Les échanges touristiques entre la Pologne et l`Europe
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Les échanges touristiques entre la Pologne et l`Europe
ÉOCARREFOUR VOL 80 1/2005 Marek WIECKOWSKI Institut de Géographie (IGiPZ) Académie des Sciences de Pologne Varsovie - Pologne RÉSUMÉ Le tourisme participe pleinement à l’intégration de la Pologne dans l’espace européen, mais de façon originale. En effet, à côté des touristes, elle accueille un nombre bien plus important de visiteurs étrangers qui viennent essentiellement pour faire du commerce. Les variations des flux des uns et des autres sont assez sensibles aux contraintes et aux atouts de nature politique et juridique liés à l’intégration européenne. Le bassin touristique polonais est essentiellement régional, transfrontalier. Les Polonais de leur côté participent de plus en plus aux échanges touristiques internationaux. La diversification des moyens de transports a joué en ce sens un rôle décisif. Les effets à court terme de l’intégration sont manifestes sur l’activité touristique ; le pays doit trouver les conditions d’en pérenniser la croissance. MOTS CLÉS Pologne, Union Européenne, tourisme, tourisme international, flux touristique. ABSTRACT Tourism is fully involved in the integration of Poland into Europe, but in a specific way. Besides tourists, many more visitors from abroad are persons come for business reasons. The variations in flows of visitors and tourists are sensitive to the political and legal effects of European integration. The tourist space of Poland is essentially regional and cross-border in character. For their part, the Poles are more and more involved in international tourist movements. The diversification of transport modes has played an important role in this process. Short term effects of European integration are 59 Les échanges touristiques entre la Pologne et l’Europe L’une des mutations économiques les plus marquantes du XX e s. a été l’explosion du tourisme. Selon de nombreux chercheurs il constituera le secteur d’activité le plus important du XXIe s. Nous sommes entrés dans une société à individus mobiles (Stock, 2001) à laquelle le tourisme participe puissamment. La mobilité est un thème aujourd’hui majeur en géographie bien que l’analyse soit souvent réduite à la question des flux et de leur direction. Le poids économique du secteur touristique équivaut à celui des plus importantes industries modernes. G. Wackermann (1997) a bien expliqué la signification du tourisme dans un contexte macroéconomique : l’internationalisation rapide, puis la mondialisation ont d’abord intégré le tourisme aux activités tertiaires de pointe, et ensuite à l’économie en général. Le tourisme est à présent considéré comme un élément constitutif de la puissance économique d’un Etat et du commerce extérieur de celui-ci. Le tourisme international, caractérisé par des consommations spécifiques, constitue une exportation invisible qui participe directement à la balance des paiements. Il est trop souvent présenté comme la clé du développement volontariste de pays en difficulté. En fait, le secteur touristique représente selon les pays, un moyen soit d’enclencher un processus vertueux de développement économique et social, soit de soutenir la phase délicate de transition vers l’économie de marché (Caccomo, Solonandrasana, 2001). Quelle place tient-il aujourd’hui dans l’économie et l’espace polonais ? Dans quelle mesure participe-t-il à l’intégration de ce dernier dans les dynamiques territoriales européennes ? Et à l’inverse, peut-on dire que l’adhésion à l’Union Européenne a facilité l’ouverture de l’espace touristique polonais ? LA PLACE DE LA POLOGNE DANS LE TOURISME EUROPÉEN Le tourisme est un phénomène social aux fortes implications spatiales. Les logiques spatiales du tourisme se dessinent à différentes échelles. Au sein du continent européen, des