Pourquoi les jeunes préfèrent-ils la musique

Transcription

Pourquoi les jeunes préfèrent-ils la musique
Pourquoi les jeunes préfèrent-ils
la musique anglaise?
Offre de service
Présenté à madame Lise Santerre
Pour le
Ministère de la Culture et des Communications
du Québec
Par
Armanda, Damir
Arseneault, Yann
Québec
05 novembre 1998.
Introduction :
La mission du ministère de la Culture et des Communications du Québec est de
« […]favoriser l’affirmation, l’expression et la démocratisation de la culture et des
communications au Québec dans le respect des valeurs de la société québécoise, francophone et
pluraliste »1. Étant donné que les jeunes québécois francophones représentent l’avenir et la survie
de la culture québécoise, il est du devoir du ministère de s’interroger sur les pratiques culturelles
de ceux-ci et l’influence qu’exerce sur eux les produits culturels anglophones.
Une des pratiques principales des jeunes est l’écoute de la musique principalement
anglophone. De ce fait, le ministère s’interroge sur les raisons de cette désaffection vis-à-vis la
musique francophone au Québec.
Problématique :
Au Canada, les sept principales compagnies de produits musicaux sont des
multinationales étrangères qui réalisent 90% des ventes au pays dont 90% sont des artistes
étrangers. En 1990, le Québec a réalisé 18% des ventes de phonographes canadiens. En ce qui
concerne les nouveaux enregistrements au Québec, de 1984 à 1994, la production francophone a
doublé, passant de 94 à 208, alors que celle anglaise reste stable à 4762.
Malgré cette
augmentation du nombre de produits francophones, les jeunes préfèrent toujours plus les produits
anglophones.
1
2
http://www.mcc.gouv.qc.ca/minister/mission.htm
Bureau de statistique du Québec, « Indicateurs d’activité culturelles au Québec », 1989, 90, 93, 97.
2
En ce qui concerne les styles musicaux, la recherche de Simon Gaudry3 démontre que
63.5% des jeunes âgés de 15 à 20 ans préfèrent la musique populaire et que 37.3% arrêtent leur
choix sur la musique grunge, heavy metal et alternative.4.
3
GAUDRY, Simon, « La culture musicale des adolescents francophones du Québec », mémoire de maîtrise, Québec,
Université Laval, avril 1998, 157 pages.
4
GAUDRY, Simon, op. cit., pages 14-15.
3
Au Québec, on remarque que de plus en plus de jeunes québécois francophones préfèrent
la musique d’expression anglaise à celle française. Durant la période de l’adolescence, le jeune
recherche une identité et la musique joue un rôle dans cette quête. Étant donné que le marché du
disque au Québec est majoritairement tributaire de celui du Canada et des Etats-Unis, les jeunes
vivent dans un univers prédisposé à l’usage de l’anglais comme langue d’expression musical.
Signification sociale de la musique :
La musique est plus qu’une harmonisation de sons et de bruits. Elle est un fait culturel et
artistique permettant aux individus d’une collectivité de s’identifier à celle-ci tout en mettant en
relief ses repères et ses valeurs. Pour les jeunes, elles est un des éléments centraux de l’identité
de leur groupe et par le fait même de leur propre identité individuelle. C’est par les styles
musicaux que ceux-ci se définissent et s’identifient au sein de la société.
Processus de création identitaire chez les jeunes de 12 à 24 ans :
Dans la conclusion de son mémoire de maîtrise, Simon Gaudry affirme que la musique
anglophone comble le vide identitaire chez les jeunes.
« L’identification à une personnalité ayant de l’importance pour l’individu
l’aiderait à combler le vide identitaire qui apparaît lors de l’adolescence. C’est
la raison pour laquelle les différents modèles culturels deviendraient des êtres
de désir et des références identitaires aux yeux des adolescents amateurs de
musique. Mais ces modèles culturels sont dans plus de 90% des cas des
modèles culturels anglophones »5.
5
GAUDRY, Simon, op. cit., page 147
4
Cette citation nous amène à définir le concept de formation de l’identité chez les jeunes.
L’identité se construit, selon Jacques Lecompte, à travers six grands principes : « Le sentiment de
continuité, de cohérence et d’unicité, la diversité, la réalisation de soi par l’action, l’estime de
soi. ».6 De plus, d’après Edmond Marc Lipiansky, l’identité se construit également par le groupe
d’appartenance du jeune.
« […] l’identité personnelle naît de l’interaction entre mécanisme
psychologiques et facteurs sociaux. D’un côté, en effet, le sentiment d’identité
résulte de la tendance du sujet à établir une continuité dans son expérience de
lui-même. De l’autre, il est clair que le sentiment d’identité prend appui sur les
identifications aux modèles proposés par les groupes primaires auxquels le sujet
appartient.
