DROIT CONSTITUTIONNEL L1

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DROIT CONSTITUTIONNEL L1
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DROIT CONSTITUTIONNEL
L1
FICHE N° 2: L’ETAT ET LA SEPARATION DES
POUVOIRS
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TABLE DES MATIERES
Résumé : ................................................................................................................................................................. 3
1.
La notion d’état ........................................................................................................................................ 4
1.1.
Définition ................................................................................................................................... 4
1.2.
Eléments constitutifs .................................................................................................................. 5
2.
La notion d’Etat de droit .......................................................................................................................... 6
3.
La séparation des pouvoirs ....................................................................................................................... 7
4.
3.1.
Le principe ................................................................................................................................. 7
3.2.
Les modalités d’application ....................................................................................................... 8
3.2.1.
La balance des pouvoirs ............................................................................................... 9
3.2.2.
La spécialisation des pouvoirs ................................................................................... 10
Les formes d’état .................................................................................................................................... 11
4.1.
L’état unitaire ........................................................................................................................... 11
4.2.
L’état fédéral ............................................................................................................................ 12
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RESUME :
La notion d’état est une notion fondamentale et transversale en droit constitutionnel [1].
A partir de cette notion un certain nombre de concepts ont été proposés. Tel est le cas de la
notion d’état de droit, considérée comme fondamentale à toute organisation d’une société [2].
Par ailleurs, la notion d’état implique le plus souvent une nécessité d’organisation. Cette
organisation de l’etat peut notamment prendre deux formes : l’organisation horizontale des
pouvoirs, via le principe de séparation des pouvoirs [3], et l’organisation verticale des pouvoirs,
via les formes de l’état [4].
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1.
LA NOTION D’ETAT
1.1.
DEFINITION
L'État n'est pas en lui-même une institution, c'est une autorité légale.
Elle s’impose à une collectivité sociale (généralement nationale) et l’organise.
On peut entendre la notion d’Etat au sens large ou étroit.
Au sens étroit, l'autorité étatique est exercée par un appareil de fonctionnaires avec à sa
tête le chef d'État et le gouvernement.
Cet appareil est composé d’institutions superposées qui peuvent avoir un droit propre : le
droit public.
Au sens large, l’Etat est l’ensemble des membres d'une collectivité sociale qui sont tous
soumis à un même ordre juridique.
On parle d’Etat français, italien, etc.
D’un point de vue dynamique, l’Etat est une personne juridique dotée d’un pouvoir
d’action sur les individus.
L'État a pour particularité par rapport à toutes les autres personnes juridiques
individuelles ou morales de détenir un pouvoir juridique utilisé dans un but d’intérêt
général.
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1.2.
ELEMENTS CONSTITUTIFS
Traditionnellement, on considère que l’Etat se compose de certains éléments.
En réalité ces éléments ne font que refléter les modalités d'exercice du pouvoir d’État.
Ce pouvoir s'exerce sur une population, sur un territoire et à l’aide d’institutions ou
d’organes spécifiques :

une population. Il n'y a pas d'État sans une population. Cette population ne s'identifie
pas forcément à une Nation même si en Occident, c'est presque toujours le cas.
Rappel : une Nation est une population qui est unie :
- par des liens objectifs (comme l'origine géographique, l’unité de langue, de religion,
d’ethnie...),
- ou des liens spirituels (comme la volonté de vouloir vivre ensemble...).

un territoire. Il n'y a pas d'État sans territoire [= un espace terrestre, maritime, aérien
délimité par des frontières].

des institutions. Il n'y a pas d'État sans un appareil d’État, c’est-à-dire sans des
institutions ou organes spécifiques ayant un pouvoir juridique effectif.
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2.
LA NOTION D’ETAT DE DROIT
On entend par État de Droit, un État dans lequel tous les individus ou collectivités ont
leurs activités déterminées et sanctionnées par le droit.
Il faut insister sur le fait que la notion d'État de droit n'induit pas de conséquences
pratiques, s'il n'y a pas de sanction ou si les règles juridiques ne voient pas leur
application contrôlée.
Deux contrôles cumulés ou non sont possibles :


le contrôle politique : par exemple, aujourd'hui le président de la République en France
est le garant politique du respect de la Constitution (art. 5) par les autres institutions
politiques
le contrôle juridictionnel : par exemple, aujourd'hui, le Conseil constitutionnel est le
garant juridictionnel du respect de la Constitution par le Parlement (art. 61).
La notion d'Etat de droit comporte au moins deux faiblesses :


