handicaps et maltraitances, de l`inconnu à la prise de

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handicaps et maltraitances, de l`inconnu à la prise de
ALMA France
B.P. 1526
38025 Grenoble cedex
Tél. (33) 04 76 84 20 40 - Fax : (33) 04 76 21 81 38
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Site Internet : http://www.alma-france.org
France
ACTES de la 7e Journée d'Etude
Handicaps et maltraitances
NUMERO NATIONAL
A l’écoute de la maltraitance
des persones âgées
et/ou handicapées
08 92 68 01 18
répondeur-enregistreur liaison directe du lundi au vendredi
de 10 h à midi et de 14 h à 16 h
De l'inconnu à la prise de conscience
Missions institutionnelles
mercredi 15 novembre 2006
Salle Pierre LAROQUE, Ministère de la Santé
ALMA France
BP 1526 - 38025 Grenoble Cedex
Téléphone 04 76 84 20 40 - Fax 04 76 21 81 38
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Un CD AUDIO
des actes de la 7e Journée d'Etude
est disponible à ALMA France
Ce travail est dédié à Monsieur René LEBOUCHER qui nous a quittés en 2007.
Président d'ALMA Paris, très sensible à la détresse et à la souffrance des personnes âgées et handicapées
Un très grand remerciement d'ALMA France aux CONFERENCIERS
Monsieur le Ministre
Madame
Monsieur
Monsieur
Philippe
Christine
Paul
Jean-Claude
BAS
BEAULIEU
BLANC
CADILHAC
Monsieur
Monsieur
André
François
DUMOULIN
BERGNIARD
Monsieur
Monsieur
Bruno
FABRE
Jean-Jacques HOUDAYER
Monsieur
Monsieur
Jean-Marie
Robert
HOUOT
HUGONOT
Monsieur
Monsieur
Madame
André
Robert
Anne-Marie
LAURAIN
MOULIAS
PAULHE
Association des Paralysés de France
Sénateur
Président d'ALMA Hérault (34)
Collectif des Démocrates Handicapés
Inspecteur Hors Classe de l'action sanitaire
et sociale
Chargé de mission - DRASS de la région
Centre
Bénévole à ALMA Lozère (48)
Bénévole à ALMA 54
(Meurthe-et-Moselle)
Président d'ALMA France
Président d'ALMA 54 (Meurthe-et-Moselle)
Vice-président d'ALMA France
Responsable d'ALMA Handicap 81
Psychanalyste, présidente de l'association
"Femmes pour le dire, Femmes pour agir"
Madame
Monsieur
Maudy
René
PIOT
PORTE
Monsieur
Madame
Monsieur
Jean-Marie
Thérèse
Jean-Jacques
SCHLERET
TOPIE
TREGOAT
Madame
Alice
VACHET
Président d'ALMA Handicap 38
Conseil national consultatif des personnes
handicapées
Médecin
Directeur Général de l'Action Sociale
Fondatrice de
l'Association des Paralysés de France
VERLEY
Union Nationale des Parents, Personnes
handicapées mentales et de leurs Amis
Monsieur
Nicolas
-2-
"HANDICAPS ET MALTRAITANCES"
De l'inconnu à la prise de conscience
Présidence : Robert HUGONOT
9h30
Ouverture par Monsieur le Ministre, Philippe BAS.
9h50
André LAURAIN
Entre la maltraitance des personnes âgées et la maltraitance des personnes
handicapées : similitudes et particularités : naissance d'ALMA Handicap 54
10h10
Thérèse TOPIE
Etude de 100 dossiers ouverts dans le cadre d'ALMA Handicap 54
10h35
Christine BEAULIEU et Chantal DESCHAMPS
L'A.P.F. et la maltraitance
10h50
Nicolas VERLEY
L'UNAPEI et la maltraitance
11h05
Table ronde animée par Jean-Claude CADILHAC et René PORTE
avec Jean-Jacques HOUDAYER, Jean-Marie HOUOT, André DUMOULIN,
François BERGNIARD, Anne-Marie PAULHE, Maudy PIOT et Alice VACHET.
12h05
DEBAT
-3-
Ouverture
Robert HUGONOT, Président de la Fédération ALMA France
« Mesdames, Monsieur bonjour ; je me présente Robert HUGONOT, je suis le responsable de la
fédération ALMA France et je suis heureux de vous voir et de travailler avec vous sur la
maltraitance des personnes handicapées durant cette journée. Il y a un certain nombre de
changements dans l'ordre de notre programme: M. Patrick GOHET, délégué interministériel aux
personnes handicapées est pris par d’autres tâches ce matin et sera avec nous en fin de matinée. Je
suis heureux de saluer la présence de M. TREGOAT, directeur général de l’action sociale qui fera la
conclusion.
Autre changement, le ministre sera avec nous à 14h15, ce qui amènera le décalage de certaines
personnes…on s’adaptera aux changements…c’est une des vertus qui nous aident à vivre.
Nous avons à côté de nous André LAURAIN et Thérèse TOPIE…André LAURAIN est le président
d’ALMA 54 et il a créé il y a longtemps ALMA HANDICAP 54 ; il va vous expliquer comment il
a créé cette association, comment elle s’est développée. En raison des très bons résultats obtenus
par ALMA 54, nous avons eu envie de poursuivre cette aventure et d’analyser les résultats, ce qui
va être fait par Thérèse TOPIE, médecin qui a fait sa thèse sur ce thème et qui vous en parlera aussi.
Nous allons donc commencer ce récit par quelque chose de pratique. Le programme devrait se
continuer ensuite comme mentionné, mais pour la Table Ronde, JM HOUOT, non-voyant total, ne
peut pas venir, ainsi qu’ Alice VACHET qui fut la fondatrice de l’Association des Paralysés de
France qui n’est pas là pour des raisons de santé. Nous le remercions de nous avoir envoyé son texte
qui vous sera lu plus tard.
André LAURAIN, vous avez la parole pour nous parler de la naissance et du développement
d’ALMA Handicap 54.
André LAURAIN :
« ALMA Handicap 54 a vu le jour à Nancy le 19 mai 2002 et pendant deux ans l’antenne a exercé
seule son action sur l’ensemble du territoire français ; depuis d’autres antennes traitent également
du handicap…ALMA Handicap fonde son action sur le même principe qu’ALMA 54 PA
(Personnes Agées), elle tient compte de la spécificité du handicap et du fait que le problème doit
être abordé avec délicatesse et prudence car c’est une réalité plus complexe qu’il n’y parait ;
certaines personnes handicapées ont des difficultés à révéler les maltraitances dont elles sont
victimes en famille ou en institution et d’autres ne peuvent le faire compte-tenu de leur handicap. Je
rappelle au départ la définition de la maltraitance : tout acte de violence commis par une personne
ou plusieurs ou par une institution qui porte atteinte à la vie d’une autre personne ou à son intégrité
corporelle ou psychique, à sa liberté d’agir et de pensée ; qui compromet également le
développement de sa personnalité ou qui nuit à sa sécurité matérielle et financière…cette dernière
notion est importante car on retrouve un pourcentage important de maltraitances financières (de
l’ordre de 35%) au sein de la famille. Le problème n’est pas nouveau…les différentes formes de
maltraitance: sont des cas avérés pour lesquels nous avons eu à traiter plusieurs dossiers avec
parfois des cas assez complexes. Ils présentent des similitudes avec les cas de maltraitance des PA,
je dis cela pour les futurs responsables de centres d’écoute.
- les maltraitances financières et matérielles : vol de chéquier, de CB, de pensions, d’objets
personnels, extorsions de fonds, d’héritage et exploitation, refus d’argent de poche,
promesses de remboursement non tenues, procurations abusives…ce sont les cas les plus
fréquents
- les maltraitances psychologiques : le manque de respect, le chantage, l’humiliation, les
menaces, le tutoiement systématique, l’infantilisation, la culpabilisation, les punitions, les
abus de langage, les cris, le harcèlement, les injures, le non respect de la vie privée,
-4-
l’interdiction de voir du monde, privation des activités, menaces d’isolement, douleur non
soulagée…citons le cas d’une dame handicapée de 86 ans, en institution, couchée qui
demande avant la relève de pouvoir aller faire pipi… le personnel répond qu’il n’a pas le
temps et que de toute façon, on lui a mis une couche. Citons aussi un cas de tutoiement
d’une personne qui travaillait en établissement et qui disait « j’aime bien les mamies ; ça
pourrait être ma grand-mère et j’aimerais bien les tutoyer ; mon patron ne veut pas ». Nous
lui avons répondu qu’il avait raison.
- maltraitances physiques : coups, brûlures, griffures, fractures…une dame a été brûlée sur les
lèvres par un mégot de cigarette parce qu’elle ne voulait pas dire où était le porte-feuille…
dénutrition, escarres, viols, négligence ou refus des soins de première nécessité…on inflige
une douleur physique (absence de soins des pieds). Nous avons eu une affaire dont vous
avez certainement eu connaissance il y a 3 semaines ; un handicapé mental a été retrouvé
dans son jardin, en slip alors qu’il faisait 17°C et qu’on le lavait avec un jet d’eau…c’était la
toilette du matin ! L’appelante a précisé que les voisins de droite et de gauche s étaient
manifestés auprès des services compétents et qu’il n y avait pas eu de suite…au bout de ¾
d’heure de conversation, elle a avoué avoir pris des photos mais elle avait peur des
représailles. J’ai dit « Mme, vous allez prendre vos photos et aller à la Gendarmerie puis
nous rappeler…nous allons vous aider et on ne va pas en rester là » ; elle est allée à la
gendarmerie, a été bien accueillie ; les gendarmes ont fait une intervention rapide et ils ont
trouvé ce malheureux avec une fracture non soignée dans une cage. La famille d’accueil
signale que l’appelante était la sœur…ils ont été mis en prison. Les enfants de cette famille
ont été placés mais l’un d’eux, âgé de 19 ans est ressorti au bout de quelques jours et il est
allé menacer cette personne alors elle a décidé de partir en vacances. Nos sujets sont sérieux
et graves.
- Les maltraitances sexuelles : obliger une personne à avoir des relations sexuelles, érotisation
de la relation…nous avons été contactés par un directeur de CAT (Centre d’Aide par le
Travail) dans le département de la Moselle. Il nous a demandé : "quel doit être le
comportement des parents vis-à-vis de leur enfant handicapé mental ?" ; nous avons étudié
le problème avec une collaboratrice médecin…on a beaucoup évoqué le problème de
sexualité et ma collègue est allée très loin dans les propos qu’elle a tenus car elle avait fait
de nombreuses enquêtes sur le sujet. Elle est allée jusqu’ à dire que certaines mères
participaient à la masturbation de leur enfant parce qu'après, pendant 24 h, c’était le ciel
bleu et la détente ! - ça allait beaucoup mieux !…j’en ai parlé avec le professeur
HUGONOT et je pense que ce document sera publié.
- Les maltraitances médicales ou médicamenteuses: abus de médicaments, de neuroleptiques,
de soins adaptés, non prise en compte de la douleur, défaut ou absence de diagnostic,
- Les maltraitances civiques ou du droit à la personne : privation de vote, privation de
papiers, abus de pouvoir, tutelle ou curatelle abusive. Là encore, beaucoup de similitudes
avec les maltraitances envers les personnes âgées. Les problèmes de voisinage, le fait
d’empêcher une personne handicapée d’exercer tout contrôle sur sa vie, discipliner les
horaires, abuser du pouvoir dans un rôle parental ou éducatif, réaliser des actes qui
compromettent la santé ou la sécurité de la personne, sont des maltraitances civiques ou de
droit à la personne.
- Négligences actives, absence de suivi de contact, restriction des soins, des vêtements,
privation des aides au quotidien, manque d’hygiène
- Négligences passives : oubli de la personne
Les 3 types d’appels que nous recevons régulièrement :
Dans un premier cas de figure, le sujet appelle lui-même parce qu’il peut se plaindre, de son
entourage , de son voisinage, de sa vie professionnelle.
Il s’agit souvent alors de contraintes psychologiques. Dans notre échange, il doit être largement fait
place au plaignant; le handicap subi ou mal assumé développe souvent chez le sujet un
comportement plus ou moins paranoïaque. En situation d’écoute, on se rend compte de cet état,
-5-
mais pas notre interlocuteur. A cet instant, il est très important de placer l’appelant au cœur de sa
démarche et de l’aider à formuler les moyens qu’il compte utiliser pour résoudre son problème.
Ainsi valorisé, il va prendre confiance en lui. Nous allons l’assurer de notre aide s’ il le souhaite
nous lui laisserons la responsabilité de son action et les personnes ressources prendront le relais.
Nous avons eu à traiter des dossiers délicats :
- Dans une grande surface, une dame en fauteuil roulant arrive à une caisse prioritaire. Elle est
précédée par une jeune femme qui est très certainement pressée avec un caddy rempli. Elle
commence à déposer un paquet de pâtes et la caissière lui dit : "Madame, vous avez une dame
en fauteuil roulant derrière vous" et la jeune femme se retourne et lui dit "de toutes façons, vous
êtes assise là et vous n’êtes pas pressée" !
Dans des cas semblables, nous prenons contact avec la Direction de l’établissement. Le
Directeur, dans ce cas précis, a dit : "Vous avez très bien fait, je vous remercie; je vais faire
passer une note auprès des caissières et si des cas semblables se reproduisent alors nous feront
en sorte que…"
Deuxième situation similaire : un monsieur handicapé moteur en fauteuil roulant éprouve des
difficultés à monter en transport en commun bien que les accès aient été aménagés de façon à ce
que ça se passe bien. Le chauffeur se rend compte qu’il éprouve des difficultés et lui dit :
"Quand on est handicapé, on reste chez soi.3. ALMA fait alors une lettre à la compagnie en
signalant le numéro du transport, la date et l’heure.
Dans un deuxième cas de figure, une personne appelle pour une personne handicapée qui est un
membre de sa famille de l’appelant. Celui-ci va parler d’une autre personne avec le regard et le
ressenti qu’il en a . Il convient de recentrer l’appel sur notre interlocuteur pour bien saisir le sens
de sa démarche et vérifier que la personne handicapée ne peut appeler elle-même. Nous laissons
libre cours à l’expression du demandeur et lui faisons prendre conscience de l’importance des
démarches qu’il souhaite entreprendre. Après qu’il ait exposé clairement sa requête, nous lui
demandons alors de confirmer ses dires par écrit pour une aide plus concrète.
Le troisième type d’appel vient de parents d’un enfant handicapé vivant en institution. C’est de
loin le type de dossier le plus lourd . Comment ne pas comprendre la douleur des parents
frappés par la souffrance de leur enfant ? ils se trouvent dans l’impuissance d’agir surtout s’il
s’agit de handicaps mentaux ou associés. Comment connaître ce qui est impénétrable puisque
l’enfant est la prolongation naturelle du parent qui ressent dans sa chair la blessure de celui-ci.
Dans ce cas, nous écoutons avec compassion la plainte en reconnaissant le bien-fondé. Nous
mettons les parents devant leur responsabilité lorsqu’ils désirent entreprendre des démarches
devant les institutions. Nous leur recommandons d’être plutôt dans la concertation et de vérifier
qu’on a bien utilisé tous les dialogues possibles.
Pour ce troisième cas, nous avons mis en place une convention avec le Conseil Général et la
DDASS et avons convenu avec ces partenaires de nous tenir informés et d'être rapidement
réactifs. Si l’action juridique n’a pas été évoquée, c’est parce qu’elle est pour nous un dernier
recours qu’il ne convient cependant pas de nier.
Je vous remercie
Robert HUGONOT :
Nous vous remercions de ces informations et devons, sans tarder, passer la parole à Thérèse TOPIE.
Elle est à votre droite et je m’adresse à elle.
Madame et maintenant chère consœur, en prononçant le 28 septembre 2005 le serment d’Hippocrate
vous avez dit "j’interviendrai pour protéger les personnes si elles sont affaiblies, vulnérables ou
menacées dans leur intégrité ou leur dignité", le choix du thème de votre thèse sur la maltraitance
des personnes handicapées a été en lui-même en conformité avec ce serment, mais pouvez-vous
pour commencer nous dire ce qui vous a conduite à choisir ce thème ?
-6-
Docteur Thérèse TOPIE, médecin
Monsieur le Professeur, je vous remercie tout d’abord de m’avoir fait l’honneur de m’inviter
à participer à cette journée d’étude.
Pourquoi le choix de ce thème ?
Il était pour moi logique de choisir un sujet de thèse sur la maltraitance, car je me suis retrouvée à
plusieurs reprises au cours de mon existence, et même très jeune, face à des situations me paraissant
anormales voire inadmissibles, et je n’ai pas su où m’adresser en temps voulu pour venir en aide à
chacune de ces personnes, d’âges très différents. J’avais besoin d’apporter des réponses à toutes les
questions que je m’étais posées au fil du temps et il me paraissait nécessaire d’apporter ma
contribution, aussi minime soit-elle, pour lutter contre la maltraitance de personnes vulnérables.
Ainsi, lorsque le choix d’un sujet de thèse s’est imposé en 2004, j’ai eu l’idée de joindre
ALMA 71, qui m’a orientée vers ALMA France. Vous m’avez alors proposé de contacter Monsieur
André LAURAIN, président d’ALMA HANDICAP 54, afin que soit réalisée cette étude à partir des
dossiers des deux premières années de fonctionnement de l’antenne expérimentale nancéenne.
Antérieurement, j’ai eu l’opportunité d’étudier le devenir d’enfants maltraités, en réalisant
un mémoire dans le cadre de l’obtention d’un diplôme universitaire de santé publique et
communautaire. A cette occasion, j’ai rencontré une enseignante témoin de maltraitance envers une
personne handicapée, et qui elle aussi ne savait pas à qui s’adresser.
Ce sujet correspondait donc tout à fait à ce que je recherchais. Je vous remercie donc, ainsi
que toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de ce travail.
Rappelons quelques définitions
Pour l’Organisation des Nations unies (ONU), « la violence fait référence à tout acte violent
de nature à entraîner, ou risquer d’entraîner un préjudice physique, sexuel ou psychologique ; il peut
s’agir de menaces, de négligences, d’exploitation, de contrainte, de privation arbitraire de liberté,
tant au sein de la vie publique que privée ».
D’après le rapport du Conseil de l’Europe de janvier 2002, Protection des adultes et enfants
handicapés contre les abus, un abus est défini comme "tout acte, ou omission, qui a pour effet de
porter gravement atteinte, que ce soit de manière volontaire ou involontaire, aux droits
fondamentaux, aux libertés civiles, à l’intégrité corporelle, à la dignité ou au bien-être général d’une
personne, y compris les relations sexuelles ou les opérations financières auxquelles elle ne consent
pas ou ne peut consentir valablement ou qui visent délibérément à l’exploiter".
Une grande variété de formes de maltraitance
Comme l’a déjà décrit Monsieur LAURAIN, les formes que peuvent revêtir les abus sont
nombreuses.
Le plus souvent, la maltraitance commence par des faits apparemment anodins qui se répètent au
fil du temps et entraînent uns souffrance de la personne.
Deux grandes formes de maltraitance peuvent être distinguées :
• La maltraitance active c’est-à-dire intentionnelle.
• La maltraitance passive : par exemple l’absence d’attention à l’apparence physique
de la personne, l’heure du lever ou du coucher pas toujours adaptée, pour des raisons
de disponibilité de personnel,…
La maltraitance se traduit assez rarement par des actes spectaculaires.
-7-
Particularités des personnes handicapées par rapport aux autres personnes
vulnérables
De nombreuses personnes handicapées passent la plus grande partie de leur vie en institution.
Contrairement aux enfants ou aux personnes âgées, certaines d’entre elles sont en situation de
dépendance tout au long de leur vie. Le handicap est un facteur de vulnérabilité
supplémentaire auquel d’autre facteurs de vulnérabilité (maladie, grossesse, âge,…) peuvent
s’ajouter et le potentialiser.
Les principaux facteurs de vulnérabilité d’une personne en situation de
handicap sont :
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Le manque d’aptitude à communiquer avec l’entourage
La soumission facile
La manifestation de confiance excessive à autrui
La mobilité réduite
La déficience ou incapacité multiple
Le comportement dérangeant ou agressif
La limite de perception de l’environnement
L’âge (âges extrêmes de la vie)
Le sexe
Les victimes sont plus fréquemment des femmes dont le profil de vulnérabilité est élevé.
Ce peuvent être des personnes ayant une grande dépendance pour les soins de base (hygiène,
alimentation, déplacement) ou qui nécessitent des contacts physiques importants.
