences consacrée à la métagénomique. Cette séance se tiendra à l’Académie des Sciences. 24 mars : Les voies du renouveau de la viticulture languedocienne. 31 mars : L’hétérosis et son exploitation pour des progrès en agriculture. L’ère industrielle a permis un développement inédit des capacités humaines à utiliser les ressources terrestres grâce aux énergies fossiles et au progrès scientifique et technique. En moyenne, on vit bien mieux et plus longtemps qu’autrefois. Mais ce développement s’est fait sans souci des milieux naturels et des inégalités engendrées selon les régions du globe et au sein même des pays. Après avoir conquis notre planète, il nous faut apprendre à la gérer. Comment nourrir correctement tous les humains et permettre le développement des pays et des populations les moins avancés? Par quoi remplacer le pétrole ? Comment limiter l’effet de serre et le réchauffement du climat ? Comment vivre sans détruire les animaux, les plantes et les micro-organismes dont nous dépendons? Les hommes ne sont pas les premiers à modifier l’environnement global. Tout organisme vivant modifie son milieu en prélevant des éléments et en en rejetant d’autres ; ainsi l’oxygène et l’azote de notre atmosphère sont d’origine essentiellement biologique, comme aussi le charbon, le pétrole ou le gaz naturel. Mais cette fois, le changement se produit à l’échelle du siècle et non plus de millions d’années, et il nous affecte directement. Le changement n’est pas nécessairement la catastrophe, car nous avons la capacité scientifique et technique pour faire face à ces défis, mais il nous manque une volonté ferme de l’orienter dans la bonne direction, ce qui suppose une forme de gouvernance mondiale. On en perçoit des signes encore timides dans les négociations sur le climat. La conquête de la Terre se termine, mais l’aventure intellectuelle continue : apprendre à partager, gérer et recycler des ressources finies pour 9 à 10 milliards d’habitants, en gardant notre Terre belle, voilà un objectif stimulant pour de nombreuses sciences. Pour proposer un avenir attirant aux jeunes générations, il nous faut de l’imagination et de l’espérance. Avec la richesse qui est la sienne, notre Académie peut y contribuer avec efficacité. ____________________________________________________________________ "Il convient d'observer la nature et de ne la contrarier jamais, car s'il y a des principes dans l'art, il y a aussi des méthodes bonnes pour certains pays et qui ne peuvent convenir à d'autres...Tout est facile dans le cabinet, la plume à la main, derrière la charrue les choses changent de face ». A-A. Parmentier (Dictionnaire universel d'agriculture publié sous la direction de l'Abbé ROZIER en 1781) Bernard Saugier La vie de la Compagnie Élections à l’Académie Le nouveau bureau, élu le 9 décembre, est constitué de Guy Paillotin, Secrétaire perpétuel ; Jean-Paul Lanly, Trésorier perpétuel ; Bernard Saugier, Président ; Jean-François Morot-Gaudry, Vice-Président ; Christian Ferault, Vice-Secrétaire et Claude Sultana, Vice-Trésorier. Treize membres – dont cinq étrangers – ont été élus le même jour : Pierre Devaux et Daniel Dattée pour la section 1, Pierre Thivend (3), François Sigaut (4), Armand Chauvel (5), Dusko Ehrlich (6), Jean-Claude Flamant (7), Vincent Pétiard (8). Les nouveaux membres étrangers sont Christopher Prins, Filipe Graciosa de Figueiredo, Philippe Baveye, Pierre Dagnélie et Tomas Garcia Azcarate. Vingt trois correspondants rejoignent les rangs de notre Compagnie dont deux étrangers. Yves Chupeau, François Desprez et Pierre Morlon au titre de la section 1, Xavier Deglise et Antoine Kremer (2), Eric Palmer, Pierre Del Porto et Michel Bonneau (3), Henri Rouillé d’Orfeuil et Raphaël Larrère (4), Yves Gnanou et Florent Maraux (5), Hubert Laude et François Taddei (6), Jean Boiffin et Xavier Reboud (7), Jacques Potus, Didier Majou et Any Castaings (8) et Xavier Laureau et Jean-Paul Charvet (10). Peter Westhoff et Félix Escher sont les nouveaux correspondants étrangers. Bienvenue à tous ces nouveaux participants aux travaux et à la vie de l’Académie. Jean-François Colomer Point de vue Principe de précaution : aujourd’hui