1 - UFRGS

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Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
GDRI CNRS EMMA, Casa de Velazquez,
Universidad Nacional de Educacion a Distancia (UNED),
Universidad Autonoma de Madrid
Colloque EMMA, Madrid, 4 et 5 juin 2004
« Europe-Méditerranée : relations économiques
internationales et recomposition des espaces »
Eduardo FILIPPI (UFRGS et C3ED/UVSQ)
Denis REQUIER-DESJARDINS (C3ED/UVSQ)
Intégration régionale et trajectoires de développement territorial :
l’exemple du sud du Brésil dans le MERCOSUR
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Filippi E., Requier-Desjardins D.
Le MERCOSUR est une zone préférentielle basée sur une intégration Sud-Sud ; c’est une
union douanière, ce qui la distingue d’une zone de libre-échange l’ALENA mais aussi des
projets de libre-échange dans le partenariat euro-méditérranéen ; c’est toutefois une
intégration régionale entre des partenaires asymétriques, un géant le Brésil, un grand pays,
l’Argentine (95% du PIB à eux deux) et deux petits pays, l’Uruguay et le Paraguay. Par contre
les niveaux de revenus par tête sont relativement proches au moins pour le Brésil, l’Uruguay
et l’Argentine (surtout si l’on tient compte des disparités brésiliennes entre le Nord et le Sud).
L’Argentine et l’Uruguay ont une activité économique concentrée dans des zones proches des
frontières internes du MERCOSUR alors que la région sur au Brésil ne représente que 17% du
PIB. Au plan global Argentine, Uruguay et Paraguay ont vu l’augmentation de la part de leur
commerce intra-Mercosur depuis la création de la zone alors que le Brésil manifeste une
tendance inverse.
On peut donc s’interroger sur l’impact du Mercosur sur la polarisation des territoires les plus
proches des frontières communes. On s’intéressera notamment au Brésil compte tenu des
caractéristiques précédemment relevées, et donc au Rio Grande do Sul. On constate que les
effets du Mercosur sur ce territoire ne peuvent se comprendre sans faire référence à la
dynamique longue de cet état caractérisée par la marginalisation de sa moitié sud, la plus
proche de la frontière justement. Celle-ci proche géographiquement, économiquement et
socialement des autres pays du Mercosur subit leur concurrence plutôt qu’elle ne bénéficie de
complémentarités. On peut par contre relever un certain impact favorable de la création de la
zone sur les concentrations industrielles de la moitié nord de l’état.
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L’impact de la proximité géographique des pays sur les processus d’intégration régionale
qu’il s’agisse d’une intégration régionale institutionnalisée dans le cadre d’une zone
préférentielle ou d’une intégration régionale qui résulte simplement du renforcement des flux
commerciaux entre les pays concernés est souligné par des analyses convergentes.
Ainsi la nouvelle économie internationale considère aujourd’hui que la création de zones
économiques préférentielles vise plus à renforcer l’attractivité de la zone dans un monde
globalisé, notamment vis-à-vis des investissements directs étrangers, que de la protéger des
flux du commerce international. La proximité, géographique mais aussi culturelle ou
linguistique, des pays appartenant à une zone préférentielle est un élément de la compétitivité
de la zone dans la mesure où elle favorise les interactions entre acteurs en son sein et renforce
ainsi leur compétitivité.
Par ailleurs, les modèles d’économie géographique (Krugman et Livas Elizondo, 1996)
montrent que la libéralisation du commerce extérieur peut entraîner une répartition plus
égalitaire de l’activité économique sur le territoire national. Cependant une forte dépendance
commerciale vis-à-vis d’un pays voisin, éventuellement institutionnalisée par l’établissement
d’une zone préférentielle, convertira cet effet en un effet spécifique sur le développement des
zones frontalières : l’évolution du nord du Mexique, dans le cadre de la libéralisation
extérieure et de l’ALENA, est une bonne illustration de ce processus (Requier-Desjardins,
1999).
Cet intérêt pour l’analyse des effets en terme de géographie économique de la proximité
commerciale des pays rejoint celles d’un courant d’analyse qui depuis une vingtaine d’années
s’intéresse au développement économique des régions frontalières. Deux facteurs apparaissent
déterminants, les différences de potentiel économique et de revenu par tête entre les pays et
l’impact de l’intégration régionale sur le développement local des zones frontalières : le fait
que ces recherches aient commencé sur le cas de la frontière Mexique Etats-Unis est en soi
révélateur.
Cependant, si les formes d’intégration Nord-Sud, comme par exemple l’ALENA, sont des cas
intéressants pour ce qui concerne leur influence sur le développement régional dans les pays
concernés, il n’est pas inutile de s’intéresser également à d’autres formes d’intégration entre
pays plus proches au plan du PIB par tête mais qui montrent eux-mêmes de grandes disparités
régionales. Le cas du MERCOSUR, marché commun des pays du cône sud en Amérique
Latine mérite que l’on s’y attarde, compte tenu de ses caractéristiques géographiques.
En effet le MERCOSUR présente deux caractéristiques :
- Tout d’abord c’est un marché commun et non une simple zone de libre-échange,
contrairement à l’ALENA ou au projet ALCA/FTAA.
- Il rassemble quatre pays très différents, d’un point de vue géographique mais aussi
économique :
• un grand pays le Brésil dont le PIB dépasse largement la somme des trois autres et
qui présente d’un point de vue interne de grandes disparités régionales que ce soit
en terme de revenu par tête ou en terme d’occupation humaine ;
• un pays moyen l’Argentine, principal partenaire du Brésil, mais également marqué
par une relative polarisation sur sa capitale ;
• deux petits pays l’Uruguay et le Paraguay, très différents par leur revenu par tête,
l’un étant pauvre et enclavé et l’autre à revenu intermédiaire et ouvert sur
l’extérieur.
Au total cependant en parité de pouvoir d’achat, les revenus par tête sont dans un intervalle de
1 à 2, ce qui distingue sensiblement le MERCOSUR d’une zone comme celle de l’ALENA.
