La compagnie AirFrance : entre alliances et fusions

Transcription

La compagnie AirFrance : entre alliances et fusions
La compagnie AirFrance :
entre alliances et fusions
Thierry Pénard
Stratégie d’entreprise
Questions
• Quelles sont les spécificités (du côté de l'offre et de la
demande) des industrie de réseaux (comme l’industrie
aérienne) par rapport aux industries plus traditionnelles
(comme le textile) ?
• Comment peut-on analyser les stratégies tarifaires d’Air
France depuis la libéralisation du marché aérien (c’est-àdire depuis l’ouverture à la concurrence dans les années
90) ?
• Pour Air France et KLM, quel était l’objectif de la fusion ?
Les résultats sont-ils à la hauteur des effets attendus pour
les deux compagnies aériennes? Ce type de fusion peut-il
bénéficier au consommateur final ?
Historique d’Air France
• Née en 1933 de la fusion de 5 compagnies aériennes
avec l’État comme premier actionnaire
– nationalisée en 1945
• 1997 Fusion avec Air Inter
• 1999 Ouverture du capital et introduction en bourse
• 2000 Lancement de l’alliance SkyTeam
– Delta, AeroMexico, Korean, puis Alitalia
•
•
•
•
2004 Fusion avec KLM
2005 Nouvelle vente d’une partie du capital par l’Etat
2007 Création de Transavia, filiale low cost
2009 Entrée dans le capital d’Alitalia (25%)
Le chiffre d’affaires d’Air France
avant fusion
14 000
12 280
12 528
12 687
12 337
en millions d'euros
12 000
10 000
8 000
Autres
Maintenance
Fret
6 000
Passager
4 000
2 000
0
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
Le résultat net d’Air France
avant fusion
450
421
400
354
en millions d'euros
350
300
250
249
200
153
150
120
93
100
50
0
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
3500
L’endettement d’Air France
avant fusion
2900
3000
2860
2530
en millions d'euros
2500
2200
2200
2000
2000
1500
1000
500
0
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
En 2003-2004, 20% du CA et 62% des fonds propres
Le groupe Air France - KLM
• Actionnariat du groupe Air France-KLM (2008)
– Salariés : 11.3 %
– l’État français : 17.9 %
– Marchés financiers: 70.1%
• 104 000 employés (y compris dans les filiales)
• 606 avions en exploitation et 248 destinations
• 74,8 millions de passagers (+2,4%)
– Premier groupe européen en passagers
• Un CA de 24,11 milliards d’euros en 2007-2008
(+4,5%)
– Premier groupe mondial en CA et sur le fret
Décomposition du CA de
Air France-KLM par activités
Passager
Fret
Maintenance
Autres
4%
3%
13%
80%
Répartition des destinations
Afrique et MO
9%
France
19%
Asie
11%
• Logique de gestion de portefeuille,
répartition des risques entre les
différentes zones
géographiques/pays
Amérique
15%
Mais 50 % du
CA réalisé sur
la France
Gestion des destinations: 248
destinations
Europe
46%
• Des réseaux complémentaires:
• Air France très présent sur le
Sud de l’Europe et l’Afrique,
• KLM très présent sur l’Europe
du Nord/Nord-Est et l’Asie
Evolution du cours boursier d’AF-KLM
Un secteur en crise
Selon les dernières estimations de l'Association du transport aérien international (Iata),
les pertes cumulées des compagnies aériennes devraient atteindre 5,2 milliards de
dollars en 2008, contre 5,6 milliards de bénéfices en 2007, sur la base d'un prix
moyen du baril de 113 dollars. .. Selon les premières prévisions de l'Iata pour 2009,
le transport aérien devrait encore générer plus de 4 milliards de dollars de pertes l'an
prochain, sous les effets conjugués de l'augmentation de la facture pétrolière et du
ralentissement du trafic.