et demain Le 1er octobre 2009 l’Assemblée nationale et le Sénat ont organisé une audition publique sur « Le principe de précaution : bilan de son application quatre ans après sa constitutionnalisation ». Ce bilan ne peut qu’intéresser les acteurs des filières AgricultureAlimentation-Environnement ! En effet, pour le public l’interprétation de ce principe n’apparaît pas stabilisée, variant d’un cas à l’autre. L’encadrement juridique reste flou et les décisions des tribunaux manquent de cohérence, conduisant à une jurisprudence de circonstance. Les différentes autorités peinent dans l’application et agissent indépendamment les unes des autres… En conséquence, dans le traitement des contentieux, le principe de précaution, parfois confondu avec la prévention, apparaît plus comme un outil de manœuvre de l’opinion que comme celui d’une politique soucieuse de solidarités actuelles et futures. En 2002 les autorités avaient déjà pris la mesure des difficultés cidessus et avaient décidé de clarifier le concept et d’en palier les insuffisances. Elles souhaitent que le principe soit assis sur des bases légales fortes et la formule retenue fut de l’inscrire dans la Constitution après en avoir précisé les attendus et la formulation. La réflexion arrive à terme en deux ans. Le principe de précaution est « constitutionnalisé » en 2004. De plus, comme la société et les connaissances ne cessent de progresser, une révision périodique est envisagée. En 2009 donc, l’Office Parlementaire d’évaluation des Choix scientifiques et techniques (OPECST) organise une audition publique pour dresser un bilan et aider à l’élaboration d’éventuelles propositions d’amendements. Une pléiade d’orateurs est convoquée pour porter publiquement témoignage : philosophes, juristes, industriels, scientifiques (sociologues, médecins, biologistes), journalistes, membres d’ONG et représentants des institutions publiques. Pour l’auditoire cette initiative est très heureuse, les conférences offrent un regard « déployé » sur le principe de précaution et un espoir d’échapper aux hiérarchies et aux égoïsmes des filières. Quelques mots sur les exposés : leurs apports sont très variables. Certains ne répondent pas à la question posée par l’OPECST et se contentent d’un plaidoyer pro domo. D’autres apportent au contraire une vraie contribution au bilan de la constitutionnalisation et à l’évaluation de l’usage du principe de précaution en France. Tous présentent le principe de précaution comme un principe d’action « encadrée », susceptible de stimuler des recherches et d’inciter à l’innovation. Tous les orateurs s’accordent sur le fait qu’en 2009, la conception de la précaution n’est toujours pas stabilisée et la constitutionnalisation n’y change rien. En revanche, fait positif, elle a permis l’élargissement du champ d’application bien au-delà de l’environnement, domaine où dès 1999, le principe était reconnu. La Charte de l’Environnement avait d’ailleurs servi de point de départ à la réflexion qui conduisit à la constitutionnalisation. Le bilan est d’ailleurs en demi-teinte dans tous les aspects de la situation actuelle. D’un côté les craintes et les attentes du public sont toujours les mêmes. La constitutionnalisation leur a même donné une légitimité juridique sans pourtant proposer une démarche qui les soulagerait et donnerait les moyens d’évaluer l’évolution des risques et de leurs coûts. Les jurisprudences ont donc un bel avenir… En mettant l’accent sur l’incertitude constitutive des connaissances scientifiques, la formulation actuelle du principe de précaution décrédibilise leurs avancées. Pour faire face aux inquiétudes légitimes la société ne dispose plus que de l’autorité des lois, des normes et des interdits. Face à la diversité des situations et pour ne pas plus perturber la cohésion sociale il faut, dans les cas difficiles, avoir recours à des moratoires et à des exceptions… Élargir le champ d’application du principe de précaution permet de renouveler les fondements de la décision et de l’action dans des domaines autres que l’environnement. Ainsi dans le monde de la santé, du médicament et des industries pharmaceutiques, « un » principe