une faiblesse constitutive : comme on l'a vu, même l'État à travers ses institutions
politiques et administratives est soumis au droit. Or l'Etat est à l'origine de la majorité des
normes juridiques et est de plus chargé de veiller à leur respect. Il est donc très facile
pour l'Etat de se soustraire au droit. Le principal danger pour l'Etat de droit, c'est donc
l'Etat.
une faiblesse née dans l'application : l'Etat de droit suppose que les opérateurs du
droit (notamment le juge) fassent un usage sincère, correct du droit. Ainsi on attend du
juge qu'il n'utilise pas sa fonction d'interprétation, de jugement à des fins politiques. C'est
très difficile à vérifier et à sanctionner.
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3.
LA SÉPARATION DES POUVOIRS
Ce principe nous vient de la Grande-Bretagne. Ce sont les anglais qui, à partir du 17ème
siècle, ont commencé à le mettre en pratique. Ce sont les premiers qui ont essayé de
diviser, de partager le pouvoir politique qui n'appartenait traditionnellement qu'à un seul
titulaire, le Roi.
Mais dans un second temps, ce sont les penseurs politiques français (dont Montesquieu)
et américains qui, au 18ème siècle, ont théorisé et popularisé avec succès ce principe
qu'on peut énoncer ainsi :
« une même autorité ne doit pas cumuler entre ses mains tous les pouvoirs au
sein de l'Etat ».
Montesquieu, dans un livre fameux intitulé « De l'Esprit des Lois » (1750) va, en
s'inspirant de la Constitution d'Angleterre, exposer dans sa forme quasi définitive le
principe de séparation des pouvoirs.
Principe qui deviendra un des fondements de la pensée libérale révolutionnaire en France,
aux États-Unis... et que les constitutions les plus modernes ou récentes tentent toujours
d'appliquer.
Nous allons préciser successivement à partir de Montesquieu le but, les modalités
d'application et les interprétations de ce principe.
3.1.
LE PRINCIPE
Ce principe s'analyse chez Montesquieu et ses contemporains en une recette
destinée à éviter le despotisme.
Montesquieu part du constat que toute personne qui détient des pouvoirs, (a fortiori tous
les pouvoirs), aura tendance à en abuser.
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Autrement dit, il aura tendance à utiliser ses compétences sans respecter aucune limite,
notamment de droit.
Il faut donc faire en sorte que s'instaure un "Gouvernement modéré" ; idéal de
Montesquieu comme des premiers révolutionnaires français, américains...
Autrement, les libertés, la sûreté comme on disait à l'époque, ne seront pas garanties.
La solution : diviser le pouvoir, ne pas le confier dans son entier à un seul titulaire quel
qu'il soit ( Roi, Prince, Sultan, Peuple).
S'il est distribué à différents individus, organes, alors la puissance d'État sera mieux
répartie, freinée et du coup, la tyrannie sera évitée.
On veillera en conséquence à ce que les trois grandes fonctions étatiques distinguées par
Montesquieu (et avant lui par Locke notamment) ne soient jamais confiées à un même
titulaire.
Car, nous dit Montesquieu, "Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps de principaux,
ou des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs".
Cette solution semble aller de soi aujourd'hui. Elle est presque banale. Mais il faut savoir
qu'à l'époque, elle fut considérée comme neuve, iconoclaste.
3.2.
LES MODALITES D’APPLI CATION
Deux grandes solutions vont être imaginées qui vont conduire à l’édiction de
Constitutions très différentes au 18ème siècle :
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3.2.1. LA BALANCE DES POUVOI RS
Cette solution est développée par Montesquieu à partir de l’expérience anglaise (dans le
livre XI de l’Esprit des Lois).
Elle sera adoptée notamment par les constituants français en 1791 et 1795 et par les
constituants américains en 1787.
La balance des pouvoirs consiste à partager le pouvoir entre plusieurs organes qui
se font contrepoids.
La solution est complexe : on ne se contente pas de répartir les trois grandes fonctions
(exécuter, légiférer, juger) entre des organes différents. On prend soin de répartir aussi la
fonction législative entre plusieurs autorités dont il faut coordonner les activités et
prévoir les interactions.
La « puissance législative » est répartie entre plusieurs organes.
Les organes chargés de la législation se font contrepoids ou équilibre (d’où le terme de
balance).
Aux Etats-Unis, on parle ici de la théorie des « checks and balances » (freiner
l’action - faire équilibre). Pour cela on va permettre selon l’expression de Montesquieu
aux organes de « s’arrêter » ou de faire pression les uns sur les autres.
Ainsi, selon Montesquieu, le Roi, en tant qu’organe/partie de la législation, se voit confier
une « faculté d’empêcher ». On l’appellera droit de veto dans les Constitutions française
et américaine.
Les moyens d’interaction entre les organes sont limités.
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On peut craindre la survenance de blocages, conflits sans solution, et finalement la
paralysie du système. C’est ce qui se passera en 1791 avec l’abus du droit de veto par
Louis XVI, surnommé « monsieur veto ».
3.2.2. LA SPÉCIALISATION DES POUVOIRS
Cette solution est proposée notamment par Rousseau et va être reprise dans les
Constitutions de 1793 et de 1848. Elle sera reprise à l’époque contemporaine dans les
Constitutions des Etats communistes.
Les organes constitutionnels hiérarchisés se voient confier l'entièreté ou le
monopole d'un pouvoir. Il existe une séparation absolue entre eux, donc aucune
interaction. Pas de faculté d’empêcher (ou de dissolution) en conséquence.
Le Parlement se voit confier la fonction essentielle, la fonction législative car il est censé
parler au nom du Peuple ou de la Nation. Les autres organes se voient confier les
fonctions dérivées (pouvoir exécutif et judiciaire).
Il faut noter que la séparation ici n’exclut pas des liens de subordination qui profitent au
seul Parlement.
Ainsi la Constitution de 1793 prévoit à son article 63 que le Corps législatif choisira les
membres du Conseil exécutif ; ce dernier réside auprès du Corps législatif (art. 75) et est
entendu toutes les fois qu’il a des comptes à rendre (art. 76).
Trois critères définissent cette conception de la doctrine classique :



