Pré-éclampsie sévère
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Pré-éclampsie sévère
Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 Pré-éclampsie sévère 1. Définition 1.1. Pré-éclampsie Association d’une hypertension artérielle gravidique (PAS ≥ 140 mmHg et / ou PAD ≥ 90 mm Hg) et d’une protéinurie > 0.3g/j survenant après 22 SA. 1.2. Critères de sévérité PAS ≥ 160 mmHg et / ou PAD ≥ 110 mmHg Signes fonctionnels liés à l’HTA : céphalées persistantes, troubles visuels, acouphènes Protéinurie ≥ 3g/j ( ou +++ à la bandelette) Hyper-réflectivité ostéo-tendineuse Insuffisance rénale (créatininémie > 100µmol/l ; diurèse < 500 ml/24h) Barre épigastrique, douleur de l’hypochondre droit, nausées, vomissements HELLP syndrome : Hémolyse : Hb ≤ 9g/dl, chute de l’haptoglobine, élévation de la bilirubinémie, LDH > 500UI/l, présence de schizocytes Cytolyse : ASAT > 3 x N Thrombopénie < 100.000 / mm3 Complications : Œdème pulmonaire Convulsions (éclampsie), œdème cérébral, signes de localisation neurologiques Hématome sous capsulaire du foie CIVD 2. Bilan initial Devant un ou plusieurs de ces signes, le bilan initial (réalisé si besoin en explorations fonctionnelles ou en hôpital de jour) comporte : 2.1. Bilan maternel Surveillance tensionnelle au dynamap Protéinurie (bandelette urinaire) NFS, plaquettes, haptoglobine, et si possible recherche de schizocytes ASAT, ALAT, LDH, bilirubine direct et conjuguée TP, TCA, Fibrinogène, D-dimères (pour leur aspect évolutif), facteurs V, VII + X, groupe (1ère deter + phenotype) Ionogramme sanguin, urée, créatinine, glycémie, uricémie Bilan datant de moins de 6 h si l’on veut envisager une péridurale 1 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 2.2. Bilan fœtal Monitorage du RCF (souffrance fœtale chronique) Echographie : biométries, estimation de poids fœtal doppler ombilical, cérébral, (+/- ductus venosus) profil biophysique (mouvements respiratoires, des racines et des extrémités des membres, tonus, quantité de liquide amniotique) 3. Critères d’hospitalisation en grossesse à haut risque: ce sont : la constatation d’une pré-éclampsie au moins un critère de sévérité maternel et /ou un des critères fœtaux suivants : Anomalies du RCF Profil biophysique perturbé Examen doppler perturbé : flux diastolique nul sur l’ombilicale ou ductus venosus ≥ 95ème percentile 4. Surveillance en cours d’hospitalisation 4.1. Surveillance clinique maternelle : Pression artérielle, pouls, fréquence respiratoire, SpO2 si possible : toutes les 8 heures Diurèse toutes les 12 heures avec recherche de protéinurie à la bandelette Poids tous les jours Signes fonctionnels recherchés et notés sur une feuille de surveillance Barre épigastrique, douleur de l’hypochondre droit Réflexes ostéo tendineux (interne de gynécologie) au moins une fois par jour 4.2. Examens complémentaires maternels : Dés que l’hospitalisation est décidée le bilan initial est complété par : 2ème détermination de groupe sanguin avec RAI Protéinurie des 12 heures, ECG (pour la surveillance du traitement) Echographie hépatique (surveillance hebdomadaire si signes de gravité à l’admission) Et selon le contexte : Fond d’œil, échographie cardiaque, Si le bilan biologique initial est normal : Nouveau bilan systématique à H24 : NFS plaquettes, recherche de schizocytes, haptoglobine 2 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 TP, TCA, facteur V, Fibrinogène ASAT, ALAT, LDH, Bilirubine Ionogramme sanguin, urée, créatinine Protéinurie des 12 heures Si le bilan biologique initial est anormal : La fréquence de surveillance biologique sera fonction de l’évolution et de l’état clinique 4.3. Surveillance fœtale : Monitorage (VCT) 2 à 3 fois par jour Echographie et dopplers tous les jours 5. Critères de transfert en réanimation Indications du sulfate de magnésium avant extraction Défaillance viscérale : Insuffisance cardiaque, insuffisance respiratoire, insuffisance rénale Eclampsie L’hospitalisation en réanimation peut être décidée à tout moment si un seul de ces critère est présent 6. Principes