f. serres

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f. serres
24>26 novembre 2016
LILLE GRAND PALAIS
CARDIOLOGIE
PROGRAMME GÉNÉRAL
Thérapeutique cardiaque :
bilans et synthèse des dernières études cliniques
Le chien asymptomatique
F. SERRES
DV
197 bis avenue Charles de Gaulle - 59510 HEM
La prise en charge du chien cardiopathe a
évolué au cours de la courte histoire de la cardiologie vétérinaire, en suivant notamment
l’évolution de la population canine. Ainsi au
départ, l’unique objectif du traitement était la
disparition des symptômes cliniques observés par le propriétaire, et reposait de ce fait
essentiellement sur l’emploi des diurétiques.
Mais le vieillissement de la population canine,
la progression d’une médecine basée sur des
preuves, ainsi que l’apparition de traitements
dédiés au marché qu’est devenu la cardiologie vétérinaire ont modifié la prise en charge
de la maladie. La maladie valvulaire mitrale
canine (MVM) et la cardiomyopathie dilatée
sont les principales affections acquises chez
le chien. Il s’agit également dans les deux cas
d’affections « chroniques » avec une évolution
progressive, avec une période asymptomatique longue (de plusieurs années) à l’issue
de laquelle des « accidents » seront observés,
pouvant correspondre à l’apparition d’une
fatigabilité à l’effort, d’épisodes congestifs, de
mort subite. Cette évolution symptomatique
de la maladie n’est pas systématique (1), et
le clinicien doit donc apprendre à « reconnaître » les patients présentant un risque de
développer une maladie symptomatique et de
proposer le traitement le plus adaptée pour
prolonger cette phase asymptomatique ou la
durée de vie globale du patient. L’échographie
reste pour cela un des outils les plus pertinents, mais d’autres biomarqueurs (notamment le NT-proBNP) peuvent être envisagé
pour détecter les patients « à surveiller ». Le
traitement n’est pas nécessaire pour tout les
patients mais la réalisation d’examen de suivi
doit être proposée à tout les patients.
Pour l’aider dans le choix thérapeutique, le
praticien dispose aujourd’hui de nouvelles
classifications et schémas thérapeutiques,
validés par des études de plus en plus importantes et/ou par des comités d’experts internationaux. Cette médecine de “population”
nécessite une « stratification » en catégorie de
patients, reposant non plus seulement sur la
classification clinique, mais sur la réalisation
d’examens complémentaires de plus en plus
complexes (radiographie, échocardiographie,
et peut être bientôt dosages hormonaux).
On dispose désormais de recommandations
précises, notamment pour la MVM, avec des
recommandations proposées par l’American
College of Veterinary Internal Medicine (2),
suivant le stade clinique des patients, en prenant en compte la présence ou non de remodelage cardiaque. Ces recommandations s’appuient sur les résultats d’études publiées, en
appliquant le principe de la médecine basée
sur des preuves, la qualité des études (étude
prospective ou rétrospective, monocentrique
ou multicentrique, avec ou sans mise en place
d’un aveugle) déterminant la force des recommandations émises.
Cardiomyopathie dilatée :
des données fiables
L’intérêt d’un traitement de pimobendane afin
de prolonger la phase asymptomatique lors de
CMD décompensée a été démontré par deux
études prospectives avec randomisation et
administration en aveugle. Ces études ont été
réalisées chez deux races différentes (Doberman et irish Wolfhound) (3,4). Le niveau de
preuve scientifique en faveur de cette thérapie préventive peut donc sembler acceptable
pour parler d’un relatif consensus sur ce sujet
au moins pour les deux races citées. L’intérêt
de ce traitement n’est que fortement supposée pour les autres races, et n’a pas encore
été confirmée par des études de qualité. Une
étude a montré un effet bénéfique d’un IECA
(le benazepril) chez le doberman en phase
occulte de CMD mais il s’agit d’une étude
rétrospective (5). L’intérêt de l’administration
concomitante des deux molécules n’a pas encore fait l’objet d’étude publiée.