Les personnes présentant un handicap mental associé à d’importants troubles du comportement sont
très exposées. Il en est de même pour les adultes handicapés vivant en institution et n’ayant peu ou
pas de contact avec l’extérieur et délaissés par leur famille.
Profil des auteurs d’actes de maltraitance
Ce sont des personnes :
• qui manifestent des comportements d’abus d’autorité
• qui montrent peu de respect pour l’intimité d’autrui
• qui accordent peu de crédibilité aux personnes en situation de handicap
• qui refusent que celles-ci puissent avoir une sexualité, une vie affective
Le maltraitant est bien souvent mal préparé à assumer la charge et l’accompagnement d’une
personne dépendante. Il est stressé, fatigué. Il peut présenter par ailleurs un état dépressif, une
toxicomanie (ce terme incluant l’alcoolisme).
La loi du silence
Quand on parle de "loi du silence", il y a :
Le silence de la victime qui peut éprouver un sentiment de honte et/ou de culpabilité et se
sentir responsable de ce qui lui arrive.
Le refus de dénoncer des actes maltraitants peut-être aussi :
- en rapport avec l’ambiguïté des sentiments partagés par le maltraité et le maltraitant.
- la crainte de l’abandon d’autant plus si le maltraitant est aidant.
- la peur de représailles.
-8-
La victime peut subir des pressions pour que les actes de maltraitance ne soient pas révélés.
Des périodes d’accalmie peuvent conduire à de nouveaux espoirs.
La capacité de dénonciation de la victime peut être altérée par les difficultés mêmes à
communiquer, ou la peur de ne pas être crue. Celle-ci peut être également affaiblie
physiquement. Il n’est pas rare non plus qu’elle ignore ses droits.
L’attitude de la famille
Au sein de la cellule familiale, certaines habitudes peuvent ne pas être perçues comme des actes de
maltraitance. En institution, la famille préfère parfois se taire en raison de la pénurie des places,
sous la menace de l’exclusion de l’établissement de la personne handicapée.
Le silence des personnels d’encadrement
- parfois il y a une perte des repères entre ce qui est normal vis à vis de la personne
accueillie et ce qui constitue un acte de maltraitance.
- mais aussi la crainte du licenciement est encore présente malgré la loi protégeant les
salariés (article L312-24 du Code de l’action sociale et des familles issu de l’article 48
de la loi du 2 janvier 2002).
Les difficultés à rassembler les preuves constituent des obstacles à la révélation d’abus
qui peut se faire parfois plusieurs années après les faits.
La direction peut craindre également pour la réputation de son établissement.
L’étude réalisée dans le cadre de cette thèse de médecine porte sur les 106 premiers dossiers ouverts
à ALMA HANDICAP 54 de mi-mai 2002 à fin décembre 2004.
Le cadre de l'étude
Les dossiers se répartissent ainsi :
-25% sont des plaintes pour maltraitance en institution.
-61% sont des plaintes pour maltraitance au domicile de la victime.
-Près de 10% sont des plaintes pour maltraitance hors du domicile (travail, lieu public,...)
-Pour les 4% restants, l’appelant présente un état délirant et/ou démentiel.
-9-
1) En institution (27dossiers) :
D’après le tableau :
ETABLISSEMENTS
POUR PERSONNES
HANDICAPEES
Enfants
adolescents
Adultes
ETABLISSEMENTS
HÔPITAL
CLINIQUE PRIVEE
Maison d’accueil spécialisée (MAS)
Centre d’aide par le travail (CAT)
Foyer d’hébergement
Foyer occupationnel (ou foyer de vie)
Etablissement de rééducation
professionnelle
Nombre
de
plaintes
2
2
2
3
1
44,45%
Autres établissements
2
Prison
Foyer pour travailleurs migrants
Maison de retraite
Service hospitalier psychiatrique
Service de médecine
Service d’accueil des urgences
Service de long séjour
Service de clinique orthopédique
1
1
2
6
1
1
2
1
3,70%
3,70%
7,41%
40,74%
REPARTITION DES PLAINTES EN FONCTION DES TYPES D’ETABLISSEMENTS
Environ 44% des plaintes concernent des établissements pour personnes handicapées, 40%
concernent le milieu hospitalier. (Le nombre de dossiers étant faible, ces chiffres sont à prendre
avec prudence).
2) hors institution (79 dossiers).
a) au domicile (65 dossiers).
Le terme "domicile" est utilisé dans un sens très large.
Les abus proviendraient :
- de l’intérieur du domicile
•
du milieu familial le plus fréquemment (34 cas).
•
de colocataire
•
de familles d’accueil
- de l’extérieur du domicile
•
du voisinage le plus souvent (11 cas)
•
d’une administration (7 cas, mais pour 3 dossiers, malgré les difficultés financières
occasionnées, l’administration avait juridiquement raison).
•
de professionnels, d’aides intervenant à domicile (4 cas)
•
d’un tuteur ou d’un curateur extérieur à la famille (3 cas)
•
ou encore : propriétaire, gestionnaire d’immeubles, « ami », entreprise, visiteur
commercial, compagnie d’assurance, mairie…
- 10 -
-
b) hors du domicile (10 dossiers)
au travail le plus souvent (4 dossiers)
autres : rue, club sportif, magasin, autobus…
Le profil de la personne appelant ALMA (nommé ici « appelant »)
1)
L’appelant est la victime une fois sur deux (51,4%).
En moyenne âgée de 53,2 ans, l’appelant est une femme dans 58,5% des cas et présente par ordre de
fréquence au moins un handicap physique dans environ 58% des cas, auditif ou visuel dans environ
16% des cas, une maladie évolutive invalidante dans près de 15% des cas, une déficience psychique
dans près de 11% des cas.
Type de handicap
Pourcentage des cas
Physique
58,18
Mental (arriération mentale exclue)
10,90
Sensoriel
16,36
Maladie invalidante
14,54
Inconnu
1,81
Non handicapé
1,81
REPARTITION DES HANDICAPS CHEZ LES
APPELANTS « VICTIMES » DE MALTRAITANCE
Le total des résultats est supérieur à 100% en raison de l’association de divers handicaps pour une
même personne.
2)
L’appelant est témoin d’une situation de maltraitance
a) lien avec la victime :
Cette personne est :
- un membre de la famille de la victime dans près de 81% des cas ; il
s’agit de la mère le plus souvent.
- un professionnel dans plus de 11% des cas.
- 11 -
Appelant « témoin »
Nombre de cas
Epoux
2
Conjoint
3
Epouse
1
Père
5
Parents
19
Mère
14
Fils
4
FAMILLE
Enfants
10
Fille
6
Frère
2
Collatéraux
7
Sœur
5
Belle-sœur
2
Cousine
1
AMI(E)
Proche extérieur à la famille
2
Educatrice(s)
3
Moniteur-éducateur
1
PROFESSIONNEL
Aide médico-psychologique 1
6
Auxiliaire de vie
1
CURATELLE
Curatrice
1
TOTAL
51
}
}
}
}
}
LIEN ENTRE L’APPELANT ET LA VICTIME
Appelant « témoin »
Membres de la famille
Ami(e)
Professionnel
Curatelle
Pourcentage des cas
80,77
5,77
11,54
1,92
REPARTITION DES APPELANTS TEMOINS
Dans 69% des cas, l’appelant « témoin » de maltraitance est une femme.
b) L’institution est mise en cause dans 42% des cas au lieu de 9% des cas
lorsque la victime appelle elle-même.
c) La victime présente une déficience psychique ou intellectuelle dans près de
la moitié des cas.
Le profil de la victime
1) Age, sexe :
Sachant que l’âge de la victime n’a été connu que dans 77 cas sur 106, l’âge moyen est
de 51,3 ans. Il s’agit d’une femme dans 59% des cas.
2) Handicap(s) :
Comme en témoigne le tableau suivant, la victime présente un handicap physique dans
plus de la moitié des cas. Notons la présence d’une victime non handicapée, maltraitée par une
personne handicapée.
- 12 -
Type de handicap
« Victime »
Physique
52,00%
Mental
26,00%
Visuel 16,98%
Sensoriel
} 21,70%
Auditif 4,72%
Maladie invalidante
16,98%
Inconnu
0,94%
Non handicapé
1,89%
REPARTITION DES TYPES DE HANDICAP DES PERSONNES MALTRAITEES
3) lieu de vie:
73,6% de ces personnes vivent à domicile, et 26,4% passent tout leur temps, ou une
partie seulement, en institution.
La maltraitance est non avérée dans 14% des dossiers
Parmi les plaintes reçues, certaines d’entre elles ne correspondent pas à des situations de
maltraitance, bien que la souffrance soit bien présente, d’autres peuvent être considérées comme
limites. Parfois, les plaintes sont non fondées.
La vigilance s’impose toutefois, des faits paraissant invraisemblables et évoquant un état
délirant, peuvent se révéler authentiques.
En milieu hospitalier, la maltraitance n’a pas été confirmée dans la moitié des cas, et même
dans 2/3 des cas en service psychiatrique.
Dans les établissements médico-sociaux destinés aux personnes handicapées, la maltraitance
n’a pas été confirmée (après enquête de la DDASS) dans 20% des cas (le nombre de dossiers étant
limité, les résultats sont à prendre avec précaution).
- 13 -
Les abus
1) Leur fréquence
Les formes de maltraitance effectives (ou très probables, mais non confirmées) se répartissent
ainsi :
REPARTITION DES FORMES DE MALTRAITANCE :
Nombre de cas
31
41
27
4
7
4
6
10
Maltraitance physique
Maltraitance psychologique
Maltraitance financière
Maltraitance médicamenteuse
Actives
Négligences
Passives
Atteinte des droits civiques
Problème de voisinage
%
29,25%
38,68%
25,47%
3,77%
10.38%
5.66%
9,43%
Remarque : le nombre total de cas est supérieur à 106 (nombre de dossiers étudiés) et le total des
pourcentages est supérieur à 100. Ceci s’explique par le fait qu’une seule et même victime puisse
subir simultanément plusieurs types de maltraitance, et de ce fait, une telle victime sera
comptabilisée pour chaque type de maltraitance subie.
Comme le montre ce tableau, la maltraitance psychologique est prédominante, viennent ensuite les
abus physiques et financiers.
Les abus sexuels sont inclus, dans cette étude, dans la maltraitance physique (2 cas). Ceux-ci
entraînent par leur gravité d’emblée la saisine de l’autorité judiciaire et/ou administrative, et de ce
fait, sont plus rarement portés à la connaissance d’ALMA handicap.
2) Singularité et intrication des différentes formes de maltraitance.
Le schéma sur la page suivante montre cette intrication des diverses forme d’abus.
Dans un peu plus de ¼ des cas, les maltraitances psychologiques ne sont associées à
aucune autre forme de maltraitance. Elles sont associées à des maltraitances physiques dans la
moitié des cas, et financières dans ¼ des cas.
Quand les maltraitances physiques sont présentes, si dans 1/3 des cas elles sont seules, elles
peuvent aussi être associées à des maltraitances psychologiques dans plus de la moitié des cas, à des
maltraitances financières dans environ 1/5 des cas, plus rarement à des négligences, des problèmes
de voisinage, voire des maltraitances médicamenteuses.
Aucun cas de maltraitance financière en institution ne figure dans cette étude.
- 14 -
Voisinage
Maltraitance
psychologique
Maltraitance
physique
Maltraitance
médicamenteuse
Droit du
citoyen
Négligences
Maltraitance
financière
: dossier
correspondant à une maltraitance hors institution
: dossier correspondant à une maltraitance en institution
- 15 -
LES DIFFERENTES FORMES DE MALTRAITANCE :
LEURS SINGULARITES ET LEURS INTRICATIONS
3) Types d’abus selon le lieu :
a) en institution
Les violences sont essentiellement psychologiques et/ou physiques.
Les plaintes pour négligences, atteinte des droits civiques, et maltraitance
médicamenteuse, ont rarement été prouvées.
b) à domicile
Dans le cadre familial, maltraitances psychologiques et financières
prédominent.
c) la maltraitance sociétale a été signalée dans quelques dossiers :
- obstacles aux accès à la cité (bus inadaptés).
- nombre insuffisant de structures recevant des adultes handicapés (notamment pour
les personnes atteintes d’autisme).
- inadaptation de certains établissements par rapport au(x) handicap(s) des
personnes accueillies.
Les auteurs d’actes maltraitants
1) Au sein de la famille :
Peuvent devenir maltraitants, par ordre de fréquence, conjoint ou ex-conjoint, enfant,
parent, plus rarement neveux et nièces, voire la personne handicapée elle-même.
La répartition homme-femme est sensiblement équilibrée.
2) En institution
Si le personnel d’encadrement est parfois maltraitant, des personnes handicapées
accueillies au même titre que la victime peuvent être à l’origine des violences.
Enfin, une maltraitance mutuelle famille-institution s’instaure de temps à autre.
La saisine de l’autorité judiciaire
Seuls 17 dossiers ont conduit à la saisine du Procureur de la République.
En conclusion
Les personnes en situation de handicap présentent plus que d’autres des facteurs de fragilité,
d’incompréhension, voire de ségrégation.
Dans le plus grand silence, elles peuvent être victimes de toutes formes d’abus, même les plus
insidieux, au sein de leur famille, ou dans le cadre institutionnel.
La prise de conscience de l’existence d’abus envers les personnes handicapées vulnérables
s’effectue progressivement, témoins et victimes révèlent peu à peu des souffrances tues plus ou
moins volontairement.
Ecouter, apporter soutien et conseil à ces personnes est nécessaire, d’où l’importance de l’existence
de centres d’écoute, tels que ceux qu’ALMA met en place.
Je vous remercie, Mesdames, Messieurs, de votre attention.
- 16 -
Robert HUGONOT :
J’ai bien le sentiment, Madame en vous remerciant que le rôle d’un modérateur est un rôle
maltraitant, mais je n’ai pas encore trouvé le moyen de sévir contre la marche inexorable de la
pendule. Nous aurons un peu de retard pour la table ronde animée par JC CADILHAC et R. PORTE
avec quelques personnes handicapées et je donne la parole à M. NICOLAS VERLEY en le
remerciant de représenter ici l’UNAPEI, (Union Nationale des Associations de Parents, de
Personnes handicapées mentales et de leurs Amis).
Nicolas VERLEY
Bonjour à tout le monde, je vais commencer
par me présenter. Je suis le papa d’un homme
de 30 ans qui travaille en CAT (Centre d’Aide
par le Travail) et qui vit chez lui dans un foyer
qui représente bien son domicile. J’ai adhéré
dans des associations locales et j’ai participé
en 1999 au livre blanc publié par l’UNAPEI
concernant la maltraitance. Ce livre est l’objet
d’un suivi par un observatoire dont je fais
toujours partie. Le sujet de la maltraitance est
aussi une préoccupation pour l’UNAPEI
La maltraitance est toujours un manque de
respect. Les personnes déficientes
intellectuelles en sont victimes comme tout le
monde. Je vais repréciser qui sont ces
personnes handicapées. J’utiliserai aussi pour
ces personnes handicapées le terme de
« personne déficiente intellectuelle » car ellesmêmes expriment parfois le besoin d’avoir
une formulation qui leur convient. Il ne s'agit
pas d'enfants, en tous cas pas des enfants
perpétuels, même lorsque les faits poussent à
maintenir chez eux une part d'enfant, mais
cela est aussi présent chez beaucoup d'autres,
et sans doute pour nous aussi. Il s'agit bien
d'adultes, avec des besoins d'adultes,
notamment dans les domaines sociaux et
affectifs, et ils ont le besoin d'être respectés et
reconnus. Il ne faut pas non plus les assimiler
aux personnes âgées qui subissent le
déchéance de l'âge, mais qui vivent avec
leurs expériences, et conservent une mémoire
consciente ou inconsciente. La personne
déficiente intellectuelle possède, en général,
le désir de progresser, de se prendre en
charge, et quel que soit le niveau du handicap,
le désir d'être reconnue et respectée comme
une personne. La Personne déficiente adulte
est généralement consciente de sa déficience
qui lui demande un temps plus long et des
mots simples pour comprendre, et, le besoin
d'être durablement accompagnée. Lorsqu'elle
est en état de s'exprimer, ou dès que l'on
- 17 -
accepte de traduire ses sentiments, on entend
cette déclaration : "nous avons besoin de plus
de temps que vous pour comprendre, vous
devez utiliser des mots simples et nous laisser
le temps; mais, il y a des choses que nous
n'acceptons pas…" Quand on essaie de lui
faire exprimer des sentiments, c’est ce besoin
de respect qui apparaÎt toujours.
La première caractéristique du handicap c’est
bien sûr cette difficulté d’expression. Cela va
aussi empêcher la personne handicapée de faire
face à ce manque de respect. Elles vont être
victimes et comment expliquer alors ce qu’on
ressent.
Une autre caractéristique de la personne
handicapée mentale, c’est la nécessité pour elle
d’être accompagnée. La loi de 2005 a bien
parlé d’accessibilité ; l’accessibilité pour un
certain nombre de handicaps, c’est difficile. Ce
besoin d’accompagnement va durer toute la vie
y compris lorsque la personne va devenir âgée.
On a tendance à dire que l’accueil en institution
pourrait être une forme de maltraitance. Une
autre forme de maltraitance, c’est de ne pas lui
donner l’institution qui lui convient. On
avancera plus si on discute de bientraitance que
de maltraitance.
La maltraitance est souvent de type
inconsciente. Elle naît des difficultés à trouver
les moyens. Je voudrais citer un cas particulier
dont on a parlé ce matin Lorsqu’une personne
handicapée devient malade et qu’elle est
amenée à aller à l’hôpital, tout le circuit est
perturbé et cela devient un problème très
spécifique aux handicapés mentaux, source de
maltraitance.
La maltraitance peut malheureusement parfois
exister dans les établissements qui les
accueillent, et cela est bien sûr choquant et
inacceptable. Les Maisons d'Accueil
Spécialisées (MAS), Foyers d'Accueil
Médicalisés (FAM) ou foyers de vie, sont
confrontés à des difficultés, à des situations
difficiles, notamment lorsque que le personnel
est peu qualifié, sans formation et reçoit un
soutien sans doute insuffisant. Seule une
volonté clairement manifestée dans le cadre du
projet d'établissement et celui de l'association
gestionnaire permettra de pallier à cela, mais
aussi une politique d'ouverture permettant les
échanges et les regards croisés.
Souvent, la majorité des maltraitances se passe
dans les lieux habituels, familles, familles
d'accueil, logements individuels ou collectifs,
cercle d'amis ou relationnels …et notamment
lorsque la déficience est plus légère. Il n'est pas
possible de parler de toutes ses formes, mais on
peut noter certaines caractéristiques.
Il n'est pas facile de les repérer même
lorsqu'elles sont graves. D'abord à cause des
difficultés pour les victimes d'en faire état, par
difficulté d'expression, mais aussi par pudeur
ou par peur des représailles, ou peur des
conséquences.
Les témoins ne sont pas toujours prêts à
signaler les faits pour les mêmes raisons.
Enfin, il faut noter un phénomène valable pour
toutes les victimes, mais encore plus critique
sans doute pour les personnes déficientes, ce
sont les difficultés rencontrées après la
révélation. Les interrogatoires, les
confrontations, les allusions à ce que les
victimes auraient pu provoqué ou accepté les
faits sont de nouveaux traumatismes. Et la
victime devient une seconde fois la victime.
Enfin, je voudrais parler de ce qu'on appelle
toujours la protection juridique, mais qui
devrait être avant tout la protection de la
Personne. La Loi de 1968 qui réglemente ces
mesures devrait être au moins dépoussiérée, et
tenir compte des évolutions des Lois de 2002 et
surtout 2005.
Malgré les avis éclairés, malgré les
concertations, les projets bien avancés
n'aboutissent pas. Sans rentrer ici dans le débat,
je lance un cri de colère. Laisser perdurer
depuis plus de 10 ans les critiques du système
actuel, ses défauts, ses insuffisantes, parfois ses
déviances, sans aboutir à rien ne me paraît pas
être respectueux des personnes qui ont besoin
d'être protégées sans perdre leur dignité et leurs
capacités.
Robert HUGONOT :
Merci. Nous faisons d’ailleurs les mêmes remarques que vous sur le retard du législateur.
Maintenant, je fais appel à M. CADILHAC et M. PORTE pour animer la Table Ronde.
