Vol. 19 No 1, 2008 - groupetraduction.ca
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Groupe traduction PHARMATERMMD Bulletin terminologique de l’industrie pharmaceutique Volume 19, no 1, 2008 Article et dénomination commerciale d’un médicament Doit-on mettre l’article devant la dénomination commerciale d’un médicament? Le cas échéant, de quel genre doit-il être? Après un bref aperçu de ce que l’on trouve dans les ouvrages de référence généraux, nous verrons l’usage par des exemples tirés de sources médicales variées. Ouvrages généraux Les auteurs des sources consultées ne semblent pas énoncer de règle précise sur l’emploi de l’article devant la dénomination commerciale d’un produit. Par contre, on peut trouver des exemples d’utilisation de celui-ci sous la rubrique « Emploi de la majuscule ». Ainsi, dans Le français au bureau figurent les exemples suivants : « une Rolls-Royce, un Campari […] des Fruibec1 ». On en rencontre aussi dans Le guide du rédacteur : « La Boréale est une bière québécoise. Il avait une Camaro2. » Le Dictionnaire Bordas des pièges et difficultés de la langue française abonde dans le même sens : « Boire un Martini. […] Une Cadillac3. » L’article est donc employé devant une dénomination commerciale et il s’accorde en genre avec le terme désignant la catégorie à laquelle appartient le produit (féminin s’il s’agit d’une voiture, par exemple). Toutefois, nous verrons plus loin que cette règle ne s’applique pas systématiquement aux textes médicaux et qu’on rencontre des noms commerciaux féminins, même si la catégorie du médicament est du genre masculin, notamment si le nom commercial se termine en « ine ». Textes médicaux Quérin, dans son Dictionnaire des difficultés du français médical, affirme : « […] Enfin, il existe une controverse sur l’emploi de l’article devant le nom commercial d’un médicament. Les médecins l’emploient couramment, tout comme devant les noms génériques : je vous prescris du LasixMD, tout autant que je vous prescris du furosémide. Aux oreilles des praticiens, LasixMD maîtrise la tension artérielle (sans article initial) sonne aussi faux (tout en rappelant l’usage anglais) que Mercedes est la meilleure voiture. L’usage est cependant différent dans les sociétés pharmaceutiques, où l’on omet l’article devant les noms commerciaux, peut-être par crainte de favoriser, en employant l’article, une confusion entre nom commercial et nom commun, comme cela s’est produit pour l’aspirine (voir ASPIRINMD – ASPIRINE)4. » Regardons ensuite du côté des répertoires de spécialités pharmaceutiques. Tant dans le Vidal 2007 que dans le Compendium des spécialités pharmaceutiques (qui est cependant une source traduite) de 2006, on omet l’article devant la dénomination commerciale d’un médicament : « Remicade doit être administré par voie intraveineuse chez l’adulte […]5 » et « REMICADE ne doit pas être administré aux patients atteints d’une infection évolutive […]6 ». Il en est de même dans La Revue Prescrire : « Granocyte° est soumis à prescription restreinte […]7 » ou « Aptivus° est désormais commercialisé en pharmacie de ville […]8 ». Difficile de connaître les motifs derrière cet usage. Certains ont cru à une obligation juridique. Toutefois, au Canada, rien dans la Loi sur les aliments et drogues9 ne permet de conclure à une telle obligation. Voyons maintenant des ouvrages de pharmacologie. Dans la majorité d’entre eux, les auteurs donnent au départ la dénomination commune du médicament suivie du ou des noms commerciaux entre parenthèses : « Le noramidopyrine méthane sulfonate de sodium est présenté soit à l’état isolé (Novalgine, comprimés à 0,50 g […]), soit en association à d’autres principes actifs […] (Algo-Buscopan; Avafortan; Baralgine) […]10 ». Certains emploient