Capitaux, monnaie, banques

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Capitaux, monnaie, banques
Capitaux, monnaie, banques
Domaine public
Marchés et contrats
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Assemblée générale (Section des finances)
- Avis n° 363 834 – 9 décembre 1999
Banque de France - Statut juridique de la Banque de France : personne morale de droit public sui
genesis - Gouverneur de la Banque de France et sous-gouverneurs - Possibilité de donner des
délégations de compétence à d'autres agents de la Banque de France.
Biens de la Banque de France - Application du régime de la domanialité publique à ceux de ces biens
affectés au service public et spécialement aménagés à cet effet.
Marchés de la Banque de France - Non- application du Livre II du Code des marchés publics à ces
marchés.
Le Conseil d'Etat, saisi par le ministre de l'Economie, des Finances et de l'industrie des
questions suivantes :
1 - La Banque de France est-elle un établissement public de l'Etat ou une personne publique sui
generis ? Si elle est un établissement public, doit-elle être regardée comme ayant un caractère
administratif ou industriel et commercial ?
2 - La Banque de France est-elle soumise au livre II du Code des marchés publics pour l'ensemble de
ses activités ?
3 - Les biens de la Banque de France sont-ils soumis au régime de la domanialité publique ?
4 - Peut-on considérer que la qualification de personne publique donnée par le Tribunal des Conflits à
la Banque de France ne remet pas en cause la légalité du décret n° 87-948 du 26 novembre 1987
modifié, citant expressément la Banque de France parmi les entreprises publiques et les sociétés
nationales soumises aux dispositions de l'ordonnance du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à
la participation des salariés aux résultats de l'entreprise ?
5 - La circonstance que le sixième alinéa de l'article 13 de la toi du 4 août 1993 modifiée, fixant une
règle relevant normalement du domaine réglementaire, ait prévu que le Gouverneur puisse déléguer
ses compétences aux sous-gouverneurs, fait-elle obstacle à ce qu'une disposition réglementaire
prévoie également, dans des conditions précisément définies, que le Gouverneur puisse donner à
d'autres agents de la Banque de France des délégations de compétence ? Ou seule la voie de la
délégation de signature demeure-t-elle ouverte ?
Est d'avis de répondre dans le sens des observations qui suivent :
1°) Aux termes de l'article 6 de la loi du 4 août 1993 susvisée, « la Banque de France est une
institution dont le capital appartient à l'Etat ». Elle est une personne publique, ainsi que l'a jugé le
Tribunal des conflits dans sa décision du 16 juin 1997 (société La Fontaine de Mars, M. et Mme
Muet), chargée par la loi précitée de missions de service public qui, ayant principalement pour objet la
mise en oeuvre de la politique monétaire, le bon fonctionnement des systèmes de compensation et de
paiement et la stabilité du système bancaire, sont pour l'essentiel de nature administrative. De ce fait,
la Banque de France ne peut être qualifiée d'établissement public industriel et commercial.
Mais, en vertu des dispositions combinées des articles 21 et 11 de la loi du 4 août 1993, les opérations
de la Banque de France ainsi que ses activités autres que celles qui relèvent des missions du Système
européen de banques centrales « sont régies par la législation civile et commerciale » , d'où il suit que,
selon les opérations et activités en cause, le régime juridique des actes et contrats de la Banque de
France ainsi que de ses relations avec les usagers et les tiers peut, le cas échéant, ne pas être celui qui
s'applique en principe aux établissements publics administratifs.
En outre, bien que les litiges individuels qui l'opposent à ses agents ressortissent à la compétence de la
juridiction administrative en vertu d'une disposition législative expresse constamment reprise depuis
1806, la Banque de France figure à l'annexe III de la loi du 26 juillet 1983 susvisée relative à la
démocratisation du secteur public, laquelle ne s'applique pas aux établissements publics administratifs,
et est ainsi comprise dans le champ d'application de cette loi à l'exception des dispositions de son titre
II. En outre, contrairement là encore aux normes appliquées aux établissements publics administratifs,
la Banque de France n'est pas soumises aux règles de la comptabilité publique, mais, en vertu du titre
IV du décret du 3 décembre 1993 susvisé, à des règles comptables qui sont principalement celles du
Code de commerce et éventuellement celles que prévoit la réglementation bancaire.
Il y a lieu de relever également que, si la Banque de France est une institution de l'Etat, celui-ci ne
peut en rien contrôler ni orienter son action dans l'exercice des missions qu'elle accomplit à raison de
sa participation au Système européen de banques centrales, en vertu de l'article 108 CE du traité
instituant la Communauté européenne et de l'article 1er de la loi du 4 août 1993.
Enfin, le fait que la Banque de France a un capital confère à cette personne publique un caractère
particulier qui la distingue des établissements publics.
Il résulte de l'ensemble de ces considérations que, ne pouvant être classée dans aucune des catégories
d'établissements publics, la Banque de France est une personne publique sui generis.
2°) Il découle de ce qui a été dit ci-dessus que la Banque de France n'est pas soumise au livre II du
Code des marchés publics, dont les dispositions s'appliquent, en vertu de l'article 39 dudit code, aux
« marchés de l'Etat et de ses établissements publics autres que ceux avant :e caractère industriel et
commercial ».
3°) La Banque de France étant une personne publique chargée d'un service public, et aucune des
dispositions législatives qui la régissent ne faisant obstacle à l'application du régime de la domanialité
publique, ce régime s'applique à ceux des biens lui appartenant qui sont affectés au service public dont
elle a la charge et sont spécialement aménagés à cet effet.
4° ) Le Conseil d'Etat ne pourrait se prononcer sur la légalité des dispositions susvisées du décret du
26 novembre 1987 sans prendre parti sur la nature de la situation juridique, de droit public ou de droit
privé, du personnel de la Banque de France. Or cette question ne peut être tranchée ici dès lors qu'elle
se pose dans des litiges actuellement pendants devant la section du contentieux.
5°) Les dispositions de l'article 13 de la loi du 4 août 1993 selon lesquelles « les sous-gouverneurs
exercent les fonctions qui leur sont déléguées par le Gouverneur » doivent être interprétées comme
ayant entendu, non pas énoncer limitativement les cas dans lesquels le Gouverneur de la Banque de
France peut déléguer ses compétences, mais seulement préciser le rôle des deux sous-gouverneurs au
sein de l'institution. Elles ne font donc pas obstacle à ce qu'une disposition réglementaire prévoie
également, dans des conditions et limites précisément définies, que le Gouverneur peut donner des
délégations de compétence à d'autres agents de la Banque de France.

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