disparités importantes sont à souligner - les deux tiers des arrivées s’effectuent dans les régions occidentales et méridionales. Le premier bassin touristique mondial, le bassin euro-méditerranéen, attire 360 millions de touristes internationaux. Il est centré sur les rives de la Méditerranée, en particulier le littoral nord, de l’Espagne à la Turquie. Une auréole secondaire apparaît au nord de cette zone centrale. Elle couvre le reste du territoire français et se dilue plus loin vers le nord et l’est de l’Europe, en intégrant des pays comme les Pays-Bas, la Norvège, la Pologne et quelques lieux privilégiés de la Russie. En Europe médiane, les échanges relativement modestes entre pays frères ont cédé la place à une libéralisation du marché. Certains pays éprouvent d’importantes difficultés pour remplacer les clientèles perdues, à l’image des stations estivales bulgares et roumaines sur la mer Noire. D’autres, au contraire, connaissent une remarquable progression de leur activité, comme la Pologne, la Hongrie (10,5 millions de touristes en 1988 et 22,8 millions en 1993). Un rapide développement du tourisme international en Europe centrale a eu lieu dans les dix dernières années : elle a accueilli 73 millions de touristes en 2005. On peut l’expliquer par des facteurs politiques, économiques, culturels, et techniques (Lijewski 2003). La Pologne est en première ligne dans ce processus d’ouverture aux flux de population, en particulier touristiques. Elle est en effet devenue en quelques années l’un des plus importants pays touristiques au monde, grâce aux flux transfrontaliers. Chaque année séjournent en Pologne de 14 à 18 millions de touristes internationaux1 (19,5 millions en 1997) qui placent ce pays au début de la deuxième dizaine de destinations touristiques au monde (avant la Suisse, la Grèce). Le nombre de visiteurs2 est toutefois beaucoup plus élevé. Si l’on recense le nombre de personnes qui franchissent les frontières polonaises, on parvient à un chiffre plus important, de 62 millions en 2004 (et 89 millions pour l’année record de 1999). Presque la moitié proviennent d’Allemagne, le voisin plus important et le plus riche. Ces visiteurs viennent souvent pour effectuer seulement des achats, mais ils le font régulièrement. La Pologne aurait naturellement intérêt à les faire séjourner plus longtemps. En 1999, on estimait à plus de 6 milliards de dollars par an les dépenses directes des touristes internationaux. Les recettes provenant de cette activité représentent un peu plus de 4,5% du PNB polonais. Après quelques années de baisse des dépenses touristiques, la situation a changé en 2004 grâce à l’augmentation du flux touristiques (5,8 milliards de dollars en 2004) (fig. 1) . Si cette tendance se stabilise, elle va dans le sens d’un impact direct de l’intégration sur l’ouverture touristique des nouveaux pays entrants, et ouvre des perspectives intéressantes pour la Pologne. LE RÔLE DE L’UNION EUROPÉENNE DANS LE TOURISME Dès 1990, l’économie touristique polonaise fut appréciée par des experts de l’UE, de la Banque Mondiale et du FMI comme un secteur modèle, par sa rapidité d’adaptation aux nouvelles conditions de l’économie de marché. Il fut admis que le tourisme offrait à la Pologne les chances d’une croissance rapide, en constituant un moteur du développement, susceptible d’entraîner d'autres secteurs de l'économie nationale. Cette opinion fut confirmée par l'attribution à la Pologne d’aides substantielles dans le cadre du programme TOURIN, prévu pour s’étaler sur trois étapes. Celles-ci devaient remplir les objectifs suivants : le soutien institutionnel et organisationnel du secteur 60 VOL 80 1/2005 Les échanges touristiques entre la Pologne et l’Europe touristique, la formation des cadres, le développement du tourisme dans les zones rurales et forestières, la mise en place d’une stratégie nationale de