l’article, mais rarement. Ainsi dans Pharmacologie clinique – bases de la thérapeutique, on retrouve l’article devant le nom commercial du médicament : « les comprimés contiennent une dose relativement faible de dérivé pyrazolé […] sauf dans le cas de la Baralgine11. » Toutefois, par la suite, la dénomination commune est utilisée, et le nom commercial du produit n’est plus mentionné qu’une fois. Ce dernier exemple illustre aussi une exception à la règle énoncée au deuxième paragraphe du présent article, puisque BaralgineMD est féminin même si la catégorie du produit (dérivé pyrazolé) est du genre masculin. Voici d’autres exemples de l’emploi de l’article : « Pour les posologies supérieures à 10 mg par jour, utiliser le SOLUPRED® […]; l’utilisation du SYNACTHÈNE® est incommode12 »; « […] le Colchimax® associe de la colchicine, du phénobarbital, un atropinique (tinémonium) et de la poudre d’opium13 ». Il y a aussi des auteurs qui emploient l’article dans certaines phrases, mais l’omettent dans d’autres : « ACUPAN n’accélère pas le sevrage d’un tel patient […] Certains effets indésirables de l’ACUPAN peuvent être majorés par les sympathicomimétiques […]14 » et « On peut aussi proposer l’ACTONEL® (Risédronate) […] On prescrit aussi ACTONEL® […]15 ». Bien entendu, il est préférable d’adopter une solution – soit l’emploi, soit l’omission de l’article – et de la conserver tout le long du texte. Analysons quelques encyclopédies et périodiques médicaux français. Dans La Presse Médicale, on emploie l’article : « Seules la Tégéline® et l’Endobuline® sont utilisées […]16 » et « Le Lacteol® (Lactobacillus acidophilus) pourrait avoir une action […]17 ». On l’emploie parfois dans La Revue du Praticien : « L’Aspégic peut également s’administrer par voie intraveineuse18 » et « […] l’équivalence porte sur la dose quotidienne ou pluriquotidienne (3 j) pour le Durogesic19. » Dans l’Encyclopédie médico-chirurgicale, on mentionne d’abord la dénomination commune, accompagnée de l’article qui convient, puis la dénomination commerciale entre parenthèses : « Le léflunomide (Arava® ) est le plus récent des traitements de fond chimiques de la polyarthrite rhumatoïde20. » Par contre, l’article figure dans le Traité de Médecine Akos : « […] certains traitements comme la Salazopyrine® […] (sauf l’Enbrel® dans la maladie de Crohn)21. » Bref, l’usage est loin d’être fixé. Du côté québécois, l’article apparaît dans au moins deux périodiques médicaux ou pharmaceutiques, soit L’actualité médicale et Québec Pharmacie : « Santé Canada a approuvé l’utilisation du Remicade (infliximab)22 », « Les études ont été complétées par 86 % des participants qui recevaient le Lyrica23 », « Le SativexMD 24 ». Il en est de même dans Les diplômés, revue à caractère général : « Depuis plus de 10 ans, elle prescrit régulièrement du Prozac à ses patients quadrupèdes25. » Dans les sources électroniques, on observe les mêmes tendances que dans les sources mentionnées ci-dessus : présence de l’article dans les textes grand public, omission ou emploi dans les textes à caractère plus technique. Voyons quelques exemples. Dans une brochure destinée aux arthritiques, on peut lire : « Le Remicade (infliximab), l’Enbrel (etanercept) et l’Humira (Adalimumab) (sic) sont les trois principaux inhibiteurs du TNF utilisés dans le traitement de la P. R.26 ». Dans un texte à l’intention des spécialistes, « PROTELOS réduit le risque de fractures vertébrales […]27 » et dans un autre, « […] l’une le NEORAL* a une meilleure biodisponibilité par voie orale que l’autre, le SANDIMMUN* 28. » Conclusion D’après ce qui précède, il conviendrait d’omettre l’article dans les monographies de médicaments et de l’utiliser dans les textes grand public. Dans les autres types d’écrits, on a