1
Maladie valvulaire mitrale :
de la controverse au consensus
Selon les recommandations de l’ACVIM, un
patient en stade ACVIM B2 (stade ISACHC
1b) peut recevoir un traitement « préventif »
à base d’IECA, ce traitement étant le plus souvent très bien toléré à tout les stades de la maladie (6-8). L’emploi des IECA pour prévenir
la progression de la MVM asymptomatique
a fait l’objet de plusieurs études prospectives
(6,7) et retrospectives (8) dont les résultats
ne sont pas unanimes. Un effet significatif et
net sur la survie n’a été retrouvé que dans une
étude retrospective (8). Une étude de grande
échelle (multicentrique avec randomisation et
double aveugle) a été entreprise depuis 2010
pour mettre en évidence l’intérêt chez des
patients atteints de MVM au stade ACVIM B2
(stade ISACHC 1b) d’un traitement de pimobendane par rapport à un traitement de placébo pour retarder la survenue d’une décompensation ou d’une mortalité cardiaque (9).
Elle démontre une capacité de ce traitement
à retarder la survenue des complications e la
maladie.
Bibliographie
1. Borgarelli M, Savarino P, Crosara S, Santilli A, Chiavegato D, Poggi M, Bellino C, La Rosa G, Zanatta R,
Haggstrom J, Tarducci A. Survival characteristics and
prognostic variables of dogs with mitral regurgitation
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3. Vollmar AC, Fox PR. Long-term Outcome of Irish
Wolfhound Dogs with Preclinical Cardiomyopathy,
Atrial Fibrillation, or Both Treated with Pimobendan,
Benazepril Hydrochloride, or Methyldigoxin Monotherapy. J Vet Intern Med. 2016;30:553-9.
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4. Summerfield NJ, Boswood A, O’Grady MR, Gordon
SG, Dukes-McEwan J, Oyama MA, Smith S, Patteson
M, French AT, Culshaw GJ, Braz-Ruivo L, Estrada A,
O’Sullivan ML, Loureiro J, Willis R, Watson P. Efficacy
of pimobendan in the prevention of congestive heart
failure or sudden death in Doberman Pinschers with
preclinical dilated cardiomyopathy (the PROTECT
Study). J Vet Intern Med. 2012 ;26:1337-49.
5. O’Grady MR, O’Sullivan ML, Minors SL, Horne R.
Efficacy of benazepril hydrochloride to delay the progression of occult dilated cardiomyopathy in Doberman Pinschers. J Vet Intern Med. 2009;23:977-83.
6. Kvart C, Häggström J, Pedersen HD, et al. Efficacy of enalapril for prevention of congestive heart
failure in dogs with myxomatous valve disease and
asymptomatic mitral regurgitation. J Vet Intern Med
2002;16:80-8.
7. Atkins CE, Keene BW, Brown WA, et al. Results
of the veterinary enalapril trial to prove reduction in
onset of heart failure in dogs chronically treated with
enalapril alone for compensated, naturally occurring mitral valve insufficiency. J Am Vet Med Assoc
2007;231:1061-9.
8. Pouchelon JL, Jamet N, Gouni V, et al. Effect of
benazepril on survival and cardiac events in dogs with
asymptomatic mitral valve disease: a retrospective
study of 141 cases. J Vet Intern Med 2008;22:905-14.
9. Boswood A, Smith S, Patteson M. Evaluation of pimobendan in dogs with cardiomegaly caused by preclinical mitral valve disease. Vet Rec. 2011 26;16:222.
Déclaration publique d’intérêts sous la
responsabilité du ou des auteurs :
• Aucun conflit d'intérêt
2
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CARDIOLOGIE
PROGRAMME GÉNÉRAL
Thérapeutique cardiaque :
bilans et synthèse des dernières études cliniques
Le chien symptomatique
Isabelle TESTAULT
DV, CEAV de médecine interne
CHV Atlantia NANTES
L’insuffisance cardiaque congestive a fait
l’objet de nombreuses publications. Par le
biais de la maladie valvulaire mitrale, cardiopathie acquise la plus souvent rencontrée,
elle constitue un motif de consultation très
fréquent dans notre pratique quotidienne.