de précaution était en usage bien avant celui qui concerne l’environnement : essais de phases I, II et III, établissement de normes, traçabilité et révisions périodiques. Dans ce domaine et de façon générale dans bien d’autres, la responsabilité finale de la précaution appartenait à l’État (agences) qui décidait des normes. La justice avait pour rôle de traiter les contentieux. Depuis 2004 a été initialisé un processus de transfert de la responsabilité aux acteurs, les entreprises en particulier. Ils doivent apporter la preuve de l’innocuité de leurs innovations et de leurs travaux. L’État se dégage de ses responsabilités anciennes et se donne un rôle de médiateur. A la relation triangulaire Etat-public-acteurs est substituée une relation binaire public-acteurs. La constitutionnalisation introduit indirectement une forme de démocratie directe dont le public et les acteurs sont les protagonistes. Parallèlement la fonction de la justice, partiellement partagée avec l’Etat maintenant, est devenue moins claire. Un changement de société se prépare donc. Bien qu’il soit difficile de prévoir l’avenir, la constitutionnalisation est une véritable avancée. Du point de vue du public et même du simple citoyen, d’intéressantes perspectives sont ouvertes. La conséquence directe de l’accent mis sur l’incertitude constitutive de la connaissance et le doute jeté sur la pertinence des avis d’experts, permettent à chacun de faire reconnaître, en invoquant la Constitution, la légitimité et la force de son angoisse indépendamment de toute connaissance ou expertise. Cette angoisse existe, même si on ne dispose pas de mesures objectivées. Au siècle dernier, elle n’était que de peu de poids face à l’évaluation formalisée des risques. Aujourd’hui, elle pèse significativement dans les négociations, la politique et les décisions de justice. Ainsi, au-delà des progrès de connaissances et de l’application des normes, sont officiellement reconnus les troubles de voisinage et les atteintes à la tranquillité psychologique du citoyen. La constitutionnalisation du principe de précaution a donc engagé une autre transformation de la société. En conclusion à court terme, le concept de principe de précaution n’a pas été clarifié et les attentes du public n’ont pas trouvé de réponse. Les risques ne sont pas mis en rapport avec les bénéfices attendus d’innovations. A long terme, la constitutionnalisation ouvre des perspectives de transformation de l’exercice de la démocratie (désengagement de l’État) et de la société dans son ensemble. Le débat est loin d’être clos, d’autant plus que nous, Français, nous méfions du pragmatisme et avons un fort penchant pour les lois et les normes. La formulation nouvelle du principe de précaution, que le Parlement adoptera bientôt sera très intéressante. www.assemblee-nationale.fr, www.senat.fr et [email protected] Y. Dattée, A. Gallais, J.C. Mounolou et J.C. Pernollet _____________________________________________________ VIE DES SECTIONS Relations « HOMME-NATURE » : interprétation d’une crise Nous savons qu’au cours de l’évolution, non seulement la vie est apparue au sein des milieux physico-chimiques complexes, mais encore que la biosphère fut une longue co-évolution entre dynamique des milieux et évolution des systèmes biologiques. Elle a évolué sous l’impact de grands changements physiques ponctués parfois de soubresauts catastrophiques (volcanisme, impact de météores), et sous les contraintes des grandes évolutions biologiques. Cette co-évolution, milieux et systèmes biologiques, instaure une dynamique incessante au sein de la biosphère. Cette dynamique actuelle se trouve dominée par l’anthroposphère (Homme et société) qui cherche à se dégager de sa matrice originelle, la biosphère. C’est pourquoi l’anthroposphère s’affirme en élaborant une technosphère, lieu des connaissances, des techniques, des pratiques et des modes d’organisation et de gestion afin de maîtriser la biosphère. Cette tendance de l’homme a été mise en exergue par toutes les mythologies et conduit non seulement à l’émancipation, mais à la puissance et à la démesure (Tour de Babel, Prométhée ou encore Faust). L’anthroposphère ne