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Tableau 1 : Indicateurs des pays du MERCOSUR
2001
Population Superficie RNB RNB/tête RNB/tête PPA
Argentine 37
2780
260,3 6940
10980
Brésil
172
8547
528,9 3070
7070
Paraguay 6
407
7,6
1350
5180
Uruguay 3
176
19,2 5710
8250
Source : World Development Indicators
En dehors de cette diversité géographique et économique entre les quatre pays, on doit noter
qu’ils communiquent par une zone frontière, dont la partie « utile », celle ou se concentre les
principales infrastructures de transport, routières et fluviales, et les principaux points de
passage des flux commerciaux et humains, est relativement limitée par rapport à la superficie
de l’ensemble : il s’agit essentiellement de la zone du bassin de la Plata, des chutes de
l’Iguaçu à l’estuaire. La position géographique des différents pays par rapport à cette zone
frontière commune est très asymétrique.
- En effet L’Uruguay peut être considéré comme un pays entièrement « frontalier »
compte tenu de sa taille et de sa position entre le Brésil et l’Argentine1.
- Le Paraguay, dont le poids économique est limité par rapport aux autres pays,
concentre une large part de sa population urbaine dans l’est du pays entre Asunción et
le Paraguay. En dehors de sa frontière orientale, ses frontières Nord, avec le Brésil, et
Sud, avec l’Argentine, traversent des régions peu peuplées et marginales d’un côté
comme de l’autre (Pantanal et Chaco).
- En Argentine la principale agglomération, Buenos-Aires (10 millions d’habitants, soit
30% de sa population) est située sur le Rio de la Plata, c'est-à-dire proche de la
frontière uruguayenne ; il faut y ajouter les agglomérations importantes le long du
Parana. Les quatre provinces argentines frontalières de l’Uruguay, du Brésil et de l’est
du Paraguay , à savoir Buenos Aires, Entre Rios, Corrientes et Misiones représentent
en effet 13,4% de la superficie du pays, mais 46,2% de la population et 49,3% de la
production industrielle (selon le recensement industriel de 1993). Selon Sili (1999), la
Pampa argentine, qui inclut la ville de Buenos-Aires, regroupait à la fin des années
1990 63% des industries et 57% de l’activité tertiaire.
- En revanche le cœur économique du Brésil, représenté par les états de Sao Paulo et de
Rio et la ville de Rio (45% du PIB environ), est relativement éloigné de cette zone de
contact. La région sud du Brésil, frontalière de l’Argentine et de l’Uruguay, ne
représente que 17% du PIB et l’état du Rio Grande do Sul, le plus frontalier des états
brésiliens, 8%. Par ailleurs si le PIB/tête du Rio Grande do Sul était en 2001 de 9129
Reais, soit parmi les plus élevés de la fédération, et s’il occupe le troisième rang dans
la production industrielle derrière Sao Paulo et le Minas Gerais, les états de Rio de
Janeiro et Sao Paulo avaient un PIB/tête encore plus élevé (10160 et 10642 Reais
respectivement) et celui de l’ensemble de la région sud était plus faible (8387 Reais).
Le sud du Brésil est donc une zone relativement prospère mais la concentration du
revenu est plus forte dans la région Sao Paulo – Rio.2
1
Son histoire politique et militaire le montre puisqu’il doit son existence à l’intervention de la Grande-Bretagne
dans le conflit entre l’Argentine et le Brésil, qui reprenait l’affrontement entre les couronnes espagnoles et
portugaises pour le contrôle de ce territoire situé aux marches des anciens empires coloniaux.
2
La cartographie de l’activité industrielle au Brésil par secteur (Lail, Fundenburg et Yepes, 2004) montre
clairement la forte concentration sur le pôle Sao Paulo Rio pour la plupart des secteurs et l’existence d’un pôle
secondaire dans les états du sud et en particulier dans le Rio Grande do Sul pour de nombreux secteurs (pôle qui
est d’ailleurs dominant pour le cuir ou le bois)
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Au total seul le Brésil est dans une situation telle que l’essentiel de l’activité économique ne
se trouve pas localisée dans une position proche des frontières internes de la zone Mercosur.
Tableau 2 : Evolution de la part dans le PIB des états de Rio et de Sao Paulo, de la région
sud et du Rio Grande do Sul
1997 1998 1999 2000 2001
Brésil 100 100 100 100 100
RJ/SP 46,7 46,5 46,6 46,3 45,7
Sud
17,7 17,5 17,7 17,6 17,6
RGDS 8,0
7,7
7,7
7,7
7,8
Source : Comptes régionaux, IBGE
Quelle a été, au cours de sa décennie d’existence, l’impact du MERCOSUR sur l’évolution de
l’activité économique dans les pays membres et sur les effets de polarisation en leur sein,
notamment en ce qui concerne les zones frontières ? C’est à cette question que la
communication tentera de répondre en se focalisant sur le cas spécifique du Brésil et du Rio
Grande do Sul, compte tenu de la caractéristique que nous venons de rappeler.
Nous envisagerons d’abord l’impact du MERCOSUR sur le développement du commerce
international des différents pays de la zone avant de nous intéresser sur son impact sur les
régions frontalières, en particulier sur l’état brésilien du Rio Grande do Sul. Nous replacerons
cette évolution dans la dynamique longue de cet état caractérisé par la marginalisation de sa
moitié sud, la plus proche de la frontière justement.
L’évolution des flux du commerce international des pays du MERCOSUR
Le MERCOSUR est contemporain de l’ALENA puisqu’il naît au début des années 1990, mais
il s’en distingue par son caractère d’union douanière et de marché commun. Cela se traduit
par la mise en place d’un tarif extérieur commun pour les produits bénéficiant de ses
dispositions et une volonté affirmée de mettre en place un début de politique commune.
Toutefois ces réalisations resteront modestes et on ne verra pas la mise en place d’institutions
communes, au-delà des conseils rassemblant les chefs d’état. D’autre part si la référence à une
Union économique est fréquente, les politiques communes ont été soumises tout au long des
dix années d’existence du MERCOSUR aux tensions nées de l’évolution divergente des
monnaies en particulier du peso argentin et du réal brésilien.