Mais l’insuffisance cardiaque congestive est
également la conséquence d’autres types de
cardiopathies : les cardiomyopathies, les cardiopathies acquises (sténoses, PCA…).
Traitement de l’insuffisance
cardiaque secondaire a une MVD
mitrale décompensée
Depuis 2009 et la publication d’un guide des
bonne pratiques thérapeutiques sur des chiens
atteints de MVD (atkins JVIM2009), le traitement de l’insuffisance cardiaque est un devenu plus consensuel (C. Atkins, J. Bonagura,
S. Ettinger, P. Fox, S. Gordon, J.Haggstrom, R.
Hamlin, B. Keene (Chair), V. Luis-Fuentes,and
R. Stepien. ACV IM Consensus Statement.
Guidelines for the Diagnosis and Treatment of
Canine Chronic Valvular Heart Disease. J Vet
Intern Med 2009 ; 23 : 1142-1150).
Pour rappel, les chiens présentant un souffle
apexien gauche systolique sont classés en
trois stades :
- le stade B asymptomatique appelé également stade précoce : ce stade se décompose
en deux sous parties : les chiens en stade
B1 (asymptomatique, sans remaniement
cardiaque associé) et les chiens en stade
B2 (asymptomatiques, avec remaniement
cardiaque associé).
- le stade C symptomatique : ce stade est une
succession de phases congestives et asymptomatiques. A partir du moment ou le chien
a présenté un épisode congestif il est entré
en stade C. ce stade dure en moyenne une
dizaine de mois.
- le stade D : il s’agit d’un stade terminal d’insuffisance cardiaque ou les épisodes conges-
tifs sont généralement réfractaires au traitement instauré.
Pour chaque stade, des recommandations
diagnostiques et thérapeutiques sont données. Les recommandations thérapeutiques
sont qualifiées de consensuelles (tous les
membres du panel sont d’accord, des publications venant étayer la légitimité de leur prescription) ou non (tous les membres du panel
n’ont pas les mêmes prescriptions). Pour cette
conférence ce sont les recommandations des
chiens en stade C et D qui nous intéressent.
Pour les chiens à MVD en stade C : un consensus se dégage pour une trithérapie de base :
utilisation concomitante d’IECA, de pimobendan et de diurétiques (furosemide) à doses
variables pour contrôler les phénomènes
congestifs ; certains panelistes rajoutent
les spironolactones, des digitaliques, des
bétabloquants ou des inhibiteurs calciques.
Concernant l’alimentation, l’objectif est de
contrôler l’amaigrissement du chien associé à
l’insuffisance cardiaque.
Pour les chiens en stade D : les doses de diurétiques sont augmentées tant que la fonction
rénale est conservée. La dose journalière peut
être divisée en trois plutôt qu’en deux. Il est
possible pour la plupart des panelistes de
substituer la voie orale par la voie injectable
(injections sous cutanées de doses de furosémide variable selon les cas). De manière
consensuelle, il n’est pas recommandé de
débuter un traitement aux bétabloquants à ce
stade.
Quand une hypertension artérielle pulmonaire est présente elle est prise en charge spécifiquement surtout si le chien présente une
insuffisance cardia que congestive globale
(oedeme plus ascite) : utilisation du sildenafil
Depuis la publication du guide de bonnes
pratiques en 2009, sont apparues de nouvelles AMM pour le stade symptomatique : le
torasémide vient renforcer l’arsenal thérapeutique en pouvant se substituer au furosémide
(peddle j. vet cardiol 2012). Attention toute-
3
fois a bien surveiller la fonction rénale (notion
de syndrome cardio renal) (Hori JAVMA
2007). Le pimobendan injectable renforce
positivement la prise en charge du chien présentant un oedeme aigu du poumon.
