DIAGRAMMES D`ELLINGHAM

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DIAGRAMMES D`ELLINGHAM
DIAGRAMMES D’ELLINGHAM
A de rares exceptions près, les métaux ne se rencontrent pratiquement pas dans la nature à l’état de
corps simple métal. Leur minerai sont des formes combinées oxydées (oxydes, halogénures, carbonates, phosphates, sulfures, sulfates, nitrates…).
L’extraction du métal intervient le plus souvent par réduction de l’oxyde; il est donc nécessaire
d’étudier les réactions redox par voie sèche.
I–Construction du diagramme d’Ellingham
1) Les oxydes
a) définitions
Les oxydes, de formule générale MxOy, résultent de la combinaison de l’oxygène avec un autre élément
M. De très nombreux métaux et non–métaux brûlent dans le dioxygène dans des réactions dites
de combustion.
L’élément oxygène est très électronégatif donc les composés oxygénés se caractérisent par la présence
d’ions oxydes O2O (au moins de façon formelle).
Un élément présentant plusieurs états d’oxydation peut former différents oxydes de stœchiométries di fférentes. Certains oxydes présentent même simultanément un même élément à deux degrés
d’oxydation.
n.o.
+I
+II
+III
+II,+III
+IV
+V
+VI
exemples
Cl2O
ZnO
FeO
Cr2O3
Al2O3
Fe2O3
Fe3O4
MnO2
V2O5
SO3
nom officiel
oxyde de chlore (I)
oxyde de zinc (II)
oxyde de fer (II)
oxyde de chrome (III)
oxyde d’aluminium (III)
oxyde de fer (III)
oxyde de manganèse (IV)
oxyde de vanadium (V)
oxyde de soufre (VI)
nom usuel
hémioxyde de chlore
monoxyde de zinc
oxyde ferreux
sesquioxyde de chrome
alumine
oxyde ferrique
magnétite
dioxyde de manganèse
pentaoxyde de divanadium
trioxyde de soufre
b) réactions redox par voie sèche
Les réactions de combustion d’une espèce B dans le dioxygène gazeux sont des types suivants:
2 Mn(S) +O2(G) = 2 MnO(S) [n.o.(Mn) = +II]
4 Mn(S) + 3 O2(G) = 2 Mn2O3(S) [n.o.(Mn) = +III]
Mn(S) +O2(G) = MnO2(S) [n.o.(Mn) = +IV]
4 Mn(S) +7 O2(G) = 2 Mn2O7(S) [n.o.(Mn) = +VII]
ou encore
2 Mn2O3(S) + 4 O2(G) = 2 Mn2O7(S)
Dans toutes ces réactions, l’élément oxygène passe de l’état 0 à l’état –II en gagnant formellement deux
électrons; il est donc réduit.
Ces électrons ne peuvent provenir que de l’élément antagoniste qui est donc oxydé: l’état d’oxydation
de celui–ci augmente.
Par analogie avec les réactions rédox en solution aqueuse, on peut définir un couple redox où B est
l’espèce réduite et l’oxyde formé l’espèce oxydée conjuguée. Par exemple MnO(S)/Mn(S),
MnO2(S)/Mn(S), ou Mn2O7(S)/Mn2O3(S).
Les réactions évoquées ci–dessus sont donc des réactions redox par voie sèche. Elles mettent en jeu
les couples oxyde/B et O2/oxyde car dans l’oxyde, l’élément O et l’élément B possèdent des états
redox différents par rapport au corps simple.
Ce type de réactions se généralise en remplaçant le couple O 2/oxyde par tout autre couple Ox/Red mettant en jeu des espèces en phase solide ou gazeuse.
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Diagrammes d’Ellingham
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2) Construction du diagramme
a) réaction de formation
La comparaison directe, d’un système à l’autre, des conditions de formation des divers oxydes à partir
des corps simples correspondants, nécessite de fixer un paramètre comme référence.
Déf: Par convention, l’équation–bilan de la réaction d’obtention d’un oxyde MxOy à partir d’un corps
simple M s’écrit en faisant intervenir une mole de dioxygène:
x
2
2 M + O2(G ) = M xO y
y
y
Cette convention oblige souvent à faire apparaître des coefficients stœchiométriques non entiers dans
les bilans.
