chirurgie valvulaire et surveillance des porteurs de valves

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chirurgie valvulaire et surveillance des porteurs de valves
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CHIRURGIE VALVULAIRE ET SURVEILLANCE DES
PORTEURS DE VALVES
I) INTRODUCTION
La chirurgie valvulaire consiste à remplacer (prothèse) ou à réparer (plastie) une
valve cardiaque endommagée par un processus pathologique conduisant à un
rétrécissement ou une fuite valvulaire. Les deux valves le plus souvent intéressées par
cette chirurgie sont la valve aortique et la valve mitrale. La chirurgie de la valve
tricuspide est beaucoup plus rare, et celle de la valve pulmonaire anecdotique. Si cette
chirurgie est devenue courante, avec de bons résultats sur le plan symptomatique, il
n'en demeure pas moins que tout patient opéré nécessite un suivi au long cours ++
afin de prévenir et détecter les complications auxquelles tout porteur de valve
cardiaque est exposé. Le rôle du médecin traitant dans le suivi au long cours de ces
patients est donc fondamental+++.
II) INDICATION:
L'indication est en général posée sur des patients symptomatiques sur le plan de la
dyspnée malgré le traitement médical. Il existe cependant certaines restrictions:
Pour la valve aortique:
* En cas de rétrécissement aortique serré, aucun traitement médical
n'améliorera le patient, le seul traitement efficace est la chirurgie.
* En cas d'insuffisance aortique importante, il ne faut pas attendre que le
patient soit très dyspnéique, et l'indication repose souvent sur l'altération des
paramètres de surveillance échographique (dilatation du ventricule gauche)
Pour la valve mitrale:
* La fibrillation auriculaire marque un tournant dans la maladie, et peut être un
critère motivant l'intervention chez un patient jusque-là stabilisé par le traitement
médical.
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* En cas de fuite mitrale importante, surtout si l'on est à peu près sûr de réaliser
une réparation de la valve (plastie mitrale), il ne faut pas attendre l'aggravation de la
dyspnée ou le suboedème pour porter l'indication de la chirurgie.
III) LE BILAN PRÉOPÉRATOIRE EST FONDAMENTAL+++
Outre un examen clinique complet et un interrogatoire "serré", il fait appel à un
certain nombre d'examens complémentaires
- Bilan Cardiaque complet:
- État exact de la valve pathologique, des autres valves, de la fonction
ventriculaire gauche, des pressions droites, de l'aorte ascendante (surtout en cas
de chirurgie de la valve aortique); c'est le rôle de l'échographie transthoracique
et/ou transoesophagienne (surtout en cas de pathologie mitrale)
- État des artères coronaires++, afin de voir s'il n'existe pas une
indication associée de pontage coronaire; C'est le rôle du
cathétérisme avec coronarographie.
- Bilan extra cardiaque complet, en insistant sur:
- Bilan vasculaire +++, d'autant plus capital que le patient est âgé et avec
des facteurs de risque d'athérome; C'est le rôle des dopplers pré-opératoires en
particulier au niveau des vaisseaux du cou afin de limiter l'incidence des
accidents neurologiques péri-opératoires.
- Fonction respiratoire ++ (explorations fonctionnelles
respiratoires); les complications respiratoires étant les premières par ordre de
fréquence après ce type de chirurgie.
- Bilan de la fonction rénale++ (bilan ionique et éventuellement
clearance de la créatinine) du fait des décompensations rénales
prévisibles après la chirurgie sur fonction précaire.
- Bilan métabolique en particulier, fonction hépatique, équilibre
glycémique et thyroïdien.
- Recherche d'une porte d'entrée infectieuse latente ou patente+++,
en particulier vérification de l'état dentaire+++, afin de limiter le
taux de survenue d'endocardite sur prothèse en post-opératoire.
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IV) LA CHIRURGIE
A) GÉNÉRALITÉS
Il s'agit d'une chirurgie lourde, qui nécessite obligatoirement l'emploi d'une
Circulation Extra-Corporelle(CEC) afin de travailler sur un cœur "sec et immobile".