thérapeutiques Dans tous les cas, le traitement a pour objectif d’obtenir une pression artérielle moyenne (PAM) comprise entre 105 et 125 mmHg. Ces valeurs doivent être obtenues progressivement. En cas d’hospitalisation, mise en place d’une voie veineuse systématique : remplissage modéré par G5% polyionique 30ml/kg/24h (pas dépasser 2000 ml) si la patiente reste à jeun, simple garde veine dans le cas contraire (500ml/24h). Eviter l’utilisation de l’albumine , 300 – 500 ml d’albumine à 4 % si protidémie faible < 12 (les autres macromolécules sont contre-indiquées en ante-partum). L’utilisation des diurétiques doit être, dans la mesure du possible, évitée en ante-partum en raison de l’hypovolémie relative. 6.1 Les médicaments antihypertenseurs : Nicardipine (Loxen®) : Administré par voie IV (Loxen pur ampoule de 10 cc contenant 10 mg), à la seringue électrique, de 1ère intention sauf en cas de tachycardie sévère. Débuté à 1 ou 2 mg/h sous surveillance par dynamap (PA et FC). Augmenté la posologie toutes les 15 mn si nécessaire sans dépasser 6 mg/h. Pas de titration par bolus. 3 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 Labetalol (Trandate®) Administré par voie IV à la seringue électrique si FC > 110/mn (ou en association avec Loxen® si TA non contrôlée) Ampoule de 20 cc à 100 mg par ampoule. 2 ampoules de 100 mg = 40 cc (= 5 mg/ml) Débuté à 2 cc/h, soit 10 mg/h sous surveillance par dynamap (PA et FC) Augmenté la posologie toutes les heures 1 cc/h pour atteindre un maximum de 12 cc/h ou 60 mg/h et sans abaisser la fréquence cardiaque en dessous de 60/mn. Contre-indication : asthme Relais per os quand la PA est équilibrée depuis 24 h à posologie constante : Loxen® : selon la dose IV : 5mg/h → 50 mg x 2/j per os Trandate® : 200mg x 2/j 6.2. Traitements complémentaires Contention élastique des membres inférieurs en cas d’alitement. Les HBPM sont contre-indiqués avant l’extraction fœtale. 6.3. Utilisation du Sulfate de Magnésium 6.3.1. Indications Peut être débuté avant l’accouchement (forme neurologique) mais nécessitera un transfert secondaire en réanimation Crise d’éclampsie (prévention des récidives) HTA non contrôlée malgré une bithérapie Barre épigastrique persistante sous Mopral® Signes neurologiques (confusion mentale, somnolence, céphalées persistantes ou s’aggravant, ROT vifs et diffusés) 6.3.2. Prise en charge Surveillance continue: scope, SpO2, dynamap Au bloc obstétrical avant l’extraction mais nécessitera un transfert secondaire en réanimation Surveillance horaire des ROT (arrêt de la perfusion si les ROT sont normaux, leur disparition est un signe de surdosage) Dosage de la magnésémie en cas de signes cliniques de surdosage (troubles de conduction, arrêt respiratoire, abolition des ROT), survenue d’une crise convulsive ou créatinémie > 150 µmol/l avoir a proximité 2 ampoules de gluconate de calcium 6.3.3. Contre-indications Insuffisance rénale sévère (créatininémie > 150 µmol/l) 4 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 Myasthénie Hypotension, Troubles de la conduction, allongement du QT Fréquence respiratoire < 16/mn Attention au association : gentamycine, béta-mimétiques, inhibiteurs calciques. Préférer l’association au Trandate 6.3.4. Utilisation Nécessite une voie veineuse spécifique en seringue électrique Mettre dans un pousse seringue 4 ampoules de sulfate de magnésie à 10% (1 ampoule = 10 cc = 1g) Dilution : 0.1g/ml Dose de charge : 4g sur 15mn (5mn en cas de crise convulsive) Entretien : 1g/h en seringue électrique En cas de survenue d’une crise convulsive sous traitement : bolus complémentaire de 2 à 4 g sur 5 mn. Taux plasmatique thérapeutique anti-convulsivant : 2 à 3 mmol/l (attention mmol/l et non mEq) 6.3.5. Toxicité et effets secondaires Taux > 5mmol/l : abolition des ROT Taux > 6 mmol/l : dépression respiratoire De 6.3 à 7.1 mmol/l : paralysie musculaire, arrêt respiratoire Taux > 12.5 mmol/l : arrêt cardiaque Antidote : Gluconate de calcium 1g IVL. 7. Objectifs du traitement en fonction du terme 7.1 Avant 32 semaines Outre le contrôle de la maladie hypertensive, l’objectif thérapeutique est d’assurer la maturation pulmonaire fœtale et de prolonger la grossesse aussi longtemps que possible en l’absence de signes de gravité. Mais l’extraction peut être décidée à tout moment en cas de survenue de signes de gravité maternel et/ou fœtal. Le traitement doit associer le Célestène chronodose® : 12 mg IM suivi d’une 2ème injection après 24 heures. 