carla bruni-sarkozy, la veritable histoire

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carla bruni-sarkozy, la veritable histoire
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Prologue
Vendredi 23 novembre 2007, onze heures. Le chef de
l’État reçoit à l’Élysée Javier Solana. Le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la Politique de
sécurité de l’Union européenne doit le précéder en
République populaire de Chine où Nicolas Sarkozy se
rend du 25 au 27 novembre en visite d’État. Les deux
hommes souhaitent harmoniser leurs discours. « Avec les
Chinois, nous voulons traiter franchement les sujets qui
fâchent mais dans une approche constructive, y compris
la question des droits de l’homme », commente-t-on à
l’Élysée à moins d’un an des Jeux olympiques. Le président écoute d’abord avec intérêt le diplomate européen,
ancien ministre espagnol des Affaires étrangères. Très
vite, il a l’esprit ailleurs. Vers ses prochains rendez-vous.
Ou plutôt, un rendez-vous avec son avenir intime.
Une ombre à l’Élysée
Ce jour-là, Denis Olivennes, alors PDG de la Fnac,
rend au chef de l’État son rapport sur le téléchargement
illégal, tandis que celui-ci doit décorer Arno Klarsfeld,
sarkozyste engagé et ancien compagnon de la nouvelle
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conquête du président ! Carla est à son domicile avec un
ami et n’ignore rien des deux temps forts de l’agenda de
son compagnon. Elle s’en amuse. Elle a pour Denis Olivennes une grande admiration. « C’est un vrai et un pur
homme de gauche. Je sais que certains lecteurs du
Nouvel Observateur lui reprochent d’avoir fourni ce
travail pour le chef de l’État. J’ai lu les violentes réactions
via le courrier des lecteurs. Ils sont incroyables, c’est un
homme de gauche, droit dans ses baskets 1. »
Devant un parterre de célébrités, à midi, Denis Olivennes remet à Nicolas Sarkozy son rapport sur le développement et la protection des œuvres culturelles dans
les nouveaux réseaux de communication. Outre les
ministres Rachida Dati, Christine Lagarde et Christine
Albanel, le président de la République est entouré d’artistes – Patrick Bruel, Calogero, Thomas Fersen, Didier
Barbelivien, Jean Reno, Christian Clavier, Liane Foly,
Roland Magdane, le journaliste Pierre Sled, l’animateur
Nikos Aliagas –, de dirigeants des grands groupes
audiovisuels – Patrick de Carolis, pour France Télévisions, Nicolas de Tavernost pour M6 –, de patrons des
fournisseurs d’accès Internet, des maisons de disques
ou encore des producteurs de cinéma comme Claude
Berri. On y aperçoit aussi Françoise de Panafieu, candidate UMP pas encore malheureuse à la mairie de Paris,
et Georges-Marc Benamou, toujours conseiller spécial à
l’Élysée en charge des médias. De son côté, le dirigeant
de la Fnac aurait dû être accompagné de Carla Bruni.
En tant qu’artiste à succès dont l’œuvre est, elle aussi,
piratée, l’interprète de Quelqu’un m’a dit a, sur ce
sujet, une opinion en demi-teinte. « Bien sûr, c’est mieux
1. Conversation avec les auteurs.
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quand une musique voyage, c’est toujours mieux pour
les artistes, pour la longévité d’une œuvre et son
audience. Mais ce qui n’est pas bon, c’est le côté out of
control. Le côté “on peut se servir sans payer”. Ce n’est
pas à l’honneur de la France de laisser faire sans réagir.
Tant mieux si les gosses se débrouillent et sont malins,
mais il faut sanctionner celui qui en fait trop. Par une
amende peut-être… Souvent, il m’arrive de soumettre
des maquettes de disques de copains musiciens très
doués à ma maison de disques. En vain : l’industrie
musicale est à la peine 1. »
Mais les événements et les rencontres en ont décidé
autrement. L’ex-mannequin Carla Bruni a déjà franchi
les grilles de l’Élysée quelques jours auparavant en tant
que compagne non encore officielle de Nicolas Sarkozy.
Le patron de la Fnac n’ignore pas que Carla Bruni
partage désormais la vie du président de la République
depuis le mardi 13 novembre 2007, jour du fameux
dîner chez les Séguéla, où, contrairement à la légende,
il n’était pas présent. Cette date n’a jamais été révélée à
ce jour. « C’était effectivement le 13 novembre, je m’en
souviens pour des raisons sentimentales mais aussi
parce que c’était un jour de grève 2 », précise Carla BruniSarkozy. Jusqu’à présent, tout et souvent n’importe quoi a
été dit sur ce dîner. La date, les hôtes, les préparatifs, le
déroulement et ses suites. « Jacques Séguéla m’a téléphoné un mois auparavant pour m’inviter à dîner à cette
date. Il ne m’a alors pas parlé des convives. J’ai donné un
accord de principe 3 », affirme la première dame.
1. Idem.
2. Idem.
3. Idem.
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Un flou, comme si l’on voulait préserver un secret
d’État. Un homme divorcé depuis le 16 octobre 2007 qui
clame son désespoir à qui veut l’entendre ne peut-il
connaître une rapide et sérieuse reconquête amoureuse ? Celle-ci risque-t-elle d’en troubler plus d’un ? Ou
plutôt une : Cécilia, l’ex-épouse du président ? Et puis
les langues se délient. Le temps, sans doute, a fait son
affaire.