Traitement de l’insuffisance
cardiaque secondaire a une
cardiomyopathie dilatée
Le traitement de base de l’insuffisance cradiaque congestive est le même : pimobendan,
IECA, diurétiques (furosemide ou torasemide), spironolactones…
En raison de la prévalence des troubles du
rythme accompagnant cette affection cardiaque chez le chien les anti arythmiques sont
très souvent utilisés : betabloquants, inhibiteurs calciques, digitaliques, amiodarone.
Ainsi l’utilisation des anti arythmiques chez
les dobermans atteints de tachycardie ventriculaire allonge de manière significative l’espérance de vie et diminue le risque de mort subite (calvert JAAHA 2004). Il semble même
que l’utilisation de deux anti arythmiques
(digitaliques et inhibiteurs calciques) chez le
chien soit plus efficace pour lutter contre les
troubles de l’excitabilité supraventriculaire de
type Fibrillation atriale qu’une monothérapie
(gelzer jvim 2009).
Considération de plus en plus
importante du syndrome cardiorénal
Définition
Le syndrome cardio rénal a été défini pour la
première fois en 2004 par the national Heart,
Lung and Blood Institute comme un état pour
lequel la thérapeutique utilisée pour lutter
contre l’insuffisance cardiaque était limitée
par une aggravation de la fonction rénale.
Plus tard la définition du syndrome cardio
rénal s’est étendue : Il est défini comme des
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interactions physiopathologiques complexes
et bidirectionnelles entre le coeur insuffisant
et les reins. Chaque dysfonctionnement d’organe a la faculté d’induire et perpétuer une
altération de l’autre organe.
Pathogénie : (figure 1). De nombreux mécanismes peuvent contribuer à la baisse de la
fonction rénale (flèches bleues) : baisse de
la pression de filtration glomérulaire, baisse
de la pression artérielle systémique, baisse
sélective de la pression dans l’artère rénale,
vasoconstriction sélective et augmentation
de la pression veineuse. Le rein développe en
réponse des mécanismes venant compliquer
et aggraver l’insuffisance cardiaque (flèches
rouges). S’installe alors un véritable cercle
vicieux
° Etat des lieux en médecine humaine le syndrome cardio rénal est particulièrement étudié tant il est maintenant prouvé que les deux
entités (cœur et rein) doivent être prises en
compte.
Voici le témoignage en 2009 d’un cardiologue
(Dr DJ van Veldhuisen (Thorax center, Groningen, Pays-Bas) interwievé lors du congres
« heart failure 2009 » de la société européenne de cardiologie :
« Il y a 15 ans, personne ne prêtait attention
à l’insuffisance rénale chez le cardiaque, y
compris les néphrologues. Notre premier travail, à partir d’une base de données de 2000
patients a montré une corrélation très forte
entre la mortalité et le débit de filtration glomérulaire. » Dans cette étude rétrospective
Figure 1
4
(Hillege et al. Circulation 2000) menée chez
des insuffisants cardiaques à un stade avancé,
la mortalité à 3 ans des patients avec un taux
de filtration glomérulaire (TFG) < 44 mL/mn
était deux fois plus importante que celle des
sujets avec un TFG > 76 mL/mn (65 % versus
30 %).
Depuis ce travail, beaucoup d’autres études
(EVEREST, OPTIME HF, CHARM…) ont montré que l’atteinte rénale, même modérée,
majore la mortalité et constitue la principale
cause de réhospitalisation »
L’insuffisance rénale compromet donc sérieusement le pronostic de l’insuffisant cardiaque.
° Etat des lieux en médecine vétérinaire les
publications sur le sujet ne sont pas nombreuses. Voici les publications marquantes :
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- Nicolle et al (JVIM 2007) démontrent une
corrélation entre l’insuffisance cardiaque liée
à une MVD et l’insuffisance rénale : l’azotémie et l’altération de la fonction rénale (diminution du débit de filtration glomérulaire)
augmentent avec la sévérité de l’insuffisance
cardiaque.
- Chetboul et al (JVIM 2012) montrent que
l’index de résistivité des artères interlobaires
rénales augmente avec la sévérité de l’insuffisance cardiaque et avec l’azotémie.