peut cependant rompre cette co-évolution homme–nature, car elle reste ontologiquement rivée à sa biosphère par ses propres besoins (air, eau, alimentation, énergie, matériaux, surfaces occupées). L’histoire nous apprend aussi que cette co-évolution entre milieux et systèmes biologiques est largement dépendante de l’homme et son devenir. L’hégémonie de la population humaine et de ses techniques, progressivement élaborées depuis quelques millénaires, induit en de nombreux lieux, surexploitations, déforestations, aridification et souvent désertification de milieux (effets drastiques accrus par l’érosion, la salini- sation, les pollutions…). Dans cette co-évolution, l’accroissement des surfaces utilisées s’est fait au détriment de flores et faunes tant sauvages que commensales et les milieux ont évolué de plus en plus vers des espaces ruraux toujours plus ouverts où disparaissent des éléments de paysages anciens (haies, talus, fossés, bosquets ou bois). Heureusement, à la fin du XXème siècle, la prise de conscience de changements globaux (changement climatique, modifications drastiques de l’occupation des terres, érosion de la biodiversité, pollutions…) a fait émerger la notion de développement durable. Un nouveau regard se porte alors sur les équilibres biologiques des agro et écosystèmes au sein des paysages et sur la biodiversité (espèces sauvages, commensales et domestiquées) et se pose la question vitale de durabilité des ressources naturelles, de préservation des milieux et du maintien de leurs potentialités. Une possible co-évolution interféconde « homme - nature » émerge alors où l’Homme prendrait en compte le développement équilibré de la biosphère. Cependant, il y a loin entre la prise de conscience et la mise en œuvre de re-médiations et une conduite agro – écologique qui favoriserait la valorisation des milieux et de la biodiversité, bref une approche de gestion durable. Or, dans un système devenu mondial, qui mise toujours plus sur le développement de productions marchandes, que feront les sociétés ? Suivront-elles la facilité, celle de prélever au moindre coût ou permettrontelles le renouvellement et la reconstruction ? Le choix premier d’un développement maximum entraîne une perpétuelle surenchère aux niveaux des productions et des échanges ; les soubresauts inflationnistes illustrés par la crise économique actuelle, en sont un révélateur qui annonce en fait une lame de fond à venir. Dans ce contexte de production, même avec une perspective de stabilisation à terme de la population accompagnée d’une réduction des biens de consommation, tout concourra à une prime évidente aux prédations encore possibles, face aux coûts et lenteurs des renouvellements ou substitutions à créer. Cette relative facilité de la prédation conduira à des pollutions de plus en plus contraignantes, aux pertes progressives de terres et de ressources et à la fragilisation de la biodiversité qui pourrait amorcer sa « sixième grande extinction ». Or, malgré ses limites, la planète pourrait encore évoluer vers une biosphère revitalisée par un juste partage, un jardinage total des espaces (forêts et autres agro-écosystèmes), au sens du « Mesnage des champs, d’Olivier de Serres », qui inclurait le maintien d’un maximum de biodiversité. En fait, une telle évolution impose un changement de paradigmes qui induirait une autre vision de la vie et probablement de ce que peut signifier le bien-être. Certes la technosphère poursuivra son développement en vue d’améliorer et de valoriser les ressources restantes voire même de reconquérir de nombreux territoires mais il faudrait pour cela cette mutation. Sans elle, les sociétés continueront à mettre à profit la technosphère pour accroître leurs prédations, favorisant les déséquilibres et crises qui forceraient à de nouveaux expédients. L’homme, au mieux, s’enfermerait alors dans un monde de plus en plus artificiel où sa seule ouverture deviendrait celle du virtuel ou peut-être un jour, celle de l’espace ? (Suite du travail de la section VII, « Homme-nature : de la domestication à la co-évolution ») Alain Perrier ___________________________________________________________ La recherche