L’identification est réciproque :
la communauté reconnaît
l’individu se reconnaît dans les modèles identificatoires et les prototypes
valorisés par la communauté. »7
Finalement, les valeurs auxquelles aspire la jeunesse se fondent à travers un paradoxe. Les
jeunes veulent plus d’autonomie et se libérer des rôles préfabriqués qui sont transmis par les
aînés tout en éprouvant un désir d’enracinement et de participation à la vie sociale par
l’entremise du groupe restreint d’ami(e)s. Une valeur est définie par Guy Rocher comment
étant « […]une manière d’être ou d’agir qu’une personne ou une collectivité reconnaissent
comme idéal et qui rend désirables ou estimables les êtres ou les conduites auxquels elle est
attribuée »8.
Hypothèse :
La raison pour laquelle les jeunes préfèrent la musique anglophone est la plus grande
diversité des styles musicaux anglophones qui permet un choix de valeurs plus grand lors de la
période de quête d’identité. La langue d’expression musicale à donc moins d’importance pour les
jeunes que la symbolique qu’ils y rattachent.
6
LECOMPTE, Jacques, « Marquer sa différence; entretien avec Pierre Tap », Sciences humaines, Hors série #15,
décembre 1996/janvier 1997. Republier dans L’identité; l’individu, le groupe, la société, coordonné par Jean-Claude
Ruano-Borbalan, Éditions Sciences Humaines, 1998, page 65-68.
7
LIPIANSKY, Edmond Marc, « Comment se forme l’identité des groupes », dans L’identité; l’individu, le groupe, la
société, coordonné par Jean-Claude Ruano-Borbalan, Éditions Sciences Humaines, 1998, page 143-144.
8
ROCHER, Guy, « Introduction à la sociologie : regard sur la réalité sociale », tome 1, Éd. HMH, Montréal, 1968,
page 70.
5
Objectifs :
Le présent projet a deux objectifs : Le premier consiste à définir les mécanismes qui
influencent le choix musical du jeune lors de l’adolescence. Le deuxième objectif est d’identifier
les valeurs et idéologies véhiculées par les différents styles musicaux, en tenant compte de la
langue d’expression, qui influencent leur choix musical.
Méthodologie
Notre recherche consistera en une recension de la littérature et portera sur une analyse de
leur contenu. Une liste élémentaire des ouvrages utilisés est présentée en annexe.
Budget et échéancier :
Étant donné que notre recherche s’effectue dans le cadre d’un cours universitaire9 aucun
coût n’est relié à sa réalisation.
•
04 novembre au 15 janvier 1998 : Résumé critique de la littérature.
•
Semaine du 18 au 22 janvier 1999 : Compte-rendu de l’avancement de notre recherche avec
le ministère de la Culture et des Communications.
•
22 janvier au 1 mars 1999 : Analyse des résultats.
•
2 mars au 18 avril 1999 : Rédaction du rapport final.
•
19 avril 1999 : Présentation du rapport final.
Références
CARON-BOUCHARD, Monique, Sylvie Beaulieu, Pascale Donommé, et Christiane St-Pierre,
« Rapport de recherche qualitative sur la chanson québécois de langue française »,
Communication ABC Inc. 1998, 123 pages.
6
GAUDRY, Simon, « La culture musicale des adolescents francophones du Québec », mémoire de
maîtrise, Québec, Université Laval, avril 1998, 157 pages.
Gouvernement du Québec, « En vacance et à l’école : les loisirs des élèves du secondaire »,
Ministère de l’éducation, 1994, 55 pages.
LULL, James, « Popular music and communication », Éd. Sage publications, 1992, 247 pages.
PATUREAU, Frédérique, « Les pratiques culturelles des jeunes », La Documentation Française,
Paris, 1992, 221 pages.
ROCHER, Guy, « Introduction à la sociologie générale » tome 1,2 et 3, Éd. HMH, Montréal,
1968, 562 pages.
RUANO-BORBALAN, Jean-Claude coordonné par, « L’identité; l’individu, le groupe, la
société », Éditions Sciences Humaines, 1998, 394 pages.
SUPIÊCIÉ, Ivo, « Musique et société : perspective pour une sociologie de la musique », Institut
de musiologie – académie de musique, Zagreb, 1971, 225 pages.
VILLENEUVE, Richard, Lucien Laforest, Guy Denis et Michel Tousignant, « Identité et
représentation de soi chez les adolescents (IRSA) :
cadre de référence », Université de
Sherbrooke, Septembre 1972, 45 pages.
9
SOC-18879 et 18880 Laboratoire de recherche I et II, Département de sociologie, Université Laval, dirigé par
Simon Langlois et Andrée Fortin.
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