7.2. Entre 32 et 34 semaines L’objectif minimal du traitement est d’obtenir un délai de 24 heures pour permettre la maturation pulmonaire fœtale. La prise en charge thérapeutique est identique. L’extraction fœtale est décidée devant toute aggravation maternelle et/ou fœtale aussi minime soit-elle. 7.3. Après 34 semaines La maturation pulmonaire fœtale n’apparaît pas nécessaire. 5 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 La décision d’extraction fœtale est prise le plus rapidement possible, la voie d’accouchement est fonction du degré d’urgence maternelle ou fœtale, en sachant que la présence d’un RCIU est associé à un risque important de césarienne en urgence pour SFA et doit donc faire préférer la césarienne programmée à l’épreuve du travail. 7.4. Indication d’extraction fœtale d’urgence Quel que soit le terme, l’extraction d’urgence est indiquée en cas de : TA incontrôlable sous traitement intra-veineux Signes de pré-éclampsie sévères et persistants, plaquettes < 50 000, trouble de la coagulation (fibirnogène < 3g/l) Souffrance fœtale aiguë Métrorragies ou hématome rétroplacentaire avec enfant viable SDRA ou OAP sévère Insuffisance rénale ou oligoanurie persistante après remplissage Hématome sous capsulaire du foie, rupture hépatique Eclampsie après 28 SA 8. Conduite à tenir en post-partum Le risque d’aggravation clinique et biologique est important. La surveillance est identique pendant 48h (en réanimation s’il existait des critères de gravité): PA, FC, FR, SpO2 toutes les 6 heures Diurèse, protéinurie à la bandelette toutes les 12h Signes fonctionnels d’HTA, barre épigastrique ROT Saignements et globe utérin Biologie : NFS plaquettes, TP, TCA, Fibrinogène, recherche de schizocytes, ionogramme sanguin, urée, créatinine, LDH, ASAT, ALAT, protéinurie des 24h Utilisation des mêmes médicaments antihypertenseurs (Loxen®, Trandate®) autorisant l’allaitement. Le sulfate de magnésium a les mêmes indications qu’en ante-partum et nécessite le transfert en réanimation L’existence d’une hémolyse doit conduire à un contrôle plus strict de la PA. En post-partum l’utilisation d’un diurétique (Furosémide-Lasilix®) est large en cas de rétention hydrosodée compte tenu des modifications de la volémie et du risque d’œdème pulmonaire (sous surveillance du taux de plaquettes). Thromboprophylaxie systématique par HBPM : Enoxaparine (Lovenox®) 0.40 ml/j pendant toute l’hospitalisation voir 4 à 6 semaines après, surveillance du taux de plaquettes 2 fois/semaine pendant toute la durée du traitement. L’utilisation de Bromocriptine (Parlodel®) est formellement contre-indiquée. L’utilisation des AINS est déconseillée. 6 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 CAT dans le post-partum en cas de pré-éclampsie Le risque d’aggravation du HELLP est important jusqu’à J4. Hospitalisation en réanimation si : • HELLP syndrome avec plaquettes < 80 000/mm3 • Oligurie • Polypnée ou OAP • TA non contrôlée. Le ttt antihypertenseur est diminué progressivement jusqu’au contrôle de la TA. 9. Bilan étiologique Il est réalisé en fonction des antécédents personnels et familiaux, de la gravité clinique et biologique et de l’anatomopathologie placentaire. Ce bilan est orienté vers la recherche d’une pathologie auto-immune ou d’une thrombophilie. NFS, Plaquettes, créatinémie, urée, iono, protides totaux, albuminémie, protéinurie, ECBU, bilan hépatique Bilan d’hémostase : TP, TCK Il comporte dans tous les cas (à 3 mois de l’accouchement) : Anticorps anticardiolipines et antiphospholipides Facteurs anti-nucléaires Bilan thrombose : homocystéinémie, protéine C, antithrombine, anticoagulants circulants, mutations des facteurs