La phase des espèces autres que O2 dépend de la température.
b) tracé du diagramme
On trace l’enthalpie libre standard des bilans définis ci–dessus dans l’approximation d’Ellingham
c’est–à–dire que l’on considère que ∆rH° et ∆rS° ne dépendent pas de T (en dehors des température de changements de phases).
Dans cette approximation, on peut donc écrire
∆ r G ° ( T ) = ∆ r H ° ( T0 ) − T . ∆ r S ° ( T0 )
Sur tout intervalle de température où aucun changement de phase ne se produit, ∆rG°(T) est un segment de droite dont la pente est l’opposé de l’entropie standard de la réaction étudiée.
Remarque: Si le métal et son oxyde sont solides (ou liquide), leur entropie molaire standard est négl igeable et l’on a donc
∆rS° ≈ –S°(O2) ≈ – 200 J.K–1.mol–1
Dans ce cas, les droites d’Ellingham relatives aux différents couples oxyde/métal sont sensiblement parallèles entre elles.
En revanche, lors d’un changement de phase de M ou de MxOy, les grandeurs ∆rH°(T0) et ∆rS°(T0) sont
modifiées ce qui entraîne un changement de pente du segment suivant de la courbe ∆rG°(T). Cependant, la courbe est continue pour T = TCE.
Exemple 1: Pour l’oxyde MgO, on donne:
∆rH°f(MgO(S)) = – 601,7 kJ.mol–1; S°(Mg(S)) = 32,7 J.K–1.mol–1; S°(O2(G)) = 205,0 J.K–1.mol–1;
S°(MgO(S)) = 26,9 J.K–1.mol–1
Température de fusion de Mg: TF = 649°C; Enthalpie de fusion LF = 9,2 kJ.mol–1.
u pour T < TF, le bilan est 2 Mg(S) + O2(G) = 2 MgO(S) (1)
∆rG°1(T) = 2(–601,7) – T(2.26,9 – 2.32,7 – 205)10–3 = –1203,4 + 0,2166 T en kJ.mol–1.
u pour T > TF, le bilan est 2 Mg(L) + O2(G) = 2 MgO(S) (2); en notant (3) le bilan de fusion Mg(S) = Mg(L),
L
on constate que (2) = (1) – 2.(3). Or ∆rH°3 = LF et ∆rS°3 = F . On obtient
TF
∆rG°2(T) = –1203,4 + 0,2166 T – 2.9,2 + T 2.9,98.10–3 = –1222 + 0,236 T
Exemple 2: Pour l’oxyde ZnO, on donne:
∆rH°f(ZnO(S)) = – 348,3 kJ.mol–1;
S°(Zn(S)) = 41,6 J.K–1.mol–1; S°(O2(G)) = 205,0 J.K–1.mol–1
S°(ZnO(S)) = 43,6 J.K–1.mol–1
Température de fusion de Zn TF = 420°C; Enthalpie de fusion LF = 6,7 kJ.mol–1.
u pour T < TF, le bilan est 2 Zn(S) + O2(G) = 2 ZnO(S) (1)
∆rG°1(T) = 2(–348,3) – T(2.43,6 – 2.41,6 – 205)10–3 = –696,6 + 0,201 T en kJ.mol–1.
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u pour T > TF, le bilan est 2 Zn(L) + O2(G) = 2 ZnO(S) (2); en notant (3) le bilan de fusion Zn(S) = Zn(L),
L
on constate que (2) = (1) – 2.(3). Or ∆rH°3 = LF et ∆rS°3 = F . On obtient
TF
∆rG°2(T) = –696,6 + 0,201 T – 2.6,7 + T 2.9,67.10–3 = –710 + 0,220 T
Remarques: Ÿ On vérifie que pour T = TF, on a ∆rG°1 = ∆rG°2 ;
Ÿ en général, le métal se vaporise pour une température inférieure à la température de fusion de
l’oxyde;
Ÿ pour le changement d’état solide–liquide, le changement
∆rG°(T)
TF
TE
de pente est peu visible alors que pour le changement liquide–gaz, il est important.