JC CADILHAC :
Bonjour tout le monde. Je vais commencer par parler des absents. On ne le dit pas assez souvent,
mais dans le monde du handicap, il y a une chose qu’il faut faire remarquer, c’est la vulnérabilité
car l’équilibre qui permet de vivre avec son handicap est un équilibre fragile que des évènements
nouveaux peuvent rompre ; Alice VACHET ne vient pas parce que son œil va mal; un oeil qui va
mal aurait peut être été compatible avec cette journée, mais un œil qui va mal + un fauteuil roulant
et la voilà dans l’impossibilité d’être avec nous. Alice, je l’avais rencontrée pour préparer avec elle
cette table ronde ; je vous la présente rapidement.
Alice VACHET est de Grenoble, a 78 ans et est en fauteuil depuis 34 ans. Elle a été proviseur de
lycée, salariée à l’Association des Paralysés de France (A.P.F.), elle a été bénévole à l’A.P.F. et à
ALMA, a tout une carrière derrière elle. Lorsque nous avons préparé cette journée, je lui ai dit « en
34 ans de fauteuil, ça m’étonnerait que vous n’ayez pas été victime de maltraitance ». Il serait
d’abord intéressant de témoigner de ce que vous avez vécu. Je lui avais également fait cette
remarque « lorsque nous sommes en présence de Personnes Âgées, nous sommes toujours en
présence d’un couple maltraitant/maltraité qu’on n’ a pas trop de mal à identifier et même lorsqu’on
est en institution, la maltraitance est diluée entre plusieurs personnes et on essaie de mieux
comprendre… et si on admet qu’il y a des négligences sans intention de nuire, on est toujours dans
ce couple maltraitant/maltraité. Quand on fréquente le monde du handicap, on a l’impression que ce
couple maltraitant/maltraité n’est pas si facile à retrouver et souvent c’est "on" qui est maltraitant,
"on" c'est-à-dire la politique, tout ce qui définit la relation entre le citoyen et la cité et qui est mise
- 18 -
en accusation. J’aimerais avoir votre avis sur cette particularité. Elle nous a adressé ce témoignage
que je vous vais vous lire et vous commenter par la suit. C’est un texte fort.
Alice VACHET, fondatrice de l'Association des Paralysés de France
La bataille n’est pas encore gagnée et le regard reste parfois bien intolérant. D’une autre manière,
nous sommes aussi victimes de "racisme". Deux incidents me reviennent en mémoire. On pourrait
aisément faire le parallèle avec ce qu’a subi Alexandre. Voici deux cas de maltraitance auxquels j’ai
été confrontées récemment.
- Au supermarché, voisin de mon domicile, une personne âgée a croisé brutalement ma
route. Voulant forcer le passage, alors que je me trouvais dans l’impossibilité de
déplacer mon fauteuil électrique, elle a poussé son caddy violemment pour forcer le
passage. Elle m’a coincé la main gauche entre son caddy et mon fauteuil, me fracturant
deux métacarpiens. Très rapidement, ma main a enflé et est devenue bleue. J’ai eu très
mal et je n’ai pas pu retenir un cri de douleur. La personne en question ne s’est même
pas retournée, ni excusée. Des clients m’ont porté secours immédiatement. Ils étaient
outrés du comportement de cette dame âgée.
- Je circulais sur le trottoir d’une rue montante. Il y avait un seul bateau, en haut de la rue. J’allais
arriver à ce bateau pour traverser la chaussée, lorsqu’un automobiliste s’est garé dessus, juste à ce
moment-là. J’ai attendu qu’il sorte de la voiture et je lui ai demandé d’avancer de quelques mètres
pour libérer le passage : une lueur d’agressivité dans les yeux, il commence à m’insulter « les
handicapés, j’en ai rien à foutre et j’en ai ras le bol. Il n’y en a que pour eux. Vous avez du fric plein
les poches. Vous ne savez faire que ça, demander du fric. Vous voulez descendre du trottoir, et bien
je vais vous descendre moi ». Il tourne le fauteuil face au trottoir et me pousse en avant. Geste fatal,
car on ne descend jamais un trottoir de cette façon, il m’éjecte littéralement de mon fauteuil.
Résultat : six points de suture dans le cuir chevelu. Quant à l’auteur, sa peur a calmé sa colère. Son
allusion à l’argent, avait pour cause la campagne du Téléthon qui battait son plein dans tous les
médias, cette semaine-là. Curieuse retombée du Téléthon !
Ce genre de maltraitance provient d’une vraie intolérance. Le fauteuil roulant, surtout s’il est
occupé, reste un « objet encombrant » au sens de la législation sécuritaire des lieux publics, cela est
expressément écrit sous cette forme dans les instructions de sécurité des salles de spectacle…Pas
« d’objet encombrant dans les allées »sous entendu y compris les fauteuils roulants ! Le problème
sera résolu par la plupart des salles de cinéma, en particulier, quelques sièges, en bordure d’allée
sont « escamotables » ce qui permet au fauteuil roulant de prendre sa place en toute légalité.
La maltraitance est beaucoup trop présente dans nos vies. Mais nous, nous avons tendance à accuser
la société toute entière. Notre quotidien est un vrai parcours de combattant. Même s’il y a de vrais
progrès, nous ne sommes ni accueillis, ni intégrés dans cette bonne société. Nous tenons peut-être
trop de place (ou trop peu)…je ne sais pas.
Mais pour qu’il y ait maltraitance, il faut qu’il y ait un sujet et un objet. Voici un petit exemple qui
illustrera mon propos.
Je me promenais, au moment des soldes, dans une rue commerçante du centre ville. Je vois dans
une vitrine d’un magasin « grandes tailles », un chemisier parme qui me plaisait beaucoup. Les
commerces, dans ce bout de rue sont surélevés à cause de la neige et des eaux de pluie. Une marche
assez haute m’empêche d’entrer. Le vendeur vient jusqu’à moi. Il m’apporte le chemisier convoité.
D’un petit mot, gentiment dit, je déplore l’absence d’un petit plan incliné en bois (ce qu’ont installé
de nombreux commerçants voisins, en particulier, le chocolatier mitoyen) et là, à ma grande
stupeur, le vendeur se met en colère contre les handicapés qui dérangent et veulent toujours tout :
« ce n’est pas de ma faute si vous êtes dans un fauteuil » ça c’est sûr ! j’ai quitté le magasin, sans le
chemisier, un peu frustrée. Vous voyez, la maltraitance n’est pas l’absence de plan incliné. Le
maltraitant est clairement identifié. C’est une personne précise et dans ce cas, le vendeur.
- 19 -
La marche et le fauteuil sont des prétextes qui ont permis au vendeur d’être maltraitant. On
trouverait de nombreux exemples. La dépendance ouvre la porte à la maltraitance, mais
heureusement, nous rencontrons sur notre route de nombreux bien-traitants, serviables, attentifs,
efficaces.
Et puis, quelquefois, le sujet et l’objet basculent. La personne handicapée devient "maltraitante" à
son tour. Petite revanche ! Non, la maltraitance n’est jamais légitime. L’objet encombrant que je
suis a une requête à faire : j’ai troqué mon habit de religieuse contre un autre uniforme : mon
fauteuil roulant. Tous deux sont des signes qui m’identifient clairement et commandent mes
relations avec les autres. Avec mon habit religieux, j’étais protégée, mais aussi tenue à l’écart. On
ne s’adresse pas à une religieuse de la même façon qu’à quelqu’un d’autre. On est prisonnière du
regard de l’autre qui nous impose un certain comportement. Pour plonger une tête dans l’océan, il
nous a fallu nous cacher. Pas question de quitter notre habit sur la plage; comme tout le monde. Il
fait partie, du moins tout le monde le pense ainsi, de notre personnalité.
Pour le fauteuil, c’est la même chose. Les personnes que vous rencontrez voient à travers l’usage
obligatoire du fauteuil, le handicap. Vous voilà cette fois identifiée: personne handicapée. Pas
moyen de s’adresser à vous comme à une personne ordinaire. Moi, je ne me vis pas handicapée. Je
suis une femme très grande, brune, au caractère bien affirmé, avec l’envie d’aimer tous ceux que je
rencontre. De plus, il se trouve que je suis en fauteuil roulant, à la suite d’un accident.
Heureusement, lorsque la relation est forte, le fauteuil est gommé comme l’était l’habit religieux.
Uniforme, quand tu nous tiens ! Les militaires, policiers, infirmières et autres se mettent en civil de
temps en temps, redevenant eux-mêmes. Nous, religieuse ou handicapée, jamais.
Quand je vous dis que mon rêve serait de passer enfin inaperçue. Drôle d’envie !
Jean Claude CADILHAC, , psychiatre, conseiller ALMA Hérault
Ce texte est un très beau texte et j’avais envie de faire un petit commentaire.
Pour Alice, la vraie maltraitance n’est pas le manque d’accessibilité au magasin, mais la réponse
méchante que lui fait le commerçant. Le couple maltraitant/maltraité est bien repérable et il en est
de même pour les autres exemples. Mais en même temps, Alice VACHET nous dit que la situation
de handicap est difficile à vivre de part et d’autre parce qu’elle génère une tension psychique avec
une sensibilité particulière. C’est dans ce climat relationnel tendu qu’éclate la maltraitance. Il est
bien difficile de se promener en ville en fauteuil roulant et d’être détendue. Nous ne sommes ni
accueillis ni intégrés mais c’est aussi difficile pour l’autre d’être d’emblée à l’aise dans cette
relation avec l’autre. Il est difficile pour l’autre de ne pas voir le fauteuil avant de voir la personne
qui y est assise. Nous tenons peut être trop de place ou trop peu mais c’est ce "trop de place" qui
déclenche chez l’autre une relation maladroite. A travers le fauteuil obligatoire, la personne voit
d’abord le handicap et vous identifie à une personne handicapée. C’est là qu’elle fait le
rapprochement avec l’habit de la religieuse qui ne lui permet pas d’être regardée comme les autres.
C’est pour cela qu’au début elle parle de racisme; le mot est exagéré car les handicapés ne forment
pas une race à part; la société n’a pas pour projet d’éliminer cette race. Le mot racisme exprime sa
souffrance d’être regardée au travers d’un objet et c’est parce qu’il y a malaise que la maltraitance
surgit avec cette brutalité inattendue. Le maltraitant n’est pas seulement méchant; il est bête et
méchant. Si on pouvait enlever un peu de bêtise, il y aurait moins de maltraitance, ce regard ne va
pas disparaître du jour au lendemain mais on peut apprendre à cheminer intérieurement et à changer
le regard.
On me dit que Jean-Maire HOUOT n’est pas là mais qu’il a transmis un texte qui sera lu par André
LAURAIN. J’ai perçu également chez Jean-Marie une grande richesse et il n’est pas là aujourd’hui,
c’est parce que sa femme est malade et qu’il estime que son rôle est d’être près d’elle et de
l’épauler. Il se sent responsable d’elle. Jean-Marie est non voyant depuis 27 ans et il est engagé
dans la vie politique de sa commune. Il se refuse à voir le monde séparé en deux qui ferait que d’un
- 20 -
côté on a les gens sans handicap et de l’autre le monde des handicapés. Pour lui, chaque handicap a
sa spécificité et chacun doit sortir de sa catégorie pour que s’établisse entre l’handicapé et l’autre
une véritable relation où chacun va prendre conscience des limites de l’autre mais surtout des
possibles de l’autre. C’est le jeu de la double responsabilité.
Je laisse la parole à André LAURAIN qui lira le texte de Monsieur HOUOT, qui s'excuse de n'avoir
pu être parmi nous
Jean Marie HOUOT, bénévole à ALMA Handicap 54
terminer avec la vie. Cette révolte violente
La personne handicapée est plus susceptible
contre moi-même n’était autre que
que toute autre d’être maltraitée. Il peut donc
l’expression d’une souffrance à laquelle je
s’agir de maltraitance volontaire. Plus
voulais mettre un terme.
couramment, on devrait faire plutôt état du
Vivant désormais le handicap de cécité au
manque de "bientraitance", par ignorance ou
quotidien, j’observe toujours qu’étant
par peur.
minoritaire dans la société, il n’est pas facile
Il n’a fallu qu’une seconde pour que
de traverser la vie sociale sans encombre
l’accident se produise et que tout s’écroule. Je
surtout quand les difficultés émanent de
fus immédiatement aiguillé vers le service
l’environnement qui ne sait pas ou qui ne veut
d’ophtalmologie. « Lésions rétiniennes
pas savoir.
importantes » déclara alors le professeur vers
On peut observer que la personne handicapée
les étudiants groupés autour de moi. Opéré
est partiellement ou totalement dépendante.
quarante-huit heures plus tard, je demeurai les
Le handicap peut être physique, psychique,
yeux bandés pendant un mois. L’opération ne
sensoriel, mental ou cognitif. Ces déficiences
fut pas concluante, une nouvelle intervention
ont un impact différent, si elles sont innées ou
eut donc lieu. « Soyez patient ! Cela va
contractées au cours ou en fin de vie. La
s’éclaircir !... » me dit l’interne. Résigné,
personne concernée est souvent définie par le
j’espérais malgré tout l’amélioration de ma
stigmate de son handicap. Il est commun
vision jusqu’au jour où le professeur, sans
d’entendre : « je vais faire traverser la rue à
aucun égard, me lança : « Monsieur, il vous
l’aveugle … » ; Ou encore : « à cette réunion,
faudra apprendre le braille !… ». Le choc fut
il y avait plusieurs fauteuils roulants ». Et
si brutal que j’en perdis connaissance.
aussi : « tu as entendu le débile ? … ». Ce
Lorsque je repris mes esprits, seule
sont là des maltraitances avérées. S’agissant
l’infirmière était restée à mes côtés.
avant tout d’une personne à part entière, il est
Impitoyablement, j’apprenais que j’étais
inacceptable qu’elle soit définie par ce qui la
définitivement aveugle. Cette révélation
caractérise comme étant différente des autres
violente sans égard n’était-elle pas déjà une
dans sa façon d’être. Selon la situation dans
maltraitance ? En tout cas, tel fut mon
laquelle elle se trouve, celle-ci sera plus ou
ressenti. J’avais vingt-sept ans, ma vie venait
moins vulnérable, ainsi elle offrira une prise
de basculer.
plus ou moins grande au maltraitant potentiel.
En retrouvant le milieu familial, la réalité
Si nous avons tous notre talon d’Achille,
m’apparut plus brutale encore, j’avais perdu
celui-ci est beaucoup plus évident chez la
tous mes repères, je tombais dans une totale
personne handicapée. De façon inconsciente,
dépendance. Je mesurai alors l’immensité du
ou parfois plus perverse, on imagine
gouffre qui s’ouvrait sur l’avenir. Ma vie au
facilement comment peut être manipulée, à
quotidien, sous tous ses aspects, avait perdu
son insu, la personne en situation de handicap.
son sens initial. Ma relation aux autres, pleine
Croyez-vous, par exemple, qu’il soit sain de
d’incompréhension, se dégrada rapidement.
parler en présence d’une personne sourde, en
Les violences verbales (reproches de la perte
pensant que celle-ci n’entendra pas, bien
d'emploi et de la baisse des ressources
qu’elle soit concernée directement ?
financières), les humiliations (pitié et
Il y a aussi l’incivisme de l'automobiliste qui
introspection) m’entraînèrent insensiblement
prendra la place de parking réservée ou qui
vers le désespoir, jusqu’à souhaiter en
- 21 -
stationnera sur le trottoir, obstruant le
passage. Autre exemple vécu au quotidien : la
personne dépendante, seule à son domicile,
qui attend hypothétiquement l’assistance
d’une tierce personne ou d’une infirmière,
s’angoisse,
soulignant
davantage
sa
vulnérabilité. Il n’est pas rare que certaines
personnes indélicates profitent du non-voyant,
en prenant sa place dans une file d’attente
avec le sentiment du « pas vu, pas pris ». Il lui
arrive parfois d’être escroqué par un tiers, soidisant de confiance, qui lui fait signer
abusivement des chèques ou tout autre
document l’engageant. Jouissant d’une
curiosité malsaine en découvrant son courrier,
une tierce personne peut aussi en dévoiler son
contenu vers l’extérieur. Il est facile de
déstabiliser un sujet handicapé psychique en
l’agressant verbalement, sachant comment
l’atteindre par ce qui est justement sa
déficience. S’il n’est pas évident de cerner le
degré de handicap mental d’une personne, on
voit aisément comment celle-ci peut être
maltraitée : atteinte physique, abus sexuel ou
toute autre manipulation.
Force est de constater que la maltraitance la
plus commune est d’ordre sociétal, l’image de
la personne handicapée indispose car elle
renvoie à l’autre, tel un miroir, une image qui
pourrait être cet autre. Moins la personne
concernée est intégrée, plus elle adopte un
profil bas. Pour éradiquer ce préjudice, la
personne handicapée doit se mettre au cœur
de son projet de vie. Afin que cela soit
possible, on doit lui rendre accessible tout ce
qui fait la citoyenneté : l’école, le sport, les
loisirs,
la
culture,
la
formation
professionnelle, l’emploi avec les aides
nécessaires, qu’elles soient techniques ou
humaines.
La vie professionnelle en milieu ordinaire,
une implication dans le monde associatif et un
mandat d’élu municipal me permettent d’aller
à la rencontre des autres, ce qui a nourri ma
réflexion sans toutefois en tirer de
conclusions hâtives.
A la mairie de notre ville de Vandoeuvre sont
organisées régulièrement des réunions de
concertation avec la participation de citoyens
handicapés et d'associations les représentant.
Chacun peut exprimer sa demande ou faire
des suggestions, son implication étant
- 22 -
révélatrice d’une détermination de vivre
pleinement citoyen.
Si les problèmes d’accessibilité sont évoqués
avec souvent beaucoup de passion, la
rencontre de visu est plus évocatrice ; il n’en
demeure pas moins que l’expression des
demandes constitue la partie émergente d’un
iceberg dont la partie immergée m’est souvent
révélée par des entretiens individuels. C’est là
que se confirme le vécu réel de ces personnes
au quotidien avec leurs souffrances, leur
solitude et leurs interrogations.
L’isolement, par manque de communication
ou de compréhension, et le rejet sont souvent
ressentis, à juste titre, comme une
maltraitance permanente. Bien qu’il y ait une
certaine évolution dans les mentalités, je
crains qu’il ne faille sans cesse remettre
l’ouvrage sur le métier… Trancherons-nous
un jour ce « nœud gordien » ? Par
comparaison, l’image que donne une
personne âgée n’est pas ressentie de la même
manière, s'agissant de notre projection
naturelle dans l’avenir, tandis que celle d’un
« jeune handicapé » nous renvoie une image
insupportable.
Enfin, la maltraitance d’ordre sociétal peut
apparaître dans différents secteurs. Les
adaptations techniques, à l’usage exclusif des
personnes handicapées, sont très onéreuses.
Les pratiques commerciales sont souvent la
cause de discrimination à l’achat de ces
matériels pourtant indispensables.
Le fonctionnement de certaines institutions
dérive parfois, s’éloignant de leur objectif.
Certains administrateurs égocentriques, en
quête d’existence personnelle, s’arrogent le
droit de les gérer sans concertation, la
personne handicapée se sentant alors
manipulée.
Dans ce même état d’esprit, soyons attentifs à
ne pas être pris comme « faire-valoir ». La
personne concernée peut, comme toute autre,
être exemplaire et faire partager son
expérience. En revanche, disposer d’elle dans
le but d’en tirer profit serait pervers.
Pour conclure, la prévention de la
maltraitance passe sans doute par une écoute
constructive et une aide à la réalisation d’un
projet de vie dont l’acteur principal est la
personne elle-même, avec ses droits et bien
entendu ses devoirs. Il est essentiel de ne pas
décider ni de faire à sa place tout ce qui peut
être réalisé par l’intéressée ; ce serait la rendre
plus dépendante, la dépossédant de son projet
de vie et, par là même, lui infliger une
maltraitance supplémentaire.
Cette réflexion est extraite d’un exposé plus
complet qui s’intitule : « vivre son handicap
au quotidien ».
Jean Claude CADILHAC : Nous remercions vivement Jean Marie HOUOT pour ce témoignage et
appelons Madame Anne-Marie PAULHE qui va nous parler de son rôle d’écoutante à ALMA
Handicap 81.
