portage de randonnee et prediction de la depense energetique
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portage de randonnee et prediction de la depense energetique
PORTAGE DE RANDONNEE ET PREDICTION DE LA DEPENSE ENERGETIQUE FOISSAC M.1,2, MILLET G. 2, BELLI A.2 1 2 Centre de Test et de Recherche DECATHLON – Villeneuve d’Ascq Laboratoire de Physiologie et Physiopathologie de l’Exercice et du Handicap – Saint Etienne INTRODUCTION De nombreux auteurs ont montré l’importance du poids transporté et du mode de portage dans l’augmentation de la dépense énergétique lors de la locomotion humaine. L’évaluation de la dépense énergétique est généralement effectuée directement en laboratoire à partir de mesure de la consommation d’oxygène (VO2). Pour une même charge transportée, des modes de portages différents ont été proposés. Par exemple, Datta et Ramanathan (1971) ont comparé 7 modes de portage différents et ont rapporté un écart de VO2 pouvant aller jusqu’à 40 % entre un portage par double-sac avant - arrière (le moins coûteux) et le portage de la charge dans les mains (le plus coûteux). +9,5% +40% 5 Avant – Arrière Tête Sac à dos Sherpa Épaule Bâton de portage 3 Mains Dépense énergétique (Kcal/min) 7 Figure n°1 : Dépense énergétique de différents modes de portage (d’après Datta et Ramanathan, 1971) Même si le portage avant - arrière s’avère être le moins coûteux, dans les utilisations principalement ciblées par les industriels des sports et loisirs (randonnée, voyage, etc.) ou professionnels (pompiers, armée, etc.) actuels, le sac à dos s’est imposé et reste le mode de portage le plus utilisé. Il combine en effet un coût énergétique relativement faible, n’entraîne ni gêne visuelle, ni inconfort thermique important et permet une grande liberté de mouvement. Pour le sac à dos il a été constaté que l’augmentation de la consommation d’O2 est sensiblement inférieure en proportion à la quantité de charge portée (par exemple un sac de masse de 25% du poids de corps induira un surcoût énergétique entre 15 et 20%). Des sacs à dos classiques ont été comparés, notamment par Winsmann et Goldman (1976) ainsi que Holewijn (1990). Les sacs concernés étaient très différents, puisque disposant ou non de report de charge sur le bassin à l’aide d’une ceinture. Aucune différence significa-tive de consommation d’O2 n’a été montrée. Dans l’objectif d’estimer le coût énergétique de la marche avec sac à dos, Pandolf et coll. (1977) ont proposé une équation de prédiction dépendante des masses du porteur et du sac, de la vitesse, de la pente ainsi que d’un indice correspondant au type terrain : M = 1,5W +2,0(W +L)( L / W )² + η (W + L)[1,5V ² + 0,35VG ] avec M = coût métabolique, watts ; W = masse du sujet, kg ; L = charge portée, kg ; V = vitesse de marche, m.s-1 ; G = pente, % ; η = indice de terrain (=1 pour le tapis roulant). Cette équation a été validée chez des militaires, puis confirmée par Myles et Saunders en 1979. Cependant, ces 20 dernières années, la conception des sacs à dos a largement évolué (amélioration du transfert de la charge au bassin, confort des mousses, réglages à la morphologie, etc.). Ces évolutions peuvent avoir influencé la dépense énergétique lors de la marche avec sac à dos. On peut alors se poser la question de la validité de l’équation proposée par Pandolf et coll. lorsqu’elle est appliquée au portage effectué avec le matériel actuel. Le but de cette étude est donc de vérifier la validité de cette équation chez des sujets pratiquant la randonnée avec des sacs à dos de conception moderne. MATERIEL ET METHODES 12 sujets masculins jeunes (23,7 +/- 3,0 ans), pratiquant régulièrement la randonnée, ont participé à cette étude. Ils ont effectué deux paliers de marche de 5 minutes à 4,5 et 6 km/h sur un tapis roulant dynamométrique de type ADAL marche (HEF Tecmachine, France) et selon deux