L’examen de l’évolution des exportations des quatre pays entre 1991 et 2001 montre que la
période de mise en place du MERCOSUR a correspondu à une phase d’ouverture extérieure
importante pour l’ensemble de la zone et en particulier pour les deux plus gros partenaires,
l’Argentine et le Brésil, qui ont doublé la valeur de leurs exportations.
Tableau 3 : Evolution des exportations des pays du MERCOSUR entre 1991 et 2001
1991
2001
Argentine 11997,8 26610,0
Paraguay
737,0
990,0
Uruguay
1573,8 2060,4
Brésil*
31620,0 60232,0
www.Mercosur.org
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L’examen de l’évolution de la structure des exportations des quatre pays entre 1991 et 2001
montre que la place du Mercosur dans cette évolution a été différenciée selon les pays (cf.
graphiques en annexe).
- L’augmentation de la part du MERCOSUR dans le commerce extérieur de l’Argentine a
été importante, passant de 16 à 28%, essentiellement au détriment de l’Union
Européenne. Il faut noter d’ailleurs que ce mouvement s’accompagne d’une hausse
également non négligeable de la part des pays d’Amérique Latine « non NAFTA », parmi
lesquels on trouve le Chili et l’Argentine, associée au MERCOSUR.
le Paraguay et l’Uruguay ont également vu la part du MERCOSUR dans leurs
exportations augmenter entre 1991 et 2001, mais cette augmentation, plus sensible pour
le Paraguay que pour l’Uruguay, s’est faite à partir d’un niveau déjà élevé, qui traduisait
une intégration de fait liée d’une part à la taille relative faible des deux pays par rapport à
leurs deux autres partenaires, à leur proximité et, pour le Paraguay à leur enclavement.
Il est par contre beaucoup moins net pour le Brésil qui voit en fait la part du
MERCOSUR diminuer3 et qui aux deux dates présente un commerce international très
largement orienté vers l’ALENA et l’Union Européenne et l’Asie. La tendance la plus
significative sur la décennie semble d’ailleurs être une substitution relative de l’ALENA
à l’Union Européenne.
Ces chiffres montrent bien l’asymétrie fondamentale entre le Brésil et ses partenaires en terme
de commerce international, et doit être rapprochée de l’asymétrie en terme de géographie
économique que nous avons déjà notée. Au total il semble que le MERCOSUR ait eu un effet
plus dynamisant et plus significatif en termes d’intégration régionale sur le commerce de
l’Argentine que sur celui du Brésil.
Cette asymétrie se retrouve dans l’évolution des flux d’investissements directs étrangers :
entre 1990 et 2000, 98% des 200 milliards de $ reçus par la zone MERCOSUR concernait
l’Argentine et le Brésil. La création du MERCOSUR a d’ailleurs entraîné une accélération
importante de ces flux, puisqu’ils sont passés d’une moyenne annuelle de 2225 millions de $
en 1981-1990 à 6288 millions de $ en 1991-1995 et 35383 millions de $ en 1996-2000.
L’attractivité de la zone a été sensiblement augmentée par la création du marché commun,
même si en pourcentage des flux mondiaux (4,5%) elle n’a pas retrouvé son niveau de la
décennie 1970 (7%). En fait, respectivement au PIB, l’évolution des IDE dans la zone a été
plus dynamique qu’au niveau mondial mais moins que pour l’ensemble des pays en
développement.
Tableau 4 : Part du stock d’IDE dans le PIB
%
1980 1990 2000
Argentine
6,9
6,4 22,1
Brésil
7,4
8,0 21,6
Uruguay
7,2 12,0 10,5
Paraguay
4,9
7,5 20,6
Pays en développement 10,2 13,4 28,0
Pays développés
4,7
8,4 14,5
Monde
6,0
9,2 17,3
Source : Chudnovski, Lopez
L’évolution de la répartition des flux entre les pays du MERCOSUR montre cependant un
certain dynamisme de l’Argentine par rapport aux autres pays de la zone, même si l’asymétrie
3
Il faut tenir compte d’un effet conjoncturel du à la crise argentine de 2002, mais en tout état de cause une
correction éventuelle ne permettrait pas d’inverser la conclusion.
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en faveur du Brésil subsiste. L’importance de l’IDE en Argentine semble toutefois lié au
secteur du pétrole qui a représenté 33,4% de l’IDE entre 1992 et 2000 (contre 22,6 pour
l’industrie et 42,7 pour les services), alors que pour le Brésil il se répartit entièrement entre
1996 et 1999 entre industrie (18,4%) et services (80,1%).
Tableau 5 : Distribution du stock d’IDE entre les pays de la zone
%
1980 1990 2000
Argentine 22,5 19,1 26,7
Brésil
73,5 78,0 71,8
Uruguay
3,1
2,1
0,8
Paraguay 0,9
0,8
0,6
TOTAL
100 100 100
Source : Chudnovski, Lopez.
L’asymétrie des différents membres de la zone se reflète également dans la répartition de
l’IDE interne au MERCOSUR. Les flux croisés Argentine-Brésil sont inexistants ou faibles
sur la période ainsi que les flux originaires de ces deux pays en direction de l’Uruguay (qui
reçoit par contre des flux chiliens important – 27,8% du total). Par contre le Paraguay est un
réceptacle des flux de ses deux grands voisins (22,5% du total pour le Brésil, 12,8% pour
l’Argentine).
Nous examinons plus particulièrement l’évolution des flux pour l’Argentine et l’Uruguay,
d’une part compte tenu de l’impact du MERCOSUR sur leur commerce et d’autre part de la
concentration de leur activité économique près de la zone frontalière.