Anne-Marie PAULHE, responsable d’Alma Handicap 81 :
Bonjour à tous,
Ayant vécu un handicap après une longue maladie et ayant eu des témoignages de certaines
personnes handicapées…étant maman d’un enfant malade mental et sur un fauteuil roulant depuis
10 ans après un gros diabète et une vie de cardiaque, je me suis engagée à Alma. Ayant été témoin
dans ma jeunesse de maltraitance sur des personnes handicapées qui n’avait pas les possibilités de
se défendre ; j’ai voulu fonder cette antenne sur le handicap en travaillant avec des personnes
compétentes : des médecins, des infirmières, des kinésithérapeutes et des psychologues qui nous ont
aidés à ne pas partir dans tous les sens. Le centre ALMA Handicap 81 est ouvert depuis 2 ans ½ et
nous sommes, depuis, témoins des maltraitances. Des familles et même des malades ont dénoncé la
maltraitance. Je souhaite vous donner deux exemples de cas signalés par une famille . Un monsieur
nous appelle : sa fille schizophrène aurait été violée lors d’un séjour en hôpital psychiatrique par un
autre malade. Le père porte plainte sans que celle-ci aboutisse faute de preuves. La fille en dehors
de ses séjours à l’hôpital habite dans un HLM , mais elle a une obsession, mettre le feu. Comprenez
l’angoisse du père, sa colère et la colère des voisins. Il nous appelle assez souvent et les appels sont
de plus en plus rapprochés car sa plainte reste sans suite. Nous avons eu des insultes agressives et
violentes à plusieurs reprises sur la messagerie ou directement au téléphone. A présent, il a quitté
notre département. Il y a 3 mois, il nous a appelés pour nous demander s’ il pouvait donner nos
coordonnées à une famille vivant la même situation. Nous nous sommes rendus compte que la
patience était constructive.
Une autre situation : la maman d’une fille polyhandicapée qui a vécu 4 ans dans la seule maison
d’accueil spécialisée de son département. Dans cet établissement, elle a perdu 26 kg, d’importants
problèmes dentaires ont été diagnostiqués à sa sortie d’établissement. Elle faisait des crises
d’épilepsie qui n’ont pas été repérées. Elle a été exclue de l’établissement car sa mère devenait
ingérable. Un huissier est venu constater l’expulsion. Dans cet établissement, l’homme d’entretien
est alcoolique. Il vient sur son lieu de travail et en profite pour visiter des sites pédophiles et l’agent
qui s’occupe de la démarche qualité est une ancienne alcoolique également. Lors de l’entretien que
la mère a eu avec le directeur et ce monsieur, ce dernier ne dit rien, puis, quand il est question de
"passage à l’acte", il nie tout. Nous demandons à la maman de faire des signalements à la
D.D.A.S.S. avec trois autres familles, à la préfecture, au procureur. Plaintes, puis enquêtes de
gendarmerie se suivent, les démarches ont duré 18 mois. Cette mère qui garde sa grande fille chez
elle doit se faire opérer d’une main et elle ne sait plus comment s’organiser, faute de confiance. Au
bout de 2 ans d’appels réguliers, elle accepte l’intervention d’une assistante sociale et envisage
l’entrée de sa fille dans un autre centre. Nous remarquons au centre ALMA que le chemin est très
long et qu’il faut avoir beaucoup de patience pour écouter et ne pas se décourager. C’est un long
chemin de patience qui aboutit souvent à apaiser la situation. Après, ce sont des appels de personnes
handicapées elles-mêmes que nous avons réussi à dédramatiser. Nous laissons faire la personne, ce
qui lui permet de prendre sa vie en main et de se mettre debout. Voilà ce que je voulais vous dire.
- 23 -
René Porte, président d'ALMA Handicap 38 :
Merci, Madame PAULHE. Nous allons poursuivre et je vais donner la parole à Madame PIOT qui,
à travers son propre handicap visuel, mais surtout au travers de son activité professionnelle a pu
rencontrer le problème de la maltraitance avec les personnes handicapées et plus particulièrement
avec les femmes. Je lui laisse la parole.
Maudy PIOT, psychanalyste, présidente de l’association, Femmes pour le dire, femmes pour
agir
Bonjour.
Je présente trois particularités qui pourraient engendrer de la maltraitance…je suis une femme, je
suis psychanalyste et je suis handicapée. Je suis présidente d’une association « Femmes pour le dire,
femmes pour agir» qui regroupe des femmes singulières et aussi des hommes puisque notre objectif
c’est de changer le regard de l’autre sur le handicap. J’ai eu envie aujourd’hui d’aborder le thème du
handicap du point de vue de la psychanalyse et de la psychologie « pourquoi cette maltraitance
existe » « qu’est-ce qui se passe chez l’autre, chez la personne handicapée ou la personne âgée pour
qu’il y ait ces interactions sur le regard qu’on porte sur la personne différente.
Je voudrais raconter quelque chose qui m’est arrivée alors que j’étais plus jeune. Un jour, je
traversais la route et une camionnette s’est arrêtée. Le chauffeur s’est exclamé : « moi les aveugles,
je les écrase » et il est passé sur mon pied . J’ai été déstabilisée, mais à l’époque je n’ai pas réalisé
que c’était de la maltraitance. D’autre part, je pense à ce que disait Alice VACHET dans son
témoignage par rapport au chemisier parme. J’aurais commencé par acheter le chemisier avant de
critiquer l’accessibilité au magasin car d’une part je me serais fait plaisir et d’autre part je crois que
ce vendeur qui s’était approché d’elle et lui avait sorti le chemisier était bienveillant ; Alice dit ellemême que c’est parfois la personne handicapée qui est maltraitante; je crois que ce vendeur avait eu
une démarche positive ; j’aurais acheté le chemisier puis j’aurais entamé une discussion avec le
vendeur car ce qu’on lui a renvoyé c’est une culpabilisation. C’est une maltraitance qui s’est mise
en place sur un malentendu. Donc nous allons essayer de voir quels sont les tenants et les
aboutissants quand on parle de maltraitance et ce qui se joue…
Je voudrais plus particulièrement parler de la maltraitance touchant les femmes handicapées et les
femmes âgées.
Déjà la résonance de ces deux mots accolés, Mal/Traitance évoque la souffrance, le déni du sujet,
le pouvoir du plus fort sur le faible. Le terme mal renvoie à l'abject, à toutes possibilités de torture,
de corps malmené, ridiculisé, méprisé, insulté. La maltraitance réveille la peur, la crainte, le
silence, les mots tus, la douleur physique et psychique. Il y a celui qui subit, celui qui exerce sa
force, sa domination. Le faible est celui qui maltraite. Celui qui se sent menacé par des
représentations inconscientes peut réagir par de la violence physique ou verbale pour se donner un
statut de force, de dominant. C'est la rencontre de l'angoisse renvoyée par celui qui est devenu
dépendant, ou que l'on croit inférieur, incapable. Pour évincer cette angoisse que réveille la femme,
la personne âgée, pour surmonter ses émotions, sa peur de la mort, l'autre ne trouve pour se protéger
que la violence, la domination.
Nous devons nous poser la question : la différence des sexes a-t-elle une influence sur la
maltraitance ? La femme est-elle plus maltraitée que l'homme? Le sort d'une femme, d'une femme
"handicapée", est-il identique à celui d'un homme, d'un homme handicapé ? Autrement dit,
l'appartenance sexuelle joue-t-elle un rôle dans le déroulement de la vie de la femme handicapée, de
la femme âgée ?
Une évidence s’impose : la survenance de la maltraitance a plus de risque de toucher la femme que
l’homme. Ensuite, la maltraitance a plus de risque de toucher la femme handicapée que l’homme
handicapé (des statistiques récentes venant du Canada montrent que les femmes handicapées ont
40% de risque en plus que les valides de subir des violences de la part de leur conjoint). En
- 24 -
conclusion, la femme handicapée est doublement discriminée, d’abord en tant que femme, ensuite
en tant que personne handicapée.
Quelles explications peut-on avancer ? Les chercheurs canadiens affirment que les hommes,
persuadés que leur victime handicapée est plus fragile et plus dépendante qu’une femme valide
n’osera pas porter plainte. La remarque est similaire en ce qui concerne les personnes âgées. La
femme dépendante en est réduite à se taire. La peur l’habite, peur également de se retrouver seule,
de perdre ses enfants etc. Il y a des couples de personnes handicapées qui vivent dans la violence et
dans… le silence. L’homme peut être valide, mais il peut aussi être handicapé lui-même, et violent !
Je vois à cela encore une autre explication. Il y a d’une part l’image de la femme, l’image sociale,
qui est à double face (on en trouve des traces très parlantes dans certains tableaux de la
Renaissance) : la femme est un être inférieur, et les idéologies religieuses ont bien développé ce
thème (souvenons-nous de la côte d’Adam d’où est sortie Eve !), elle porte le péché, la tare, le mal.
Mais en même temps, la femme doit être belle, parfaite, elle doit séduire, ce qui provoque chez
l’homme convoitise et crainte; elle a par ailleurs ce pouvoir fascinant de donner la vie. Alors, quand
cette femme est handicapée, marquée dans son corps ou son psychisme, c’est une image abîmée
qu’elle donne à voir, image narcissique abîmée disent les psychologues. Elle provoque chez l’autre,
chez l’homme, comme une terreur, un désir de vengeance, la violence, la maltraitance.
Une situation illustre bien cela : c’est la réaction de la société, de la famille, face à une femme
handicapée qui aspire à la maternité. Quand une femme handicapée désire un enfant, on la
soupçonne d'emblée de devenir une mauvaise mère : « Quelle honte, elle va donner un enfant
handicapé à la société, un de plus! ». On va même jusqu’à lui interdire d’enfanter, nombreux sont
les cas de stérilisation forcée de femmes handicapées – psychiques le plus souvent. Avez-vous déjà
entendu condamner un homme parce qu'il désire un enfant ? Avez-vous entendu un blâme
concernant les hommes qui désirent avoir des relations sexuelles ?
L'âge, le handicap seraient-ils les stigmates de la vulnérabilité, susciteraient-ils des attitudes, des
comportements blâmables?
Les difficultés économiques justifieraient-elles le manque de moyen, de personnel, qui entraîne une
surcharge de travail dans les institutions, laquelle légitimerait la maltraitance ?
La femme handicapée ou âgée renvoie si fortement l'image de la mort, de la castration, que la
violence; la maltraitance serait là pour donner à voir la limite de nos institutions.
La femme handicapée ou âgée, dans sa différence, sa singularité, oblige l'Autre à regarder
autrement.
Ces différences sont source de richesse, elles obligent la société à penser, à imaginer, à créer.
La maltraitance serait l'attitude facile pour enfermer la femme handicapée dans le silence, la
souffrance. C'est la fuite dans la violence pour calmer l'inconnu que nous donnent à voir les
personnes singulières.
Toute singularité entraîne un travail sur soi, une remise en question. Je vous remercie.
René PORTE :
Je vous remercie. Pour ma part, j’ai l’impression qu’on a fait quelques progrès du côté de la
sexualité des personnes handicapées femmes, mais on pourra en discuter après. Je passe la parole à
Jean-Jacques HOUDAYER qui a connu la maltraitance lorsqu’il a fréquenté un établissement alors
qu’il avait pu auparavant travailler en milieu ordinaire malgré ses problèmes neurologiques
- 25 -
Jean-Jacques HOUDAYER, Magasinier, bénévole Croix Rouge Lozère
Bonjour à tous.
Je m’appelle Jean-Jacques HOUDAYER et je suis un homme de 40 ans. Je voudrais réagir à
différentes interventions. Je vais d’abord vous présenter mon parcours dont je dirais que je suis
assez fier. J’ai été en institution à partir de 8 ans, j’ai été dans un centre pour handicapés et puis
d’un seul coup à 17 ans, j’en ai eu marre qu’on me commande, qu’on me dise ce que j’ai à faire et
je suis parti . Je ne savais pas où je mettais les pieds, mais petit à petit, j’ai eu la chance d’avoir des
parents qui me comprenaient, qui sont venus s’installer en Lozère à mes côtés ; j’ai quitté le centre
contre l’avis de mes parents. J’ai dit « moi, je veux faire ma vie » et mes parents m’ont dit « qu’estce que tu vas faire ? »
J'été en contact avec des assistantes sociales et j’ai eu un contrat TUC (Travaux d'Utilité Collective)
à la mairie et je participais à la vie de mon village. Après j’ai été dans la commune voisine dans une
maison de retraite et j’ai connu beaucoup de monde et ma directrice était à mes côtés. J’ai eu des
problèmes de santé et on m’a arrêté, puis, j’ai été licencié.
Par ailleurs, j’ai assuré tout seul, j’insiste, pour aider ma mère qui était malade jusqu’à la fin de sa
vie. Elle a déménagé et elle est venue à mes côtés et c’est moi qui faisais le parent et qui la
soutenais. Mais je respectais ses choix. Je ne suis pas quelqu’un qui s’impose .
Après le décès de ma mère, j’ai été dans un CAT (Centre d’Aide par le travail)) parce qu’il me
fallait travailler et parce que je me bats pour avoir du travail. Pour moi, le mot "handicap" n’existe
pas. Je suis "tombé" dans un CAT qui ne connaissait pas mes capacités bien entendu parce qu’il ne
me connaissait pas. Mais moi, je voulais toujours faire face et soulager les personnes "normales" ?
c’est marrant, car on dit beaucoup plus le mot "handicapé" que "pas tout à fait normal". On est tous
ensemble et je ne veux pas vous faire la politique de ce que vous savez, mais pourquoi cette
violence ?.
Dans ce CAT, je travaillais avec beaucoup d’handicapés et les personnes handicapées sont parfois
méchantes entre elles. On me voyait d’un mauvais œil parce que j’avais travaillé et on pensait que
je voulais prendre la place des moniteurs. C’était complètement faux. J’ai subi trop de méchancetés,
mais maintenant ma vie est bonne parce que j’ai passé mon permis ; j’ai ma voiture automatique
certes et je me débrouille. J’ai acheté un appartement qu’il me faut parce que j’ai changé de métier ;
je ne suis plus au CAT parce que je voulais m’en sortir et je me sens la force et je vois dans les yeux
certains se dire « ce gars là, il se sent la force, mais il n’en est pas capable mais venez passer une
journée ou 10mn avec moi, et je vous montrerai ce dont que je suis capable. J’ai réussi grâce au
CAT qui m’a aidé à trouver un stage à Intermarché où je suis depuis février et le personnel me traite
comme les autres. Faut pas tout me passer. Dans la vie, rien n’est facile même pour les gens
normaux. J’ai une bonne équipe qui m’a adopté, un bon patron qui me fait confiance. J’ai été
convoqué chez mon patron et je lui ai dit 'faut pas tout me passer parce que je suis handicapé. Moi,
je suis exposé à toutes les idées.
Je vous remercie.
Céline FAGES, ALMA HANDICAP Lozère
Et je ne sais pas si c’est moi qui accompagne
Jean Jacques ou si c’est lui qui
m'accompagne, mais je peux vous dire que je
n’ai plus rien à vous dire. Il m’a beaucoup
appris après un jour de voyage pour venir de
la Lozère; nous avons beaucoup échangé et il
m’a beaucoup enrichi. Il a fait preuve de sa
capacité de compréhension et d’analyse avec
son vocabulaire comme il le dit. J’ai été son
- 26 -
employeur pendant 10 ans et je dois dire que
c’est à la demande de l’employeur précédent
qui ayant apprécié ses qualités, m’a demandé
si je ne pouvais pas lui trouver un contrat.
Nous l’avons embauché en tant que
travailleur handicapé pendant 12 ans. Je l’ai
quitté en l’an 2000. Nous avons été très aidés
pour cet emploi par l’AGEFI (Agence
Economique et Financière)
Jean Jacques a quand même un handicap dont
il ne vous a pas parlé puisqu’il n’est pas
handicap ! Jean-Jacques ayant des difficultés
dans la marche, dans la préhension, l’AGEFI
lui a offert un véhicule électrique comme les
voitures de golf ; nous y avons attelée une
remorque qui lui permettait de mieux faire
l’entretien de notre parc. Vous vous apercevez
qu’il a eu plusieurs étapes, une en institution
où il s’est dit maltraité. Il a fait une fugue de
l’établissement pour ne pas rentrer en CAT
car il voyait que les gens orientés vers le CAT
avait des déficiences mentales, alors que lui
n’en a aucune Vous remarquez qu’il a
toujours très bien réussi et qu’il a toujours été
très bien accueilli dans le travail normal.
C’est lorsqu’il est retombé en CAT qu’il a eu
d’énormes difficultés qui ont été prises en
charge par la direction du CAT et l’éducateur
chef. Grâce à ce centre, il a aussi fait appel à
la DDASS (Direction Départementale des
Affaires Sanitaires et Sociales) où il a
toujours d’excellentes relations, à ALMA
aussi. L'équipe du CAT lui a trouvé un stage.
Il est pu se réinsérer dans le monde "normal"
de travailleur "normal" où il a trouvé sa place
et où il se dit très heureux. C‘est sa volonté
qui lui a permis de s’en sortir
René PORTE :
Merci beaucoup pour ce témoignage. Je vais donner la parole à André DUMOULIN du Collectif
des Démocrates Handicapés.
ANDRE DUMOULIN , Collectif des Démocrates Handicapés
Bonjour,
Je m’appelle André DUMOULIN. Je suis parent de Bruno, jeune adulte aveugle, multi-handicapé
de 30 ans, actuellement en Foyer d’Accueil Médicalisé (FAM) (anciennement Foyer Double
Tarification FDT).
- 2) des dysfonctionnements institutionnels
Je suis actuellement en retraite
divers de la part de la direction :
professionnelle. J’étais Moniteur d’Atelier
Détournements financiers importants, entrave
(MA), puis Educateur Technique Spécialisé
au Code du Travail pour les salariés élus, non
(ETS) d’abord dans un centre accueillant des
respect des représentants légaux, salariés et
jeunes en placement Justice, difficultés
travailleurs handicapés.
familiales, pré-délinquants de 1971 à 1979.
- 3) Décès d’un résident entraîné par la non
Puis, à partir de 1979, ETD au CAT de
assistance à personne en danger par des
Lavaur, « atelier Jardins-Espaces Verts ». J’ai
personnels salariés en "excellente relation"
dénoncé au printemps 1996 :
avec le directeur .
- 1) des faits de maltraitance sur des
J’ai été licencié fin avril 96 pour
travailleurs handicapés par des personnes
"diffamation". En 1998, le CAT a porté
salariées en "excellente relation" avec le
plainte contre moi sur les mêmes bases que
directeur. Des affaires de sexe (invitations
celles du licenciement. En octobre de cette
verbales…), amusement de salariés à exposer
même année, la Justice me "relaxe". Le CAT
devant tous la vie sexuelle et affective de
ne fait pas appel.
certains qui avaient déjà souffert
Etant en très grande difficulté financière en
physiquement et moralement de ces "faits
raison de chômage forcé, je n’ai pu continuer
similaires" durant leur enfance. Invitation à
seul ce combat.
fêter joyeusement ceci ou cela en payant, lors
de déplacements professionnels, l’apéritif à
En décembre 99, sur l’invitation de DECLIC,
tous (et surtout plusieurs fois aux encadrants
le magazine du handicap et de la famille, avec
d’atelier) alors que tout le monde sait que le
des personnes handicapées, des parents et du
mélange alcool et de médicaments est très
personnel, nous décidons la création de
explosif. Des pressions psychologiques très
l’association Respect pour tous concernant ce
importantes de la part de la direction et de sa
problème de la maltraitance des personnes
"cour" ont été exercées sur l’ensemble des
handicapées. Nous recueillons tous les
travailleurs handicapés du CAT.
- 27 -
dossiers sur ce sujet émanant de tout citoyen
quel que soit son handicap, son inadaptation,
son âge (enfant, adolescent ou adulte jusqu’à
60 ans. A plus de 60 ans, les dossiers sont
transmis à ALMA).
Dans le cadre du Collectif des Démocrates
Handicapés, nous avons été auditionnés, en
mars 2003 par la Commission d’enquête sur
la maltraitance envers les personnes
handicapées accueillies en établissements et
services sociaux et médico-sociaux et des
moyens de la prévenir. Nous y allions avec
plus de 40 gros dossiers (plus de 30 pièces),
tous basés sur des reconnaissances officielles
de justice, DDASS ou organismes divers.
Constat: nous basant sur :
- mon expérience familiale,
professionnelle et associative (Association
Nationale des Parents d’Enfants Aveugles ou
gravement déficients visuels avec ou sans
handicap(s) associé(s) ANPEA).
- l’expérience de tous les membres de
l’association Respect pour Tous
Nous constatons que :
- 1) Certains organismes gestionnaires
(associations, Etat, Région, Département,
Commune ou autres) sont beaucoup plus
enclins à détruire le dénonciateur qu’à régler
le problème à sa racine.