La courbe a en général l’allure suivante:
T
Déf: On appelle diagramme d’Ellingham l’ensemble des courbes
∆rG°(T) tracées, dans l’approximation d’Ellingham, pour
différentes réactions d’obtention d’oxydes avec la même
quantité de O2
3) Interprétation des points du diagramme
a) états d’équilibre
Si le métal et son oxyde sont dans une phase condensée (solide ou liquide), la variance du système {M,
MxOy, O2(G)} est v = (3 – 1) + 2 – 3 = 1. Le système est monovariant, on ne peut choisir arbitrairement qu’un seul facteur pour établir un état d’équilibre, par exemple T. Alors la pression du
système, notée pEQ, est une fonction de T. Cette pression est celle de O 2.
x
2
Par ailleurs, pour le bilan 2 M + O 2 ( G ) = M x O y , on peut écrire l’affinité chimique du système dans
y
y
p0
pbO g
un état quelconque A = − ∆ r G° (T ) − RT ln
.
RT ln
p O2
p
T
A
A=0
l’équilibre,
∆ r G° (T ) = − RT ln
b g
donc
bO g .
p
p0
= RT ln EQ
pEQ O 2
p0
b g
2
0
T
2
RT ln
b g
pEQ O2
p
La droite d’Ellingham correspond donc aussi à l’équation
p O
RT ln EQ 2 = f (T ) et le point d’abscisse T sur
p0
cette droite représente l’état d’équilibre du système à cette tempér ature.
b g
E
0
b) états hors d’équilibre
En étendant la remarque précédente, on peut considérer que chaque point du diagramme d’ Ellingham a
p O2
pbO g
pour coordonnées (T, RT ln
). Dans un état
RT ln
p
p0
T
quelconque du système, on a
p (O )
A
A = − RT ln EQ 2 .
p O2
b g
2
0
b g
RT ln
b g
pEQ O2
E
p
Le point E représente l’état d’équilibre à T. Le point A
représente un état tel que p(O2) > pEQ(O2) Ce ne
peut être un état d’équilibre donc il manque une
phase condensée. Or, d’après l’expression établie ci–dessus, l’affinité dans cette état est positive et le système chercherait, s’il le pouvait, à évoluer dans le sens direct du bilan. Il manque donc le métal pour permettre cette évolution. Le point A représente donc un état où
coexistent l’oxyde et O2(G).
0
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T
Conclusion: L’ensemble des points « au–dessus » de la courbe d’Ellingham représentent des états où
coexistent l’oxyde et O2. On parle de domaine de stabilité de l’oxyde.
De la même façon, les points en dessous de la courbe représentent des états où coexistent le métal M et
O2. C’est le domaine de stabilité du métal.
Remarque: Les domaines ainsi définis ne sont pas des domaines de prédominance mais des domaines
d’existence exclusive.
c) cas où le métal ou l’oxyde est gazeux
Prenons l’exemple du couple CO(G)/C(S) mis en jeu dans le bilan 2 C (S) + O2(G) = 2 CO(G).
On a cette fois (∆rαi)(G) = 2 – 1 > 0 donc on peut prévoir que ∆rS°
≈ 2 S°(CO) – S°(O2) > 0: la pente de la droite d’Ellingham
est donc négative.
La variance de cet équilibre est v = (3 – 1) + 2 – 2 = 2: le système est divariant et l’on peut fixer arbitrairement deux
paramètres intensifs (T et p ou T et p(O2)).
La
condition
d’équilibre
0 = ∆ r G° (T ) + ln
est
K° =
∆rG°
T
CO(G)
C(S)
[ p(CO)]2EQ
[ p(O 2 )]EQ
.
On
peut
F [ p(CO)] I = ∆ G° (T ) + lnF [ p(CO)] I + lnF p I On
GH p JK GH [ p(O )] JK
GH [ p(O )] JK
2
EQ
2
EQ
r
2
0
2
0
EQ
2
écrire
peut redon-
EQ
ner à la droite d’Ellingham la même signification que pour un système monovariant à condition d’imposer p(CO)EQ = 1 bar.
Il en résulte que les points situés « au–dessus » de la droite correspondent à des états tels que
p(CO) > 1 bar: c’est le domaine de prédominance de CO (mais pas d’existence exclusive car
l’équilibre est divariant). L’ensemble des points au–dessous représente le domaine de prédominance de C(S).
II–Utilisations du diagramme
1) Corrosion d’un métal par le dioxygène
Déf: On dit qu’un métal est corrodé à une température T s’il est oxydé par O2 à cette température. La
pression du dioxygène correspondant s’appelle pression de corrosion.
Soit un couple oxyde/métal dont la droite d’Ellingham est représentée ci–dessous.