L’évolution des exportations argentines entre 1995 et 2002 montre que l’augmentation de ces
exportations en direction de ses partenaires du MERCOSUR a été acquise dans les premières
années et que depuis 1997 il y a eu un déclin régulier. Si nous mettons à part l’année 2002,
compte tenu de la crise qu’a connu le pays, on remarque que cette diminution concerne
surtout le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay présentant un profil stable jusqu’aux années de
crise.
L’alignement du peso sur le dollar doit évidemment être considéré comme une des causes
principales de cette évolution, ainsi que la politique monétaire suivie au Brésil qui a entraîné
notamment une dévaluation de 60% du real brésilien par rapport au dollar (donc au peso) dans
le courant de l’année 1999. On doit même considérer que la performance argentine sur le
marché brésilien vers la fin de la décennie est de bonne qualité compte tenu des pressions
liées à l’évolution divergente des monnaies, ce qui montre le maintien d’une certaine
dynamique du commerce interne au MERCOSUR.
Tableau 6 : Evolution des exportations argentines en direction de ses partenaires du
MERCOSUR entre 1995 et 2002
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Brésil
5 510,9
6 619,9
8 107,3
7 924,4
5 689,3
6 991,4
6311,3
Paraguay
631,6
581,4
621,2
621,9
563,2
592,2
496,7
246,1
Uruguay
654,2
717,1
835,3
843,3
818,6
818,3
768,5
380,4
6 796,7
7 918,4
9 563,8
9 389,6
7 071,1
8 401,9
7 576,5
5 003,3
Total
4743,8
www.Mercosur.org
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Tableau 7 : Evolution des importations argentines en provenance de ses partenaires du
MERCOSUR entre 1995 et 2002
1996
1997
4 174,4
5 325,2
6 897,5
7054,7
5598,9
6478,5
5277,6
1773,6
139,8
181,3
319,6
347,6
304,1
294,9
303,0
185,6
1995
Brésil
Paraguay
Uruguay
Total
1998
1999
2000
2001
2002
279,3
293,8
371,0
528,0
395,8
425,9
328,4
101,9
4 593,5
5 800,3
7588,1
7930,3
6298,8
7199,3
5909,0
2061,1
Graphique 1 : Evolution des soldes commerciaux de l’Argentine avec ses partenaires du
MERCOSUR
BRASIL
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
Año Abr
Jul
Oct
1995
Año Abr
Jul
Oct
1996
Año Abr
Jul
Oct
1997
Año Abr
Jul
Oct
1998
Año Abr
Jul
Oct
1999
Año Abr
Jul
Oct
2000
Año Abr
Jul
Oct
2001
Año Abr
Jul
2002
-500
-1 000
PARAGUAY
600,0
500,0
400,0
300,0
200,0
100,0
0,0
Año Abr
1995
Jul
Oct
Año Abr
1996
Jul
Oct
Año Abr
1997
Jul
Oct
Año Abr
1998
Jul
Oct
Año Abr
1999
Jul
Oct
Año Abr
2000
Jul
Oct
Año Abr
2001
Jul
Oct
Año Abr
2002
Jul
8
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URUGUAY
600,0
500,0
400,0
300,0
200,0
100,0
0,0
Año Abr
1995
Jul Oct Año Abr
1996
Jul Oct Año Abr
1997
Jul Oct
Año Abr
1998
Jul Oct Año Abr
1999
Jul Oct Año Abr
2000
Jul Oct Año Abr
2001
Jul
Oct Año Abr
2002
Jul
Jul Oct Año Abr
2000
Jul Oct Año Abr
2001
Jul Oct Año Abr
2002
Jul
MERCOSUR
3 500,0
3 000,0
2 500,0
2 000,0
1 500,0
1 000,0
500,0
0,0
Año Abr
1995
Jul
Oct Año Abr
1996
Jul Oct Año Abr
1997
Jul Oct Año Abr
1998
Jul Oct Año Abr
1999
Source : www.Mercosur.org
L’évolution des soldes commerciaux argentins confirme la relative stabilité du solde avec
l’Uruguay et un lent déclin de l’excédent avec le Paraguay. Mais elle montre également le
poids du solde avec le Brésil dans le solde total avec le MERCOSUR. L’instabilité du solde
est très importante avec le Brésil, cette évolution est largement liée à celle du taux de change.
Tableau 8 : Evolution des exportations uruguayennes en direction du MERCOSUR
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Argentine
267,1
271,7
354,3
513,2
368,6
410,7
316,5
104,6
Brésil
700,0
831,0
940,2
935,2
557,3
530,1
439,2
388,8
Paraguay
TOTAL
24,9
49,4
60,7
83,8
81,0
82,1
82,9
57,1
992,0
1 152,1
1 355,2
1 532,2
1 006,9
1 022,9
838,6
550,5
Source : www.Mercosur.org
Tableau 9 : Evolution des importations uruguayennes en provenance du MERCOSUR
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Argentine
608,5
690,8
790,8
839,4
795,6
836,1
706,0
540,6
Brésil
698,6
745,5
802,1
793,4
651,7
666,6
626,0
389,6
13,6
25,3
23,7
16,6
14,4
15,3
18,1
13,6
1 320,7
1 461,6
1 616,6
1 649,4
1 461,7
1 518,0
1 350,1
943,8
Paraguay
TOTAL
Source : www.Mercosur.org
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L’Uruguay se caractérise par la très grande stabilité de ses importations avec ses partenaires et
en particulier avec l’Argentine et le Brésil, à l’exception de l’année 2002. Par contre les
exportations sont plus fluctuantes, notamment avec le Brésil, avec une cassure brusque en
1999.
Graphique 2 : Evolution des soldes commerciaux uruguayens
ARGENTINA
0,0
A ño
A br
Jul
1995
Oct
A ño
A br
Jul
1996
Oc t
A ño
A br
J ul
1997
Oc t
A ño A br
Jul
Oct
1998
A ño
A br
Jul
Oc t
1999
A ño
A br
J ul
Oc t
2000
A ño
A br
Jul
2001
Oct
A ño
A br
Jul
Oct
2002
-100,0
-200,0
-300,0
-400,0
-500,0
-600,0
BRASIL
200,0
150,0
100,0
50,0
0,0
-50,0
Año Abr
1995
Jul
Oct Año Abr
1996
Jul
Oct Año Abr
1997
Jul
Oct Año Abr
1998
Jul Oct
Año Abr
1999
Jul Oct
Año Abr
2000
Jul Oct
Año Abr
2001
Jul
Oct Año Abr
2002
Jul
Oct
-100,0
-150,0
-200,0
-250,0
10
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Filippi E., Requier-Desjardins D.