développement touristique, l’identification de cinq domaines de produits de marques touristiques (produits du tourisme d’affaires, urbain et culturel, rural, spécialisé, transfrontalier), et enfin la promotion du pays à travers l’Organisation Polonaise du Tourisme. En outre, depuis une dizaine d’années, les régions polonaises bénéficient de fonds préparatoires et structurels issus des programmes PHARE et INTERREG. De nombreux projets ont dores et déjà été financés par l’Union Européenne : ils concernent des études thématiques, la mise en place d’informations (tourisme, musée), d’échanges (scolaires, culturels, économiques, etc.), et l’amélioration de l’infrastructure touristique. L’existence d’un axe de développement du tourisme frontalier dans le programme TOURIN montre que la situation géopolitique de la Pologne dans l’espace européen lui ouvre des perspectives particulières : le statut des frontières est d’une importance capitale pour le devenir de l’économie touristique. CHANGEMENT DU RÔLE DES FRONTIÈRES L’ouverture des frontières après 1989 et surtout leur défonctionnalisation ont offert de nouvelles potentialités et perspectives. Dans le contexte de recomposition de l’Europe médiane, les frontières politiques s’ouvrent : cela ne signifie pas qu’elles s’effacent, mais plutôt qu’elles acquièrent de nouvelles fonctions. Les formalités de douane ont été réduites, le nombre des postes frontières a brusquement augmenté, par conséquent les flux transfrontaliers se sont accrus. Depuis 15 ans les zones frontalières ont ainsi changé de statut, profitant des flux touristiques. Le différentiel de pouvoir d’achat et de salaires engendre des mouvements transfrontaliers et du tourisme commercial. Cette dynamique fait le bonheur des bazars, mais aussi du tourisme qui fleurit le long de toutes les frontières, en prenant parfois des formes à la marge de la légalité (Wieckowski, 2005). L’ouverture des frontières et leur défonctionnalisation surtout, qui abaisse sensiblement ou fait pratiquement disparaître leur statut de filtre, font apparaître des complémentarités et des synergies. En 2004, après que la Pologne est devenu un membre de l’Union européenne, les frontières du pays ont acquis deux types de rôles et de statuts. Les frontières avec l’Allemagne, la République Tchèque, la Slovaquie, la Lituanie et presque toute la frontière maritime sont devenues des frontières internes au sein de l’Union européenne. Pour ces espaces, le développement du tourisme sera peut-être plus facile. Les autres frontières, avec la Biélorussie, l’Ukraine et l’enclave de Kaliningrad sont devenues les bornes externes de l’Union européenne, et sont ainsi en situation de défense renforcée. En 1999, après plusieurs d’années d'augmentation des flux transfrontaliers, les franchissements de frontières de la Pologne par les étrangers ont atteint 89,1 millions de visiteurs internationaux. La diminution des flux par la suite s’explique notamment par l’application d’une politique de meilleur contrôle des frontières, demandé par l’UE avant l’adhésion. Peu avant l’adhésion de la Pologne à l'Union Européenne, on a introduit les visas pour les voisins de l'Est. Pendant la première année (d’octobre 2003 à septembre 2004), le nombre d'arrivées enregistrées sur les frontières russe, biélorusse et ukrainienne a baissé de 21%. Mais les mois suivants les flux sont repartis à la hausse. De même, après 2004, la fermeture des magasins en détaxe à bord des f e r r i e s a entraîné une contraction des flux d'arrivées, en particulier à Nowe Warpno (la baisse est de 55%) et à Swinoujscie (moins 25%). Seul le port de Gdynia voit son trafic de passagers augmenter (+18%). Le nombre d'arrivées d’étrangers par la voie maritime a atteint 1,4 millions en 2003 mais seulement 800 000 en 2004. TOURISTES ET VISITEURS INTERNATIONAUX EN POLOGNE obvious; the country now needs to create the conditions to maintain this growth. KEY WORDS Poland, European Union, tourism, international tourism, tourist flows. 