La lettre apostolique « Témoins de la joie » du 21

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La lettre apostolique « Témoins de la joie » du 21
Vies consacrées, 87 (2015-3), 163-171
1. Conférence prononcée à Lubumbashi (République Démocratique du Congo) à
l’occasion de l’ouverture de l’Année de la vie consacrée.
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Dans son message sur la vie consacrée, le pape François nous
invite à faire mémoire avec gratitude du passé récent de nos
ordres, congrégations, instituts et sociétés de vie apostolique.
Dans le sillage du concile Vatican II, ceux-ci se sont engagés à se
rénover et à s’adapter au monde d’aujourd’hui en retournant aux
sources de la vie chrétienne et à leur inspiration originelle. Ils ont
reconnu que la suite du Christ de la manière proposée par l’Évangile devait toujours rester la norme suprême, tout en reconnaissant que chaque fondateur ou fondatrice a vécu cette suite d’une
manière particulière, offrant à l’Église la richesse de son charisme. Le retour aux sources a permis de dépoussiérer les congrégations de beaucoup d’incrustations qui en étaient venues parfois à cacher l’esprit des origines. L’histoire même de la vie
consacrée témoigne de ce que plusieurs familles religieuses ont
connu des réformes.
Malheureusement, il est parfois arrivé qu’on jette le bébé
avec l’eau du bain. Nombreux ont été les départs dans la période
post-conciliaire. On peut suspecter que certaines personnes
étaient entrées dans la vie consacrée pour des motivations peu
solides. Il y a sans doute eu aussi un effet d’entraînement et de
confusion. On a aussi noté, par ailleurs, un embourgeoisement
de la vie consacrée. On s’est rendu compte également que des
fonctions comme institutrices ou infirmières pouvaient être
exercées avec compétence par des laïcs. Surtout, l’on n’a pas toujours compris que le renouvellement de la vie consacrée devait
s’accompagner d’une rénovation spirituelle à laquelle, d’après le
concile, il fallait attribuer le rôle principal.
ANNÉE DE LA VIE CONSACRÉE
La lettre apostolique « Témoins
de la joie » du 21 novembre 20141
J.-L. Vande Kerkhove, s.d.b.
« Faire mémoire avec gratitude du passé récent »
Mais cela ne peut nous faire oublier l’élan qui a saisi les
congrégations à retourner à un style de vie plus évangélique, plus
fidèle à l’inspiration des débuts, plus soucieux de s’insérer dans
la vie de l’Église et du monde. Elles ont réécrit leur règle ou leurs
constitutions pour réaliser ce programme. Certaines ont fait des
choix courageux, abandonnant parfois des couvents situés dans
une zone d’habitation bourgeoise pour aller rejoindre les plus
pauvres. D’autres ont relu leur charisme à la lumière des temps
nouveaux. Je songe ici aux Mercédaires, nés au Moyen Âge pour
se substituer aux captifs chrétiens et qui ont décidé de se consacrer en priorité aux nouvelles formes d’esclavage du monde
moderne. Les Jésuites se sont souvenus qu’Ignace ne s’était pas
occupé seulement d’enseignement supérieur, d’accompagnement des élites, mais aussi des pauvres, notamment des prostituées, avec la maison Sainte-Marthe à Rome. C’est bien là l’œuvre
de l’Esprit Saint qui ne cesse de guider son Église à travers l’histoire des hommes et des femmes. En cette année, nous sommes
invités à faire mémoire de toute cette réalité riche tout en reconnaissant aussi les fragilités qui ne manquent jamais et qui sont,
selon le pape François, des occasions de grandir dans l’expérience de l’amour miséricordieux de Dieu pour nous.
« Embrasser l’avenir avec espérance »
Cette mémoire de l’histoire récente de la vie consacrée ne doit
pas nous enfermer dans le passé plus ou moins glorieux, mais
nous ouvrir à une espérance active comme nous le recommande
le pape François : « Il ne s’agit pas de faire de l’archéologie ou de
cultiver des nostalgies inutiles, mais bien plutôt de parcourir à
nouveau le chemin des générations passées pour y cueillir l’étincelle inspiratrice, les idéaux, les projets, les valeurs qui les ont
mues ». C’est vrai, la présence des consacrés sur le vieux continent
se fait de plus en plus discrète. De moins en moins d’institutions
scolaires ou médicales sont aujourd’hui gérées par des consacrés.