On met le métal M en présence de dioxygène gazeux à la pression p(O2).
pbO g
Pour les températures telles que M et son
RT ln
TC(pC)
p
oxyde sont en phases condensées, la variance est 1 et, à l’équilibre, le choix de
T impose la valeur de p et donc celui de
p(O2)EQ.
2
T
0
Traçons la courbe
Fp I
T → g (T ) = RT lnG J
Hp K
C
RT ln
b g
pEQ O2
C
p0
g(T)
0
pour une valeur fixée pC de p(O2). C’est
une droite de pente négative car le plus souvent, pC < p0. Elle coupe la droite d’Ellingham au
point C d’abscisse TC(pC).
Les points de la droite g(T) correspondront à des états d’existence de l’oxyde (c’est-à-dire de corrosion
du métal) s’ils sont au-dessus de la droite d’Ellingham.
Conclusion: Pour une pression de corrosion pC fixée en dioxygène, il existe une température limite de
corrosion TCL telle que le métal est corrodé si T ≤ TCL.
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On peut trouver TCL graphiquement ou par le calcul avec la relation :
FG IJ
H K
∆ r G° (TCL )
p
= ln C
RTCL
p0
Remarque: Comme la pente de la droite de la droite d’Ellingham est en général positive, la température
limite de corrosion augmente si l’on augmente la pression de corrosion pC.
Si l’on impose la température TC, la corrosion a lieu si p(O2) > pC.
Conclusion: Pour une température TC donnée, il existe une pression de corrosion limite pCL telle que le
métal est corrodé à cette température si p(O2) > pCL.
On peut trouver pCL graphiquement ou par le calcul avec la relation pCL = p0 exp
FG ∆ G° (T ) IJ .
H RT K
r
C
C
Remarque: Pour la même raison que ci–dessus, la pression de corrosion limite augmente avec T.
On peut calculer la pression de corrosion théorique pour un certain nombre de métaux:
METAL
OXYDE
pC à 298 K
(en bar)
pC à 1300 K
(en bar)
Al
Al2O3
4.10–186
2.10–34
Ag
Ag2O
1.10–4
4.104
Ca
CaO
3.10–212
1.10–40
Cu
CuO
4.10–46
1.10–3
Fe
FeO
4.10–85
5.10–15
Fe
Fe3O4
4.10–88
2.10–14
Mg
MgO
1.10–200
2.10–37
Mn
MnO
5.10–128
8.10–24
Hg
HgO
4.10–22
2.108
Au
Au2O3
2.10+15
4.1010
Pb
PbO
6.10–24
2.10–7
Si
SiO2
5.10–151
2.10–28
Ti
TiO
1.10–156
5.10–29
Zn
ZnO
2.10–112
8.10–17
On constate qu’en général, la pression de corrosion limite est très faible même à des températures él evées. Dans l’air où p(O2) = 0,2 bar, on a p(O2) > pCL et la plupart des métaux sont corrodés sauf
quelques métaux dits nobles (or, platine).
Tous les autres métaux doivent être protégés par une couche imperméable (peinture, film plastique,
émail, traitement de surface). Dans certains cas, c’est la couche d’oxyde elle–même, formée lor sque le métal est placé dans l’air, qui empêche la poursuite de la corrosion (alumine Al 2O3, minium Pb3O4).
2) Réduction des oxydes métalliques
Considérons deux couples M1xOy/M1 et M2x’Oy’/M2 dont le bilans de formation sont:
x
2
x'
2
2 M 1 + O 2 = M 1x O y et 2 M 2 + O 2 = M 2 x 'O y '
y
y
y'
y'
Si l’on met en présence un métal et l’oxyde de l’autre métal, on peut écrire le bilan
x
2
2
x'
2 M 1 + M 2 x ' O y ' = M 1x O y + 2 M 2
y
y'
y
y'
On a ∆rG°(T) = ∆rG°1(T) – ∆rG°2(T) et l’affinité chimique s’écrit :
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Diagrammes d’Ellingham
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A = − ∆ r G° (T ) − RT ln
F a(M ).a(M
GH a(M ). a(M
I.
) JK
2
1x
Oy )
1
2 x'
O y'
a) constituants tous à l’état condensé
Si tous les constituants sont en phase condensée, leurs activités sont égales à 1. Donc l’activité du système ne peut être nulle qu’à la température Ti telle que ∆rG°(Ti) = 0. (C’est la température
d’inversion). Cela correspond au point d’intersection des deux droites d’Ellingham relatives aux
deux couples. Ce point représente l’état d’équilibre du système dans lequel coexistent les quatre
espèces.