1 - Un touriste international est une personne qui voyage et séjourne dans un pays dont il n’est pas résident, pour des motifs de loisirs, d’affaires et autres, et qui à cette occasion s éjo urne da ns des li eux distincts de son environnem ent ha bitue l, p our une période d’au moins une nuitée, e t in férieure à dou ze m ois consécutifs,. 2 - Un visiteur international est une personne qui franchit la frontière et passe à l’étranger quelques heures sans passer de nuitée. La fin des régimes socialistes en Europe centrale et orientale a bouleversé l’organisation du tourisme dans ces régions. Après une période de Figure 1 : les dépenses directes des touristes et des visiteurs internationaux en Pologne (en milliards de dollars) Source : GUS, 2005 Frontière Allemande Tchèque Slovaque Ukrainienne Biélorusse Lituanienne Avec l’enclave de Kaliningrad Maritime Aérienne Toutes frontières 1999 52,5 18,2 3,5 4,8 5,1 1,5 1,1 2004 32,9 13,1 3,5 4,1 3,8 1,5 0,7 1,3 1,1 89,1 0,8 1,5 61,2 Tableau 1 : Le nombre d’arrivées d’étrangers aux frontières polonaises (en millions de personnes) Source : Données des gardesfrontières Les échanges touristiques entre la Pologne et l’Europe VOL 80 1/2005 Figure 2 : Le nombre de franchissements de frontières de Pologne (en millions de personnes) Source : Données des gardesfrontières Figure 3 : Le nombre de touristes étrangers en Pologne (en milliers de personnes) Source : Institut du Tourisme Figure 4 : Le nombre de touristes étrangers dans les voïvodies polonaises (en millions de personnes, en 2003) Source : Institut du Tourisme 61 62 VOL 80 1/2005 Les échanges touristiques entre la Pologne et l’Europe Figure 5 : Nombre de nuitées en hébergement collectif (en milliers) Source : Institut du Tourisme hausse rapide du nombre d'arrivées d'étrangers en Pologne (1990-1996), les flux ont stagné à un niveau élevé dans les années 1997-1999 pour s’effondrer entre 1999 et 2002. La reprise entamée en 2003 se confirme (+19% entre 2003 et 2004) (fig. 2). La Pologne a enregistré au cours de l’année 2004 l’arrivée de 62 millions de visiteurs internationaux. Parmi ceux-ci, 75% sont des voyageurs en transit ou des excursionnistes présents sur le territoire polonais pour une journée. Du côté des visiteurs internationaux, les flux connaissent une sélection radicale en liaison avec l’intégration européenne. Depuis 2004 en effet, la hausse d’entrées de ressortissants de l’UE par les frontières terrestres est significative (en particulier du côté des frontières allemande et slovaque). Mais cette tendance s’observe aussi du côté des entrées par les aéroports (+30%). Parmi les 61,9 millions de visiteurs internationaux enregistrés en Pologne en 2004, 83% provenaient d’un pays de l’Union Européenne, et les Allemands à eux seuls représentaient 25%. Sur les frontières externes en revanche, les arrivées d’étrangers diminuent (les entrées ont diminué de 9,1%, en provenance de Biélorussie et de 5, 7% pour l’Ukraine). 76% de la fréquentation touristique, et 94% de la fréquentation de visiteurs. L’éventail des provenances des touristes en Pologne est très étroit : la part des 5 premières nationalités d’origine de ces touristes était de 77 % en 1995 mais est restée à un niveau élevé (73,8% en 2004). Le marché polonais est dominé par la clientèle allemande (5,2 millions, soit 36,6% des touristes internationaux). Le cas allemand, premier émetteur touristique européen (plus de 25% des journées de vacances des Européens et 790 millions de journées à l’étranger), illustre l’importance des flux de proximité : 84% des touristes allemands ne sortent pas de l’espace européen et 40 % séjournent dans un pays limitrophe. En Pologne, ils privilégient la fréqentation des régions comme la Poméranie et la Silésie. Les flux du tourisme