Des couvents se ferment les uns après les autres. Mais d’autres
formes naissent ici et là et de nouveaux types de présence se
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­ essinent, plus humbles, soucieux d’assurer une présence d’Église
d
dans des milieux défavorisés. Les congrégations ont accru leur
souci de transmettre leur charisme à des laïcs pour continuer leur
œuvre éducative, sociale. Mais surtout, la vie consacrée connaît
un essor remarquable dans les églises de plusieurs pays d’Afrique,
en Inde, au Vietnam... Et alors que les missionnaires européens
étaient venus nombreux dans ces pays, aujourd’hui des consacrés
qui en proviennent vont témoigner de l’Évangile en Europe et en
Amérique du Nord, témoignant de la catholicité de l’Église. N’estce pas là un signe que la vie consacrée n’appartient pas au passé,
mais qu’elle continue à avoir un sens aujourd’hui ?
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Sans doute, mais à quelle condition ? Ne risquons-nous pas,
nous aussi, de connaître tôt ou tard le même sort que nos frères et
sœurs du vieux continent ? C’est là que nous rejoint la troisième
invitation du pape : nous sommes conviés à vivre le présent avec
passion dans le sillage des fondateurs, de façon à réveiller le monde.
C’est sur cette troisième invitation que je voudrais m’attarder. Vivre
le présent, qu’est-ce à dire ? C’est ne pas se réfugier dans le passé ni
dans l’avenir, c’est regarder autour de soi les hommes et les femmes
qui nous entourent, leurs souffrances, leurs joies, leurs attentes,
c’est reconnaître l’appel de Dieu qui se manifeste dans les événements, c’est sortir de notre moi pour nous laisser interpeller par les
autres et par l’Autre qui est Dieu. Trop souvent nous passons à côté
du présent parce que la nostalgie du bon vieux temps nous prend
ou parce que nous voulons nous enfuir dans un futur imaginaire
pour nous échapper de la réalité parfois dure de notre vie et de celle
des autres. Il n’est pas rare d’entendre des consacrés d’un certain
âge regretter un passé où la vie était plus paisible, plus assurée,
moins compliquée qu’aujourd’hui. C’est compréhensible, mais
cela ne devrait pas conduire à croire qu’il n’y a pas d’avenir et surtout
pas à nous détourner du présent avec ses défis. Rendons grâce à
Dieu d’avoir pu bénéficier de ce temps pour consolider notre vocation et témoigner auprès de nos frères et sœurs plus jeunes.
Ce présent, nous dit le pape, il faut le vivre avec passion.
Sans passion rien ne bouge : il n’y a ni art, ni exploit sportif, ni
ANNÉE DE LA VIE CONSACRÉE
« Vivre le présent avec passion »
J.-L. Vande Kerkhove, s.d.b.
­ ngagement politique. La question est de savoir si nous sommes
e
des passionnés de Dieu, des personnes qui savent communiquer
le goût des choses de Dieu aux autres. Ne risquons-nous pas trop
souvent de devenir des fonctionnaires qui se contentent d’accomplir les tâches qui nous sont confiées de manière mécanique,
comme un simple moyen d’obtenir de l’argent pour nos besoins
personnels ? Quand vous rencontrez un passionné, il peut parler
des heures de ce qui le passionne ; il traversera tout pour réaliser
sa passion. Pourrait-on en dire autant de nous du point de vue
religieux ? Le goût des choses de Dieu doit se voir dans notre prière
et dans le zèle avec lequel nous accomplissons notre mission. Quel
temps y consacrons-nous ? Avec quelles dispositions ? Je crois que
les gens autour de nous sentent très bien ce qui nous anime. Il y a
malheureusement des consacrés qui se contentent du service
minimum.