spécialisation fonctionnelle : chaque organe est spécialisé et ne peut donc participer de la
fonction d'un autre organe.
indépendance des organes politiques : les organes politiques ne peuvent agir les uns sur
les autres même à travers de simples moyens d'empêcher.
équilibre : il n'y aurait pas de hiérarchie entre les pouvoirs ou les organes ; chacun serait
au même niveau ayant des fonctions équivalentes.
Critique :
On va s'apercevoir assez tard que cette conception ne correspond ni aux idées de
Montesquieu, ni aux intentions des constituants français et américains au 18ème siècle.
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4.
LES FORMES D’ETAT
4.1.
L’ETAT UNITAIRE
C'est un État dans lequel l’exercice du pouvoir juridique d’État est monopolisé par un
seul centre politique ou Gouvernement central.
Corollaire : tous les individus sont soumis au même Gouvernement qui seul dispose
d’un pouvoir normatif propre.
Cela n’exclut pas que l’Etat unitaire admette en son sein l’existence de
collectivités territoriales capables de créer leur propre droit (règlements).
Mais dans ce cas, les collectivités devront se soumettre à un droit commun minimal issu
du gouvernement central.
Cette forme d'organisation, qui caractérise l'État français actuel et la majorité des États
dans le monde, est la plus ancienne.
On distingue deux types d'États unitaires : centralisés et décentralisés.
Cette distinction doit être relativisée en pratique.
En effet, un Etat unitaire ne peut accepter une décentralisation complète sauf à
disparaître, démembré en plusieurs Etats.
Donc chaque Etat recherche un équilibre entre centralisation et décentralisation.

les États centralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est exercé seulement
par des agents nommés et soumis à l’autorité hiérarchique du Gouvernement central. Ils
n’ont donc aucun pouvoir juridique propre.
Un État centralisé est généralement déconcentré au sens où certains de ses agents
bénéficiant de délégations pourront être délocalisés.
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Exemple : le Préfet en France.
La concentration est donc un mode théorique d'organisation administrative.

les États décentralisés : État dans lequel le pouvoir juridique d’État est en partie confié
aux individus eux-mêmes qui, à travers certaines institutions administratives
généralement élues vont s’administrer avec un contrôle souple du Gouvernement central.
Cette « libre administration » peut conduire lorsqu’elle est très poussée à permettre à ces
institutions de disposer d’un pouvoir normatif (réglementaire, législatif…) autonome
(Espagne, Italie) dans certains domaines.
Mais ce pouvoir ne saurait être constituant ; donc permettre aux institutions
décentralisées de définir leur propre statut.
Le principe de « libre administration » se manifeste par le fait que les institutions
décentralisées ont :


la personnalité juridique (ce qui leur permet d'avoir leurs propres agents publics et
ressources).
disposent d'une compétence spécialisée sous le contrôle de l'État : en France on distingue
la tutelle (contrôle administratif exercé par le Préfet sur les personnes et les actes) du
contrôle juridictionnel (contrôle sur les actes, exercé par les préfets qui déférent ces actes
devant les juridictions lorsqu'ils estiment qu'ils sont illégaux).
4.2.
L’ETAT FEDERAL
C’est un État dans lequel le gouvernement central confie l’exercice de certaines
compétences à des entités (Républiques, Provinces...) qui vont se diriger elles-mêmes.
C’est le cas de l’Allemagne et des Etats-Unis, notamment…
La notion d’Etat fédéral répond à 3 principes essentiels :

la juxtaposition = sont juxtaposés 2 centres décisionnels, le niveau fédéré (local) et le
niveau fédéral (national),
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

la participation = les états fédérés peuvent et doivent participer au niveau fédéral de
différentes manières. Ex : leur consentement est nécessaire pour modifier la Constitution
fédérale,
l’autonomie = les entités fédérés disposent d’une autonomie conséquente et importante.
Elles peuvent faire tout ce qui n’est pas interdit par les règles de l’Etat fédéral, en général
relativement souples et rares.
Principe de « libre gouvernement ».
Corollaire : les individus seront soumis à des normes fédérales communes (Constitution
fédérale, lois fédérales...) et à des normes locales propres aux entités fédérées
(Constitution, lois des entités fédérées).
Le gouvernement central conserve en général des compétences dites «
régaliennes » : droit de faire la guerre, droit d'avoir des représentations diplomatiques à
l'étranger, droit de battre monnaie.
Nota : il est souvent difficile de distinguer entre un État fédéral et un État unitaire
décentralisé. Cela parce qu'il n'y a pas de différence essentielle entre décentralisation
gouvernementale et décentralisation administrative, État unitaire et État fédéral.
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