Outre l'état cardiaque sous-jacent, c'est l'emploi de cette CEC qui explique les
complications post-opératoires rencontrées (respiratoires, rénales, neurologiques
notamment) et donc la nécessité d'un bilan pré-opératoire extensif.
Le risque de cette chirurgie n'est donc pas nul, mais est actuellement très codifié
(Euroscore) en fonction du type de valvulopathie, de l'age, et des tares associées
cardiaques et extra-cardiaques.
Sans rentrer dans les détails, on peut dire que la mortalité péri-opératoire, pour tous
les patients confondus âgés de moins de 70 ans est de:
- 2 à 5% pour un remplacement valvulaire aortique
- 6 à 8% pour un remplacement valvulaire mitral (2 à 4% pour une réparation)
- 8-10% pour un double remplacement valvulaire aortique et mitral.
Cette mortalité augmente avec l'age, avec les lésions coronaires associées, avec la
gravité de l'altération de la fonction ventriculaire gauche (fraction d'éjection) et avec
les tares associées.
Sur le plan de la morbidité, le taux de complications est là encore prévisible selon le
même raisonnement, mais il faut retenir qu'il existe un taux d'accidents vasculaires
cérébraux de 1% avant 70 ans, et que celui-ci augmente de façon très importante avec
l'age et les facteurs de risque (diabète, insuffisance rénale, artériopathie
cérébrale…)jusqu'à représenter un taux de 8% à 80 ans dans certaines configurations.
Il est donc fondamental de prévenir les patients et leurs proches avant la chirurgie+++
Si le risque n'est pas nul, les résultats en terme d'amélioration fonctionnelle sont par
contre très importants et gratifiants dans l'immense majorité des cas.
B) LES DIFFERENTS SUBSTITUTS VALVULAIRES ET LEUR CHOIX+++
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Il existe différents types de prothèses cardiaques possédant chacun des avantages et
des inconvénients. À part, les réparations qui ne s'envisagent que dans l'insuffisance
mitrale et l'insuffisance tricuspidienne.
1) Les prothèses MÉCANIQUES:
Anciennement à bille (Starr)
Puis à monodisque basculant (Bjork)
Actuellement à doubles ailettes (St Jude)
* Avantages:
Indestructibles
* Inconvénients: Nécessité d'une anticoagulation au long cours par antivitamines K(AVK) avec tous les problèmes induits par ces AVK.
Thromboses plus fréquentes
2) Les prothèses BIOLOGIQUES:
Xénogreffes valvulaires porcines (avec ou sans armature)
Xénogreffes péricardiques bovines
Homogreffes valvulaires humaines cryopréservées (plus rarement employées
du fait de leur rareté, réservées à la chirurgie de la valve aortique chez le sujet jeune
et dans certaines cardiopathies congénitales, ou dans un contexte infectieux)
* Avantages:
Pas de nécessité d’anticoagulants (hormis les 3
premiers mois)
* Inconvénients: Durabilité limitée (10-15ans)
3) CHOIX DES DIFFERENTS TYPES
a) AGE+++:
- Avant 65 ans, mécaniques
- Après 70 ans bioprothèses
Entre 65 et 70 ans, la décision se fait au cas par cas mais les recommandations
actuelles des sociétés de cardiologie sont en faveur de la bioprothèse en position
aortique à partir de 65 ans.
b) TERRAIN++: Valve Biologique si
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*Affection contre-indiquant la prise des AVK
* Impossibilité de prise correcte des AVK et du contrôle régulier
de l'hémostase (zone d'habitation, conditions socioéconomiques, état neuropsychique)
* Pratique de sports dangereux
* Femme jeune souhaitant des grossesses (risques tératogènes des AVK,
risques d'avortements spontanés, augmentation de la morbidité fœtomaternelle)
c) RYTHME EN FIBRILLATION AURICULAIRE
* Nécessité d'AVK, donc plus facilement mécanique
À Part, LES RÉPARATIONS (OU PLASTIES) VALVULAIRES:
Employées essentiellement dans l'insuffisance mitrale+++, et également parfois dans
l'insuffisance tricuspide.