PARAGUAY
80,0
70,0
60,0
50,0
40,0
30,0
20,0
10,0
0,0
Año Abr
Jul
Oct Año Abr
1995
Jul Oct
1996
Año Abr
1997
Jul Oct
Año Abr
Jul
Oct
1998
Año Abr
1999
Jul
Oct
Año Abr
Jul
Oct
2000
Año Abr
Jul
Oct Año Abr
2001
Jul
Oct
2002
MERCOSUR
0,0
Año Abr
1995
Jul Oct
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1996
Jul Oct
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1997
Jul Oct Año Abr
1998
Jul Oct
Año Abr
1999
Jul Oct Año Abr
2000
Jul Oct
Año Abr
2001
Jul Oct
Año Abr
Jul Oct
2002
-100,0
-200,0
-300,0
-400,0
-500,0
-600,0
Source : www.Mercosur.org
L’évolution des soldes confirme la relative stabilité des relations commerciales avec
l’Argentine qui contraste avec la fluctuation de celles avec le Brésil. L’évolution du solde
avec le Paraguay permet d’expliquer le léger décrochage de l’évolution du solde
MERCOSUR par rapport au solde Brésil au début de la période.
Au total la stabilité relative des relations commerciales Argentine-Uruguay contraste avec
l’instabilité relative des relations Brésil-Argentine et Brésil-Uruguay. On peut considérer cette
situation comme la conséquence de la moindre intégration commerciale relative du Brésil par
rapport à la Zone Mercosur.
L’impact du Mercosur sur les régions frontalières : le cas du Rio Grande do Sul
L’examen du comportement en terme de commerce extérieur de l’Uruguay et même de
l’Argentine dans le MERCOSUR a à la fois une signification nationale mais également une
signification régionale, compte tenu de la polarisation de l’activité et de la population en
Argentine dans la zone de la Pampa et du bassin de la Plata et compte tenu de la situation
géographique de l’Uruguay. Il en va différemment du Brésil : compte tenu du poids limité
dans le PIB brésilien du Rio Grande do Sul, le seul état brésilien véritablement frontalier des
autres pays du Mercosur compte tenu de sa position géographique, on ne peut pas assimiler a
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Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
priori l’impact du Mercosur sur le commerce extérieur du Brésil à l’impact sur l’activité au
Rio Grande do Sul. C’est pourquoi il faut examiner le comportement de cet état dans la
décennie d’existence du MERCOSUR. Celle-ci ne peut toutefois se comprendre que par
rapport à l’évolution historique longue de sa place dans l’ensemble brésilien.
Filippi (2004) souligne la particularité de l’évolution historique de cet état dans l’ensemble
brésilien, due en grande partie à sa situation frontalière, au départ entre les empires coloniaux
portugais et espagnols.
En effet, compte tenu des caractéristiques de la colonisation portugaise du Brésil, longtemps
orientée vers la production de matières premières agricoles tropicales et donc longtemps
limitée au rivage tropical du pays, la colonisation du Rio Grande do Sul a été tardive, à partir
de la fin du XVIIIème siècle. De plus elle s’est faite en deux temps :
- D’abord une colonisation à but essentiellement militaire, la défense et la définition de
la frontière avec les territoires sous domination espagnole, dans un conteste de rivalité
pour le contrôle du bassin de la Plata : Colonia do Sacramento, située sur le Rio de la
Plata en face de Buenos-Aires, est aux mains des portugais jusqu’en 1777. Cette
colonisation, essentiellement le fait de portugais, centrée sur le sud et l’ouest de l’état,
la frontière actuelle, acquiert une dimension économique nouvelle du fait de la mise
en valeur des mines du Minas Gerais, qui fait du Brésil une colonie minière, plus
proche donc du modèle espagnol de colonisation de l’Amérique : il faut en effet
nourrir la main d’œuvre des mines, ce qui ouvre un marché important au « charque »,
la viande boucanée produite dans les pâturages de la pampa brésilienne du sud de
l’état.4
- Ensuite une colonisation qui démarre après l’indépendance du Brésil en 1821, qui va
se poursuivre tout au long du XIXème siècle et qui concerne l’intérieur et le Nord de
l’Etat, essentiellement par appel à l’immigration allemande et italienne ; la
préoccupation géopolitique n’est pas absente dans la mesure où il s’agit pour le
nouvel empire brésilien indépendant de peupler des territoires considérés comme
« vides », mais l’effet va être essentiellement économique avec la formation de
communautés dotée d’un savoir-faire artisanal, qui va déboucher sur une
industrialisation sous la forme de « clusters » de petites entreprises : l’exemple de
l’industrie de la chaussure de la vallée de Sinos, autour de la ville de Nôvo
Hamburgo5, étudié notamment par Schmitz (1995 et 1999), en est une illustration.
Le résultat de ce double mouvement de colonisation va être à long terme un mouvement de
ciseaux économique entre la moitié sud et la moitié Nord de l’état du Rio Grande do Sul : la
zone sud, autrefois prospère notamment grâce à la production de Charque, va voir son poids
économique se réduire régulièrement au profit de la moitié Nord qui s’industrialise.
Tableau 10 : Evolution des parts respectives de la moitié Sud et de la moitié Nord dans le
PIB de l’état du Rio Grande do Sul de 1939 à 1999.