- 2) Certaines DDASS, parfaitement
endormies ou chloroformées par des aspects
politiciens ou l’inertie de leur propre
bureaucratie ou la volonté de « ne pas faire de
vagues » ne bougent pas trop, du moins pas
assez pour être au minimum compréhensibles
des personnes accueillies, de leurs familles et
des professionnels. Depuis 2002, les
inspecteurs des DDASS sont pourtant
assermentés. Mais quoi dire de ces
"inspections" prévues à l’avance, où ces
personnes ne vont voir que le directeur sans
aller consulter les dénonciateurs, les résidents,
des familles ou des professionnels autres que
ceux « choisis » par la Direction. Sans
consulter les registres officiels de
représentation du personnel ou du conseil
d’établissement aujourd’hui Conseil de la Vie
sociale…
- 3) Certaines structures ont peut-être plus de
contrats avec des sociétés de « peinture » ou
de « nettoyage de matériel » qu’elles n’ont de
volonté explicite de traiter le problème de la
- 28 -
maltraitance. Oh, bien sûr, on peut nous faire
remarquer que dans telle structure, une
formation est faite depuis peu. Mais nous
rétorquerons que c’est précisément dans cette
structure qu’ont lieu ces faits et
dysfonctionnements divers et que le personnel
salarié qui a osé les dénoncer est toujours, à
ce jour en procédure de licenciement ou fait
l’objet de diverses mesures d’intimidation de
la part de ces structures.
- 4) Si le « pus » de ces affaires n’est pas
correctement extrait, anéanti, la grande
souffrance des résidents et autres personnes
très perturbés par ces faits sera toujours
présente et bloquera irrémédiablement l’aide
(par le Travail des CAT, aide médicale,
éducative ou psychologique)
promise par ces établissements. Ainsi, la
finalité de ces structures sera-t-elle totalement
dévoyée malgré les bonnes apparences de
« peinture » et de « grande propreté ». Elles
résisteront, tenteront – peut-être - de se
redresser. Mais il n’en demeurera pas moins
que ces cicatrices recousues sans nettoyage
seront toujours comme un abcès qui laissera
sur les côtés des « chemins de la vie » le plus
« petits », les plus « écrasés » de nos
Personnes Handicapées.
- 5) Une personne licenciée (pour ces
dénonciations) doit pouvoir se défendre en
saisissant la justice. Donc avec l’aide d’un
avocat. qu’il faut payer. Or, les finances du
licencié vont fondre comme neige au soleil.
Au bout de quelque temps, il ne pourra plus
faire face à ces frais assez importants. Et,
faute de finances, il devra arrêter sa défense.
Tandis que la structure qui aura licencié peut
très bien faire durer le plaisir (avec l’accord
de son organisme gestionnaire…). Ses
finances proviennent des fonds publics
alloués par l’Etat ou le département.
Autrement dit, par ses impôts, le dénonciateur
(honnête) paie le couteau qui va l’égorge"
- 6) A l’heure actuelle, - à notre connaissance
– aucune grande association ne tient à
"enclencher" la proposition n° 26 faite par la
Commission Sénatoriale citée plus haut, à
savoir : "Engager une réflexion sur les
conditions dans lesquelles une association de
défense des personnes handicapées peut
assurer la gestion d’établissements sociaux et
médico-sociaux". Pourtant, la création d’une –
ou de plusieurs- association(s) non
gestionnaires(s) pourrait éventuellement
conduire à plus de liberté dans le respect et la
défense des personnes handicapées et de leur
famille et amis.
- 7) Tous ces constats, et bien d’autres en
découlant, nous font dire - encore et toujours
- que, d’une façon générale, notre pays ne
veut pas reconnaître la pleine citoyenneté de
TOUTE PERSONNE HANDICAPEE.
Merci de m’avoir écouté et, je l’espère
compris. Je laisse maintenant la parole à
François.
François BERGNIARD , Collectif des Démocrates Handicapés
Je serai assez bref pour vous parler du Collectif des Démocrates Handicapés qui est un mouvement
politique et qui est un des premiers mouvements qui a fait remonter au niveau des politiques du
sénat les problèmes de maltraitance. Pour nous, la personne handicapée est d’abord un citoyen à
part entière et si l’on considère que nous sommes citoyens, nous devons être traités de façon
correcte. J’ai entendu dans cette salle décrier le fait de maltraitance en institution, mais le problème
n’est pas le manque de personnel pour aider les personnes handicapées. Il s’agit d’un véritable
problème politique à savoir mettre les moyens adéquats pour gérer ces établissements et il en est de
même pour la personne qui vit chez elle. Il y a quelque temps, mon ami me disait qu’il devait se
coucher à 8h le soir car l’auxiliaire de vie a des horaires à respecter, il n’est donc pas libre. Il est
resté tout un dimanche, et ce n'était pas la première fois, dans son lit parce qu’il n y avait pas
d’auxiliaire de vie. Parmi les propositions que le candidat Jean-Christophe PARISOT a faites il y a
des propositions sur la maltraitance, par exemple la création d’un observatoire de la maltraitance
avec résultats donnés à l’ensemble des citoyens. Mettre les moyens financiers nécessaires pour que
dans les institutions il y ait assez de personnel comme dans d’autres pays d’Europe alors la
maltraitance aurait des chances de s’évanouir. Je terminerai en disant que la première maltraitance
vient des hommes politiques qui ne nous ont pas encore considérés comme des vrais citoyens
DEBAT :
Un intervenant :
Christian CARIOLA, Directeur d’un foyer d’accueil médicalisé et membre fondateur d’Alma 48
Je saisis l’opportunité qui m’est donnée de rebondir très rapidement.
Deux points m’interpellent : je voulais rebondir sur les propos de M . DUMOULIN qui dit que la
maltraitance s’arrête où commence la bienveillance. J’adhère tout à fait à ce point de vue sauf que
j’ai envie de dire, en tant que professionnel, que la bienveillance est relativement dangereuse. On a
tendance à considérer positive la bienveillance…(ou la bientraitance qui est un mot nouveau qui
apparaît dans le processus et à bientraitance on a ajouté bienveillance). Seulement la bientraitance a
tendance, quand on n’est pas bienveillant, à devenir très maltraitante parce qu’on va faire à la place
de et on va réfléchir à la place des autres sous prétexte qu’on ne veut pas être maltraitant. C’est un
peu comme l’extrême droite et l’extrême gauche, à force d’aller dans les extrêmes, on se rejoint.
Voici des exemples : l’histoire des protections, des couches, mais en terme de bientraitance, on dit
protection. Les couches, c’est un confort faramineux sauf quand la couche devient un élément qui
permet de pallier au manque de personnel, qui devient un élément pour calmer les professionnels et
on devient hyper maltraitant. C’est vrai que les maltraitances en institution existent, mais il y a
énormément d’institutions où les choses se passent bien et il serait intéressant d’élever le débat sur
le manque de personnel
- 29 -
Juste une anecdote qui permet de lier les maltraitances faites aux personnes handicapées et
personnes âgées. Il a été traité auprès de la Cour d’Assises de Rouen le cas dramatique de Léonie,
90 ans qui a étranglé sa fille qui était handicapée à 100%. Le jury dans sa grande clémence a
condamné à une peine de prison avec sursis.
Une intervenante :
On a parlé de maltraitance, mais je voudrais dire que certains médecins psychiatres traitent les
familles, qui viennent voir les malades, comme des moins que rien. Récemment, j’ai eu une affaire
et je ne vais pas laisser ça là.
Robert HUGONOT : Madame, vous avez raison car tous les corps de métier peuvent être
dénoncés.
Jean Jacques HOUDAYER : avec tout ce que j’entends, on ne va pas noircir le tableau. Nos
politiques, (moi je ne fais pas de politique) mais au lieu d’inventer le permis à points pourquoi ils
n’inventent pas la conscience professionnelle avec des points ?
Chaque point mérite débat et on a un peu dépassé cela aujourd’hui !
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"HANDICAPS ET MALTRAITANCES"
Missions institutionnelles
Présidence : Robert MOULIAS
14h20
Jean-Marie SCHLERET
Participation et citoyenneté : l'implication des communes
14h40
Paul BLANC
Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence,
le rapport de juin 2003 et ses suites
15h
Bruno FABRE
Agir sur le cœur institutionnel des établissements, promouvoir une vigilance partagée
15h30
Robert HUGONOT
Le développement d'ALMA France handicap
15h45
DEBAT
Conclusion
Jean-Jacques TREGOAT
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Robert MOULIAS, vice-président d'ALMA France :
Nous allons recommencer la séance et nous l’interromprons à l’arrivée du Ministre. Cet après-midi,
nous allons parler des missions institutionnelles. Si une personne se trouve par sa déficience,
incapable d’assurer un certain nombre de ses activités de la vie quotidienne, elle va être soit en
situation d’exclusion, soit elle va pouvoir bénéficier d’aides. A ce moment là, on a une emprise de
l’aidant sur la personne aidée et est-ce que la personne est préparée à avoir cette emprise sur
l’autre ?. Il va y avoir le problème de la disponibilité du personnel en quantité suffisante et en
qualité pour cette mission difficile. Est-ce que cette aide va aider la personne à sortir de sa
dépendance ou au contraire va l’enfoncer dans sa dépendance ?. L’objectif étant que la personne
puisse se passer de l’aide. Je laisse la place à M. le Ministre qui vient d’arriver.
Robert HUGONOT :
Monsieur le Ministre, nous sommes honorés par votre présence montrant votre intérêt pour ces
questions complexes et délicates. Je me présente rapidement pour vous dire qu’en 1973, Monsieur
Pierre LAROQUE m’a confié sa place comme Administrateur à la Fondation Nationale de
Gérontologie. Je salue la présence de Geneviève LAROQUE qui en est la Présidente actuelle. En
1987 quand s’est tenu à Strasbourg un colloque international sur les violences au sein de la famille.
J’ai été chargé de présider la commission "Violences contre les personnes âgées au sein de la
famille", j’ai découvert ce sujet qui avait déjà été étudié par les Norvégiens, les Suédois et les
Anglais . Nous avons décidé alors de révéler ces maltraitances invisibles en France. Nous avons pu
le faire avec l’aide de la Fondation locale et maintenant nous avons une fédération qui regroupe 52
antennes qui vont s’occuper en plus de la maltraitance des personnes âgées, de la maltraitance des
personnes handicapées.
Philippe BAS, Ministre délégué à la Sécurité Sociale, aux Personnes âgées, aux Personnes
handicapées et à la Famille
Merci Monsieur le Président HUGONOT de votre accueil et de ce bref aperçu historique de cet
engagement et de cette action qui sont au cœur de votre existence depuis de nombreuses années.
C’est une expérience dont je souhaite continuer à profiter.
Je suis heureux que vous ayez aujourd’hui cette Journée d’Etude dans cette salle Pierre Laroque du
Ministère de la Santé et des Solidarités sur la prévention de la maltraitance. C’est un sujet sur
lequel, depuis ma nomination dans ce ministère, j'exerce une grande vigilance.
Je vois un tel engagement des familles, bien sûr, mais aussi des personnels des maisons
médicalisées, que je ne veux pas évidemment jeter la suspicion sur la qualité, la générosité des soins
qui sont apportés aux personnes âgées…et pourtant, justement parce que je suis attentif à cette
qualité, je ne veux pas non plus laisser passer quoi que ce soit dans ce domaine et je ne veux pas
nier l’existence de ce phénomène à domicile comme en établissement.
Mais pour tout dire, c’est un problème de société qui est par nature caché parce que les violences ne
sont jamais publiques. Certaines personnes âgées souffrent en secret, en silence pendant des années
sans que personne ne s’en aperçoive vienne à leur secours. Par conséquent, je crois que
l’information est nécessaire et que c’est un préalable à une action efficace et une bonne prévention.
C’est la raison pour laquelle ce que vous faites en vous réunissant, en travaillant ensemble, les
idées, les pistes de réflexion, les recommandations que vous pouvez émettre, sont pour moi très
intéressantes.
Face à un phénomène caché, aussi insaisissable, il est tout de même bien difficile de trouver des
moyens d’action qui soient parfaitement pertinents. On voit bien qu’ils aillent relever de plusieurs
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types d’intervention; il doit y avoir une intervention d’urgence, pour faire cesser le mal quand il est
détecté. Il va y avoir une intervention qui va consister à essayer de détecter plutôt le mal qui reste
caché et puis une intervention plus globale qui va consister tout simplement à faire en sorte que la
qualité des services, des soins, de l’accueil dans les établissements se renforcent petit à petit : cela
suppose un effort quantitatif, un effort qualitatif et d’amener tous les responsables des personnels
sur le chemin d’une plus grande qualité, d'une bientraitance, qui dépasse les gestes techniques, les
gestes de soins, pour englober la nécessité d’une aide à la personne, aide affective, psychologique,
aide dans la lutte contre la solitude. Je fais régulièrement des sondages dans les maisons de retraite,
partout où je vais chaque semaine; des petits sondages qui me sont personnels. Je demande aux
aides-soignantes, après avoir vu les personnes âgées, qu’on me dise si les personnes âgées reçoivent
de la visite et je suis toujours frappé de voir que les réponses -ça vaut ce que ça vaut - se
ressemblent : entre un tiers et 50% des personnes âgées des établissements où je suis allé n’ont
jamais de visite. C’est vrai que l’isolement et la solitude, et pas simplement en maison de retraite,
mais à domicile, c’est sans doute forme de maltraitance la plus fréquente, ce que notre société
moderne réserve à ses aînés, ce qui est, par rapport à notre civilisation, une inversion complète des
comportements.
Alors Monsieur le Président, je suis heureux d’être parmi vous aujourd’hui pour cette journée du
réseau ALMA. Je voudrais rendre hommage au dynamisme avec lequel, depuis des années, vous
luttez en faveur des personnes âgées les plus fragiles.
Depuis 1990, vous avez su attirer l’attention des pouvoirs publics sur ce phénomène jusqu’alors
méconnu. Depuis cette époque, que de chemin parcouru. Je salue l’arrivée de Monsieur le sénateur
Paul BLANC que je retrouverai tout à l’heure au sénat pour discuter de la loi de financement sur la
Sécurité Sociale et j’aurai l’occasion de vous dire, Mesdames et Messieurs, que nous allons dans
cette loi de financement de la Sécurité Sociale faire des choses qui ne sont pas sans lien avec le
sujet de notre rencontre.
Le travail accompli jour après jour par le réseau ALMA est exemplaire. Je tenais à vous le dire et à
vous dire que je le sais. Je tiens à remercier les bénévoles qui, avec humilité, écoutent et
accompagnent leurs concitoyens qui souffrent. Ils sont plus de mille, et choisissent de suivre
régulièrement des formations, pour être plus efficaces. Ce sont des bénévoles qui ont un véritable
professionnalisme. Je veux souligner cette implication personnelle de chacun, qui donne toute sa
valeur à l’action menée. Avec des moyens jusqu’à présent modestes, Monsieur le Président, le
réseau ALMA est devenu une vraie réussite nationale, incontestable. Son action repose sur des
principes de vigilance et de respect des personnes. ALMA ne juge pas, ALMA n’accuse pas.
ALMA tente simplement de comprendre les raisons d’une violence, et de donner les moyens de la
faire cesser. Car la violence n’est pas une fatalité. Nous pouvons la combattre. Nous pouvons en
sortir. Votre association, c’est aussi une éthique : le secret, la confidentialité sans lesquels l’écoute
et le conseil seraient impossibles. Sans secret, point de confiance, et sans confiance, pas de
confidence; sans confidence, pas d’action possible car vous responsabilisez les personnes qui vous
appellent, en les aidant à faire elles-mêmes les démarches nécessaires, avec les Directions
départementales des affaires sanitaires et sociales, les Conseils Généraux, la Police, la Gendarmerie
et les services d’aide de proximité ou d’aide à domicile. Enfin, vous conduisez des actions de
sensibilisation et de formation continue que je veux saluer.
Ce matin, vous avez longuement abordé le problème de la prise de conscience de la maltraitance. La
société française s’est enfin emparée de ce débat. Je crois qu’il faut contribuer à le nourrir en
l’orientant vers l’action. Notre pays est aujourd’hui en train de briser un tabou. Je m’en réjouis et je
vous en félicite car cette évolution des mentalités, vous en êtes les précurseurs et les acteurs.
Lutter contre la maltraitance, c’est d’abord promouvoir de bonnes pratiques professionnelles. Je
laisse de côté sur ce point le problème spécifique de la maltraitance à l’intérieur des familles. Nous
devons développer une véritable culture de la bientraitance. C’est pour cela que j’ai décidé de créer
dès 2007 une Agence nationale de l’évaluation et de la qualité dans le secteur social et médicosocial. Pour permettre à tous nos établissements médico-sociaux d’évaluer leurs pratiques, avec une
grille extérieure et puis, entre deux évaluations, de pouvoir mesurer le chemin parcouru pour
- 33 -
l’amélioration de la qualité. Des dispositions législatives sont nécessaires et sont en ce moment
même en train d’être débattues au sénat. Cette Agence pilotera le processus d’évaluation et émettra,
en toute indépendance, des avis, des recommandations et des référentiels de qualité faisant autorité
parce qu’ils regrouperont les meilleures pratiques professionnelles au plan national. Cette Agence
mettra en synergie l’ensemble des acteurs et experts du secteur, au premier rang desquels la Haute
Autorité de Santé et la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie. La création de cette
Agence va de pair avec l’auto évaluation de chaque établissement pour mieux apprécier la qualité
de ses activités et de ses prestations, et les faire progresser. Cette culture de la bientraitance est
indissociable de la reconnaissance de la dignité et de la liberté de nos concitoyens âgés et
handicapés. J’ai voulu donner aux personnes âgées le libre choix de rester chez elles si elles le
souhaitent. J’ai voulu aussi que nous inventions la maison de retraite de demain, une maison de
retraite plus médicalisée, une maison de retraite plus humaine, plus ouverte sur son environnement
et qui sache aussi se faire l’auxiliaire du maintien à domicile en développant des services ouverts
sur l’extérieur. Pour donner aux personnes âgées le libre choix de rester chez elles, nous allons créer
6 000 places supplémentaires par an pendant cinq ans en services de soins infirmiers à domicile.
Le coût de ces places est plus important pour l’assurance maladie que celui des places en
établissements, c’est vrai. Mais il fallait répondre aux aspirations profondes de beaucoup de
Français.
Pour faciliter le maintien à domicile, il faut aussi développer l’hospitalisation à domicile. Le
nombre de places a été accru de 5 000 à 8 000 fins 2005. D’ici à 2010, ce nombre sera presque
doublé puisqu’il y aura 15 000 places en hospitalisation à domicile. Pour les personnes les plus
dépendantes, nous faisons aussi un effort très important pour les maisons de retraite. Nous allons
créer 5 000 places par an en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes,
2 125 places d’accueil de jour et 1 125 places d’hébergement temporaire.
Créer des places, c’est aussi renforcer les moyens en personnel. Notre effort d’investissement se
traduit très directement par la création de près de 20 000 emplois dans le secteur médico-social, en
plus du remplacement normal des départs en retraite, au total 40 000 recrutements par an pendant
dix ans pour les personnes âgées : 400 000 recrutements en 10 ans. Je compte aussi sur les services
à domicile. Je veux mettre à profit le renouvellement des conventions tripartites avec les maisons de
retraite médicalisées pour augmenter les personnels. Et surtout aujourd’hui, vous savez que les
dotations des établissements ne bougent pas pendant la durée de la convention tripartite qui est de 5
ans, ce qui est une éternité, face à l’accélération de la dépendance liée à la situation démographique
dans laquelle nous nous trouvons (doublement en 10 ans des plus de 85 ans qui vont passer
d’1.100.000 personnes à 1.900.000 personnes), il faut donc vraiment mettre les bouchées doubles.
Le plan Solidarité Grand Age est quantitativement très ambitieux pour les créations de places. Il est
très ambitieux aussi pour les crédits qui vont permettre d’ajuster les moyens des maisons de retraite,
année après année, à l’évolution des besoins des résidents dont la dépendance s’aggrave mais
naturellement, tout ceci prend un petit peu de temp. En 2012, le plan prévoit qu’il y aura pour les
personnes les plus dépendantes un professionnel pour une personne âgée accueillie. Voilà un gros
effort naturellement qu’il va falloir là aussi poursuivre.
Mais lutter contre la maltraitance, c’est aussi renforcer la prévention.