Il s'agit d'une réparation plus ou moins complexe, avec le support quasi-constant d'un
anneau prothétique. L'avantage est l'absence de nécessité d'AVK au long cours, et
cette technique doit être appliquée chaque fois que possible (en l'absence de
calcifications valvulaires et de l'appareil sous valvulaire) chez le sujet jeune.
L'inconvénient est le risque de ré-intervention au long cours, surtout sur des valves
rhumatismales.
V) SURVEILLANCE DES MALADES PORTEURS DE VALVE
CARDIAQUES++++
Une fois la phase péri-opératoire passée, après une période en maison de
convalescence, le patient va se retrouver très brutalement "démédicalisé". Le rôle de
l'information fournie au patient durant son séjour (informations générales et
prévention de l'endocardite, carnet d'anticoagulants) et de la coopération entre le
médecin traitant, le cardiologue et l'équipe hospitalière est alors fondamental. Tout
doit être fait pour diminuer au maximum le taux des complications auxquelles tout
porteur de valve est soumis.
A) COMPLICATIONS DES REMPLACEMENTS VALVULAIRES
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1) Complications infectieuses: L'endocardite sur prothèse, malgré les progrès de
l'antibiothérapie et de la, chirurgie reste une complication gravissime. On
distingue:
 Les endocardites post-opératoires précoces(<2mois) en général à
staphylocoques, dues à des contaminations iatrogènes(per-op, cathéter...)
ou à une infection postopératoire quelle que soit son origine. Leur
gravité est extrême et la mortalité est de 60 à 80%.
 Les endocardites tardives, le plus souvent dues à des streptocoques
(d'origine dentaire ou digestive).
Le diagnostic repose chez un patient fébrile, qui a éventuellement présenté des
embolies( 30% d’embolie dans l’endocardite), et qui a un souffle, sur
- les hémocultures+++




en dehors de toute antibiothérapie
répétées, lors d’un pic fébrile ou d’un frisson
permettent d’établir l’antibiogramme et de guider le traitement
5 à 15 % d’endocardites à hémocultures négatives ; leur négativité
n’élimine donc pas formellement le diagnostic+++
 hémocultures à répéter pour la surveillance sous traitement
 à compléter par des sérologies (fièvre Q par exemple) surtout si
hémoc négatives.
-l'échographie transthoracique(ETT) et transoesophagienne+++(ETO)




à la recherche d'une désinsertion prothétique, de végétations et d’abcès.
sensibilité et spécificité de l’ordre de 90%
sa négativité n’élimine pas le diagnostic.
à répéter en cas de suspicion clinique persistante
- les autres examens potentiellement utiles sont
 biologie standard (hyperleucocytose, altération fonction rénale…)
 marqueurs immunologiques (CIC, facteur rhumatoïde)
 scanner corps entier à la recherche d’embolies silencieuses
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 l’artério cérébrale et/ou angio I.R.M pour confirmer un anévrysme cérébral
mycotique
critères de Durack
Endocardite certaine en présence de :
2 critères majeurs ou 1 critère majeur et 3 critères mineurs ou 5 critères mineurs
critères majeurs :
 hémocultures positives
* 2 hémocultures positives à streptocoque non groupable, streptococcus bovis, bactérie du
groupe HACEK ((Haemophilus, Actinobacillus, Cardiobacterium, Eikenella,
Kingella), ou en l’absence de foyer identifié, à staphylocoque ou entérocoque
* hémocultures positives persistantes au même organisme
 atteinte de l’endocarde : signes échographiques et cliniques
* végétation
* abcès
* nouvelle fuite périprothétique
* clinique : souffle de fuite valvulaire d’apparition récente
critères mineurs :






cardiopathie prédisposante ou toxicomanie
fièvre > 38 °
phénomènes vasculaires (embolie artérielle, anévrysme mycotique, infarctus pulmonaire,
hémorragie conjonctivale, hémorragie cérébrale)
phénomène immunologique (glomérulonéphrite, nodule d’Osler, tache de Roth)
critères microbiologiques mineurs : hémoculture positive sans entrer dans la définition du
critère majeur, sérologie positive pour un organisme responsable d’endocardites
critères échographiques mineurs : échographie compatible sans entrer dans la définition
du critère majeur

Retenir le dicton: toute fièvre inexpliquée chez un porteur de valve est à priori une
endocardite++++. Dans ce cas, JAMAIS d'antibiothérapie à l'aveugle mais
TOUJOURS des hémocultures++++.