1939 1949 1959 1970 1980 1990 1999
Moitié Sud 38,33 30,06 29,46 23,97 21,41 17,70 17,27
Moitié Nord 61,67 69,94 70,54 76,03 78,59 82,30 82,73
Source Governo do Rio Grande do Sul (1998), Ilha, Alves & Saravia (2002)
(cité par Filippi, 2004)
4
Vers les années 1840 la production de Charque fait de la région de Pelotas Rio Grande, aujourd’hui en déclin,
une des régions les plus riches du Brésil (Filippi, Requier-Desjardins, 2003)
5
Comme son nom l’indique, c’est une zone d’implantation d’une forte colonie de migrants allemands arrivés
dans les années qui ont suivi l’indépendance du Brésil.
12
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
Les activités de substitution au Charque, comme le développement de la culture intensive du
Riz dans la région de Pelotas Rio Grande ou d’une industrie de transformation de fruits
(pêches), ne parviennent pas à contrecarrer le déclin relatif de la moitié sud où l’élevage
extensif reste prédominant.
Le ciseau économique s’accompagne d’un ciseau démographique, comme en témoignent les
données suivantes :
Tableau 11 : Evolution des parts respectives dans la population de la moitié sud et de la
moitié nord de l’état du Rio Grande do Sul entre 1890 et 2000
1890
52,07
47,93
28,04
1900
48,40
51,60
30,06
1920
41,30
58,70
27,47
1940
35,67
64,33
25,57
1950
32,74
67,26
26,69
1960
30,11
69,89
30,66
1970
28,54
71,46
34,29
1980
26,31
73,69
40,21
1991
25,19
74,81
44,74
Moitié sud
Moitié nord
Dont :
RMPA/ACS
Source : Alonso, Benetti & Bandeira (1994) ; Governo do Rio Grande do Sul (2000)
Cité par Filippi (2004)
2000
24,27
75,73
45,75
La concentration démographique dans la moitié nord est essentiellement la conséquence de la
concentration démographique dans les deux zones de développement de l’industrie, soit la
Région Municipale de Porto Alegre (RMPA) et l’agglomération de Caxias do Sul (ACS). Ces
deux régions représentaient 55% du PIB de l’état en 1999. La croissance industrielle de l’état,
concentrée dans la moitié Nord, a d’ailleurs été plus vigoureuse que celle de l’ensemble du
Brésil, En fait, sur la base de ces chiffres, l’état de Rio Grande do Sul correspond assez bien
au modèle centre périphérie à deux régions, développé notamment par Krugman (1991), avec
concentration de l’industrie dans une seule région. Les relations inter-entreprises sont
d’ailleurs minimales entre les deux régions, la moitié sud ne fournissant que très peu d’inputs
à l’industrie de la moitié nord.
Tableau 12 : Evolution comparée de la structure du PIB au Brésil et au Rio Grande do Sul
Agriculture
Industrie
Services
Brésil RS Brésil RS Brésil RS
1939 28,50 37,49 18,81 15,79 52,69 46,72
1949 26,41 31,94 21,96 20,34 51,63 47,72
1959 20,75 27,56 27,68 22,64 51,57 49,80
1970 12,53 23,21 30,62 22,40 56,85 54,39
1980 10,03 15,79 38,26 35,48 51,71 48,73
1990 11,06 12,08 37,50 44,01 51,44 43,92
1995 14,03 14,22 31,00 36,69 54,97 49,08
2001* 9,00 11,67 34,00 40,49 57,00 47,84
Source : Bandeira (1988), Governo do Rio Grande do Sul (2003), World Bank
(2003)*
On constate d’ailleurs que si la part du PIB du Rio Grande do Sul dans l’ensemble brésilien
est stabilisée depuis plus d’un demi-siècle la part de son PIB primaire dans le total national est
beaucoup plus fluctuante, traduisant les vicissitudes de son agriculture.
13
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Tableau 13 : Evolution de la part du Rio Grande do Sul dans le PIB brésilien total et
primaire.
1939 1949 1959 1970 1980 1990 1995 2000
% PIB total
10,33 8,64 8,41 8,60 7,98 8,13 8,30 8,07
% PIB primaire 13,58 10,44 11,18 15,93 12,56 11,72 13,93 13,23
Source : Filippi (2004)
L’examen des données des tableaux précédents permet de repérer des effets spécifiques de la
mise en place du Mercosur sur le Rio Grande do Sul :
- Tout d’abord il ne semble pas que le processus de dégradation de la part de la moitié
Sud ait été enrayé dans la décennie d’ouverture au Mercosur, que ce soit au plan du
PIB ou même au plan démographique.
- Par contre on note dans la dernière décennie une hausse de la participation du Rio
Grande do Sul dans l’économie nationale, dans la première partie de la décennie
1990, lors de la mise en place du Mercosur et une baisse de cette même part dans la
seconde partie, conformément à l’évolution des flux du commerce au sein de la zone,
ce qui semble montrer une influence plus grande du Mercosur sur l’économie de l’état
que sur l’économie brésilienne dans son ensemble. En fait les taux de croissance de
l’état sont particulièrement élevés en 1992, 1993 et 1994 (7, 10 et 4%), avec un creux
en 1995 (-6%), un redémarrage en 1997 (4%), un nouveau creux en 1998 (-1%) et des
taux positif entre 1999 et 2002 (2, 3 et 1%).
- Ensuite la décennie d’ouverture au Mercosur semble avoir marqué au Rio Grande do
Sul d’abord une poursuite du rattrapage industriel des années 1980 jusqu’à la midécennie, suivie d’une relative stabilisation voire d’une diminution dans la seconde
partie de la décennie.
- Au contraire le déclin de la part de la production primaire au Rio Grande do Sul
semble enrayé dans les premières années de mise en place du Mercosur, même si une
petite régression intervient dans les années récentes.
Si on prend en compte la région Sud qui regroupe les trois états de Rio Grande do Sul, Santa
Catarina, Parana, et que l’on examine leur comportement dans la période de mise en place du
Mercosur, les chiffres suivants semble montrer, malgré leur grande stabilité, un léger
rééquilibrage au profit du sud dans les premières années du Mercosur, cet avantage étant
conservé en partie vers la fin de la période.