Pour mettre en œuvre toutes ces décisions, j’adresse dans les prochains jours une instruction
générale à la Direction Générale de l’Action Sociale, à la Caisse Nationale de Solidarité pour
l’Autonomie et à tous les Préfets ainsi qu’aux chefs des services déconcentrés du Ministère des
Affaires Sociales. Cette instruction comprend des mesures très concrètes sur le signalement,
l’écoute, les contrôles et la qualité. Je veux maintenant vous exposer brièvement le contenu de cette
instruction, les financements qui seront mobilisés pour son application. Au niveau national, je veux
mener une lutte globale contre la maltraitance qu’elle concerne les personnes âgées ou les personnes
handicapées.
J’ai décidé de nommer Mme CHARRETIER-JACQUET en qualité de chef de projet national pour
mettre en œuvre cette politique de lutte contre la maltraitance. Je souhaite dans un délai très bref
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Que nous réussissions à étendre à l’ensemble du territoire le réseau d’accueil téléphonique, avec
vous et avec les autres organisations qui s’impliquent dans cet accueil téléphonique.
Aujourd’hui, seuls 55 % des départements bénéficient d’une antenne spécialisée et d’une capacité
de médiation sur ce sujet, grâce au réseau ALMA, même si des regroupements existent déjà entre
plusieurs départements. Vous me l’avez récemment écrit, Monsieur le Président, en me demandant
que cette généralisation prenne en compte le maillage national, qu’elle se fasse dans le bon ordre et
en veillant à ce que les responsables qui en prendront la charge soient bien formés car vous préférez
mettre un peu plus de temps parfois, mais être sûrs de la qualité de la prestation que vous assurez en
faveur des personnes âgées. J’ai bien compris votre message. Cela ne m’empêche pas, mais je crois
que vous partagez ce souci, de vouloir que nous puissions avoir un maillage aussi proche que
possible du terrain, car c’est toujours mieux, avant la fin 2007.
Douze départements supplémentaires doivent bénéficier d’une antenne locale, 17 en 2008 et 16 en
2009.
Ce maillage national permettra non seulement de mieux repérer les cas de maltraitance, mais
Aussi grâce à une plus grande proximité, d’être plus efficace pour y remédier. Au niveau local, je
veux mieux coordonner les actions. Pour améliorer le signalement, je vais nommer, dans chaque
Direction départementale des affaires sanitaires et sociales, un correspondant unique sur les
questions de maltraitance.
Un protocole de signalement et de traitement des situations de maltraitance sera conclu avec chaque
établissement. Enfin, pour favoriser la prévention, nous allons intensifier les inspections dans les
établissements. Dès l’année prochaine, leur nombre va doubler. Il faut que les professionnels
Soient les premiers acteurs de la lutte contre la maltraitance. Ils le sont d’ailleurs déjà dans leur
quasi-totalité.
Je tiens en effet à dire que les personnels des établissements médico-sociaux ont un engagement, un
dévouement et une implication remarquables auprès des personnes âgées, avec une générosité dont
je suis chaque semaine le témoin sur le terrain. Et les cas de maltraitance se rencontrent davantage à
domicile qu’en établissement. Mais chaque cas est un cas de trop. C’est pourquoi je veux agir avec
fermeté contre ces pratiques, à domicile comme en établissement. Pour cela, je vais d’abord
renforcer la formation des personnels et inscrire ce volet de la lutte contre la maltraitance dans le
plan de formation de chaque établissement.
Des accords cadres vont être signés l’année prochaine avec les organismes paritaires collectifs
agréés pour lancer des actions de formation ciblées sur la sensibilisation et la prévention de la
maltraitance. Nous veillerons à offrir en cas de besoin un soutien psychologique à chaque
professionnel, dans le respect des règles de confidentialité.
Nous recourrons aussi systématiquement, dans un souci de protection maximale des personnes
âgées, à la procédure de suspension des agents, en cas de faits avérés. Et un contrôle des suites
données aux recommandations de l'inspection sera mis en place. Enfin, je veux inclure la lutte
contre la maltraitance dans une démarche d’amélioration de la qualité. Pour les établissements
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, le renouvellement des conventions tripartites est
une bonne occasion de renforcer la dimension qualitative, en prenant mieux en compte le niveau
réel de dépendance de chaque résident, et leur évolution dans l’attribution des moyens en personnel.
Les moyens financiers dégagés sont à la hauteur de ces enjeux. Ce sont au total deux millions
d’euros qui, en trois ans, seront alloués spécifiquement à la lutte contre la maltraitance, pour les
antennes, la professionnalisation du réseau et une campagne d'information sur le numéro d'appel.
L’année prochaine, je soutiendrai la journée mondiale qu’ALMA organise sur la prise de
conscience de la maltraitance des personnes âgées. J’ai par ailleurs demandé une étude détaillée,
avec les différents services concernés, pour approfondir notre connaissance du phénomène de la
maltraitance, et pour en finir avec les non-dits : la fréquence de ce phénomène, les facteurs de
risque, mais aussi les réactions des victimes.
Vous avez fait œuvre de pionnier. Au fil des années, courageusement, vous avez su mettre en pleine
lumière un problème de société important. Vous avez ainsi contribué à briser un tabou. Je voudrais
à nouveau vous en remercier et vous en féliciter. Vous en remercier, car le premier facteur de la
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maltraitance, ou plutôt de la persistance d'une situation de maltraitance, c’est l’ignorance. Je veux
vous en féliciter, car ce que vous avez accompli est exemplaire. C’est pourquoi je souhaite que nous
continuions à travailler ensemble, en étroite collaboration pour gagner encore en efficacité. Et pour
tout ce qui reste à accomplir, je tiens à vous dire que nous serons à vos côtés.
Je vous remercie.
Robert MOULIAS, vice-président d'ALMA France :
Nous sommes heureux de ces bonnes nouvelles et nous allons reprendre le cours de nos travaux.
Les institutions qui vont avoir à s’occuper de personnes handicapées ou de personnes âgées
handicapées qui vont employer du personnel qu’il ne faut pas comprendre avec ce personnel de
compensation , le personnel de service à la personne banal. Il y a besoin pour la compensation du
handicap de qualification particulière car ces personnes vont devoir s’occuper de personnes
vulnérables, en particulier quand il s’agit de handicap mental ou de situations de syndromes
démentiels. Ce personnel doit avoir une qualification et une formation et doit prendre en compte la
dignité de la personne humaine ; cette dignité ne pouvant être altérée par une déficience
quelconque. On doit s’occuper de la personne quelle que soit la gravité de la déficience. Valoriser la
personne et l’identité de la personne valorisera aussi le personnel car je crois que ce duo est à
valoriser en tant que tel. Cela favorise aussi la noblesse de ces métiers. Mais ceci va être traité de
façon plus précise par les différents orateurs et le premier va être Jean-Marie SCHLERET.
Jean-Marie .SCHLERET, Président du Conseil National Consultatif des Personnes
Handicapées (C.N.C.P.H.)
PARTICIPATION ET CITOYENNETE : L’IMPLICATION DES COMMUNES
Je me suis rendu compte après avoir entendu les très intéressantes communications de ce matin,
qu’il fallait dans un domaine pareil avoir beaucoup d’humilité mais ne jamais dissocier les
responsabilités que l’on peut avoir sur le terrain et celles qu’on exerce nationalement parlant. Il
se trouve que je suis un peu à la conjonction des deux à la fois Président du C.N.C.P.H. ; c’est
un conseil qui a été complètement transformé depuis 2002 ; c’est près de 80 personnes et 45
associations, les organismes payeurs et les collectivités, mais aussi les organisations syndicales,
les organismes de recherche et les 22 ministères. C’est dix plénières dans l’année, de très
nombreuses commissions thématiques, donc une masse de travail considérable depuis que la loi
du 11 février 2005 qui porte à son titre deux contributions majeures du CNCPH, je ne parle pas
des personnes handicapées, la loi de 1975 déjà l’évoquait sauf que c’était une moi en faveur de.
La, nous sommes sur les droits et l’égalité des chances, mais les deux contributions, c’est
participation et citoyenneté. Là, on est déjà au cœur de la question mais aussi ne pas me départir
de ma fonction d’élu local, et c’est vrai que c’est le titre de mon intervention. Les communes,
les maires et les intercommunalités sont au cœur de l’application d’une loi pareille qui est une
loi de transformation profonde de la société. C’est au cœur de notre pacte républicain et il y a là
des enjeux considérables. L’élu de territoire, le maire à fortiori est au cœur de l’application.
Il ne suffit pas d’avoir une belle loi de 101 articles, il faut derrière pouvoir aller de l’avant.
C’est vrai que les communes ayant l’obligation d’appliquer l’article 46 de la loi du 11 février
qui leur impose une commission communale d’accessibilité, voire une commission
intercommunale. Les propositions doivent passer chaque année au conseil municipal. Les
maires ont là des obligations mais ils n’ont pas attendu pour se préoccuper de ces questions et
quand il y a des intercommunalités, il y a la question des espaces publics et de l’habitat, mais
aussi les transports et la voirie. Les transports, ce n’est pas seulement l’accessibilité des
matériaux roulants. Il n y a plus de PMR (personne à Mobilité Réduite) dans la loi ; il y a des
personnes handicapées avec des types différents de handicaps. Or dès qu’on parle PMR, on
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pense fauteuil et quelque part, on chosifie les choses et ce n’est pas acceptable. Tous les types
de handicaps sont pris en compte, ce qui veut dire le matériel (500 000 €) pour un bus. La SNCF
qui n’est malheureusement jamais la première à aller de l’avant fait que le nouveau TGV est
n’est pas conforme malgré son coût avec la loi du 11 février. La SNCF a expliqué qu’il lui faut
5 ans.
Il y a deux façons de voir l’accessibilité : l’accessibilité matérielle et les attitudes, tout ce qui
doit accompagner. Nous pensons à des formations et de la sensibilisation de conducteurs de
véhicules publics.
Les maires doivent s’occuper en premier lieu de leur propre mairie, à continuer par leurs écoles
et les conseils généraux par leurs collèges et les lycées par rapport aux régions mais aussi tout
ce qui est équipement sportif, musées…et ce n’est pas simple car il y a des délais, des décrets et
arrêtés.
N’oublions pas que nous entrons en année électorale, ce qui suppose aussi des équipements au
niveau des bureaux de vote et c’est une obligation pour toutes les communes. La loi prévoit
dans son article 71, que dorénavant des majeurs placés sous tutelle peuvent voter si le juge des
tutelles en décide ainsi. On avait avant des choses calamiteuses qui se passaient : des personnes
se voyaient adresser un courrier par le maire de la commune « vous êtes placé sous tutelle et de
ce fait, vous êtes rayés des listes électorales. Vous imaginez les conséquences pour la personne
et pour la famille. En septembre 2005, un juge a accordé le droit de vote à une personne
handicapée mentale se fondant sur la fait qu’elle votait depuis l’âge de 18 ans et qu’il n y avait
pas lieu au motif qu’elle venait d’être placée sous tutelle de lui retirer le droit de vote.
Je suis allé également voir de quelle manière on s’occupait de la lutte contre les discriminations.
J’étais intervenu autour des questions de maltraitance ; j’avais en particulier évoqué des
éléments concernant l’isolement qu’on retrouve deux fois plus souvent chez les personnes
handicapées aux mêmes âges que les personnes âgées. De la même manière, trois fois moins de
visites de familles chez les personnes handicapées. On peut toujours dire que la personne
handicapée n’ayant pas fondé de famille par définition en a moins mais il faut vraiment veiller à
cela. Puis tout ce qui concerne les grands domaines de la vie quotidienne : le logement, les
transports, culture, loisirs…ce sont des champs tout à fait favorables à des formes de
discrimination par rapport auxquels les maires doivent veiller. On a vu dans cette fameuse
enquête HID (Handicaps Incapacité Dépendance) où il apparaissait que plus d’un million de
personnes vivant en milieu ordinaire ont des difficultés pour accéder à leur logement. Dès qu’on
prend de l’âge et qu’on a été imprudent pour construire un pavillon avec plein de marches et il
arrive un moment où ça ne va plus. 580 000 personnes déclaraient vivre « confinés ». sur cet
aspect, les communes ont une obligation particulièrement par rapport aux établissements
recevant du public mais aussi par rapport à l’accès au logement et dans le rapport annuel des
commissions d’accessibilité devra figurer l’état d’avancement des logements accessibles aux
personnes handicapées dans le parc public que privé. Il y aura donc de l’adaptation à faire en
profitant des rénovations.
Parmi les autres aspects, je pense à la culture, accès physique aux musées et salles de spectacles.
Il y a aussi tout la démarche qui consiste à savoir donner l’opportunité à des personnes
handicapées de participer à des actions culturelles et festives. C’est très important pour la
personne mais aussi pour la ville en terme de lien social.
Pour ce qui est dans la collectivité aussi, on voit bien qu’à partir du moment où ce « vouloir
vivre ensemble » est mis en œuvre, ce n’est pas un service que l’on rend aux personnes
handicapées ; c’est un service au quartier, un service à la ville. Il ne s’agit pas uniquement de
valoriser ce qui peut apparaître comme élément électoral. Dans ces périodes électorales, certains
maires ouvrent le contact avec les personnes handicapées pour les voir apparaître sur leur liste.
Et plus le fauteuil est imposant et mieux c’est !
Je souhaite terminer par quelque chose de plus personnel encore, car les communes qui veulent
imprégner leur ville de cet esprit d’ouverture et d’acceptation des différences en reviennent à la
symbolique de la place. La place, c’est le lieu du contact, c’est le lieu où s’échange le regard qui
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peut être bienveillant ou non. Au-delà, ce peut être de l’entraide et véritablement du partage, et
surtout celui de la fraternité vécue au sein d’une ville. Je vois bien quand je traverse des espaces
commerciaux ou aux caisses avec ma fille qui a maintenant 22 ans, les regards ne sont pas
toujours bienveillants. Ce sont souvent des regards gênés qui montrent qu’on a énormément de
chemin à parcourir. Dans cette idée du « vous c’est nous » il n y a pas de différence
fondamentale. Cela me fait penser à la phrase du petit Théo qui disait : « je n’ai pas besoin
d’être intégré car je suis comme les autres ». En évoluant, ce n’est pas un service qu’on rend à la
personne en acceptant la différence mais c’est un service qu’on se rend à soi-même. Chacun a
beaucoup de choses à apporter et que chacun puisse contribuer à l’avancée de tous.
C’est le message que je voulais faire passer aujourd’hui et je vous remercie.
Robert MOULIAS, vice-président d'ALMA France :
Merci de cette avancée dans la politique de la ville. J’étais très heureux d’entendre le mot
« fraternité » revenir. Je laisse la place au sénateur Paul BLANC.
Paul BLANC, Maltraitance envers les personnes handicapées : Briser la loi du silence, le
rapport de juin 2003 et ses suites
Bonjour à tous, nous allons commencer par le premier point :
1) A MOYEN ET LONG TERME ENGAGER UN PROCESSUS DE CONVERGENCE DES
DISPOSITIFS « DEPENDANCE » ET « HANDICAP »
La loi du 11 février 2005 a pris l’engagement de supprimer, dans un horizon de cinq ans, toute
distinction en matière de compensation et d’aide sociale à l’hébergement, entre personnes
handicapées en fonction de l’âge.
Un critère d’âge conduit en effet aujourd’hui à distinguer deux régimes conçus en réponse à des
situations-types contrastées :
- Le système destiné aux personnes âgées est conçu en réponse à des situations qu’on a
considérées comme caractéristiques du grand âge et relativement homogènes : pertes plus ou
moins progressives de facultés physiques, mentales, sensorielles, associées bien souvent à
une polypathologie, espérance de vie limitée, sociabilité installée, liens familiaux, droit à
pension de retraite et éventuellement patrimoine déjà constitués. Ce cadre correspond à des
situations réelles relativement fréquentes. Il est même conçu pour répondre à un sort si
commun qu’il constituerait pour chacun un horizon prévisible : les solidarités nationales et
de proximité s’exercent en effet pour ces personnes dans un cadre étroitement délimité,
laissant à la charge de l’intéressé et des solidarités familiales une part importante des frais
entraînés par la perte d’autonomie.
Un accord peut se faire aisément sur l’adéquation très relative d’une personne de 60 ans à
cet « idéal-type » aujourd’hui. L’âge de 60 ans, qui caractérisait en général l’arrivée à la
retraite, est depuis longtemps dissocié de la survenue d’incapacités, et sera même de moins
en moins celui de l’arrivée à des droits à pension à taux plein. Un état de santé
correspondant à ce tableau, de plus en plus inhabituel voire exceptionnel avant 75 à 80 ans,
dénote autour de cet âge une situation qu’on sait particulièrement mal distinguer de celle du
handicap. Quant à l’espérance de vie à 60 ans, elle est, pour les femmes, de 27 ans et pour
les hommes, de 23 ans.
- Le système destiné aux personnes handicapées répond à une gamme plus hétérogène de
situations, évaluées par des outils multidimensionnels. Il ne s’arrête pas sur un « idéal-type »
unique. Il se situe dans la perspective dynamique d’un projet de vie, tient compte de
l’environnement de la personne et de ses besoins pour soutenir son insertion sociale, ne
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préjuge ni de son âge ni de ses ressources, ni de ses relations familiales, et se fonde sur
l’idée que, pour l’intéressé et sa famille, le handicap est un malheur, rare, imprévisible, qui
justifie le rassemblement solidaire de la société autour de ceux que ce malheur atteint.
La dualité de systèmes et l’appartenance à l’un ou l’autre régime selon un critère d’age posent
donc des problèmes incontestables de frontière et d’équité.
On voit bien toutefois que le système le plus universel dans son objet, celui du handicap, n’est
supportable par la société et les collectivités publiques que dans la mesure où il demeure réservé
à des situations exceptionnelles (ceux que le malheur du handicap a frappés, identifiés
aujourd’hui assez artificiellement par ce critère d’âge). C’est bien principalement la crainte
d’une charge excessive qui empêche d’envisager une levée brutale de la barrière d’âge : si les
collectivités publiques devaient apporter une aide aux personnes âgées dépendantes selon les
conditions réservées aux personnes handicapées, sans que l’ensemble de la situation soit
revisitée, leurs charges globales subiraient certainement une augmentation importante, voire
démesurée, dont l’ampleur ne peut toutefois pas être appréhendée de façon précise aujourd’hui.
Plutôt que de raisonner en fonction des coûts et des charges de différents scénarios, exercice
utile pour éclairer la décision mais qui demande des moyens et du temps, la mission a
simplement choisi d’approfondir quelques modalités de cheminement possible pour faire
converger les deux systèmes destinés aux personnes en perte d’autonomie.
En effet, autant les deux systèmes différent par leurs cibles, autant ils se rapprochent par
beaucoup de modalités concrètes, sur le terrain desquelles des convergences sont possibles.
Dans cette perspective, la mission a dégagé quatre pistes, qui sont autant de chantiers de travail
qu’elle propose de lancer rapidement, de façon à réunir avant la date fixée par la loi du 11
février 2005, à savoir à l’horizon 2010 l’ensemble des éléments nécessaires à une décision de
suppression de la barrière d’âge.
1.1)
FAVORISER AU NIVEAU LOCAL UN RAPPROCHEMENT DES INSTITUTIONS
ET DES DISPOSITIFS DESTINES AUX PERSONNES HANDICAP2ES ET AUX
PERSONNES AGEES
Le double dispositif français pour les personnes âgées et pour les personnes handicapées a
donné naissance à des institutions et à des procédures dédiées à l’une et l’autre politique qui
demeurent parallèles mais ont de nombreux points de convergence. Un rapprochement entre ces
institutions et ces procédures pourrait être envisagé dans un avenir proche car les collaborations
qu’il suppose sont relativement aisées à mettre en place et de nature à développer les échanges
entre les cultures des milieux du handicap et de la gérontologie.
Le dispositif destiné aux personnes handicapées dispose d’un outil très complet, qui rassemble
l’essentiel des leviers nécessaires à la prise en charge des personnes concernées : il s’agit des
Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH). Il est intéressant de noter que la
loi n’a pas défini leur champ d’intervention en fonction d’une quelconque catégorie d’âge.
Ces maisons ont d’abord une fonction d’information et d’animation générale des politiques.
Dans le domaine des aides techniques, elles constituent dans aucun doute le lieu ressources le
plus complet, et ce pour tous les âges de la vie.