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IL faut bien sur insister sur la prévention+++ et le traitement de tout foyer infectieux
que nous reverrons.
Tout patient doit être porteur d’une carte de porteur de valve et au mieux de la carte
de prévention de l’endocardite (fournie par la société française de cardiologie) et les
présenter
- à son praticien avant chaque soin dentaire
- à son médecin traitant ou spécialiste avant tout geste invasif.
2) Complications thromboemboliques: Complications les plus fréquentes+++ des
prothèses valvulaires.
Elles surviennent de façon plus fréquente
- chez les porteurs de valves mécaniques que chez les porteurs de valves
biologiques, d'où la nécessité absolue, indéfinie, et continue d'un traitement
par AVK chez tout porteur de valve mécanique.
- la fréquence augmente également en fonction de la position valvulaire: elle
est plus élevée en position mitrale.
- la fréquence augmente avec la fibrillation auriculaire.
Elles consistent en deux types de complications
a) Les embolies: migration dans la circulation systémique d'un caillot formé
sur la prothèse. Elles peuvent toucher tous les territoires viscéraux avec une
prédilection pour le cerveau(AIT, AVC).
Le diagnostic repose, outre la clinique, sur
 La biologie : niveau d’anticoagulation (INR)
 L’échographie(ETT, mais surtout ETO++) recherche :
d’un contraste spontané dans O.G.
d’un thrombus dans auricule G
d’un thrombus sur la prothèse.
Des examens d’imagerie fonction de la localisation :
Scanner (cérébral ou abdominal)
Echodoppler voire l’artériographie (membres sup ou inf).
b) Thromboses de valves (quasi exclusivement chez les porteurs de valve
mécanique) pathologie nécessitant une prise en charge urgente, elles
peuvent être :
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



- Aiguë à l'origine d'un tableau dramatique de choc cardiogénique et OAP
nécéssitant une prise en charge médicochirurgicale extrêmement urgente.
Elles sont souvent précédées par des embolies périphériques dans les jours
ou les semaines qui précèdent.
- Chroniques et résultant en une limitation du jeu valvulaire elles entraînent
donc
une réapparition de la symptomatologie de type dyspnée,
une modification de l'auscultation de la prothèse,
une augmentation du gradient transprothètique à l'échographie T.T et un
thrombus à l’E.T.O +++.
L'examen de référence est la réalisation d'un radiocinéma démontrant la
diminution de l'amplitude des mouvements des disques de la prothèse.
La prévention de ces accidents +++ passe par un bon contrôle des anticoagulants.
3) Complications hémorragiques chez lez patients sous AVK.
Elles entraînent des complications cérébrales, mais également viscérales, en
particulier rénales (hématuries) et digestives (hématémèses, moelena et rectorragies)
qui doivent faire rechercher de principe une lésion organique sous-jacente+++.
Le risque d'hémorragie augmente avec
* Le niveau d'anticoagulation, donc l'INR
* L'age
En cas d'hémorragie sévère, on peut-être amené à suspendre de façon temporaire
l'anticoagulation par les AVK, et à la substituer par de l'héparine pour maintenir un
TCA de 1.5 à 2 fois le témoin. On peut également en cas d'urgence vitale neutraliser
l'action des AVK par de la vitamine K (efficacité en 12 heures) ou par du plasma frais
congelé(efficacité immédiate).