Un des signes extérieurs de la passion pour Dieu, comme
nous l’a rappelé le pape François, c’est la joie, la joie de vivre et
de communiquer l’évangile, la joie de vivre sa vocation. Dans
sa lettre aux consacrés, le pape François affirme qu’« une
sequela triste est une triste sequela ». L’égoïsme, le repli sur soi,
créent la tristesse, car on n’est jamais satisfait par rapport à tous
ses besoins. Le don de soi, la recherche de l’essentiel procurent
la paix du cœur. « Que rien ne te trouble » disait la grande
­Thérèse. Peut-on dire aujourd’hui que les consacrés sont des
personnes paisibles ? N’a-t-on pas parfois l’impression qu’ils
s’agitent pour beaucoup de choses, mais lesquelles : le pouvoir,
l’avoir, la recherche d’affectivité désordonnée ? D’où les réunions en petits comités, les compensations de toutes sortes, les
réclamations interminables, les accusations réciproques...
même de sorcellerie. Un vrai disciple de Jésus ne devrait-il pas
accepter de porter sa croix, sa souffrance plutôt que de créer
des divisions et de soupçonner ses propres confrères ou
consœurs ? Jésus n’a pas sauvé le monde en l’accusant, alors
même qu’il mourait à cause de ses péchés, mais en l’aimant,
en pardonnant. C’est là la vraie libération de nos peurs : la
confiance en Jésus qui nous sauve même au-delà de la mort et
non la multiplication des protections quasi magiques, s’agit-il
même de prières créées à cet effet...
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Si réellement nous vivions notre consécration comme nous le
demande le pape, alors nous devrions réveiller le monde. En réalité
nous paraissons parfois plus vouloir copier ce monde avec tout ce
qu’il offre que vouloir le réveiller. Mais le réveiller, qu’est-ce que cela
peut vouloir dire ? Le monde a tendance à se replier sur soi, à s’assoupir. Il finit par trouver normales l­ ’injustice, l’exclusion, la jouissance
égoïste. Il ferme les yeux sur la violence, l’exploitation des petits.
Il se construit sans Dieu sur le pouvoir de l’argent, des armes, de la
manipulation. Réveiller le monde c’est alors vivre les valeurs du
Royaume : donner le témoignage d’une vraie fraternité, s’engager
pour la justice, donner le primat à Dieu. Construire une vraie
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« Réveiller le monde »
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Il nous faut vivre le présent avec passion dans le sillage de nos
fondateurs. Leur vie est une page d’évangile qu’il nous faut réécrire
pour aujourd’hui en tenant compte des nécessités de notre temps.
Mais pour qu’il en soit ainsi, nous devons d’abord les connaître, lire
leur vie, leurs écrits, ceux des consacrés qui se sont inspirés d’eux
et ont vécu le charisme de manière authentique. Trop de fois nous
considérons que c’est là l’affaire du noviciat, de la formation initiale. Si nous parcourons les communautés aujourd’hui, n’a-t-on
pas parfois l’impression que les frigos et les garde-robes sont plus
remplis que les bibliothèques ? Combien de temps passe-t-on à la
lecture et à quelle lecture ? Plusieurs congrégations ont pourtant
fourni l’effort pour publier et traduire les écrits des fondateurs ou
fondatrices, leur vie, celle d’hommes et de femmes qui ont vécu
leur charisme dans les endroits les plus divers. Et si ce n’est pas le
cas, il y a peut-être là un effort que nous devons fournir. Cela nous
permettra de ressembler un peu plus à ces hommes et ces femmes
animés par l’Esprit, de trouver chez eux l’inspiration pour affronter
les nouveaux défis du monde d’aujourd’hui. Le pape François écrit
que « l’imagination de la charité n’a pas connu de limites et a su
ouvrir d’innombrables chemins pour porter le souffle de l’Évangile
dans les cultures et dans les milieux sociaux les plus divers ». Cette
imagination ne devrait pas tarir, s’essouffler, mais nous aider
encore aujourd’hui à ouvrir des chemins nouveaux.
ANNÉE DE LA VIE CONSACRÉE
« Dans le sillage des fondateurs »
J.-L. Vande Kerkhove, s.d.b.
f­raternité, voilà certes un premier défi dans un monde plus que
jamais divisé. C’est le premier témoignage au service de l’évangélisation. La fraternité est un don de Dieu à faire fructifier jour après
jour par le partage, la communication, l’attention à l’autre, la solidarité. Le paradoxe est qu’au moment où nous disposons des moyens
de communication les plus performants — téléphones, smartphones, tablettes, sans oublier les réseaux sociaux sur internet —, la
qualité de la communication dans la communauté n’a pas connu la
même progression, pour ne pas dire qu’elle a reculé. On peut appeler quelqu’un au bout du monde, mais on oublie d’informer son
supérieur ou son confrère quand on a un empêchement communautaire. Quand on se trouve à table, si on s’y trouve ensemble, on
n’a rien à partager, on guette son téléphone ou son smartphone, on
parle seulement de sport, de politique ou de musique ou des derniers racontars. Comme il est beau pourtant d’échanger sur ses
expériences pastorales, de s’enquérir des proches d’un confrère,
d’une consœur, de partager des nouvelles de la congrégation !