On retrouve ce résultat en calculant la variance, (avec 2 * = 1 car la pression n’est pas facteur
d’équilibre):
v = (4 – 1) + 1 – 4 = 0.
Le système est invariant et on n’a pas le choix de la température d’équilibre.
A une température différente de Ti, A(T) ≠ 0 et le système tend à évoluer.
Ÿ si ∆rG°1(T) > ∆rG°2(T), A(T) < 0 et le système cherche à évoluer dans le sens indirect du bilan.
Puisque l’on a mis en présence seulement M 1 et M2x’Oy’, le système ne peut pas évoluer.
Ÿ si ∆rG°1(T) < ∆rG°2(T), A(T) > 0 et le système cherche à évoluer dans le sens direct du bilan.
Puisque l’on a mis en présence M1 et M2x’Oy’, le système peut évoluer jusqu’à disparition complète du réactif minoritaire. Le métal M 1 réduit l’oxyde
∆rG°(T)
M2x’Oy’.
T
On a vu qu’en général les droites d’Ellingham des deux couples
oxyde 2
sont sensiblement parallèles; on a donc un schéma du
type suivant si ∆rG°1(T) < ∆rG°2(T):
oxyde 1
métal 2
On constate que dans ce cas, l’oxyde 2 et le métal 1 ayant des
métal 1
domaines d’existence disjoints ne peuvent coexister. Il
se produit une réaction totale lorsqu’ils sont mis en
présence.
Conclusion: Un oxyde est réduit par tout métal dont la droite d’Ellingham se situe au–dessous de la
sienne.
Remarque: Ÿ surtout à basse température, des considérations cinétiques peuvent empêcher l’évolution
prévue par l’étude thermodynamique précédente;
Ÿ ce type d’étude est très utilisée en métallurgie pour l’élaboration d’un métal par réduction de
son oxyde par un autre métal (aluminothermie, magnésiothermie, …).
b) présence d’un constituant en phase gazeuse
Si l’un des constituant du bilan au moins est gazeux, la variance devient v = (4 – 1) + 2 – 4 = 1. On peut
avoir l’équilibre pour différentes valeurs de T.
F
La condition d’équilibre s’écrit K ° (T ) = G
Hp
I
JK
2
x
y
p0
(dans le cas où c’est le métal M2 qui est
EQ ( M 1( G ) )
gazeux). Le choix de T impose donc la valeur de pEQ(M1(G)) et réciproquement.
Le diagramme devient dans ce cas
La température Ti du point d’intersection des courbes
∆rG°(T)
TVAP(M1)
Ti
T
d’Ellingham est telle que ∆rG°(Ti) = 0: c’est donc la
température d’inversion.
oxyde 2
métal 2
oxyde 1
métal 1
Les Matériaux métalliques
Si T < Ti, ∆rG°(T) < 0 mais le signe de A(T) dans l’état initial du système dépend de la valeur de p0(M1(G)). Si
A0(T)
> 0, le système évolue dans le sens direct du
bilan jusqu’à atteindre l’état d’équilibre tel que
Diagrammes d’Ellingham
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F
K ° (T ) = G
Hp
p0
EQ ( M 1( G ) )
rect du bilan.
I
JK
2
x
y
. De même pour T > Ti, on peut encore avoir évolution dans le sens di-
Conclusion: Dans le cas où l’une des espèces est gazeuse, on peut avoir coexistence des quatre espèces
du bilan à des températures différentes de Ti.
Dans l’exemple étudié, on pourra avoir réduction de l’oxyde de M 1 par M2 en se plaçant à T > Ti (pour
avoir K°(T) < 1 et en éliminant le gaz M 1 au fur et à mesure de sa formation pour maintenir
0 et favoriser le sens indirect du bilan.
A <
c) cas de plusieurs oxydes d’un même élément
Un même élément, métallique ou non, peut posséder plusieurs oxydes de stoechiométries différentes.
Par exemple le plomb (PbO, Pb3O4, PbO2), le fer (FeO, Fe2O3, Fe3O4), le carbone (CO, CO2)…
On est donc conduit à définir au moins deux couples pour le même élément et à étudier la stabilité rel ative des oxydes.