Tableau 14 : Evolution de la répartition du PIB brésilien par grande région
Sud* Sud-est° Autres régions
1985 17,1 60,2
22,7
1986 17,6 58,9
23,5
1987 17,3 60,2
22,5
1988 17,5 60,3
22,2
1989 18,6 59,4
22,0
1990 18,2 58,8
23,0
1991 17,1 58,7
24,2
1992 18,3 58,8
22,9
1993 18,4 57,7
23,9
1994 18,7 57,3
24,0
1995 17,9 58,7
23,4
1996 18,0 58,1
23,9
1997 17,7 58,6
23,7
14
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Filippi E., Requier-Desjardins D.
1998 17,5 58,2
24,3
1999 17,8 58,3
23,9
2000 17,6 57,8
24,6
2001 17,8 57,1
25,1
Source : IBGE
*La région sud regroupe les états de Rio Grande do Sul, Santa Catarina et Parana
° La région sud-est regroupe les états de Sao Paulo, Rio, Minas Gerais et Espirito Santo
Il semble donc que l’économie du Rio Grande do Sul et en particulier son industrie ait subi un
certain effet du Mercosur puisqu’on retrouve la hausse du début de la période et une relative
stagnation dans les années récentes, années de difficulté pour le Mercosur. Ce schéma paraît
aussi valable pour la production primaire. Au total cependant au Rio Grande do Sul,
l’industrie apparaît ces récentes années comparativement plus dynamique que la production
primaire, en comparaison avec l’ensemble du Brésil.
Tableau 15 : Evolution de l’indice de la production en volume par grand secteur
1985 = 100
RGDS
Brésil
1998 1999 2000 2001 1998 1999 2000 2001
Agroélevage 111,9 123,4 123,7 139,0 143,2 153,9 161,3 170,5
Ind. Manuf. 124,0 126,1 137,3 140,1 123,9 123,2 130,8 132,8
Source : comptes régionaux IBGE
La prise en compte de l’évolution du commerce de l’état en direction du Mercosur peut
permettre de préciser ce constat. Il montre incontestablement un impact du marché commun
sur le commerce de l’état. Il faut d’ailleurs noter que le déclin en fin de période paraît plus lié
à l’impact de la crise argentine que des troubles monétaires antérieurs.
Tableau 16 : Evolution de la part des exportations de l’état allant vers la zone MERCOSUR
entre 1995 et 2002.
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
13,70 15,40 17,10 19,70 17,00 17,00 13,00 6,35
Source : Bello (2001), Garcia (2001), FEE (2003)
Cité par Filippi (2004)
Tableau 17 : Evolution du volume des exportations du Rio Grande do Sul à destination du
MERCOSUR entre 1992 et 1998.
Chaussures
Tabacs Machines
et composants
et mécanique
1992 1,51
1,45
39,55
1997 4,54
5,62
53,90
1998 6,38
7,01
58,10
Bello (2001), cité par Filippi (2004)
Véhicules Viandes Matières
plastiques
18,53
20,89
40,89
55,05
15,73
54,73
50,48
20,72
54,67
L’évolution par secteur montre que si tous les secteurs industriels de l’état ont augmenté leurs
exportations en direction du MERCOSUR, on doit constater :
- la quasi-stagnation, voire la diminution du secteur de la viande. Il faut rappeler à cet
égard que ce secteur est très concurrencé par les autres pays du Mercosur et que par
ailleurs il concerne essentiellement la moitié sud de l’état.
15
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
-
-
l’augmentation très importante de l’industrie automobile, ce qui est intéressant
compte tenu de la présence d’une industrie automobile importante dans les deux pays
et des phénomènes d’intégration et de commerce intra-branche dans ce secteur. La
question reste ouverte de savoir si la proximité géographique du Rio Grande do Sul
avec l’Argentine a joué un rôle, ou s’il s’agit des conséquences d’une spécialisation
antérieure de l’état dans l’ensemble brésilien.
l’augmentation de l’industrie de la chaussure dont les marchés se situaient
prioritairement aux Etats-Unis et en Europe au début des années 90, mais qui fait face
depuis à une concurrence de plus en plus forte sur ces marchés, en particulier de
l’industrie chinoise (Schmitz, 1999).
Au total l’examen de l’activité productive et du commerce extérieur du Rio Grande do Sul
permet d’avancer deux éléments de conclusion :
En premier lieu en ce qui concerne le commerce agricole, la proximité de l’écosystème du sud
de l’état avec celui des pays voisins, Argentine et Uruguay fait que la moitié sud se retrouve
en concurrence avec les partenaires du Mercosur, et en particulier avec les régions proches
des pampas uruguayennes et argentines, sur ses principaux produits.
C’est le cas de la viande, avec le paradoxe que l’état du Rio Grande do Sul n’a pu profiter
pleinement de la baisse conjoncturelle des exportations de ses partenaires en direction de
l’extérieur de la zone, liée au change et à la fièvre aphteuse, parce qu’il subit lui-même la
concurrence des zones pionnières brésiliennes plus productives en terme d’élevage bovin et
que, de plus, il a fini par être touché également par la fièvre aphteuse du fait justement de la
proximité de son écosystème avec l’écosystème des pays voisins. On retrouve une des
données de long terme de l’histoire économique de l’état, écartelé entre sa spécialisation
proche des autres pays et son appartenance à l’ensemble brésilien, que le Mercosur ne remet
pas en cause.
Le cas du riz, produit phare de l’agriculture de la moitié sud de l’état dont le développement
depuis deux décennies a été tiré par l’expansion du marché urbain brésilien est
symptomatique de cet état de fait. Dans ce cas la production nationale ne suffit pas à satisfaire
la demande et la création du Mercosur a simplement conduit à un détournement de trafic,
l’intégralité des importations de riz brésiliennes étant maintenant assurées par l’Argentine
(76%) et l’Uruguay (24%).