le choix entre ces deux solutions, puisqu’aucune règle de grammaire ni loi ne permet de trancher le débat et que l’usage ne semble pas fixé – bien qu’au Québec la tendance aille dans le sens de l’emploi de l’article. Toutefois, le problème demeure pour les textes des sociétés pharmaceutiques comportant un extrait de monographie de produit dans un texte grand public. On pourra alors, comme certains auteurs, utiliser la dénomination commune, accompagnée de l’article qui convient, puis la dénomination commerciale entre parenthèses. Par exemple, on écrira « le ranélate de strontium (Protelos®) peut être prescrit aux sujets âgés ». Louise LeBlanc Chargée de cours Université de Montréal Références 1. Guilloton, N. et Cajolet-Laganière, H., Le français au bureau, 4e édition, Québec, Les publications du Québec, 1996, p. 135. 2. Bureau de la traduction, Le guide du rédacteur, 2e édition, Ottawa, Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 1996, p. 84. 3. Girodet, J., Dictionnaire Bordas des pièges et difficultés de la langue française, Paris, Bordas, 1997, p. 885. 4. Quérin, S., Dictionnaire des difficultés du français médical, nouvelle édition revue et augmentée, s. l., Edisem - Maloine, 2006, p. 28. 5. Vidal 2007, 83e édition, Issy-les-Moulineaux, Vidal, 2007, p. 1855. 6. Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques, Ottawa, L’Association des pharmaciens du Canada, 2006, p. 2106. 7. La Revue Prescrire, tome 27, n° 282, avril 2007, p. 262. 8. La Revue Prescrire, op. cit., p. 263. 9. Loi sur les aliments et drogues, http://lois.justice.gc.ca/fr/showdoc/cr/C.R.C.-ch.870/boga:l_C-gb:s_C_01_001//fr#anchorbo-ga:l_C-gb:s_C_01_001. 10. Giroud, J.-P., Mathé, G. et Meyniel, G., Pharmacologie clinique – bases de la thérapeutique, Paris, Expansion Scientifique Française, 1988, p. 884. 11. Pharmacologie clinique – bases de la thérapeutique, op. cit., p. 884. 12. Bergmann, J.F. et coll., Thérapeutique, 4e édition, Paris, Édition Marketing, 1991, p. 586. 13. Bismuth, C. et coll., Toxicologie clinique, 5e édition, Paris, Flammarion Médecine-Sciences, 2000, p. 112. 14. Perlemuter, L. et Perlemuter, G., Guide de thérapeutique, 3e édition, Paris, Masson, 2003, p. 1654 et p. 1655. 15. Perrot, S., Thérapeutique pratique, 15e édition, Paris, Med-Line, 2005, p. 964 et p. 965. 16. La Presse Médicale, tome 36, n° 4, cahier 1, avril 2007, p. 607. 17. La Presse Médicale, op. cit., cahier 2, p. 702. 18. La Revue du Praticien, vol. 48, 1998, p. 1011. 19. La Revue du Praticien, vol. 50, 2000, p. 908. 20. Encyclopédie médico-chirurgicale, Appareil locomoteur, 14-220-A-20, 2006, p. 7. 21. Traité de Médecine Akos, 7-0510, 2005, p. 1. 22. L’actualité médicale, vol. 27, n° 16, 3 mai 2006, p. 41 23. Québec Pharmacie, vol. 54, n° 3, mars 2007, p. 23. 24. Québec Pharmacie, vol. 54, n° 4, avril 2007, p. 45. 25. Les diplômés, vol. 412, printemps 2007, p. 24. 26. Association Polyarthrite, http://www.arthrites.be/nouvelles_1.asp. 27. http://www.esculape.com/medicament/ranelate%20strontium-has.html. 28. pharmacorama.com/Rubriques/Output/Cytokine4_1.php. Dépôt légal – 1er trimestre 1990 ISSN 0847 513X Copyright© 2008 Tous droits réservés. Le contenu de cette publication ne peut être reproduit en tout ni en partie sans le consentement écrit du Groupe traduction. Les opinions exprimées dans cette publication n’engagent en rien Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada. Ont collaboré à ce numéro de Pharmaterm : Johanne Brisson, AstraZeneca Canada Inc. Manon Genin, Pfizer Canada Inc. Nadine Tabib, Johnson & Johnson Inc. Nous remercions également Lise Genest, terminologue et traductrice autonome, pour sa collaboration à la rédaction de ce numéro de Pharmaterm. Pour consulter Pharmaterm en ligne : www.groupetraduction.ca.