Réveiller le monde, c’est s’engager pour la justice dans une
société où les plus pauvres sont souvent laissés à eux-mêmes,
sans possibilité de défendre leurs droits. Les préoccupations
pour notre sécurité, pour notre confort risquent de nous rendre
insensibles aux cris de ceux qui nous entourent. Ce souci de la
justice doit commencer par le respect des droits de nos employés.
Il doit s’étendre aux gens autour de nous. À travers notre œuvre
d’éducation et de formation, nous sommes invités à leur faire
comprendre leurs droits et à nous organiser pour les défendre.
Nous pouvons prêter notre voix aux sans voix pour dénoncer ce
qui est contraire à la dignité de la personne. Une vraie solidarité
devrait caractériser notre action, car c’est là, entre autres, que se
joue notre crédibilité. Les discours sur l’autofinancement, sur la
bienfaisance locale, pour justes qu’ils soient, ne doivent pas
dévier vers la recherche du confort pour soi sans souci des autres.
Je suis frappé de voir combien dans les conversations ou les discussions, on se réfère plus à une poignée de compatriotes qui ont
réussi dans la vie qu’à la grande majorité de pauvres de nos périphéries ou de la brousse. Dans le feuillet du CRI2, nous avons repris
2. Centre pour la réflexion et l’information, Lubumbashi.
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deux articles sur les creuseurs et sur les déplacés de notre province
du Katanga. On peut bien vivre à Lubumbashi, parcourir le centreville, le golf, entrer dans le nouvel Hyper-psaro et penser que désormais, nous y sommes. Nous devons nous secouer au moins de temps
en temps, nous l’avons fait dans le passé face à des urgences, mais il
ne faut ne pas relâcher notre attention. Alors nous pourrons réveiller
le monde enfermé dans la satisfaction égoïste de son bien-être. Alors
nous pourrons, comme les prophètes de la Bible, dénoncer ce qui
dans ce monde est contraire aux valeurs du royaume de Dieu.
3. Message de la Conférence épiscopale nationale congolaise (CENCO), suite à sa
51e Assemblée plénière , le 2 juillet 2014.
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Ici, je voudrais insister sur la nécessité de nous former à l’analyse économique et sociale, non pas pour nous limiter à elle, mais
pour mieux comprendre et lutter contre les mécanismes qui
engendrent la pauvreté et l’exclusion. Pourtant les instruments
ne manquent pas. La revue Congo-Afrique du CEPAS nous
informe bien de ces réalités, mais combien de nos communautés
y sont abonnées ? Nous avons souvent beaucoup de bonne
volonté, mais nous manquons d’un sain esprit critique qui nous
permettrait d’agir efficacement dans la défense des plus démunis. Notre culture politique — j’entends par là la compréhension
du fonctionnement d’un état démocratique, le jugement sur les
capacités à avoir pour bien diriger un pays — est souvent limitée.
Quand, dans une déclaration « Protégeons notre pays » de 20143,
notre Eglise prend position en recommandant le respect de la
constitution en vue de garantir un bon avenir pour le pays, combien d’entre nous s’informent, font connaître cette déclaration ?
Le pape invite aussi les instituts religieux à se mettre ensemble
pour des projets de formation, d’évangélisation et d’interventions sociales. Ne sommes-nous pas trop souvent surtout préoccupés de nos œuvres, de nos présences ?
Réveiller le monde, c’est l’ouvrir à la réalité de Dieu notre créateur et notre sauveur. Là nous touchons à l’essentiel, à ce qui motive
tout le reste. Nous ne sommes pas des O.N.G., encore moins des
ANNÉE DE LA VIE CONSACRÉE
Comment se former ?