Elles assurent également le fonctionnement des Commissions des Droits et de l’Autonomie des
Personnes Handicapées (CDAPH). Or les décisions individuelles que prennent ces
commissions ne sont pas toutes limitées par un critère d’âge. Si c’est le cas pour l’Allocation
aux Adultes Handicapés (AAH), il en va autrement pour l’attribution de la carte d’invalidité et
des cartes de priorité(station debout pénible » de même que pour les décisions de
Reconnaissance du Travailleur Handicapé (RTH) et les aides liées à une activité professionnelle
(demandes qui deviennent certes rares avec la progression en âge mais sont encore accordées
après 60 ans. Les CDAPH ont enfin à connaître des situations de personnes handicapées de plus
de 60 ns hébergées dans un établissement pour adultes handicapé. Ainsi les CDAPH ont-elles de
fait pour usagers des personnes de tous âges.
- 39 -
Ce sont également les MDPH qui organisent les équipes pluridisciplinaires chargées de réaliser
l’évaluation de la situation des demandeurs et de proposer des plans d’aide aux commissions.
Elles rassemblent ainsi tout l’appareillage et toutes les compétences techniques mobilisées pour
instruire les décisions et animer les politiques locales du handicap.
Par contraste, l’appareillage technique et les compétences nécessaires pour instruire les
décisions et animer la politique départementale à l’égard des personnes âgées apparaissent plus
dispersées et plus ou moins étoffés selon les localisations.
Ainsi, les équipes médico-sociales qui évaluent la situation au regard de l’Allocation
Personnalisée d’Autonomie (APA) et proposent des plans d’aide au décideur relèvent du
Conseil général. Elles sont souvent limitées à deux ou trois professionnels et peuvent n’avoir
d’équipe que le nom, quand un seul professionnel de santé ou travailleur social assure le contact
avec l’auteur d’une demande ou sa famille.
Mis en place dans un premier temps par l’Etat, les Centres Locaux d’Information et de
Coordination (CLIC) relèvent depuis 2000 des conseils généraux qui ont hérité d’un parc à
géométrie variable composé d’institutions qu’ils ont également pris en main de façon inégale.
Cependant, certains d’entre eux se sont étoffés, fonctionnent de façon satisfaisante et abritent de
surcroît une équipe médico-sociale d’évaluation. Ces centres remplissent alors, sur un territoire
d’étendue infra-départementale et pour une clientèle d’usagers particulière, des fonctions en
partie parallèle (information, coordination et éventuellement évaluation) et en partie
complémentaires (puisqu’il revient aux CDAPH d’attribuer des avantages qui peuvent être
demandés pour cette clientèle) à celles des MDPH.
Devant ce panorama institutionnel, l’existence d’un double dispositif peut apparaître comme
une source de complication et de perte d’efficacité. On peut bien sûr admettre qu’en l’état actuel
des cultures, radicalement différentes entre le monde du handicap et celui de la gérontologie,
l’existence de deux réseaux peut offrir quelques garanties de compétence dans chacun des deux
domaines.
Mais lors de la création des MDPH, les acteurs locaux ne s’y sont pas trompés. Dans la pratique,
une grande partie des départements a commencé à rapprocher les dispositifs personnes âgées et
personnes handicapées. L’étude que l’Observatoire de l’Action Sociale Décentralisée (ODAS)
vient de réaliser auprès des départements sur la mise en place des MDPH montre qu’une large
majorité (plus de 50 sur 80 répondants) envisagent une articulation entre MDPH et CLIC ou
entre équipes médico-sociales et équipes pluridisciplinaires. Parmi les avantages d’un
rapprochement, on notera celui d’une meilleure diffusion territoriale : rayonnant sur des
territoires infra-départementaux dont ils sont en général bons connaisseurs, les CLIC peuvent
apporter aux MDPH des facilités pour installer les antennes de proximité dont toutes les
personnes intéressés ont besoin. Dans certains sites visités par la mission, le travail en commun
amorcé par les équipes des deux secteurs leur ont fait réciproquement découvrir des savoir-faire
utiles et permis d’amorcer des projets en commun, notamment en relation avec les problèmes
rencontrés par les personnes handicapées vieillissantes.
Par ailleurs, des procédures parallèles sont prévues et rendues obligatoires par les textes en ce
qui concerne l’élaboration et la validation de stratégies à moyen terme dans les deux secteurs :
- des schémas gérontologiques départementaux sont arrêtés depuis plusieurs décennies par les
présidents de conseil généraux en concertation avec les préfets
- des schémas départementaux du handicap, plus récents, ont également vu le jour suivant la
même configuration.
L’étude précitée de l’ODAS montre une évolution moins avancée mais intéressante s’agissant
de ces différents schémas : seuls quatre départements ont déjà organisé une mise en commun du
travail d’observation réalisé à l’occasion de l’élaboration et de l’adoption des schémas handicap
et vieillesse. Dans les schémas handicap en cours d’application ou en cours d’élaboration, la
question du vieillissement des personnes handicapées est toutefois systématiquement abordée,
avec une volonté de diversifier les propositions d’accueil et de promouvoir les innovations
intéressantes.
- 40 -
Ces évolutions semblent correspondre à une orientation prise spontanément par les équipes
locales qui ne peuvent qu’être encouragées et soutenues. Elles correspondent également à la
lente évolution des prestataires de service.
Ces collaborations directes entre institutions et ces coopérations en matière de stratégie à moyen
terme contribuent à une salutaire confrontation avec des réalités de terrain. Les représentations
que chacun se fait de l’autre secteur peuvent évoluer. A terme, on peut dans ces conditions
projeter la constitution d’un large réseau technique, comprenant un panel de compétences
diversifié et les spécialisations nécessaires. Les plus importantes difficultés immédiates
pourraient se rencontrer dans les départements où aucune politique active de liaison et de
coordination dans le secteur des personnes âgées n’a encore été mise en place.
1.2)
PREPARER UNE EVOLUTION DES REFERENTIELS ET DES GRILLES
D’EVALUATION
Pour cadrer les décisions d’attribution des prestations comme pour construire les plans de
compensation et d’aide, dans le secteur personnes âgées comme dans le secteur handicap, il est
fait appel à des référentiels qui ont valeur réglementaire, ainsi qu’à des grilles (questionnaires)
utilisés en appui à l’évaluation des situations individuelles. Il s’agit certes d’instruments
techniques complexes, mais leur conception générale, brièvement rappelée, répond à des
objectifs différents qui ne sont pas exclusivement techniques.
Les deux systèmes ont été conçus en se référant à la classification internationale du handicap. Ni
l’un ni l’autre n’étant destiné à établir des constats fondés sur l’appréciation d’une déficience.
Ils cherchent à définir les moyens d’aide qui doivent être offerts aux personnes souffrant de
difficultés pour accomplir des activités de la vie quotidienne et sont donc fondés sur des
questionnaires très proches dans leur conception, qui décrivent dans les deux cas ce que peut ou
ne peut pas faire une personne, avec ou sans aide, et en déduisent des droits et des modalités
d’intervention.
Cependant, les objectifs visés dans la construction des grilles diffèrent. Les dispositifs s’insèrent
en effet respectivement dans les conceptions globales de la dépendance ou du handicap qu’on a
brièvement exposées plus haut.
La première de ces grilles est la grille AGGIR, utilisée dans le cadre de la dépendance des
personnes âgées. Elle sert à la fois de grille d’analyse des besoins et de référentiel pour l’accès à
un niveau de prestation (l’APA). Elle permet d’élaborer des scores globaux permettant
d’apprécier la lourdeur du handicap d’une personne, d’apprécier son éligibilité à une prestation
et de détermine le montant des aides auquel son niveau de dépendance ouvre droit. C’est un
instrument compact dont la conception illustre bien le point de vue qui a été adopté sur la
dépendance et qui prévaut sitôt qu’il s’agit d’une personne de plus de 60 ans : les difficultés
auxquelles il s’agit de faire face seraient caractéristiques de grand âge et relativement
homogènes. Il constitue en outre, par son système de classement un outil d’usage aisé pour
réaliser des travaux prévisionnels.
Le référentiel associé à la grille AGGIR et son application ont fait l’objet de plusieurs études.
Celles-ci montrent que l’outil, bien implanté, pourrait utilement être amélioré, en particulier par
l’adjonction d’un outil multidimensionnel à la grille existante.
Dans le secteur du handicap, le référentiel utilisé identifie des critères qui donnent accès ou non
à une forme de compensation (attribution de la Prestation de Compensation du Handicap (PCH),
mais aussi de l’AAH, d’aides à l’insertion professionnelle, orientation vers un établissement). Il
existe par ailleurs un guide d’évaluation qui vise à facilite un examen complet de la situation de
la personne et à amorcer la construction du plan d’aide. Ni le référentiel ni le guide d’évaluation
ne sont conçus pour permettre de construire un score ou de classer une personne dans un groupe
ou sur une échelle de handicap. Le contenu et le montant des aides sont définis indépendamment
d’un tel classement.
L’élaboration du guide d’évaluation a fait l’objet d’un important travail et de tests nombreux au
cours de l’année 2005 et au début 2006. Il devait être largement diffusé à partir de fin 2006. Son
- 41 -
utilisation en routine est prévue pour faire l’objet d’un suivi en vue d’adaptation éventuelles. Le
travail qui a été parallèlement réalisé sur le système d’information des MDPH et de la Caisse
Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA) doit également déboucher à la fin de cette
année 2006 et faciliter ce suivi.
Au total, on peut considérer que les deux systèmes de référence et d’évaluation sont appelés à
évoluer. Des appréciations sur les différentes qualités attendues de tels systèmes et des
expérimentations sont prévues en vue de modifications raisonnées et prudentes.
En revanche, il n’est pas prévu jusqu’ici de simuler (à titre d’étude ou de recherche) quelles
seraient les conséquences d’une généralisation de l’une ou l’autre de ces grilles. Rien, à priori,
ne s’y oppose. Or, savoir combien il en coûterait aux collectivités publiques d’appliquer aux
personnes de plus de soixante ans le même régime qu’aux moins de soixante ans aiderait le
décideur public à se prononcer sur un simple déplacement de la barrière d’âge (en la situant par
exemple à 70, 75 ou 80 ans, qui sont des âges plus significatifs au regard des processus de
vieillissement observés que l’âge actuellement retenu).
Il pourrait également être intéressant d’étudier une restructuration des systèmes existants
permettant d’inclure un système dans l’autre, en considérant que la situation des personnes
âgées dépendantes n’est plus un cas particulier parmi une multitude de situations de handicaps
possibles.
Qu’on veuille appliquer à des personnes ainsi identifiées un régime particulier de droits et de
prestations peut se justifier pour des raisons diverses sur lesquelles on sera aMenés à revenir.
Mais dans ce cas, il convient d’identifier, mieux qu’au moyen d’un seul critère d’âge, les
situations auxquelles ce régime particulier est susceptible de s’appliquer.
La mission suggère qu’une réflexion soit entreprise sur les possibilités techniques de juxtaposer
un tronc commun de références pour l’accès au droit à compensation (ce qui serait plus
satisfaisant que la situation actuelle, au regard du principe d’universalité du droit à
compensation) et des questions filtres permettant de répartir les personnes ayant droit à
compensation entre plusieurs régimes, dont un régime applicable aux personnes âgées
dépendantes. L’enjeu d’une réflexion de ce type est de formalise des critères qui derrière une
notion d’âge peu adaptée, définissent la ou les situations particulières auxquelles le législateur
entend réserver un traitement particulier.
1.3)
PROGRESSER VERSUNE HARMONISATION DES PRESTATIONS, DES PRISES
EN CHARGE ET DES TARIFS
Du fait de la dualité des systèmes, les prestations, les tarifs et les conditions d’accès aux
différents types de prise en charge appliqués aux personnes handicapées et aux personnes âgées
diffèrent de façon souvent inutilement compliquée, aussi bien pour les personnes concernées
que pour les prestataires et les financeurs. Dans la perspective d’une convergence, ces disparités
doivent être traitées chaque fois que c’est possible. En tout état de cause, une harmonisation est
de nature à simplifier la gestion de toutes les instances qui ont à traiter de ces sujets (depuis les
administrations jusqu’aux prestataires de services)
La mission n’a pas fait une liste complète de ces disparités. Aujourd’hui, alors que les CDAPH
se mettent en place, que la PCH n’est pas encore rôdée, les acteurs opérationnels n’ont pas
encore fait le tour des interrogations que peuvent susciter les modalités d’application comparées
de la loi de 2001 sur la dépendance des personnes âgées et de la loi Handicap de 2005.
Deux types de disparités, qui ne demandent pas le même de traitement, sont cependant
repérables.
Certaines divergences entre système du handicap et système de la dépendance découlent de la
volonté même du législateur ou de l’autorité réglementaire et correspondent à des options
fondamentales.
Ainsi, dans le cadre de l’APA (Allocation Personnalisée à l'Autonomie) en établissements, le
législateur a voulu soulager partiellement les personnes âgées de la charge de leur hébergement tout
- 42 -
en maintenant le principe d’un financement de cet accueil à titre principal par les personnes ellesmêmes ou par leur famille, estimant que la prise en charge de ces frais devait au moins en partie
relever de la prévoyance individuelle, chacun étant susceptible d’être confronté un jour à la
dépendance liée au vieillissement. S’agissant des personnes handicapées, le législateur a fait le
choix exactement inverse : ainsi, la participation des personnes handicapées au financement de leur
hébergement relève de l’exception, ces frais étant généralement pris en charge intégralement par
l’aide sociale départementale.
Il n’en demeure pas moins qu’en établissement, le système de tarification ternaire pour les
Etablissements pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD), binaire pour les établissements pour
personnes handicapées financés par les départements et, ne facilite pas la lisibilité du système. Des
complications supplémentaires proviennent en outre, pour les personnes âgées, de la différence
entre les régimes d’aide sociale qui s’appliquent d’une part au tarif hébergement, d’autre part au
ticket modérateur de l’APA. Le calcul différent des sommes minimales qui doivent être laissées à la
disposition des personnes accueillies selon qu’il s’agit d’un EHPAD ou d’un établissement pour
adulte handicapé ajoute encore de la complexité. Enfin, les financeurs se partagent la charge du
budget de façon différente : côté handicap, l’intervention de l’assurance maladie est de type
forfaitaire ; côté personnes âgées, le règlement dispose que selon leur nature, les dépenses sont
prises en charge soit par les personnes âgées (subsidiairement par le département), soit par le tarif
dépendance, soit par l’assurance maladie et pour certaines dépenses, par deux financeurs (les
dépenses d’aide soignantes se partagent entre soins et dépendance, les dépenses d’animation, entre
dépendance et hébergement…).
Le problème est que toute tentative de révision marginale de ce système dual traitant des
situations proches, système faiblement lisible et d’une complexité exceptionnelle, se heurte à
des logiques en chaîne. En remontant ces chaînes, on aboutit à l’un des nœuds importants du
système : l’attachement solide de beaucoup de Français en général et des élus en particulier
à l’obligation alimentaire et à la récupération de l’aide sociale sur les successions des
personnes âgées qui est à la source de la tarification ternaire, tandis que le devoir de
solidarité à l’égard du malheur des personnes handicapées entraîne un traitement différent du
système tarifaire.
Un autre exemple renvoie également à des questions concernant les options fondamentales
des systèmes. Il concerne les disparités, sensibles, entre les montants des plafonds d’aide
financière dans les deux secteurs.
Ici, c’est moins la complexité qui pose problème que le volume des moyens alloués aux
deux populations. Cette disparité est sensible dans le cas des aides techniques : dans le cadre
fixé par les plafonds APA , il n’est pas possible de se procurer que des matériels peu
onéreux, lourds et peu performants. Que ces matériels puissent convenir à certains, peu
mobiles en tout état de cause par suite de polyhandicaps, cela s’entend. Il est en revanche
moins justifié de traiter uniformément par « un plafond tarifaire » et non par évaluation
individuelle ces cas et ceux de personnes qui, à soixantaine ou soixante-dix ans, sont
aujourd’hui capables des apprentissages nécessaires pour améliorer leur capacité d’insertion
dans la vis sociale (on pense ici notamment aux aveugles, qui le deviennent souvent à un âge
avancé ou aux personnes ayant un handicap moteur d’origine accidentelle ou pathologique
également survenu après la soixantaine).
Un « projet de vie », des situations personnelles différenciées sont possibles quand on a plus
de vingt ans d’espérance de vie devant soi. Mais cette notion, très développée dans la
perspective du handicap, ne l’est guère dans celle de la dépendance…Dans ce cas comme
dans l’exemple précédent, en remontant la chaîne, on se confronte aux options
fondamentales des deux systèmes.
Aussi, les disparités de ce type doivent-elles être analysées en rapport avec les options
fondamentales et alimenter le dossier qui permettra d’y revenir en y associant une analyse
plus complète de leurs conséquences.
- 43 -
D’autres disparités heurtent vivement les usagers et leurs représentants associatifs car ils n’y
voient aucun fondement réel.
Un exemple frappant de ces disparités peut être relevé en ce qui concerne l’emploi des aidants à
domicile. Les réglementations permettant l’application de l’APA et de la PCH différent à cet
égard de façon probablement excessive : elles diffèrent par exemple en ce qui concerne la
possibilité de rémunérer des aidants familiaux , le statut ‘(salarié ou non) qui leur est donné et
les tarifs qui leur sont applicables. Les réglementations diffèrent également en ce qui concerne
le contenu de l’aide : alors que l’aide domestique (pour les courses et l’entretien du logement,
pour la préparation des repas) est considérée comme centrale dans le soutien des personnes
âgées à domicile, ces mêmes services ne peuvent être couverts sur la PCH pour les personnes
handicapées et sont renvoyés au Fonds départemental de compensation. Quant aux tarifs
applicables aux aides professionnelles, elles diffèrent d’un côté selon le statut de l’aidant
(service prestataire, mandataire…) de l’autre selon sa qualification.
Qu’il s’agisse de disparités de l’une ou l’autre catégorie, une comparaison plus systématique des
situations serait souhaitable. A mesure que la loi du 11 février 2005 se met en place, les
remontées sur les difficultés rencontrées sur le terrain par suite de ces disparités devaient faire
l’objet d’une analyse spécifique.
A court terme, les enseignements de ces comparaisons pourraient alimenter une adaptation et
une harmonisation de ces règles qui ne soulèvent pas de problèmes fondamentaux pour chacun
des systèmes de compensation et de prise en charge en établissements. Les disparités qui
renvoient à des questions plus fondamentales sont, quant à elles, des éléments importants pour
alimenter le quatrième et le dernier chantier qu’il est proposé d’ouvrir.
1.4)
PREPARER UNE EVALUATION DES SOURCES DE FINANCEMENT
Toutes les tendances d’évolution que la mission a pu identifier pour l’avenir en s’interrogeant sur le
vieillissement des personnes handicapées vont dans le sens d’une hausse des charges, difficilement
évitable :
- la longévité nouvelle des personnes handicapées se traduit par un accroissement global du
nombre de personnes qui ont besoin d’aide et de prise en charge ;
- les personnes handicapées vieillissantes « ajoutent des incapacités aux incapacités » et leurs
besoins sont plus importants que ceux des plus jeunes ;
- leur vie familiale plus précaire les conduit à compter plus fortement, l’âge venant, sur les
solidarités collectives ;
- leur présence de plus en plus nombreuse dans une tranche d’âge que la législation française
considère comme ayant basculé vers « l’âge de la vieillesse » contribue à poser des
problèmes d’équité. Risquant de devenir sensibles, ces problèmes peuvent nécessiter un
ajustement des systèmes de prise en charge des pertes d’autonomie, aujourd’hui gérés selon
un critère d’âge.
Les données disponibles ne permettent guère d’évaluer avec précision l’ampleur de ces charges
supplémentaires, mais quelques ordres de grandeur relatifs doivent être rappelés.
Au regard du nombre de personnes handicapées et des moyens mobilisés pour répondre à leurs
besoins, on a avancé, avec précaution, la possibilité d’une pression sur l’offre correspondant à une
augmentation minimale de 20% des places disponibles pour offrir dans les vingt années qui
viennent l’accueil nécessaire à ceux qui vieillissent en établissement en même temps qu’aux plus
jeunes qui souhaitent y entrer. La pression réelle pourrait être beaucoup plus importante en tenant
compte des besoins de ceux qui commencent à vieillir à domicile. Au regard de l’ampleur de la
population handicapée aidée, les taux de progression des besoins sont donc très sensibles.
Par la nature de leurs besoins et le statut que leur confère la législation actuelle, les personnes
handicapées vieillissantes rejoignent aussi l’ensemble de la population en perte d’autonomie. Les
effectifs sont ici beaucoup plus nombreux, le nombre de personnes âgées dépendantes étant
- 44 -
susceptibles de franchir la barre du million dans les prochaines années, alors que l’ordre de
grandeur des personnes handicapées vieillissantes ne devrait pas s’élever à plus de quelques
dizaines de milliers. L’impact relatif sur les charges de la perte d’autonomie n’a donc pas la même
ampleur.