Là encore, la prévention de ces accidents +++ passe par un bon contrôle des
anticoagulants.
4) Complications de dégénérescence valvulaire chez les porteurs de valve biologique.
Tout porteur de valve biologique est exposé à la dégénérescence de sa prothèse au
long cours. En fait, la dégénérescence est d'autant plus rapide
* Qu’il s’agit d’une prothèse mitrale
* Que le patient est plus jeune
* Qu'il existe une insuffisance rénale
* Qu’une femme a eu une grossesse.
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Avec les bioprothèses actuelles, la probabilité de non dégénérescence pour un patient
de plus de 70 ans sans pathologie particulière, d’une bioprothèse aortique est encore
de 90% à 15 ans, ce qui explique son choix dans cette catégorie d’age.
La dégénérescence va se manifester soit de façon progressive par la sténose de la
prothèse due à une calcification progressive des valvules, soit de façon brutale par
déchirure d'une valvule.
Cette dégénérescence justifie la surveillance au long cours des bioprothèses et
l'augmentation de la fréquence des visites après la 7-8° année.
5) Désinsertions valvulaires: survient autant sur une valve mécanique que sur une
valve biologique.
Elle survient en général dans les premiers mois qui suivent l'intervention mais
peuvent se voir à tout moment en cas d'endocardite. Elles sont dues soit à un lâchage
de sutures spontané (tissus fragiles) par phénomène mécanique, soit par infection
(endocardite). En cas de grosse fuite, elles peuvent entraîner une aggravation
fonctionnelle.
Le diagnostic se fait à l'auscultation en cas de grosse fuite,
Surtout à l'ETT ou l'ETO+++.
Elles peuvent entraîner une hémolyse (anémie, présence de schizocytes et
réticulocytose, LDH, haptoglobine) et conduire à la réintervention.
Désinsertions et endocardite sont des complications communes aux deux types de
valves, mécaniques ou biologique. La thrombose est beaucoup plus fréquente chez le
porteur de valve mécanique. La dégénérescence est l’apanage des bioprothèses. Les
complications hémorragiques sont la rançon des A.V.K.
B) SURVEILLANCE PROPREMENT DITE++++
La surveillance sera réalisée tous les mois par le médecin traitant(état clinique,
AVK), tous les 6 mois par le cardiologue traitant, et une fois par an ou tous les deux
ans par l'équipe hospitalière. En fait, à la sortie de l'hôpital, les contrôles par le
généraliste seront rapprochés, et le cardiologue contrôlera son patient au 3° mois avec
échographie. Cette surveillance est :
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1) Clinique:
L'interrogatoire recherche la notion d'une fièvre, d'un AIT, la réapparition d'une
dyspnée, et recherche les signes d'alerte de surdosage AVK comme épistaxis,
gingivorragies, hématuries.
L'examen clinique recherche
-Des signes de décompensation cardiaque droite (hépatomégalie, œdèmes des
membres inférieurs) et gauche (tachycardie, galop, sous-crépitants des bases)
-Vérifie l'absence de fièvre et de foyer infectieux à chaque consultation.
- Recherche une modification de l'auscultation de la prothèse+++
* Toute apparition d'un souffle diastolique sur une prothèse aortique, ou d'un
souffle systolique sur une prothèse mitrale signe une désinsertion
* Toute apparition ou renforcement d'un souffle systolique sur une prothèse
aortique ou toute apparition d'un roulement diastolique sur une prothèse mitrale doit
faire rechercher une dysfonction prothétique
* Toute diminution de l'intensité des bruits d'ouverture et de fermeture d'une
prothèse mécanique, en particulier s'il existe une variabilité des bruits d'un cycle
cardiaque à l'autre, doit faire rechercher une dysfonction prothétique
2) ECG: n'apporte pas grand-chose en dehors de l'existence d'un rythme sinusal ou en
fibrillation auriculaire
3) Radiographique: la radio du thorax n'apporte pas grand-chose en dehors de la
régression du volume cardiaque après le changement de valve.