V Leiden, II (G20210 A), VIII et MTHFR. Une consultation néphrologique (recherche d’une néphropathie ionogramme sanguin et urinaire, échographie rénale) doit être réalisée pendant l’hospitalisation post-partum. A distance, recherche d’un déficit en protéine S (au delà de 10 semaines post-partum). Indication du bilan de thrombophilie Il se justifie en cas de : - Avortements à répétition - Mort fœtale - RCIU sévère - HRP - Eclampsie ou récidive - Antécédents familiaux ou personnels (collatéraux du 1er ou 2 ème degré de thrombose veineus ou artérielle) 7 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 Bilan de thrombophilie. Il comprendra les dosages de : l’antithrombine III, la protéine C, la protéine S, l’homocystéïne, les facteurs II et VIII, la détection d’un AC antiprothrombinase et/ou anticardiolipide La recherche : d’une résistance à la protéine C activée, du gène de la prothrombine, du gène de la méthylène tétrahydrofolate réductase MTHFR, si le taux d’homocystéïne est élevé. 8 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 Eclampsie Complication paroxystique de la pré-éclampsie, elle met en jeu le pronostic maternel et surtout fœtal. Urgence thérapeutique. La crise d’éclampsie se caractérise par l'absence d'aura et de pertes d'urine. Elle évolue en 4 périodes : 1 - Période d'invasion : très brève, elle n'excède pas 30 secondes, et se caractérise par l'apparition de secousses fibrillaires touchant d'abord la face puis atteignant le cou et les membres supérieurs. 2 - Période tonique : également brève (20 à 30 secondes) avec contracture de tous les muscles du corps (tête renversée, tronc cambré, MS en flexion, MI en extension), cyanose due à l'apnée et parfois morsure de langue. 3 - Période clonique : marquée par des convulsions qui intéressent la moitié supérieure du corps. Il n'y a pas de perte d'urines. Cette période peut durer plus d'une minute. 4 - Période comateuse : de profondeur variable avec résolution musculaire complète, respiration régulière et stertoreuse ; l'examen constate une mydriase bilatérale, aucun signe en foyer, une aréflexie complète. Conduite à tenir 1.Réanimation : Assurer la liberté des voies respiratoires par une canule ; discuter l’intubation (Pento/Celo, anesthésiste présent) Dans tous les cas, le Sulfate de magnésium doit être débuté d’urgence quel que soit le terme afin de prévenir la récurrence des crises d'éclampsie. Le SO4Mg nécessite une voie d'abord veineuse particulière. La perfusion se fait sous surveillance électrocardiographique. Modalités d’administration: - 4g IV en charge sur 10 à 15mn (5mn si crise) puis 2g/h IV à la seringue électrique. - Si la créatininémie est ≥ 100µmol/l : 2g en charge puis 1g/h. - En cas de survenue d'une nouvelle crise sous traitement: Bolus supplémentaire de 2 à 4g IV sur 5mn. - Surveillance horaire des réflexes ostéotendineux. - Oxymétrie de pouls ( ou fréquence respiratoire ≥ 12/mn ). - Taux plasmatique thérapeutique: 2 à 4 mmol/l Contre-indications, toxicité et effets secondaires: cf pré-éclampsie Les objectifs thérapeutiques visant à contrôler l’HTA sont indiqués dans le chapitre pré-éclampsie. 9 Protocoles obstétricaux Nouméa Version 12/09/06 2.Prise en charge obstétricale : Avant 28 SA révolues : Outre le contrôle de la maladie hypertensive, l'objectif thérapeutique est d'assurer la maturation pulmonaire fœtale (Célestène chronodose® 12mg IM suivi d'une nouvelle injection après 12 à 24 h) et de prolonger la grossesse aussi longtemps que possible si le bilan maternel et fœtal l’autorise. La surveillance de la patiente est réalisée en salle de travail pendant la période de traitement par sulfate de magnésium Mais l'extraction doit être décidée à tout moment en fonction de l'aggravation du tableau maternel et/ou fœtal. A partir de 28 SA révolues : La décision d'extraction fœtale est prise en urgence, la voie est fonction du degré d'urgence maternelle ou fœtale. Dans tous les cas, l'extraction fœtale doit être réalisée sous sulfate de magnésium et la patiente sera transférée en réanimation secondairement. 10