230312Investissements Chine

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230312Investissements Chine
Note de veille, 23 mars 2012
Investissement étranger : les nouvelles priorités de Pékin
La version actualisée du catalogue d’orientation de l’investissement étranger1 en Chine est
entrée en vigueur le 30 janvier 2012. Au-delà d’une libéralisation tempérée et cantonnée à
certains secteurs, cette actualisation reflète clairement le rôle que les autorités chinoises
assignent à l’investissement étranger, conçu comme un vecteur d’appropriation des savoirfaire et des technologies les plus avancés au bénéfice des industries domestiques.
Le 24 décembre 2011, le ministère chinois du Commerce et la Commission nationale pour le
développement et la réforme 2, l’organisme en charge de la planification, ont conjointement
promulgué la version révisée du catalogue d’orientation de l’investissement étranger, qui est
entrée en vigueur le 30 janvier 2012. Publié pour la première fois en 1995, le catalogue a déjà
fait l’objet de quatre révisions en 1996, 2002, 2004 et 2007. Il est divisé en trois catégories :
les investissements encouragés, les investissements restreints et les investissements interdits.
Tout projet d’investissement étranger dans un secteur non mentionné est a priori autorisé. Le
catalogue joue un rôle déterminant dans le processus d’approbation des projets
d’investissement étranger. Ceux qui figurent dans la catégorie des projets encouragés sont
susceptibles de bénéficier de régimes fiscaux préférentiels. Le catalogue constitue pour les
autorités chinoises un outil essentiel de guidage du développement économique et chaque
révision traduit une mise en conformité avec les nouvelles priorités définies par le Parti
communiste chinois (PCC). En octobre 2007, dans le prolongement du 17e congrès national
du PCC, la précédente version du catalogue 3, avec une présence importante des secteurs des
énergies « propres » et des énergies renouvelables dans la catégorie des investissements
encouragés, reflétait le tournant vers une croissance plus respectueuse de l’environnement et
moins consommatrice en énergie et ressources naturelles.
La nouvelle version du catalogue intègre quant à elle les orientations du 12e plan quinquennal
(2011-2015) approuvé le 14 mars 2011, lors de la réunion annuelle de l’Assemblée nationale
populaire 4. Le plan promeut un modèle de développement plus durable en faisant une large
place aux thématiques environnementales et en confirmant le développement des énergies
propres et des technologies « vertes ». L’objectif de montée en gamme des industries
1
Version
officielle
(en
chinois)
disponible
sur le
site
de
la
CNDR
:
www.ndrc.gov.cn/zcfb/zcfbl/2011ling/W020111229379511927834.pdf ; version traduite en anglais
(non
officielle)
disponible
sur :
www.fbcs.fi/files/InvestmentCatalogue2012UnofficialEnglishVersion.pdf
2
CNDR, http://en.ndrc.gov.cn/.
3
Ministère du Commerce. « Decree of the State Development and Reform Commission, the Ministry
of Commerce of the People's Republic of China », n° 57, 31 octobre 2007. URL :
www.fdi.gov.cn/pub/FDI_EN/Laws/law_en_info.jsp?docid=87372
4
Voir JAN Michel et Chaponnière Jean-Raphaël. « Politique intérieure, économie, diplomatie et
sécurité dans le 12e plan quinquennal chinois », Note d’analyse prospective, n° 94, 13 juillet 2011,
Futuribles International.
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1
chinoises est clairement affiché et le plan identifie sept secteurs stratégiques : 1/ véhicules
propres ; 2/ biotechnologies ; 3/ efficacité énergétique et protection de l’environnement ; 4/
nouveaux matériaux (terres rares, matériaux nano- et supraconducteurs…) ; 5/ nouvelles
énergies (nucléaire, solaire, éolien, smart grids et bioénergies) ; 6/ nouvelle génération des
technologies de l’information (cloud computing, nouveaux systèmes d’affichage…) ; 7/
équipements industriels de haute technologie (aéronautique, train à grande vitesse,
satellites…).
Dans la nouvelle version du catalogue, la catégorie la plus importante reste celle des
« investissements encouragés ». Le service économique de l’ambassade de France en Chine
relève que « l’un des traits les plus frappants est l’augmentation très forte du niveau de
précision de la description dans de nombreux secteurs 5 ». Plusieurs explications sont
avancées :
— le degré de technicité atteint par les entreprises chinoises dans de nombreux domaines ;
— le ciblage très précis réalisé dans l’acquisition de certaines technologies avancées, en
conformité avec les objectifs du 12e plan ;
— une hausse des seuils indiquant soit des améliorations technologiques, soit des unités de
production plus importantes (par exemple appareils photo de 10 millions de pixels, contre 6
millions dans le catalogue de 2007 ; éoliennes d’une puissance égale ou supérieure à 2,5
mégawatts, contre supérieure à 1,5 MW dans le catalogue de 2007).