Par contre le radiocinéma de la valve est un examen clé en cas de suspicion de
thrombose valvulaire++.
4) Échographique+++:
Le suivi par echo-doppler cardiaque transthoracique est fondamental dans la
surveillance au long cours. Si des contrôles ont déjà été effectués avant la sortie
hospitalière, le contrôle du 3° mois est cependant fondamental car réalisé en dehors
de toutes les perturbations post-opératoires (anémie qui augmente le débit et donc les
gradients, fibrillation auriculaire post-opératoire transitoire, hypocinésie septale
présente après toute chirurgie, épanchement péricardique etc...). L'examen mesure
* Le fonctionnement de la prothèse: gradient, surface effective(comparés à des
tables), recherche une fuite au doppler, des végétations en cas de suspicion
d'endocardite, ou des images évocatrices de thrombus.
* Le fonctionnement cardiaque: fraction d'éjection, pression pulmonaire,
régression de l'hypertrophie...
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Toute anomalie doit faire réaliser, au mieux dans la structure hospitalière initiale, une
ETO et/ou un radiocinéma +++.
5) Surveillance biologique
a) du traitement anticoagulant++++:
Chez les porteurs de valve mécanique (ou les porteurs de valve biologique en
fibrillation auriculaire) un équilibre parfait du traitement AVK est indispensable
à vie et les AVK ne doivent JAMAIS être arrêtés sauf hémorragie mettant en jeu le
pronostic vital(cf chapitre complications hémorragiques), ou pour une chirurgie
extra-cardiaque.
En "régime de croisière", un contrôle mensuel de l’INR est suffisant. Ces contrôles
seront beaucoup plus fréquents après la sortie hospitalière (jusqu'à 2 à 3 par semaine)
tant que le niveau souhaité et stable d'INR n'est pas atteint. Ce niveau est fonction:
* Du type de valve: Les anciennes prothèses à bille et à disque de première
génération sont plus thrombogènes et nécessitent une fourchette d'INR comprise entre
3 et 4,5.
* De la position de la valve et du rythme cardiaque pour les valves modernes (à
doubles ailettes en carbone), cet INR optimum est de
- 2 à 3 en position aortique et rythme sinusal, 2.5 à 3.5 en F.A
- 2.5 à 3.5 en position mitrale et rythme sinusal, 3.0 à 4.0 en F.A
*Les valves biologiques ne nécessitent pas d'anticoagulants après le 3° mois, sauf en
cas de fibrillation auriculaire.
Le niveau souhaité est alors de 2 à 3 en position aortique, de 2.5-3.5en position
mitrale.
À l'heure actuelle, de plus en plus, les AVK ne sont pas employés pour les valves
aortiques biologiques en rythme sinusal pendant ces 3 mois, mais sont remplacés par
des anti-aggrégants plaquettaires.
*Les réparations valvulaires (mitrales essentiellement) ne nécessitent pas
d'anticoagulants après le 3° mois, sauf en cas de fibrillation auriculaire.
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Dans tous les cas, le niveau exact d'anticoagulation sera défini au départ par l'équipe
hospitalière ou le cardiologue réfèrent pour chaque cas. Par la suite, il est préférable
que le patient effectue toujours ses contrôles, à la même heure par rapport à la prise,
et au même laboratoire pour une plus grande fiabilité du suivi. La tenue d'un carnet
d'anticoagulants est fondamentale pour la surveillance+++.
D'autant que ces carnets contiennent les recommandations de la société française de
cardiologie en matière de surveillance, d'hygiène alimentaire et les actions à éviter
(automédication etc..)
b) NFS, et recherche d’hémolyse (bilirubinémie, haptoglobine, LDH, recherche de
shizocytes) 2 fois par an
Problème de la grossesse.