Pour le carbone et ses deux oxydes, on donne à 298 K:
∆rH° (en kJ.mol )
S° (en J.K–1.mol–1)
–1
O2(G)
C(S)
CO(G)
CO2(G)0
0
0
–110,5
–393,5
205
5,7
197,6
213,6
Pour le bilan 2 C(S) + O2(G) = 2 CO(G), on a
∆rG°1(T) = (2.(–110,5)) – T (2.197,6 – 205 – 2.5,7)
= – 221 – 0,179 T en kJ.mol–1
et pour le bilan 2 CO(G) + O2(G) = 2 CO2(G), on a
∆rG°2(T) = (2.(–393,5) – 2.(– 110,5)) – T (2.293,6 – 205 – 2.197,6)
= – 566 + 0,173 T en kJ.mol–1
Les pentes sont de signe contraire. On a donc le schéma suivant:
Les deux droites se coupe pour T1 = 980 K. Comme il existe
∆rG°(T)
Ti
des espèces gazeuses, on a des domaines de prédomiT
nance et non d’existence.
CO(G)
Pour T > Ti, il existe un domaine (entre les deux droites) où CO
IV
C(S)
prédomine devant C et devant CO 2. Ce domaine est donc
II
CO2(G)
celui de CO. En dessous de la courbe (II/0), c’est le doII
maine de C; en dessus de la courbe (IV/II), c’est le doCO(G)
0
maine de CO2.
Par contre, pour T < Ti, on constate que la position des deux
droites entraîne que CO réducteur (couple IV/II) réduit CO oxydant (couple II/0). Il n’est donc
pas stable et se dismute suivant le bilan 2 CO(G) = C(S) + CO2(G).
Dans ce domaine de température, l’oxydation de C (S) par le dioxygène conduit directement à CO 2(G)
suivant le bilan C(S) + O2(G) = CO2(G).
On calcule ∆rG°3(T) = (1/2)∆rG°2(T) + (1/2)∆rG°1(T)
= – 393,5 – 0,003 T.
C’est une droite de pente quasiment nulle. Le diagramme
d’Ellingham est donc le suivant:
∆rG°(T)
On en déduit que CO n’est pas thermodynamiquement stable à
température ambiante. Il n’existe à cette température qu’à
cause d’un blocage cinétique.
Les Matériaux métalliques
Diagrammes d’Ellingham
Ti
T
CO2(G)
IV
CO(G)
II
II
C(S)
0
page 7/11
III–Application à la pyrométallurgie du zinc
1) Généralité sur le zinc
a) état naturel
La teneur moyenne en élément zinc de l’écorce terrestre est de 0,08 % soit 80 g de métal par tonne.
On le trouve essentiellement sous forme de sulfure ZnS (appelé blende) ou de silicate (appelé calamine).
Les minerais exploités (qui sont formés de blende associée à une gangue constituée de calcite CaCO3 et
de dolomite MgCO3) renferme jusqu’à 20% de zinc.
La plus grande mine du monde se situe en Alaska (teneur en zinc 17%).
La blende est décrite par une structure ionique de type c.f.c. pour les ions Zn2+ avec occupation d’un site
tétraédrique sur deux par les ions S2–.
b) le métal
Le zinc est un métal blanc bleuâtre.
La température de fusion est TF = 420°C et la température de vaporisation est TV = 907°C.
La densité est d = 7,14.
Le zinc cristallise dans une structure hexagonale compacte.
c) l’atome
Le numéro atomique est Z = 30; la configuration électronique de l’atome dans son état fondamental est
donc:
1s2–2s22p6–3s23p63d10–4s2.
Le métal s’oxyde facilement pour donner Zn 2+.
d) applications
Le métal est très réducteur: de nombreuses piles utilisent le zinc comme anode.
Mais à l’air, il se forme une couche superficielle d’oxyde qui le protège. Il est donc utiliser en France
pour les toitures.
On utilise le zinc dans la protection d’autres métaux (comme le fer) contre la corrosion (galvanis ation).
Le zinc est utilisé dans les alliages comme:
Ÿ le laiton (avec le cuivre);
Ÿ les alliages de fonderie comme Zn–Al ou Zn–Al–Cu.