De plus, l'impact des hausses tarifaires a bel et bien cassé la croissance du trafic aérien
et fait resurgir le spectre de la surcapacité. Alors que l'offre globale des compagnies
aériennes progressait encore de 3,8 % en juillet, le trafic passagers était en baisse de
1,9 %, pour la première fois depuis cinq ans. De 6,5 % en 2007 la croissance du
trafic passagers international devrait ainsi tomber à 3,2 % en 2008. « Il ne s'agit pas
d'une crise comme les autres, a souligné hier Giovanni Bisignani, le directeur
général de l'Iata. Le problème n'est pas seulement de stimuler la demande pour
relancer la croissance, mais de redéfinir notre modèle économique, afin de s'adapter
à un prix du carburant passé en sept ans de 13 % des coûts d'exploitation à 40 %. »
D'une industrie guidée par ses coûts fixes - avions et employés - le transport aérien est
en effet devenu une affaire de coûts variables, où la rentabilité d'un vol dépend du
prix du pétrole. D'où la nécessité pour les transporteurs de poursuivre non seulement
la quête des gains de productivité - déjà accrue de 18 % depuis 2001 - mais encore
de trouver la souplesse nécessaire pour adapter en permanence leur offre à la
variable pétrolière. Les Echos, B. Trevidic 4 septembre 2008
Air France KLM face à la crise
L'inexorable et spectaculaire renchérissement du prix du kérosène oblige Air
France-KLM à réviser ses ambitions et réduire son offre de sièges. Le groupe
franco-néerlandais, qui avait tenu bon jusqu'à présent - grâce à une bonne
couverture de ses achats de carburant et à l'application des fameuses « surcharges
» tarifaires -, “ a revu à la baisse son offre pour la saison d'hiver, en raison du
coût du carburant”, a déclaré hier aux « Echos » une porte-parole du groupe.
Pour mémoire, le programme du groupe aérien pour l'hiver 2007-2008 avait été
marqué par une augmentation de 5,2 % des sièges-kilomètres offerts, par rapport
à l'hiver 2006-2007, la hausse atteignant même 6,2 % sur le réseau long-courrier.
Pour la seule compagnie Air France, le poste carburant représentait ainsi 24 % des
coûts d'exploitation en 2007-2008, soit 10 points de plus qu'en 2003-2004. De
même, la facture carburant avant couvertures est passée, d'un exercice à l'autre,
de 1,4 milliard d'euros à 3,36 milliards d'euros.
Signe des temps, Air France planche plus que jamais sur l'intermodalité des
transports. Elle examine ainsi « la possibilité d'un accord de partenariat » avec
Veolia Transport dans la grande vitesse ferroviaire. Un tel accord, qui s'inscrirait
dans le cadre de la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs en Europe,
permettrait à la compagnie aérienne d'acheminer ses passagers par rail sur
certains axes. Les Echos, 4 juillet 2008, C. Palierse
Les atouts actuels d’Air France
• Une situation de quasi-monopole en France
– disparition d’AirLib, Aeris, Air Littoral
– rachat de Brit Air, Flandres Air, Régional Airlines,
devenues filiale d’Air France
– Quels concurrents aujourd’hui ?
• La plate forme de Roissy CDG2 (Hub) ouvert en
Avril 1996
– 830 vols et 76300 passagers par jour en moyenne
• 21 800 connexions hebdomadaires offertes
– connexions avec le réseau SNCF (TGV, RER)
• En France: Lyon, premier hub régional
Les atouts d’Air France KLM
L'ambition d’Air France KLM, affichée en début d'année, de porter de 7 % à 8,5 % le
retour sur capitaux employés (Roce) a cédé la place à un objectif plus modeste de
dégager un résultat d'exploitation « de l'ordre de 1 milliard d'euros », sur la base
d'un baril à 120 dollars et d'une parité euro-dollar de 1,53. « [Selon le président
d’Air France], le premier atout d’Air France - KLM serait la solidité de son bilan,
avec 10,6 milliards de fonds propres pour 2,69 milliards de dettes. Le deuxième est
la répartition équilibrée de son activité, qui lui permet de compenser la faiblesse
actuelle du marché américain (16 % des recettes) par la croissance de l'Asie (16 %
également) et de l'Afrique Moyen-Orient (14 %). Le troisième est le
renouvellement accéléré de la flotte, qui a réduit la consommation de 10 % entre
2000 et 2006 et devrait encore permettre d'économiser 10 % d'ici à 2012.