Chez une porteuse de valve biologique, la grossesse accélère la dégénérescence de la
valve.
Chez une porteuse de valve mécanique, la survenue d'une grossesse est un événement
non désirable en cas de patiente indisciplinée ou ayant déjà un enfant. En effet, la
grossesse devient à très haut risque+++.
Le risque thrombo-embolique est multiplié par 10 pendant la grossesse. Ce risque
thrombo-embolique est encore plus important sous héparine que sous AVK.
Il y a un risque important d'avortement spontané et de complications hémorragiques
en fin de grossesse.
L'attitude classique consiste à prendre un relais par héparine durant le premier
trimestre en raison du risque tératogène potentiel des AVK, à reprendre les AVK au
cours du 2° trimestre et jusqu'à 15 jours à 3 semaines avant le terme, date à laquelle
l'héparine est reprise en raison du risque hémorragique de l'accouchement et du postpartum. (Cette attitude est remise en question par certains qui ne préconisent plus
l'arrêt des AVK.)
La survenue d'une grossesse chez une porteuse de valve est donc un événement
sérieux qui nécessite une surveillance très stricte et très rapprochée++++.
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Problème de la chirurgie extra-cardiaque
Dans ce dernier cas, le patient arrête les AVK sous couvert d'un traitement
héparinique(TCA de 1,5 à 2 fois le témoin) et l'intervention a lieu quand l'INR est
voisin de 1. L'héparine est arrêtée de 2 à 4 heures avant l'intervention et reprise le
plus tôt possible en post-opératoire. Dès que le risque hémorragique est
définitivement éloigné, reprise des AVK sous couvert de l'héparine jusqu'à obtenir
l'INR souhaité.
En cas de geste mineur(extraction dentaire, colonoscopie avec biopsie...) on peut
arrêter les AVK pendant 1 à 3 jours jusqu'à obtenir un INR autour de 1,8 à 2 et les
reprendre le jour même du geste. Rappelons que les héparines de bas poids
moléculaire (type fraxiparine, fragmine, lovenox, inohep) n'ont pas
l'AMM(autorisation de mise sur le marché) dans le traitement des valves cardiaques.
Leur utilisation en tant que relais doit donc être extrêmement prudente, encadrée par
des spécialistes+++
VI) PREVENTION DES COMPLICATIONS+++
Toutes les complications des prothèses valvulaires représentent un risque d’environ
3%/patient/année d’exposition. C’est dire l’importance de la prévention afin de
limiter ce taux au minimum, en particulier en jouant sur la bonne gestion des
anticoagulants et la prévention de l’endocardite. Cette prévention repose
 Avant tout sur l’éducation du patient+++ pendant sa phase hospitalière et
immédiatement à la sortie :
 Ne jamais arrêter les AVK
 Ne jamais modifier la posologie sans avis médical
 Ne jamais faire d’automédication : dangers de l’aspirine et des antiinflammatoires par augmentation de l’anticoagulation
 Connaître les signes d’un surdosage en AVK : épistaxis, gingivorragies,
hématuries.
 Consulter très rapidement devant un AIT (à fortiori devant un AVC).
 Consulter systématiquement devant une fièvre et jamais d’antibiotiques à
l’aveugle
 Insister sur les règles d'hygiène et en particulier soins dentaires et soins
corrects de toute plaie++.
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2) Mais aussi par l'action des médecins généralistes++
* Antibioprophylaxie à prescrire en même temps que tout acte
invasif(fibroscopie digestive haute avec biopsies, fibroscopie digestive basse avec ou
sans biopsies, biopsies de prostate, extraction dentaire....)
* Antibiothérapie curative de tout foyer infectieux patent(notamment cutané,
ORL, dentaire).
* Jamais d'antibiothérapie à l'aveugle sur une fièvre inexpliquée mais toujours
des hémocultures car il s'agit, jusqu’à preuve du contraire, d'une endocardite chez un
porteur de valve+++.
* Connaissance de la surveillance des AVK+++.