2) Grillage de la blende
Le traitement du minerai de zinc commence par l’oxydation du sulfure en oxyde: cette opération est
appelée grillage.
a) obtention d’un concentré
Le minerai naturel titre moins de 20% de zinc. Il faut donc l’enrichir en éliminant une partie de la ga ngue.
Le minerai est finement broyé (particules dont le diamètre est de l’ordre de 0,1 mm). Cette poudre est
mise en suspension dans l’eau puis on insuffle de l’air. Par suite de la différence de mouillabilité
des différents constituants du minerai, les bulles d’air permettent à la blende de flotter alors que la
plus grande partie de la gangue précipite.
Cette opération s’appelle la flottation.
Le concentré ainsi obtenu contient de 40 à 60% de Zn (c’est–à–dire 60 à 90% de ZnS).
b) oxydation du concentré
α) réaction principale
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Diagrammes d’Ellingham
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On grille le concentré dans l’air selon le bilan:
3
ZnS(S) + O 2 ( G ) = ZnO (S) + SO 2(G)
2
On constate que ce n’est pas l’état d’oxydation du zinc qui est modifié mais celui du soufre qui passe
de l’état –II à l’état +IV. L’oxydant est l’oxygène de l’air qui passe de 0 à –II.
Avec les tables thermodynamiques, on peut calculer ∆rH° = – 439,1kJ.mol–1. D’après la loi de
Van’t Hoff, elle est favorisée par une faible température. Mais pour garder une vitesse suffisante, on opère à 700°C.
On calcule (∆rα)G < 0 donc, d’après la loi de Le Châtelier, cette réaction est favorisée par une forte
pression.
En fait, pour T = 700°C, on trouve K° ≈ 6×1019. La réaction est donc totale et il est inutile
d’augmenter la pression.
β) réactions parasites
Il peut se produire essentiellement deux autres réactions:
u ZnS(S) + 2 O2(G) = ZnSO4(S). Cette réaction se produit vers 500–600°C et n’intervient donc pas
dans le domaine de température où l’on opère.
u SO2(G) + ½ O2(G) = SO3(G). En fait, le SO2 produit par le grillage est récupéré puis transformé
en acide sulfurique en passant par SO 3.
c) mise en oeuvre industrielle
Le concentré est chauffé dans un courant d’air. Vers 700°C, la réaction d’oxydation s’amorce. C’est
l’allumage.
La réaction étant exothermique, la température augmente et peut dépasser 1000°C.
On obtient le concentré grillé appelé calcine.
3) Obtention du zinc par métallurgie thermique
a) principes de la pyrométallurgie
Le passage de l’oxyde au métal est une réduction. Du point de vue industriel, le réducteur doit être
peu coûteux et agir aux températures les plus basses possibles.
Pour améliorer la cinétique, on choisit en général un réducteur à l’état gazeux.
On utilise souvent H2 (couple H2O/H2) ou CO (couple CO2/CO). Les droites d’Ellingham correspondantes ont une pente positive et reste parallèle à celles des couples oxyde/métal. Les m étaux les plus réducteur ne pourront pas être obtenus par cette méthode.
Le carbone (couple CO/C) conduit à une droite d’Ellingham de pente négative qui coupe toujours la
droite du couple oxyde/métal pour une température suffisamment élevée. C’est le principe de
la carbothermie (le carbone est sous forme de coke).
b) diagramme d’Ellingham du zinc
Les tables thermodynamiques indiquent:
O2(G)
Zn(S)
ZnO(G)
∆fH° (en kJ.mol )
0
0
–350,5
S° (en J.K–1.mol–1)
205
41,6
43,6
–1
–1
Pour le zinc, TF = 693 K avec LF = 6,7 kJ.mol ;
TVAP = 1180 K avec LVAP = 114,8 kJ.mol–1.
Dans le domaine de température envisageable, ZnO ne fond donc pas.
Le bilan de formation est 2 Zn(S) + O2(G) = 2 ZnO(S)
u si T < 693 K, le zinc est solide et l’on trouve:
∆rG°1(T) = 2(–350,5) – T(2.43,6 – 205 – 2.41,6) = – 701 + 0,201 T en kJ.mol–1.