agronomique des États Unis objet d'une restructuration prioritaire Le "National Institute of Food and Agriculture" (NIFA) a ouvert ses portes le 1er octobre. La création de cet Institut fait partie d'un remaniement important au ministère de l'agriculture des USA (USDA) qui a récemment enrôlé Rajiv Shah comme directeur scientifique en soulignant l'importance de la recherche agronomique fondamentale pour répondre tant aux besoins nationaux que mondiaux, incluant le changement climatique, les biocarburants, la nutrition et la sécurité alimentaire. Beaucoup de scientifiques espèrent que le nouvel Institut améliorera les objectifs, l'efficacité et la visibilité de la recherche agronomique fondamentale américaine, longtemps critiquée pour être conduite par les politiques régionales au lieu des priorités nationales. Face à la perception négative de la recherche agronomique, notamment par le Capitole, ce devrait être l'occasion de réévaluer le rôle de cette recherche et de son organisation aux USA. Il demeure cependant primordial que les États-Unis fixent des priorités nationales pour l'attribution des crédits de recherches afin d’éviter que la recherche agronomique ne continue à régresser face aux autres domaines, notamment la recherche médicale et la National Science Foundation, qui drainent la majorité des crédits fédéraux, respectivement 10 et 3 milliards de dollars. La direction du NIFA a été confiée à Roger Beachy, biotechnologiste végétal qui a notamment développé des PGM résistantes aux virus en collaboration étroite avec Monsanto, ce qui n'est pas sans soulever du scepticisme à propos de l'indépendance des objectifs du NIFA et de son aptitude à mener à bien une politique scientifique d'excellence. Le NIFA gérera un programme de contrats ciblés (AFRI, Agriculture and Food Research Initiative) dont le budget est encore limité (~300 millions de dollars) au même niveau que celui de l'organisme précédent. En dépit de ses buts ambitieux, l'impact final du NIFA est donc encore incertain, même si cette restructuration fédérale vise à diminuer l'influence de l'électoralisme local dans les orientations de la politique de la recherche agronomique états-unienne. Jean-Claude Pernollet Source : Lizzie Buchen. Federal restructuring aims to lessen the influence of pork-barrel politics. Nature 461, 580. doi :10.1038/461580a. _____________________________________________________ Une araignée herbivore La livraison de Current biology du 13 octobre dernier rapporte le cas d’une araignée « sauteuse » d’Amérique centrale, Bagheera kiplingi (tout un programme !) qui présente la particularité de vivre, en partie, sur un acacia dont elle consomme le nectar, riche en lipides et protéines, produit à la base des feuilles et par des structures caulinaires. Ces sécrétions sont absorbées par l’araignée avec sa trompe. Le comportement social de l’espèce est également différent : elle demeure sur la plante et s’y reproduit, les mâles « s’occupant » des œufs puis de la progéniture. En période sèche, elle peut redevenir carnivore. Un cas intéressant et unique… pour l’instant ! Christian Ferault _____________________________________________________ Les travaux du groupe intersection « PAC 2013 » Ce groupe animé par la section 10 fait suite aux travaux réalisés par l’Académie à l’occasion du bilan de santé de la PAC et à la séance « La PAC en question » animée par Michel Jacquot le 26 novembre 2008. La nouvelle Commission européenne doit proposer fin 2010 son projet politique et financier concernant la future PAC 2014-2020 qui sera discuté par le Conseil et le Parlement européen. Notre objectif est de participer à la réflexion sur les priorités et les outils d’une PAC qui réponde aux enjeux actuels dans un contexte européen et mondial en profonde mutation. • Une PAC qui combine des outils efficaces de régulation des marchés, de sécurisation des risques et d’organisation des producteurs. • Une PAC qui cherche à maintenir l’emploi agricole et les emplois induits dans tous les territoires. • Une PAC qui encourage la production de valeur ajoutée dans les exploitations et qui rémunère les biens publics et les services environnementaux