Parmi les nouveaux secteurs qui font leur apparition dans la catégorie des « investissements
encouragés », on relève notamment :
— ceux qui touchent à l’environnement et à l’énergie (construction et gestion d’usines de
traitement des eaux ; technologies de nettoyage des pollutions pétrolières ; recyclage des
déchets ; construction et exploitation de stations de recharge et d’échange des batteries de
véhicules électriques …) ;
— ceux qui concernent les hautes technologies (le développement et la fabrication
d’équipements de réseaux Internet de nouvelle génération basés sur la version 6 du protocole
IP ; la production de nouveaux types de vaccins ; la production de fibres optiques ; la
production d’écrans tactiles…) ;
— certains services : crédit-bail, conseil en propriété intellectuelle, capital-risque, formation
professionnelle, services à domicile…
Plusieurs secteurs, qui en 2007 figuraient dans la catégorie des « investissements
encouragés », sont désormais banalisés et donc non mentionnés dans le nouveau catalogue.
C’est notamment le cas de la construction automobile, autrefois « encouragée » (sous forme
de co-entreprise à 50 % maximum). L’évolution traduit la volonté des autorités chinoises
d’éviter un afflux excessif d’investissements dans certains secteurs manufacturiers
traditionnels où les entreprises étrangères sont déjà très présentes.
La catégorie des « investissements restreints » évolue peu. Elle regroupe des secteurs que les
autorités veulent protéger de la concurrence étrangère (exploitation minière, fret ferroviaire,
production de certains vaccins…), déjà encombrés par une surcapacité de production
(fabrication de certains textiles synthétiques…) ou qui font intervenir des technologies
anciennes et déjà maîtrisées par la Chine (production de certains engins de chantier…). Dans
5
Ambassade de France en Chine. Service économique régional de Pékin. « Actualisation du catalogue
chinois sur les investissements étrangers ». Bulletin économique Chine, n° 35, avril 2011. URL :
www.ambafrance-cn.org/-Bulletin-economique-Chine-.html
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cette catégorie, les projets d’investissement sont soumis à l’approbation des autorités. La
nouvelle édition du catalogue lève certaines restrictions (production de boissons gazeuses,
services de vente aux enchères…). D’autres secteurs restent par ailleurs étroitement
contrôlés : industrie financière, enseignement supérieur, industrie du divertissement…
La catégorie des « investissements interdits » rassemble essentiellement des secteurs qui
touchent à des enjeux nationaux (protection du patrimoine naturel et culturel ; exploitation
minière dans certains secteurs dont celui des terres rares), de sécurité (cartographie ;
fabrication d’armes et de munitions), éthiques (clonage). Elle a également peu évolué par
rapport à la version précédente du catalogue. Des interdictions ont été levées : l’importation
(mais non la production) de livres, journaux et périodiques, et de produits audiovisuels ; les
sites Internet de musique en ligne. De nouvelles interdictions ont été établies : services
domestiques de courrier express. Dans le catalogue de 2007, la construction de villas figurait
dans la catégorie des « investissements restreints ». Les investissements étrangers sont
désormais exclus de ce secteur, interdiction qui vise à contenir la bulle immobilière.
Officiellement, le nouveau catalogue manifeste les progrès de la Chine sur la voie de la
libéralisation, dans le respect des engagements souscrits lors de l’accession à l’Organisation
mondiale du commerce. L’établissement d’un contexte ouvert et non discriminatoire pour
l’investissement étranger est cependant encore loin d’être acquis. Les ouvertures affichées
demeurent en trompe-l’œil du fait des nombreuses procédures de filtrage dont disposent les
autorités, notamment à travers les réglementations sectorielles qui prévalent sur le catalogue.
L’actualisation du catalogue reflète clairement le rôle que les autorités chinoises assignent à
l’investissement étranger. Celui-ci est conçu comme un vecteur d’appropriation des savoirfaire et des technologies les plus avancés au bénéfice des industries nationales.
Selon les statistiques publiées par le ministère chinois du Commerce 6, en 2011
l’investissement étranger direct a représenté 116,011 milliards de dollars US, soit une hausse
de 9,72 % par rapport à l’année précédente. Les investissements provenaient essentiellement
de 10 pays ou territoires : Hong Kong (77,011 milliards de dollars US), Taiwan (6,727
milliards de dollars US), le Japon (6,348 milliards de dollars US), Singapour (6,328 milliards
de dollars US), les États-Unis (2,995 milliards de dollars US), la Corée du Sud (2,551
milliards de dollars US), le Royaume-Uni (1,61 milliards de dollars US), l’Allemagne (1,136
milliards de dollars US), la France (802 millions de dollars US) et les Pays-Bas (767 millions
de dollars US).
Sources : DICKINSON Steve, « China’s New Foreign Investment Catalog. The Scope Of
FDI »,
China
Law
Blog,
9
janvier
2012.
URL :
http://www.chinalawblog.com/2012/01/chinas_new_foreign_investment_catalog_the_scope_
of_fdi.html ; Ambassade de France en Chine. Service économique régional de Pékin,
« Actualisation du catalogue chinois sur les investissements étrangers », Bulletin économique
Chine, N° 35, avril 2011. URL : www.ambafrance-cn.org/-Bulletin-economique-Chine-.html
Yann Vinh
Champ de veille : Économie et finances
Mots clefs : Chine / Commerce international / Protectionnisme
6
Sur le site du ministère du Commerce de la République populaire de Chine. URL :
http://english.mofcom.gov.cn/static/column/statistic/foreigninvestment.html/1
© Futuribles, Système Vigie, 23 mars 2012
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