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Diagrammes d’Ellingham
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u si 693 K < T < 1180 K, le zinc est liquide avec ∆fH°(Zn(L)) = 0 + 6,7 = 6,7 kJ.mol–1 et
6,7
S° ( Zn ( L ) ) = 41,610 −3 +
= 51,27 10−3 en kJ.K–1.mol–1. On en déduit :
693
∆rG°2(T) =[2(–350,5) – 2.6,7] – T(2.43,6 – 205 – 2.51,27) = – 714,4 + 0,220 T en kJ.mol–1.
u si 1180 K < T, le zinc est gazeux avec
∆rH°(Zn(G)) = 6,7 + 114,8 = 121,5 kJ.mol–1 et
114,8
S° ( Zn ( G ) ) = 51,27 10−3 +
= 148,6 10−3
1180
en kJ.K–1.mol–1. On en déduit
∆rG°2(T) =[2(–350,5) – 2.121,5] – T(2.43,6 – 205 –
2.148,6) = – 944 + 0,415 T en kJ.mol–1.
On obtient le diagramme d’Ellingham suivant, sur
lequel sont placées les droites relatives aux
couples du carbone.
∆rG°(T)
980 1180
693
T
CO2(G)
ZnO(S)
Zn(S)
C(S)
Zn(L)
B
CO(G)
A
Zn(G)
c) choix du réducteur
Industriellement, on utilise le carbone et le monoxyde de carbone. Sur le diagramme ci–dessus, on
constate que la droite d’Ellingham du zinc coupe celles de C et de CO en deux points dont les
abscisses sont TA = 1217 K et TB = 1562 K.
On peut donc envisager deux réducteurs possibles:
Ÿ le carbone (couple CO/C) avec le bilan
ZnO(S) + C(S) = CO(G) + Zn(G)
de température d’inversion TA = 1217 K
Ÿ le monoxyde de carbone (couple CO 2/CO) avec le bilan
ZnO(S) + CO(G) = CO2(G) + Zn(G)
de température d’inversion TB = 1562 K
d) mise en oeuvre industrielle
CHARGEMENT
La pyrométallurgie est réalisée dans un haut fourneau. Parmi différents procédés, le plus utiGAZ
GAZ
lisé actuellement est nommé Procédé Impe1000°C
rial Smelting (ISP).
On charge par la partie supérieure appelée le
AIR A 920°C
AIR A 920°C
gueulard le mélange de calcine, de coke et
de fondant (celui–ci se combine avec la gangue pour former le laitier liquide que l’on
recueille au bas du haut–fourneau dans le
creuset).
On injecte de l’air à 920°C au bas du réacteur ce
qui entraîne la combustion complète du carbone en CO. Cette réaction est exothermique
et permet de maintenir la température à environ 1000°C se qui est nécessaire pour les réactions de réduction qui sont endothermique.
AIR A 920°C
AIR A 920°C
Pour cette raison, une deuxième entrée d’air
se trouve en partie supérieure (au dessus du
LAITIER A 1250°C
chargement) pour y réaliser également la
combustion du carbone.
CREUSET
Le haut–fourneau fonctionne en continu.
Le laitier liquide recueilli en bas contient le plomb liquide to ujours présent dans le minerai de zinc.
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Le mélange gazeux contenant le zinc sort en haut du haut–fourneau à environ 1000°C. La composition
moyenne est, sous 1 bar: 8% de Zn, 11% de CO2, 25% de CO, 1% de H2 et 55% de N2.
Ce gaz est envoyé dans un condenseur refroidi par une pluie de plomb liquide vers 450°C. Seul le zinc
se liquéfie en formant un alliage Pb–Zn.
En refroidissant, cet alliage se dépare en deux phases: l’une est riche en plomb et renvoyée dans le
condenseur; la deuxième est riche en zinc et ne contient que 1,5 à 2% de plomb. Cette opération
est appelée liquation.
Le zinc brut (à 98–98,5%) ainsi obtenu est appelé zinc d’oeuvre. Il est raffiné par distillation fractionnée et l’on obtient du métal pur à 99,99%.
Résumé:
ZN
BLENDE
FLOTTATION
RAFFINAGE
ZINC D’OEUVRE
CONCENTRE DE ZNS
LIQUATION
GRILLAGE
REDUCTION
CALCINE, ZNO
ZN(G) (Pb)
Références:
Chimie Spé PSI
R.DIDIER & P.GRÉCIAS
Chimie 2ème année
A.DURUPHTY; A.CASALOT; A.JAUBERT
Les Matériaux métalliques
Ed Tec & Doc
Ed Hachette
Diagrammes d’Ellingham
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