Il semblerait donc qu’à l’instar de la médecine
humaine le syndrome cardio rénal existe bel
et bien. Mais quelles sont ses implications sur
le pronostic du chien Insuffisant cardiaque ?
Quelles sont ses implications sur le traitement ?
° Recommandations pour le suivi rénal du
chien insuffisant cardiaque ?
Le consensus du diagnostic et du traitement
de l’insuffisance mitrale publiée par Atkins et
al dans le JVIM 2009 incite à explorer la fonction rénale dès les stades précoces (stade B2
selon la classification ACVIM) par mesure de
l’azotémie. En revanche le rythme de suivi de
la fonction rénale n’est pas mentionné. Par ailleurs, aucune recommandation thérapeutique
n’est donnée en cas d’insuffisance rénale aussi bien dans les stades précoces que dans les
stades d’insuffisance cardiaque plus sévère.
Les ajustements des traitements de l’insuffisance cardiaque n’est donc pas basé sur de
l’Evidence Base Medecine mais au cas par
cas en fonction de l’expérience des cliniciens
et des caractéristiques pharmacologiques des
drogues utilisées.
- Utiliser des doses de furosémide ou de torasemide minimales efficaces par suivi clinique,
radiographique (recherche oedème persistant…)
- Attention à l’utilisation des digitaliques a l’index thérapeutique faible éliminés à 90 % par
le rein. Diminuer les doses lors d’IR présente.
Attention à l’utilisation des spironolactones
lors d’hyperazotémie…
Quelques recommandations « logiques »
- comme le préconise le consensus du JVIM
connaître les valeurs d’urée et de créatinine
en stade précoce afin de suivre l’évolution en
fonction du temps et de l’aggravation de la
cardiopathie.
- Mesurer régulièrement la Pression Artérielle
(PA) systémique : La PA diminue avec l’augmentation de la sévérité de l’insuffisance cardiaque (dysfonction systolique) (Petit et al.
Vet journal 2013) ; la baisse de la PA favorise
l’apparition d’une hyperazotémie. L’utilisation
d’inotropes positifs (pimobendan) permet
d’améliorer le débit rénal.
5
Déclaration publique d’intérêts sous la
responsabilité du ou des auteurs :
• Refuse de déclarer d'éventuels conflits
d'intérêt
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PROGRAMME GÉNÉRAL
Thérapeutique cardiaque :
bilans et synthèse des dernières études cliniques
Thérapeutique chez le Chat
Charlotte MISBACH
DV, PhD, Dip. DESV de médecine interne-cardiologie
20 rue milton - 75009 PARIS
Les myocardiopathies (MC) primitives félines incluent un ensemble d’affections du
muscle cardiaque ayant pour conséquences
une dysfonction myocardique diastolique
comme dans la MC hypertrophique (MCH)
et restrictive, ou systolique comme dans la
forme dilatée (MCD). Quelle que soit le type
de dysfonction, les MC peuvent évoluer vers
l’insuffisance cardiaque (IC) et l’apparition de
symptômes en relation avec une IC congestive
(ICC), une IC de bas débit ou certaines complications comme la thrombo-embolie aortique (TEA). Cette conférence à pour but de
dresser le bilan des études cliniques concernant la thérapeutique des principales MC félines et de la TEA. Au stade asymptomatique,
seule la MCH a fait l’objet d’études cliniques
évaluant les effets à court et moyen termes
des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de
l’angiotensine (IECA) et des ß-bloquants (aténolol).1-5 Les résultats, bien que controversés,
décrivent une amélioration de la relaxation et
de l’hypertrophie du myocarde ainsi qu’une
diminution de l’obstruction dynamique dans
la chambre de chasse du ventricule gauche
lors de MCH obstructive. Récemment, les
effets de l’aténolol sur le suivi à long terme de
chats atteints de MCH ont été évalués, sans
identifier de bénéfice sur la survie.4 En outre,
la spironolactone et l’ivabradine ont fait l’objet
d’études5-7 mais leur intérêt clinique dans le
traitement de la MCH asymptomatique reste