joints. • Une PAC qui soutienne la consommation alimentaire des plus démunis et développe les enjeux nutritionnels, dans la restauration collective notamment. • Une PAC flexible et adaptable dans son budget en fonction des évolutions conjoncturelles. Les conditions de la durabilité économique, sociale et environnementale des exploitations, des filières et des territoires sont au cœur de nos réflexions qui devraient aboutir au premier trimestre 2010. Contact : [email protected] Proposition à l’Académie d’Agriculture de France Notre Académie a besoin d’argent pour fonctionner. Où le trouver ? Là où il se trouve. Comment le faire venir ? En intéressant ceux qui en ont à le donner. Comment ? En leur rendant des services qui relèvent de nos compétences. C’est approximativement le raisonnement que fit Michael Faraday dans les années 1820, quand la Royal Institution de Londres était endettée comme elle ne l’avait jamais été depuis sa création, par Rumford. Étrange personnage, savant, aventurier, espion, militaire… Rumford avait été un visionnaire en créant la Royal Institution, étrange lieu intermédiaire entre une sorte de Palais de la découverte, club scientifique, laboratoire… L’étrangeté même de l’entreprise avait toujours mis l’institution en délicate position financière, mais quelques uns de ses hôtes avaient contribué, jusque là, à sa survie. Par exemple, Humphry Davy (17781829), découvreur du protoxyde d’azote, du sodium, du potassium, du strontium, du calcium, père de la lampe de sûreté pour les mineurs… faisait des conférences si merveilleuses qu’il attirait le beau monde londonien, puis anglais et même européen, à la Royal Institution. Toutefois, ce succès même mit l’institution en péril, quand Davy épousa une riche veuve et démissionna de sa chaire en 1812. Selon Henry Bence Jones, auteur d’une histoire des débuts de la Royal Institution, le problème récurrent des finances de l’institution ne fut résolu durablement que par Michael Faraday, en raison des traditions qu’il instaura. Notamment Faraday introduisit les Friday Evening Discourses le 3 février 1826, avec une conférence sur le caoutchouc. Il avait fait quelques analyses de la matière, alors nouvelle, dans son laboratoire en 1824, puis en 1825, afin de le caractériser, et il présenta plusieurs expériences qui mettaient bien en évidence les propriétés du matériau, utilisant une méthode de présentation qui avait fait l’objet de tous ses soins : l’organisation de la salle, le type de discours, la posture du conférencier, le rythme de la conférence… Faraday avait finalement décidé que ces causeries devaient être engageantes d’aspect, mais qu’elles devaient, au moins au début, présenter des nouveautés importantes du monde en mouvement, transmettre de l’information et de la compréhension sur des sujets d’actualité technologique : la lithographie, qui commençait à révolutionner la presse et l’édition ; les moteurs de Marc Isembard Brunel, l’éclairage au gaz… Les conférences commençaient à neuf heures du soir, et duraient une heure exactement ; puis l’audience était invitée à une collation légère (du thé, au début), pendant laquelle les membres du « club » ou ceux qui avaient acheté des billets pour assister à la conférence, étaient invités à discuter dans les salons de la Royal Institution, souvent autour d’objets qui avaient été réunis par Faraday, et qui avaient ou non trait aux conférences (lentement, cette pratique conduisit à la constitution d’un cabinet de curiosités). Parfois, la technologie faisait place à la musique, aux arts, aux lettres… Faraday ne ménageait pas sa peine pour rétablir l’équilibre financier. Il y invitait les meilleurs scientifiques anglais, y faisait venir les savants étrangers de passage à Londres… et la tradition ne s’est pas éteinte avec lui, puisqu’il avait tout fait pour qu’elle ne dépende pas de lui seulement, invitant progressivement une proportion croissante de conférenciers extérieurs. Aujourd’hui, la Royal Institution continue d’exister, et elle a même eu les moyens de se rénover entièrement, ces quelques dernières années. Et si notre Académie faisait de même ? Hervé This ______________________________________________________ L'Académie en visite chez ROQUETTE Le 12 novembre 2009, un groupe de membres de l'AAF était reçu à Lestrem pour une visite des Établissements Roquette préparée par notre confrère Daniel-Éric Marchand. Créée en 1933 pour la production de fécule de pomme de terre pour l'industrie textile, la société a diversifié ses sources de matières premières avec le maïs et le blé et plus récemment le pois. Le tonnage annuel transformé représente 550000 ha de production dans le monde pour la fabrication de quelques 400 produits (spécialités) dérivés de l'amidon et des protéines des céréales et du pois. Aujourd'hui, le groupe emploie 6000 personnes dans le monde. Il est présent dans une centaine de pays et possède 17 sites de production en Europe, en Amérique du nord et en Asie. L'usine de Lestrem, siège du groupe, est la plus grosse unité avec 3000 personnes et un centre de recherche qui occupe 250 personnes. Elle transforme 6000 tonnes/jour et les installations sont prévues pour un doublement éventuel de la production. La société Roquette a su préserver son caractère familial tout en se hissant (avec un chiffre d'affaires de 2,5 milliards d'euros) parmi les premiers de ce secteur au plan mondial, tenant, pour certaines spécialités, une position de leader. Après la visite des ateliers, les participants ont eu un échange très large et très ouvert avec Monsieur Marc Roquette, PDG, qui a eu l'occasion de développer son approche d'industriel lors de la séance de rentrée du début janvier 2010. Un compte-rendu plus détaillé de la visite sera prochainement publié sur le site de l'Académie. Claude Sultana (section 9) _____________________________________________________ Billet Mesurer le bonheur ? En ce début 2010 et de présentation des vœux, il n’est pas interdit de rêver à des jours meilleurs. Les chiffres de l’évolution du PIB n’incitent guère à l’optimisme. Mais, comme le déclarait le Président Kennedy : « Le PIB mesure tout sauf ce pourquoi la vie vaut la peine d’être vécue ». En réalité on mesure encore bien mal ce qui fait le bonheur individuel ou collectif des gens. Depuis 1994, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a innové en publiant un « Indicateur de développement humain » qui ajoute à celui du PIB, ceux de l’espérance de vie et du niveau de formation dans les différentes parties du monde. Mais en privilégiant le développement humain, le classement des pays se modifie au grand dam des économistes purs et durs. Pierre Le Roy, directeur de Globeco et invité du groupe « Communication » de l’Académie propose d’aller plus loin avec la fixation d’un « indice du bonheur mondial ». Un indice calculé à partir de 40 indicateurs depuis la paix et la sécurité jusqu’à l’accession à la culture en passant par la démocratie et les droits de l’homme ainsi que la qualité de vie et qui prend en compte l’environnement. Avec la création de la commission Stiglitz voulue par Nicolas Sarkozy cette vision n’est plus utopique. Voilà un beau sujet de débat pour notre Compagnie ! Jean-François Colomer __________________________________________________________________ A lire : – Évaluation sensorielle : manuel méthodologique, par Félix Depledt, Éditions Lavoisier. – Biologie végétale, croissance et développement, sous la direction de Jean-François Morot-Gaudry et Roger Prat, Éditions Dunod. – Hétérosis et variétés hybrides en amélioration des plantes, par André Gallais, Éditions Quae. ____________________________________________________________ Ils nous ont quittés : Éric Choppin de Janvry, ancien directeur de l’Institut technique de la Betterave. Georges Bublot, membre étranger, professeur émérite de l’Université de Louvain. Jacques Huet, directeur de recherche honoraire de l’Institut national de la recherche agronomique. Jean Adrian, professeur honoraire de Biochimie industrielle et agroalimentaire du Conservatoire national des Arts et Métiers. www.académie-agriculture.fr – 18, rue de Bellechasse – 75007 Paris – Tél. : 01 47 05 10 37 Directeur de la publication : Guy Paillotin – Rédacteurs en chef : Jean-François Colomer et Christian Ferault Conception et réalisation : Christine Ledoux-Danguin