international en Pologne se concentrent autour de grands pôles, comme des villes (Varsovie, Cracovie, Poznan), et des régions frontalières. Les régions de prédilection de ces touristes sont les voïvodies de Mazovie, de Grande Pologne, et de Lublin (fig.4 et fig. 5). LE TOURISME INTERNATIONAL DES POLONAIS Le nombre de touristes internationaux est passé entre 1990 et 1999, de 3,4 millions à 18 millions pour redescendre à 14,3 millions en 2004 (fig. 3). Là aussi, les citoyens de l’Union Européenne sont largement majoritaires. Les causes de cette progression du tourisme international sont nombreuses et ne sauraient être réduites à l’effet de l’ouverture des frontières. Le différentiel de pouvoir d’achat et les écarts de niveau des salaires provoquent des flux frontaliers et du tourisme commercial. Mais il faut aussi évoquer l’évolution de l’accessibilité, l’amélioration de la qualité des lieux touristiques, la nature préservée et sauvage (en Mazurie, dans les Carpates), ou des facteurs historiques (par exemple le tourisme sentimental pour les Allemands dans les Territoires Recouvrés). Certes, la Pologne ne bénéficie pas de la réputation de destinations comme la France, l’Italie et bien d’autres : le fonctionnement des espaces touristiques reste dominé par des dynamiques régionales et la fréquentation d’une clientèle proche : la clientèle régionale représente Le tourisme fonctionne aussi comme un facteur d’intégration dans l’autre sens, ce que révèle l’arrivée de touristes polonais dans les pays de l’Union Européenne. Le mouvement touristique vers l’Europe occidentale était autrefois strictement contrôlé. Ce n’est qu’à partir de 1989 que les déplacements touristiques furent pleinement autorisés. Grâce à la libéralisation politique, à l’ouverture des frontières, au libre accès aux passeports et aux devises et à l’ouverture vers l’économie de marché, le nombre de personnes qui voyagent en dehors de la Pologne a nettement augmenté depuis une quinzaine d’années. L’année 2000 constitue un pic : 10 millions de Polonais ont passé leurs vacances en-dehors de leur pays (fig. 6).La tendance a baissé depuis, jusqu’à 6 millions en 2004. Toutefois, le nombre de visiteurs polonais à l'étranger est beaucoup plus élevé. Si l’on recense ceux qui franchisent les frontières polonaises, on parvient à un chiffre nettement plus important, de Les échanges touristiques entre la Pologne et l’Europe VOL 80 1/2005 45,8 millions en 2002 (et 57,5 millions pour l’année record de 2000). La majorité de ces séjours de Polonais à l’étranger sont relativement longs : ils avaient une durée moyenne de 11,9 jours en 2001 et de 10,9 jours en 2003. La part de voyages typiquement touristiques augmente (54% en 2003), ce qui témoigne d’une augmentation générale du niveau de vie en Pologne. Mais le développement des moyens de transport a eu aussi une grande influence sur l’augmentation des déplacements touristiques internationaux, et cela surtout par la diffusion de l’automobile, le développement de l’offre de transports aériens et la multiplication de compagnies d’autocars internationaux. L’automobile est le moyen de transport le plus souvent utilisé dans le tourisme international, mais une grande partie de cette circulation est constituée de parcours locaux liés aux achats. La desserte en autocar est assurée par les agences de tourisme ou par des compagnies qui gèrent des lignes régulières. Dans les années 1990 le réseau de ces compagnies est devenu impressionnant : 326 liaisons régulières de transport en autobus partaient de la Pologne (vers 25 pays, dont tous les pays de l’UE à 15, sauf l’Irlande et la Finlande) avec un total de 17 800 parcours par semaine (Komornicki, 1996). L’avion est quant à lui utilisé le plus souvent pour les destinations lointaines. Grâce aux vols charter, les séjours à l’étranger deviennent accessibles aux catégories moyennes. La