à démontrer. Le bilan des travaux réalisés ces
dernières années n’a donc pas permis de définir un consensus pour le traitement des MC
félines asymptomatiques. Il semble malgré
tout rationnel d’initier un traitement médical
chez un chat atteint de MC occulte évoluée,
en utilisant des molécules améliorant la fonction myocardique, limitant le risque de TEA
et prévenant l’activation des systèmes neurohormonaux responsables de l’ICC, même si
cette activation reste non démontrée à ce jour
dans l’espèce féline. Lorsque la MC évolue,
l’apparition de symptômes est le plus souvent
liée à la présence d’une ICC se manifestant
principalement par une dyspnée secondaire
à un œdème pulmonaire ou un épanchement
pleural. Classiquement, le traitement de l’ICC
repose sur l’administration orale ou parentérale de furosémide, à laquelle s’ajoute des
IECA, dont la bonne tolérance à long terme a
été démontrée dans l’espèce féline.8 Les IECA
entraînent une vasodilatation, une diurèse
et une natriurèse, améliorant les signes cliniques des chats atteints de MCH au stade de
l’ICC.1 Leurs effets incluraient également une
amélioration de la fonction diastolique et une
diminution de l’hypertrophie myocardique
évaluées en échocardiographie.2,9 Par ailleurs,
une seule étude a évalué l’effet d’un inhibiteur
des canaux calciques (diltiazem) chez le chat
atteint de MCH au stade de l’ICC.10 Les résultats ont montré une amélioration clinique,
radiographique et échocardiographique intéressante chez les chats traités au diltiazem
par rapport à ceux recevant du propranolol
ou du vérapamil. En revanche, aucun bénéfice
des IECA ou du diltiazem sur la survie n’a été
démontré à ce jour. Récemment, l’intérêt du
pimobendane, en complément du traitement
classique de l’ICC, a été évalué dans plusieurs
études rétrospectives incluant des chats atteints de cardiopathies avec ou sans dysfonction systolique.11-14 Les résultats ont montré
que cette molécule aurait un bénéfice sur la
survie des chats atteints de MCD et MCH.12,14
Ce bénéfice est à nuancer pour les formes
obstructives de MCH en raison d’effets secondaires observés dans une étude (hypotension
systémique grave nécessitant l’interruption
du traitement).11 Enfin, la TEA, complication
grave de MC évoluée, a fait récemment l’objet
d’une étude incluant 75 chats ayant survécu
à un premier épisode thrombo-embolique.15
De manière intéressante, les résultats ont démontré la supériorité du clopidogrel par rapport à l’aspirine pour prévenir une récidive. En
revanche, l’intérêt de prescrire un anti-coagulant pour prévenir un premier épisode de TEA
chez un chat atteint de MC reste inconnu, de
même que le type de protocole anti-coagulant
utilisé lors de TEA aiguë.
6
En conclusion, lorsque la mise en place d’un
traitement est décidée chez un chat atteint
de MC, son objectif principal doit être d’assurer une qualité de vie optimale à l’animal et à
son propriétaire, tout en minimisant les effets
secondaires des molécules utilisées. Lors de
MC occulte évoluée, l’instauration d’un traitement médical (principalement les IECA et
l’aténolol) peut être indiquée bien que son réel
bénéfice demeure inconnu à ce jour. Au stade
de l’ICC, une thérapeutique classique incluant
l’association furosémide/IECA est conseillée,
à laquelle peut s’ajouter le pimobendane lors
d’ICC réfractaire. L’utilisation du pimobendane semble à éviter dans les formes obstructives de MCH. Enfin, après un épisode de TEA,
la mise en place de clopidogrel est justifiée
pour prévenir une récidive. Des études prospectives randomisées sont nécessaires afin
d’améliorer les connaissances sur la thérapeutique des MC primitives félines.
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Déclaration publique d’intérêts sous la
responsabilité du ou des auteurs :
• Aucun conflit d'intérêt