C’est enfin le cas pour des produits agroalimentaires comme les confiseries et les conserves
de fruit de la région de Pelotas Rio Grande, qui ont pu être identifiée comme formant un
« cluster » ou un « Système agroalimentaire localisé » (SYAL) (Filippi, 2004) : le
comportement de ce système productif local dans la décennie 1990 a subi l’impact de la
concurrence des importations de conserves de fruits d’Argentine et d’Uruguay (ainsi que de
Grèce), et la récupération de 2000 semble essentiellement être due à l’évolution des taux de
change.
Au total le relèvement de la part de la production primaire, puis sa stabilisation, du Rio
Grande do Sul pendant la décennie 90 paraît plus liée à l’expansion de son marché intérieur,
sur lequel elle subit néanmoins la concurrence des fronts pionniers que de l’ouverture
d’opportunités dans la zone Mercosur et il est donc logique que le déclin séculaire de la
moitié sud ne soit pas enrayé par le MERCOSUR.
La situation peut être différente en ce qui concerne l’industrie où il existe un flux
d’exportation de l’état du Rio Grande do Sul vers le Mercosur, en forte croissance dans des
industries comme la chaussure, l’industrie des machines et de la mécanique et l’automobile.
Mais d’une part ce flux concerne la moitié nord de l’état compte tenu de la structure centre-
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Filippi E., Requier-Desjardins D.
périphérie de ses implantations industrielles. D’autre part il faut tenir compte de l’évolution
de la « gouvernance » de ces filières au niveau sous-régional. Pour l’industrie de la chaussure
par exemple, la réorientation des exportations vers le Mercosur est du à la concurrence
chinoise sur les marchés d’exportation des USA et de l’Union Européenne (Schmitz, 1999),
qui ont constitué depuis 20 ans le débouché essentiel de cette industrie ; on peut donc se poser
la question de savoir si cette réorientation peut pallier la perte de ces marchés et si une filière
régionale peut survivre au niveau du Mercosur, compte tenu de la domination par l’aval et les
grandes marques de distribution caractéristiques de ce secteur. Cependant, le redémarrage de
l’emploi dans la filière chaussure depuis 2000, malgré le mouvement de délocalisation du
cluster de Sinos au Ceara (Schmitz, 1999) peut être du à l’ouverture de ce marché de
proximité.
Pour l’automobile, filière pilotée par l’amont et la Recherche-Développement, on peut
invoquer un effet de l’intégration globale de l’industrie automobile, mais là aussi on peut
s’interroger sur la possibilité de voir une industrie automobile relativement autonome s’établir
dans la zone ou sur la capacité des groupes de l’automobile présents dans les pays du
MERCOSUR à arbitrer entre le Brésil et l’Argentine en fonction de l’évolution des coûts
(comme cela semble s’être passé au moment de la crise monétaire de 2000-2001).
Au total, la question essentielle est de savoir dans quelle mesure l’ouverture du MERCOSUR
a dynamisé les zones frontières du bassin de la Plata. C’est pour le Brésil que la question a le
plus de sens, puisque c’est le pays où on peut distinguer le plus nettement les zones proches
de la frontière du reste du pays, à la fois sur le plan géographique et économique.
Il ne semble pas que l’ouverture au MERCOSUR ait été en mesure de renverser la tendance
historique au déclin des zones les plus proches des frontières uruguayenne et argentine au Rio
Grande do Sul. Par contre l’industrie de l’Etat a pu bénéficier dans une certaine mesure, du
fait de sa proximité géographique avec les partenaires du MERCOSUR et au premier plan
l’Argentine, des effets d’intégration au sein des filières globales propres à la sous-région.
L’effet-frontière des processus d’intégration régionale serait donc prédéterminé par la
tendance préexistante du déclin historique de la moitié sud de l’état et par la proximité agroécologique et sociale du Rio Grande do Sul par rapport aux pays de la Plata qui génère plutôt
des effets de concurrence que de complémentarité.
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18
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
Annexe : Structure des exportations des pays du MERCOSUR en 1991 et 2001
Structure des exportations de l’Argentine par destination en 1991 et 2001
1991
NAFTA
13%
ALADI (excl.
Mercosur y México)
10%
Asia
11%
Unión Europea
33%
Oriente Medio
6%
Africa
3%
MERCOSUR
16%
Otros
8%
ALADI (excl.
Mercosur y
México)
15%
2001
NAFTA
14%
Asia
13%
Unión Europea
17%
Oriente Medio
4%
Africa
5%
MERCOSUR
28%
Otros
4%
19
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
Structure des exportations du Paraguay par destination en 1991 et 2001
Ot r os
10 %
Or e
i n t e M edio
Af r ci a
0%
0%
1991
M ERCOSUR
Asia
36%
8%
ALADI ( excl. M er cosur y M é xico
9%
Naf t a
5%
Africa
0%
Otros
11%
2001
Oriente Medio
1%
Asia
9%
ALADI (excl.
Mercosur y México
13%
MERCOSUR
52%
Nafta
3%
Unión Europea
11%
Structure des exportations de l’Uruguay par destination en 1991 et 2001
20
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
Africa
0,6%
1991
Otros
7,0%
Oriente Medio
4,4%
MERCOSUR
35,4%
Asia
11,2%
ALADI (excl. Mercosur
y México
3,1%
Nafta
12,9%
Unión Europea
25,4%
Oriente Medio
4,0%
Africa
1,9%
Otros
3,9%
2001
Asia
10,1%
MERCOSUR
40,7%
ALADI (excl. Mercosur
y México
5,3%
Nafta
15,2%
Unión Europea
18,8%
Structure des exportations du Brésil par destination en 1991 et 2002
21
Colloque EMMA, Madrid 4-5 juin 2004
Filippi E., Requier-Desjardins D.
1991
Oriente Medio
4%
Africa
3%
Otros
6%
MERCOSUR
7%
Asia
18%
Unión Europea
32%
ALADI (excl.
Mercosur y México)
6%
Nafta
24%
2002
MERCOSUR
5%
Otros
9%
Africa
4%
Oriente Medio
4%
Unión Europea
25%
Asia
15%
ALADI (excl. Mercosur
y México)
7%
Nafta
31%
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