J.-L. Vande Kerkhove, s.d.b.
hommes d’affaires ou des politiciens ! Nous devons témoigner du
primat de Dieu dans notre vie. La radicalité évangélique nous fait
choisir Dieu à la suite du Christ comme notre bien suprême. Le
pape François le dit avec des mots simples : « Jésus est-il notre premier et unique amour ? » Nos trois vœux, ce qui nous lie, nous tous
les consacrés, à Dieu et entre nous, devraient être la manifestation
de cet appel et de ce choix de mettre Dieu au-dessus de tout. Pourtant, je l’ai dit plus haut, bien des crises, de la vie en communauté
semblent surgir de ce qu’on s’éloigne du vécu de nos vœux. Des
jalousies, des rancœurs naissent autour de l’argent, de l’utilisation
des moyens de la communauté, des nominations à tel ou tel poste
plus prestigieux ou plus rémunérateur. Le pape François dénonce
fermement ces attitudes : « Les critiques, les bavardages, les envies,
les jalousies, les antagonismes sont des attitudes qui n’ont pas le
droit d’habiter dans nos maisons. » On vit plus sa vie affective en
dehors de la communauté qu’au-dedans, on investit plus ses énergies et ses moyens au-dehors. Je suis convaincu qu’il existe un lien
entre la qualité du vécu des vœux et celle de la vie fraternelle. Comment celui qui ne cherche que ses intérêts, l’accomplissement de
sa volonté propre, la satisfaction de son plaisir pourrait-il être à
l’écoute de l’autre, être solidaire avec lui, communiquer en profondeur, humaniser la vie commune ? Bien sûr il ne s’agit pas ici d’une
observance purement formelle des vœux, mais d’un vécu authentique par amour du Christ qui le premier a appartenu complètement à son Père et a fait de nous ses frères et sœurs. La priorité de
Dieu doit se manifester dans la gestion de nos rapports avec la
famille, avec le monde extérieur. Notre souci pour les nôtres ne doit
pas nous détourner de la prière, de la communauté, de la mission.
Cette priorité doit être reconnaissable au détachement par rapport
aux biens et à notre volonté propre en vue de la disponibilité à la
mission.
Le risque existe d’une dilution de notre identité religieuse
quand nous prenons le monde extérieur comme modèle, comme
critère de notre bien-être. Les gens qui nous entourent, surtout
les chrétiens, n’attendent pas de nous que nous soyons comme
eux, mais que nous soyons des hommes et des femmes de prière,
des hommes et des femmes qui ont du cœur pour leur prochain,
des hommes et des femmes qui n’ont pas peur de s’engager pour
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La lettre apostolique « Témoins de la joie » du 21 novembre 2014
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« Sans passion rien ne bouge : il n’y a ni art, ni exploit sportif, ni engagement
politique. La question est de savoir si nous sommes des passionnés de Dieu,
des personnes qui savent communiquer le goût des choses de Dieu aux
autres ». Une belle lecture de la Lettre apostolique du Pape François,
« Témoins de la joie » (21 novembre 2014). Le Père Vande Kerkhove, grâce à
sa longue expérience en terre d’Afrique, propose des pistes de réflexion aptes
à « réveiller » nos communautés et nos partages : un préalable indispensable pour que nous puissions à notre tour « réveiller le monde ».
2014 2016
- Jean-Luc Vande Kerkhove, s.d.b.
Institut St François de Sales
B.P. 882 Lubumbashi
République Démocratique du Congo
ANNÉE DE LA VIE CONSACRÉE
la justice parce que mus par l’Esprit du Christ et libres par rapport
à la famille, aux biens, à notre propre volonté. Pour nous aussi
vaut l’avertissement du Christ : « Si le sel perd de sa saveur avec
quoi le salera-t-on ? » Quel goût donnerons-nous au monde si
nous devenons comme des caméléons qui prennent la couleur
de leur environnement ? Pour réveiller le monde il faut avoir le
courage d’assumer notre différence sans complexe et dans la
joie. Cela va de notre manière de nous habiller à la façon de nous
détendre, des renoncements qu’implique notre état aux choix
que nous devons faire. Nous ne devons pas avoir honte de ce que
nous sommes, de dépendre d’une communauté, de ne pas avoir
les gadgets dernier cri, de devoir dire non à certaines sollicitations qui nous conduisent loin de notre projet de vie.
J’ai sans doute été un peu dur dans certains points de mon
diagnostic. Je sais qu’il y a aussi beaucoup de générosité, de sens
de la prière, d’engagement chez les consacrés, mais nous devons
rester sur nos gardes, surveiller les tendances qui peuvent nous
éloigner de notre idéal. Alors, la vie consacrée aura encore un bel
avenir devant elle au service de Dieu, de l’Église et du monde.