navigation maritime reste limitée aux lignes de ferry-boat vers les pays scandinaves. Conclusion L’isolement, la marginalisation et le blocage politique dans lesquels la Pologne avait vécu depuis 50 ans avaient maintenu le pays dans un retard considérable, par rapport aux pays de l’Europe occidentale. Avec le début des années 1990, la Pologne a acquis l’image d’un espace exotique et attractif dans une certaine mesure pour les nouveaux visiteurs. Cette image se transforme, des pratiques touristiques d’un genre inédit apparaissent en Pologne comme dans d’autres pays d’Europe centrale (le tourisme médical, ou dentaire par exemple). On commence également à voir apparaître le phénomène d’achat de résidences secondaires par des étrangers. Mais pour l’essentiel, l’offre touristique en Pologne est fondée sur le tourisme d’achats, le séjour balnéaire ou de santé. La nature préservée et des paysages peu anthropisés constituent en cela un atout certain. Le pays offre aussi des prix bas pour toute la gamme d’intrants dont le tourisme a besoin pour se développer : coût du foncier, de la maind’œuvre, etc. Puisque le tourisme contemporain s’appuie avant tout sur les déplacements automobiles et l’aviation, la Pologne a intérêt et besoin de moderniser son réseau routier (surtout autoroutier) et de développer l’offre aérienne (notamment les compagnies à bas prix). 63 L’adhésion de la Pologne à l’Union Européenne a eu des effets économiques favorables dans le secteur du tourisme (création d’emplois directs et indirects) et contribue de manière significative à l’équilibre de la balance de paiements, avec un fort excédent du secteur touristique. En 2003, le tourisme international a généré des recettes de 3,6 milliards d’euros pour la Pologne. Avec presque 2,5 milliards d’euros de dépenses touristiques internationales la Pologne a enregistré un excédent de 1,1 milliards d’euros. Il devrait augmenter dans les années à venir. L’adhésion à l’Union Européenne a permis de relancer les flux touristiques internationaux vers la Pologne. La comparaison des nuitées d’étrangers dans les hôtels pour la saison estivale de 2004, par rapport à la même période en 2003 témoigne d’une forte augmentation (+26,9% soit 3 350 000 nuitées en 2003 et 4 490 000 en 2004). L'augmentation de la part d'arrivées de touristes d'Allemagne et d'Europe occidentale peut entraîner une hausse des recettes supérieure à celle du nombre d'entrées. Afin de maintenir cette tendance, et pour augmenter la rentabilité de l’économie touristique, il faut améliorer l’offre, la rendre concurrentielle sur le marché international. L’offre locale doit concourir à l’augmentation de la dépense journalière des touristes étrangers en Pologne. C’est une des conditions nécessaire pour que le tourisme participe encore plus efficacement à l’avenir à la modernisation du pays. Il le fait en soi, car c’est une activité complexe, mais aussi parce qu’il contient des aspects multiplicateurs sur l’économie et la société, qui joueront un rôle central dans le développement de la Pologne. BIBLIOGRAPHIE BARTOSZEWICZ W., SKALSKA T., 2004, Zagraniczna turystyka przyjazdowa do Polski w 2003 [Le tourisme international en Pologne en 2003], IT Warszawa, 150 p. BORNE-JANULA H. et al., 2004, Turystyka polska w 2003 roku. Uklad regionalny [Le tourisme en Pologne en 2003. Aspects régionaux], IT Warszawa, 150 p. CACCOMO J.-L., SOLONANDRASANA B., 2001, L‘innovation dans l’industrie touristique. Enjeux et stratégies, L’Harmattan, Paris, 156 p. DEWAILLY J.-M., 1990, Tourisme et aménagement en Europe du Nord, Paris, Masson, 243 p. HALL D.R., 1998, Tourism development and sustainability issues in Central and South-eastern Europe, Tourism Management, Vol. 19, n° 5, p. 423-431. 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St. Leszczyckiego Polska Akademia Nauk Ul Twarda 51/55 01 818 Warszawa E.mail : [email protected]