conditions : sans sac et avec sac à dos moderne. La charge portée représentait 25,0 +/0,4 % du poids de corps du sujet. Cette valeur différence entre un paquetage constitué de produits techniques légers et d’autres d’entrée de gamme plus lourds peut être comprise entre 2 et 4 kg. Ci-après voici les valeurs de dépense énergétique prédite pour des paquetages de 14 à 18 kg . sac de 18 kg sac de 17,5 kg sac de 17 kg sac de 16 kg sac de 14 kg 0,0% Réduction de la dépense énergétique (%) correspondait aux valeurs moyennes observées lors de treks en autonomie complète. Pour ces quatre conditions, la VO2 a été mesurée après atteinte d’un état stable en continu à l’aide d’un métabographe de type CPX/D (Medgraphics, USA). Le coût énergétique a été calculé en estimant qu’un litre d’O2 consommé produit 20100 J. La dépense énergétique a également été calculée à partir de l’équation de Pandolf. La relation entre la dépense énergétique mesurée et calculée a été tracée pour plusieurs indices de terrain afin de déterminer celui qui offre la meilleure corrélation et les valeurs les plus proches. Les coefficients de corrélation ont été calculés par régression linéaire. sujet de : -2,0% 50 kg 60 kg -4,0% 70 kg -5% 80 kg 90 kg -6,0% -8,0% RESULTATS Nous avons calculé le coût métabolique en utilisant un indice de terrain η égal à 1 - 1,2 - 1,5 (Fig. 3). η = 1 correspond à la valeur théorique de Pandolf pour le tapis roulant. Nous trouvons que le coefficient de la droite de régression entre la valeur mesurée et prédite est égal à 1 pour η = 1,2 (Fig. 3). Coût métabolique calculé (W) Pandolf 1977 1000 y = 1,2 x 800 y = 1,0 x 2 R = 0,55 600 nu = 1,5 nu = 1 400 nu = 1,2 y = 0,9 x 200 0 100 300 500 700 900 Coût métabolique mesuré (W) Figure n°2 : Corrélation entre le coût métabolique mesuré et prédit d’après Pandolf et coll. (1977) La corrélation entre valeurs mesurées et prédites est à chaque fois significative (p < 0,001) et pour chaque valeur de η la valeur de R² est comprise entre 0,52 et 0,57. CONCLUSIONS Nous trouvons que la valeur de η = 1,2 dans l’équation de Pandolf est celle permettant la meilleure prédiction de la dépense énergétique sur tapis roulant. Ceci corrobore les résultats de Myles et Saunders (1979), et valide l’équation pour des sacs à dos actuels. Pour des produits de randonnée, il n’est pas rare d’observer des différences de 500 g à 1 kg entre deux sacs à dos de même usage. En outre, la Figure n°3 : Réduction de la dépense énergétique prédite (%) pour différents poids de sacs et de sujets (vitesse de 4,5 km/h, η = 1,2). De nombreux auteurs ont constaté qu’il était difficile de mettre en évidence des différences significatives de coût énergétique ou de ressenti entre 2 sacs à dos si elles étaient inférieures à 5% (voir par exemple les résultats de Legg et Mahanty (1985)). Par conséquent, même si réduire le poids diminue la dépense énergétique, il faut être conscient du fait que des effets notables ne peuvent être observés qu’en travaillant sur tous les éléments portés (tente, vêtements, aliments, etc.) et sans surcharge pondérale. Enfin, il convient de rappeler que le surpoids du paquetage est source d’inconforts et de contraintes mécaniques qui peuvent également pénaliser la performance. RÉFÉRENCES Datta, S., Ramanathan, N., Ergonomic comparison of seven modes of carrying loads on the horizontal plane. Ergonomics 1971 ; 14:269-278. Holewijn, M., Physiological strain due to load carrying. Eur J Appl Physiol 1990 ; 61:237-245. Pandolf, K., Givoni, B., Goldman, R., Predicting energy expenditure with loads while standing or walking very slowly. J Appl Physiol 1977 ; 43:577-581. Legg, S., Mahanty, A., Comparison of carrying a load close to the trunk. Ergonomics 1985 ; 28:1653-1660. Myles, W., Saunders, P., The physiological Cost of Carrying Light and Heavy Loads. Eur. J. Appl. Physiol. 1979 ; 42:125-131.