Ce vendredi 23 novembre, quand Denis Olivennes
franchit les portes de l’Élysée, pénètre dans le salon
Murat en se mêlant aux artistes et aux professionnels de
la musique et s’adresse au président de la République,
nul dans l’assemblée n’a connaissance de la relation du
chef de l’État avec Carla Bruni, qui a débuté depuis dix
jours seulement. Ne sont dans la confidence que Denis
Olivennes, « un homme très bien », insiste Carla Bruni, et
une poignée de fidèles des deux tourtereaux. Précédés
d’une solide réputation de séducteurs, l’un et l’autre
sont les seuls à savoir qu’ils sont en train de vivre une
véritable histoire d’amour. Alors, qu’importe le flacon
des exposés de Denis Olivennes qui, deux mois durant,
a auditionné tous les acteurs du secteur afin d’aboutir à
un accord sur le piratage sur Internet, pourvu que Nicolas savoure l’ivresse de ce moment. Accord signé par
l’État, les professionnels de l’audiovisuel, du cinéma, de
la musique, et que la ministre de la Culture qualifie
d’« historique ». Ce mot résonne aux oreilles du président mais pour d’autres raisons.
La séance s’éternise, le président serre quelques
mains, mais il n’est déjà plus là, par l’esprit en tout cas.
Pressé de revoir sa bien-aimée, il souhaite la présenter
au monde et s’en ouvre à son ami Séguéla, qui lui
conseille de patienter. Nicolas Sarkozy devra encore
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attendre plusieurs jours, bienséance et agenda présidentiel obligent. Le chef de l’État retourne à ses obligations.
En cette journée du 23 novembre, à dix-huit heures –
nouvel heureux hasard du calendrier –, il remet à la
chasseuse de nazis, Beate Klarsfeld, la Légion d’honneur, et à son fils, Arno – collaborateur de François
Fillon – l’ordre national du mérite. « Comme ta mère, tu
es un militant qui agit, pas un militant qui déclame. […]
Je suis très fier de t’avoir comme ami. » Et comme prédécesseur dans le cœur de Carla, songe-t-il peut-être à cet
instant précis ?
Le surlendemain, dimanche 25 novembre 2007, Nicolas Sarkozy s’envole pour la Chine. Dans l’avion présidentiel, il garde précieusement sur lui deux objets : une
liste d’opposants transmise, la veille, à l’Élysée, par les
écrivains Bernard-Henri Lévy, Pascal Bruckner, André
Glucksmann et Christophe Ono-dit-Biot, inquiets de la
situation en Birmanie et en particulier du sort réservé
au prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi, retenue en
résidence surveillée par la junte militaire, proche
de Pékin. Et une compilation de chansons de sa nouvelle compagne qu’il fera écouter à ceux qui le suivent
au cours de ce voyage.
Quelques jours après la remise de son rapport, Denis
Olivennes dîne avec des amis. Son téléphone portable
sonne. Une voix lui lance, solennelle : « Bonjour, ne
quittez pas, on vous passe le président de la République. »
Le correspondant du président de la Fnac est visiblement lui aussi en train de dîner. Denis Olivennes perçoit
des bruits de couverts et d’assiettes. Le président se
contente de lâcher un lapidaire et à ce jour incompréhensible : « Bonjour, Denis. Je vais très bien, je t’embrasse
très fort. » Et il raccroche. Denis Olivennes n’a même pas
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le temps d’esquisser une réponse, de saluer son interlocuteur ni même de l’interroger. Surpris à la fois par cet
appel impromptu auquel Nicolas Sarkozy ne l’a guère
habitué, par ce tutoiement ainsi que par le « je t’embrasse », très familiers, Denis Olivennes cherche à
décrypter ce mystère. En vain. Souvent, il interroge des
amis, à qui il raconte la scène pour tenter de comprendre la logique de ce coup de fil. Tous, comme lui,
sont intrigués.
Les interrogations restent encore nombreuses quant
aux circonstances réelles de l’apparition de Carla Bruni
dans la vie du président. Aujourd’hui, la première dame
de France Carla Bruni-Sarkozy s’est installée dans son
rôle. « Un couple au pouvoir », écrit L’Express 1. Une
parenthèse personnelle et politique semble s’être refermée. À moins qu’il ne s’agisse d’une nouvelle étape
dans le quinquennat d’un Nicolas Sarkozy en quête
d’une nouvelle image. Même s’il tente de renouer avec
la sobriété pour reconquérir une opinion déçue, l’action
politique du président Sarkozy continue de mêler
l’amour et le glamour à la marche de l’État. Afin de
suivre les fortunes de ce couple, on désigne désormais
au sein de chaque rédaction importante, à l’instar de
Paris Match, un « correspondant Bruni ». Internet n’y
échappe pas qui a contribué à faire bouger les lignes. La
Toile, on le verra, a démocratisé l’accès aux coulisses de
la politique. C’est l’histoire inédite de ce nouveau cycle
sentimental et politique du mandat de Nicolas Sarkozy
que retrace ce livre. Pour le meilleur et pour le pire.
1. 2 avril 2008.