Mais son meilleur atout, à court terme, reste sa couverture pétrolière, qui s'est soldée
par une économie de 800 millions sur l'exercice 2007-2008, sur une facture de
4,57 milliards d'euros. « De toutes les grandes compagnies, Air France - KLM est
la mieux couverte, estime son directeur financier, Philippe Calavia. Alors que nos
principaux concurrents voient leur couverture se réduire, la nôtre est encore plus
efficace cette année, avec 78 % de nos besoins couverts à 94 dollars le baril en
moyenne. » Les Echos, 23 mai 2008, B. Trevedic
Les défis d’Air France KLM
Le métier de l'aérien est difficile. On y perd généralement
beaucoup plus d'argent qu'on n'en gagne. L'activité est
extrêmement cyclique (la conjoncture), très capitalistique (la
flotte), avec des coûts d'exploitation élevés (le carburant) et
une rentabilité faible : rarement plus de 6 % de marge
opérationnelle les très bonnes années. Sans parler de la
complexité du dialogue social, qui conduit régulièrement à
des grèves dévastatrices. Les contraintes d'une compagnie
comme Air France sont donc de trois ordres : politique, avec
la gestion des susceptibilités nationales, économique avec la
montée en puissance de la concurrence issue de la
libéralisation et industrielle avec une obsession constante de
la gestion de coûts et de revenus extrêmement variables l'un
et l'autre, le tout dans un contexte social le plus apaisé
possible. Les Echos, 12 décembre 2007, P. Escande
Perspectives futures
• Poursuivre de la stratégie de baisse des coûts
– De bons résultats financiers en 2007-2008 malgré
la hausse du prix du pétrole …
• Résultat d’exploitation de 1,4 milliards € (+13,3%)
• Résultat net en forte baisse (-16%) = 748 millions €
lié à une provision de 530 millions € pour participation
à une entente en prix
• Vers de nouvelles fusions ?
– Tentative de rachat d’Austrian Airlines
– rachat total d’Alitalia ?
– Création d’une ‘joint venture internationale’ aux
USA
• Accords d’ouverture des lignes transatlantiques
Perspectives futures
•
Après 2008, deux crises majeures
1. Disparition du vol Paris-Rio
2. Récession économique: baisse de la demande (en particulier de la
demande de vols affaires ; chute de l’activité cargo (- 40%)
•
Conséquences
– Baisse des capacités de production
– Plan de licenciement (départs « volontaires ») : -4500 employés (2012)
– Recette unitaire : - 15%
• Résultats attendus pour 2008-2009
– Résultat : -20%
– Perte nette : -426 millions d’euros pour le premier trimestre 2009
•
•
Lufthansa : bénéfice de 40 millions d’euros
Air France: poids des couvertures pétrolières
– Retour aux bénéfices et à la croissance en 2011 ???
La pratique des autorités pour l’examen
des fusions : les bilans concurrentiel et
économique
Aucun effet
anticoncurrentiel
Des effets
anticoncurrentiels
Bilan concurrentiel
Concentration
Barrières à l'entrée
Concurrence potentielle
Puissance de la demande
Fusion acceptée
Aucun gain/aucun
progrès
économique
Fusion rejetée
Des gains
en termes
d'efficacité
économique
Soit fusion acceptée
sous condition
Soit fusion rejetée
Bilan économique
Synergies - Baisse de coûts
Création de nouveaux
services
Innovation
Autres critères sociaux et
politiques : Défense de
l'emploi (entreprise
défaillante)
La fusion Air France KLM
Dans la fusion Air France et KLM, pas question de bouleversement des
équipes, de plans en cent jours et autres délices de consultants. Nous
ne sommes pas chez Arcelor. KLM est restée une société à part
entière, le management n'a pas bougé et l'aéroport d'Amsterdam reste
le grand « hub » qu'il était. En fait l'intégration progresse tout de
même, mais discrètement. Un comité exécutif commun présidé par
Jean-Cyril Spinetta se réunit tous les quinze jours et examine les
différents chantiers de synergies présentés par des « couples » de
managers des deux entités. De plus en plus de fonctions sont mises en
commun : marketing, achats, finances...
Une méthode douce baignée par la culture du compromis à la hollandaise
et qui, pour l'instant, fait des merveilles. Les synergies sont
constamment revues à la hausse et en trois ans le groupe a accru ses
ventes de 30 % et son résultat d'exploitation a été multiplié par plus de
trois. Mais une fusion totale, des hommes et des marques, n'est
toujours pas à l'ordre du jour. Les Echos, 12 décembre 2007, P.
Escande
Évaluation des synergies de la fusion
Air France KLM
Principales actions
Ventes/
Distribution
Passagers
-
Coordination des structure de vente
Réduction des coûts commerciaux
Optimisation des réseaux
Harmonisation du Yield management
Optimisation de l’utilisation de la flotte
Gestion coordonnée
Fret
Optimisation des réseaux
Coordination des politiques commerciales
Coopération commerciale
Maintenance
Achats
Sous-traitance rapatriée
Mise en commun (stocks, etc.)
Systèmes
Convergence progressive des systèmes
informatiques
informatiques
Autres
Regroupement des achats
Total
Source : http://www.airfrance.com
Année 5
100
130-195
35
60-65
50-70
10-30
385-495
Évaluation des synergies de la fusion
Air France KLM
millions d'euros
Evolution des synergies prévues à long terme
800
600
400
200
0
2004/05
2005/06
2006/07
2007/08
Année
2008/09
Long terme