La suppression de la barrière d’âge entre deux dispositifs selon l’âge de survenue du handicap ne
peut être traitée avec équité sans prendre en compte en même temps les coûts induits et l’étendue de
la population concernée.
Les craintes de coûts excessifs, difficiles à financer sans la construction de ressources nouvelles,
sont susceptibles de rendre plus attractives les solutions continuant à réserver à un petit nombre des
dispositions spécifiques, au risque de maintenir également les sources d’iniquité qu’on a évoquées.
Si la progression globale inévitable des financements de la perte d’autonomie fait l’objet d’un
pilotage efficace, si des sources nouvelles de financement sont identifiées, en revanche, le jeu sur
une contrainte aussi stricte que celle de la barrière d’âge peut s’ouvrir.
Des pistes ont été récemment ouvertes par le rapport du centre d’analyse stratégique, dont plusieurs
intéressent directement le dossier des personnes handicapées vieillissantes. De façon originale, ce
rapport aborde la question du financement de la perte d’autonomie sous l’angle du reste à charge
des personnes, soulignant qu’il convient de le limiter pour maintenir un vrai choix de vie aux
personnes dépendantes. En cela, il rejoint l’option retenue dans le cadre de la politique du handicap
et fait ressortir la principale difficulté pour les usagers d’une articulation entre le système du
handicap (qui limite les charges par l’intéressé) et celui de la dépendance (redoutée des personnes
handicapées fragiles et de leur famille parce que les charges personnelles y sont lourdes).
Pour contenir les coûts supportés par l’usager, le rapport du CAS propose une action sur plusieurs
fronts. Certaines concernent les éléments de partage des charges entre financeurs, dont on a aperçu
ici la complexité. D’autres proposent de mobiliser diverses ressources d’efficacité dans la gestion
du système. D’autres enfin appellent sans ambages à une remise à plat de l’aide sociale en
établissement en proposant notamment de considérer dans des ensembles cohérents, d’une part les
différentes possibilités de solvabilisation de la prise en charge en institution à la charge des
départements (quelles que soient les sections tarifaires et en prenant en compte la solidarité devant
s’exercer envers les personnes démunies) d’autre part les possibilités de mobilisation du patrimoine.
Ces propositions rejoignent les réflexions de la mission. Avec la survenue d’incapacités, des
personnes que rien ne caractérise comme en situation e pauvreté ont à supporte sans préparation,
mutualisation des risques et organisation des solidarités, des charges supérieures à celles auxquelles
une retraite normale peut faire face. La mise en œuvre de l’obligation alimentaire et des
répercutions sur successions a des effets néfastes sur l’acceptation, par les personnes elles-mêmes
de leur séjour en établissement ; elle comporte des incitations bien souvent inutiles au maintien de
liens de solidarité familiaux qui, à cet âge, ont d’autres cadres pour s’exprimer, et établissent entre
les familles dont les parents ont pareillement épargné, des discriminations peu pertinentes selon la
chance ou la malchance qu’ont les uns et les autres de voir leurs parents survivre en échappant ou
non à la dépendance.
Si, e outre, étaient retenues et approfondies les propositions visant à renforcer la sélectivité des
dispositifs de solvabilisation publics en faveur des publics les plus fragiles, et si des ressources
nouvelles étaient recherchées, comme le préconise le rapport du CA ? par la prévoyance
individuelle, l’accès au crédit et l’assurance dépendance, des possibilités nouvelles de
rapprochement entre systèmes et de suppression des barrières d’âge seraient ouvertes. Les Français
se montrent au demeurant réceptifs à l’idée d’épargner pour anticiper une perte d’autonomie : deux
tiers d’entre eux (y compris les plus jeunes) y sont favorables. Selon le baromètre qui suit l’opinion
publique sur ce thème, ils sont de plus en plus nombreux, par exemple à se déclarer favorables à une
cotisation individuelle facultative ainsi qu’à une intervention publique dans ce domaine et ils
modulent leurs préférences selon qu’il s’agit des réponses au problème du grand âge ou à celui du
handicap.
Il est donc souhaitable que soient engagés rapidement les travaux complémentaires appelés par ce
rapport, qu la mission ne peut qu’appuyer.
- 45 -
Dans cette perspective, la contribution de représentants des personnes handicapées et de leur
familles à ces travaux sera particulièrement utile :
- ils disposent d’une expérience appréciable de systèmes d’épargne et de constitution
patrimoniale pour le maintien et le financement de l’autonomie, qu’ils ont contribué à
construire ;
- ils sont particulièrement à même de veiller, au cours de ces travaux, au respect et au
renforcement de liens et d’articulations entre les institutions consacrées au maintien et à
l’entretien des situations d’autonomie, pour éviter entre elles les effets de rupture comme les
risques de repli sur la défense d’intérêts spécifiques.
Je vous remercie de m’avoir écouté avec attention.
Robert MOULIAS, vice-président d'ALMA France :
Effectivement, la formation est un des soucis que nous avons en permanence.
Je laisse maintenant la parole à M. Bruno FABRE.
Bruno FABRE - Inspecteur Hors Classe de l'action sanitaire et sociale
Chargé de mission – Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales
(DRASS) de la région Centre
Accompagner les personnes handicapées : prévenir la maltraitance
Agir sur le cœur institutionnel des établissements par une vigilance partagée
POURQUOI parler de vigilance PARTAGEE ?
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je vous remercie de m’avoir invité cet après-midi.
Mes propos seront fondés sur mon expérience professionnelle
La loi du 02 janvier 2002 a introduit dans le Code de l'Action Sociale et des Familles (CASF) des
dispositions 1 conduisant un recentrage de l'action sociale destinée aux personnes vulnérables 2 sur
les prestations d’accueil et d'accompagnement. A ces dernières se trouvent désormais attachés des
droits individuels et des obligations de professionnalisme opposables aux établissements. Les
usagers se retrouvent placés au centre de la dynamique institutionnelle des structures qui les
accueillent.
L’expérience du contrôle des institutions d’accueil de personnes vulnérables conduit par ailleurs à
deux constats :
Les institutions peuvent être exposées à la perte de la capacité de surprise : il arrive que les
évènements intérieurs se "dégradent" en incidents, auxquels n’est pas toujours attaché un sens.
La problématique des prestations d'accueil et d'accompagnement est maintenant appelée à
être pleinement intégrée dans un amont commun aux différents contrôles exercés par les
autorités publiques dans le cadre du CASF.
1
2
Articles L. 311-3 et suivants CASF
Selon les définitions du CASF : personnes âgées, handicapées - adultes et mineures - en situation d'exclusion /
réinsertion sociale, mineurs protégés
- 46 -
Dans ce contexte, il est utile d'encourager une vigilance partagée autour de la prise en charge
des personnes vulnérables, considérée comme une racine d'action commune à décliner selon deux
axes :
Développer et évaluer les activités d’accueil et d’accompagnement, gérer les risques : une
responsabilité des dirigeants des institutions.
Promouvoir la compréhension de la maltraitance comme un risque institutionnel, agir sur
l’exercice des métiers pour garantir la bonne application des garanties légales : une
responsabilité des autorités publiques.
I. PREVENIR LA MALTRAITANCE : UN ENJEU DES RELATIONS COLLECTIVES
1.1 - LES EXIGENCES DE LA VULNERABILITE
La personne handicapée : une personne reconnue vulnérable
Elle a vocation à bénéficier de "l’action sociale" 3, laquelle correspond à des "missions d’intérêt
général et d’utilité sociale" : évaluer, prévenir, accompagner, soutenir, soigner, accueillir.
Elle bénéficie :
Des droits reconnus aux usagers des établissements et services sociaux et médico-sociaux :
L'accès à des "prestations d’accueil et d’accompagnement".
Le bénéfice d'une définition légale des prestations d’accueil : assurer et garantir "la
dignité, l'intégrité, la vie privée, l'intimité, la sécurité, l'individualisation et l'information ".
D'une politique de prévention du handicap comportant notamment "des actions de prévention
concernant la maltraitance" 4
Son séjour dans une institution d’accueil est protégé :
Le contrôle des établissements sociaux et médico-sociaux comprend une "surveillance des
conditions d'organisation et de fonctionnement" 5. Mission spécifique de protection des personnes
vulnérables à l'occasion de leur séjour dans un établissement d'accueil, elle représente une garantie
nationale dont la mise en œuvre incombe aux directions des affaires sanitaires et sociales, placées
sous l'autorité des préfets de département.
1.2 -LA MALTRAITANCE, UN RISQUE INSTITUTIONNEL
La maltraitance : un phénomène social global et spécifique
Elle renvoie à une vulnérabilité, à une relation comportant des obligations et à la durée.
Elle représente l'expression de la violence dans les établissements sociaux. Caractérisé par
l'exercice d'une contrainte sur une personne, la négation de l'altérité et le fait de laisser une
trace, l'acte violent couvre les violences caractérisées (l'abus) comme également les négligences
faisant contrainte 6, toutes source de maltraitance
Parce qu'elle atteint les finalités de sûreté personnelle et de bien-être attachées aux prestations
d'accompagnement, elle traduit une défaillance de la régulation de l'action collective.
3
Article L. 311-1 CASF
Article L. 114-3 CASF
5
Articles L. 331-1 et suivants CASF, issus de la loi du 24 décembre 1971
6
Les négligences faisant contrainte : privations, brimades, mépris, pressions de toutes sortes, indifférence, oubli et
omission, habitudes non critiquées, etc. Font l'objet de définitions internationales.
4
- 47 -
La maltraitance : les dirigeants confrontés à la gestion des risques.
La gestion renvoie à la relation au référentiel de l’institution, et donc à la capacité d'implication
de celle-ci pour maîtriser son fonctionnement au moyen d’une organisation.
Les risques renvoient à la relation aux acteurs et à l’environnement de l’institution. Ils traduisent
l'éventualité de ruptures fonctionnelles - incident, dysfonctionnement, événement sentinelle,
accident, catastrophe - porteuses de menaces pour les personnes.
1.3 - face a la maltraitance : les prestations au centre de l’action collective
Dans la mesure où elle atteint la capacité de l'établissement à protéger et à promouvoir les
personnes, la maltraitance se joue au niveau des prestations d'accompagnement et renvoie aux
relations collectives correspondantes. En effet :
L’usager est désormais titulaire d’un statut légal 7, caractérisé par des prérogatives vis-à-vis :
de l'institution : respect de droits des usagers, de l'individualisation de la prise en charge et de
normes de fonctionnement ;
de la prise en charge qui lui est proposée, soumise désormais à des obligations légales de
professionnalisme : pluridisciplinarité, coopération, évaluation.
Le souci de protéger les personnes vulnérables - démarche d'assistance, la première, des autorités
publiques, assise notamment sur les lois d'aide sociale de la fin du XIXième siècle - est désormais
prolongé par celui de les promouvoir. L'usager devient un interlocuteur des dirigeants, placé au
centre d'un système de relations collectives fondé sur l'obligation de délivrer des prestations
d'accueil et d'accompagnement..
La formalisation de celles-ci par des dispositions issues de la loi du 2 janvier 2002 a un impact fort
sur l’ensemble des fonctions de prise en charge.
Dans ce contexte, le professionnalisme de la prise en charge représente un enjeu majeur de
l'action de l'établissement. Caractérisé par le fait d'observer une règle pour assumer une fonction, il
permet aux dirigeants de structurer l'exercice des différents métiers en agissant sur deux variables
fondamentales dans toute relation collective :
Les marges d'autonomie à reconnaître aux acteurs de l'institution ;
Les marges d'incertitude qu'ils entendent contrôler.
Ce faisant, il leur devient possible d'affronter de manière volontaire et explicite le risque de
maltraitance.
1.4 -
FACE A LA MALTRAITANCE
L'ORGANISATION
:
S'INTERROGER SUR LA PLACE DE LA REGLE DANS
La règle représente une marque de l’engagement des dirigeants pour garantir un ordre
institutionnel porteur de protection et de promotion des personnes.
La problématique de la règle repose sur une dynamique établie entre deux pôles :
Distinguer, positionner les différents membres de l'institution,
Pour les rassembler et garantir une cohésion institutionnelle.
L'enjeu est de faire de l’établissement un système complexe de relations.
7
Articles L. 311-3 et suivants et L. 312-8 CASF,
- 48 -
La règle est ainsi porteuse des valeurs institutionnelles de cohésion :
La régulation : la présence adulte, protéger, dire la loi interne.
La médiation et l’ouverture : la présence responsable, positionner, déléguer, soutenir, accueillir.
La vigilance : la présence adulte, garantir.
Le développement du professionnalisme par la pratique de la règle représente :
Une garantie de l’aptitude institutionnelle à obtenir les performances opérationnelles requises
pour l'accompagnement des personnes vulnérables, notamment celles atteintes d'un handicap ; il
permet d'établir des médiations et des obligations de distance dans les relations et de favoriser la
parole.
Une clé de l’éthique de l’intervention, considérée comme une garantie des finalités de l'action
sociale et permettant de préférer l’autorité professionnelle à la maîtrise de l’usager.
II. PREVENIR LA MALTRAITANCE : AGIR SUR LE CŒUR INSTITUTIONNEL DES
ETABLISSEMENTS
2.1
FACE AU RISQUE DE MALTRAITANCE : AGIR SUR L’ORGANISATION
La prévention des risques institutionnels repose notamment sur la construction de "défenses en
profondeur" au moyen de règles internes spécifiques. Elles sont source d'autorité professionnelle.
Pour mesurer leur développement dans une organisation, le professionnalisme de la prise en
charge, parce qu'il est lié à la pratique de la règle, sera utilisé comme un "marqueur" du risque de
maltraitance. Au moyen de ce marqueur, on peut pratiquer une interrogation de l'organisation :
Mesurer le degré de professionnalisme de la prise en charge,
en repérant la présence des valeurs de cohésion par l’étendue de la règle,
pour s’assurer de la capacité de contenance de l’institution.
Dans le cas de l'accueil et de l'accompagnement des personnes handicapées, caractérisés
notamment par la longue durée, on portera une attention plus particulière à deux points critiques de
l'organisation interne :
La capacité de veille.
L’attention permanente au lien institutionnel.
2.2- HANDICAP ET RISQUE DE MALTRAITANCE : SOUTENIR LA CAPACITE DE VEILLE
Donner sens à l’incident :
Un exemple : dans un établissement d’accueil de personnes handicapées adultes :
Lors d’un temps d’activité, un résidant tétraplégique demande un verre d’eau.
Absence de réponse des personnels présents, demandes répétées.
A la longue, un agent AMP dépose brusquement un verre d’eau sur la table, mais hors de portée
du
résidant.
Absence de réaction des autres agents, comme d’évocation de cet incident en réunion d’équipe.
Il sera connu de la direction par une plainte provenant de la famille de l'intéressé.
Comment lire cette situation ?
Donner sens à l’incident, l’exemple du refus d’assistance :
1ère lecture : un incident dans l’exercice d’un métier
De caractère ponctuel, individuel et aléatoire.
Une attitude regrettable, pondérée par la considération de la lourdeur des prises en charge.
- 49 -
"Cela peut arriver", "Le directeur ne peut pas être partout".
Accent porté sur les circonstances : personnalité ou état de santé de ce résidant, la vie de
l'équipe d’agents à ce moment là et ce jour là.
"On fera des rappels à l’ordre et des recommandations" afin d'appeler au calme, à la bonne
volonté de chacun et à un comportement raisonnable.
2ième lecture : un événement indésirable dans la vie de l’institution
Il ne se limite pas à une simple question de bonne ou mauvaise volonté individuelle.
Il renvoie à la problématique de la régulation de l’action collective, et plus spécialement à
l'organisation de la coopération des acteurs de l'institution : personnels, usagers.
Parce qu'il intéresse la prise en charge, il relève à part entière de l’attention des dirigeants,
garants du projet d’établissement.
1ère conclusion : passer de l’incident à l’événement indésirable
L’émergence de l’événement indésirable, deux conditions :
Une surprise : "La chose émerge du réel"
Une signification : "Elle rend la chose saillante".
La perception d'un événement indésirable est donc liée à une capacité d’entretien du sens.
L’événement indésirable : un appel d’attention
Il extériorise la perception d’un dysfonctionnement.
Il est le signe d'une "perte" éventuelle de l’action de l’institution.
Face visible des ruptures affectant l’institution, il représente aussi par opposition un appel
d’attention sur les "zones d’ombre", les secteurs de la prise en charge qui n'émettent jamais de
signaux.
2ième conclusion : s’engager à identifier le risque de maltraitance, trois attitudes.
Penser le fonctionnement en termes d’attention aux risques :
"Quels objectifs et moyens pour connaître ce qui se passe dans l’établissement ?"
Passer de l’événement indésirable au repérage du risque.
Le refus d'assistance soulève trois interrogations relatives à l'organisation
l'accompagnement :
La relation au résidant, la relation aux fonctions exercées, le silence de l’équipe.
de
Passer de la réparation ponctuelle à la vigilance permanente vis-à-vis de l’organisation.
2.3 - HANDICAP ET RISQUE DE MALTRAITANCE : L’ATTENTION AU LIEN INSTITUTIONNEL
Les différents champs qui structurent l’organisation interne ont vocation à être porteurs de valeurs
spécifiques concourant à la cohésion de l'établissement (voir ci-dessus). On y recherchera 8 la
présence d'éléments de règle attestant d'un engagement des dirigeants en vue d'entretenir le
professionnalisme du lien institutionnel et se rattachant notamment aux points suivants : les
positionnements, l'accueil, les distances et le respect de l'intimité, l'individualisation de la prise en
charge, la parole, la gestion des risques.
A partir de l’exemple du refus d’assistance, l'interrogation suivante peut être conduite :
8
Par recueil de pièces régulièrement établies et validées et mesure de leur degré d'enracinement interne au moyen
d'entretiens avec différents membres de l'institution ("entretiens de perception").
- 50 -
Les espaces de la régulation :
Existe-t-il un projet d’établissement, actualisé, porteur de valeurs ?
L’agent le connaît-il ? En a-t-il un exemplaire ?
Comment les dirigeants s’assurent-ils du respect du projet ?
Comment est organisée l’information sur la vulnérabilité des personnes ?
Quel est le rôle du conseil de la vie sociale par rapport à la vie intérieure ?
Les espaces de la médiation et de l'ouverture :
Le projet individuel : existe-t-il ? Comment les personnels y sont-ils associés ? Comment
est-il garanti ?
Le positionnement des agents : Est-il assuré ? Est-il garanti ? Permet-il de répondre aux
questions suivantes :
"Je sais ce que l’on me demande", "Je sais qui me dirige", "Je sais avec qui je travaille", "Je
connais mes soutiens et mes recours".
Le soutien professionnel, la délégation, la reconnaissance : qu'en est-il ?
Les règles de vie : existe-t-il un règlement de fonctionnement ?
Recommande-t-il des attitudes et comportements de référence ?
Le travail de proximité avec les équipes de personnel :
Place de l’encadrement, évaluation et validation, régulation des oppositions de personnes
conduisant à la suppression de toute négociation, prévention de l’isolement professionnel, de
la fatigue.
Les espaces de la vigilance :
Diriger :
Le recrutement : antécédents, qualifications, motivation, compréhension des fonctions
proposées.
L’agent dispose-t-il d’une fiche de fonction ? Qui la garantit, comment ?
Le signalement interne : quelle organisation ?
Surveiller :
L’information : Quelles règles ? Quelle validation ?
L’exercice des fonctions : affectation, évaluation, tutorat et soutien, repérage des conduites
professionnelles à risque.
Anticiper : au-delà de la réaction à l’événement, penser le risque :
Un dispositif de prévention de la maltraitance est-il organisé ? Selon quelles modalités ?
Les crises de la prise en charge : S'y est-on préparé ? Un protocole existe-t-il ? Est-il
approprié par les agents ?
Pourquoi n'a-t-il pas été possible de récupérer la défaillance de l'attention d'un agent ?
CONCLUSION
La construction de l'autorité professionnelle de la prise en charge, garantie de la sûreté des
personnes, appelle trois engagements de fond de la part des dirigeants :
1. DETERMINER UN OBJECTIF : LA COHESION DE L'INSTITUTION
La cohésion de l'institution représente une garantie majeure de la sûreté personnelle.
- 51 -
Elle traduit l'engagement des dirigeants en faveur de l'éthique de l'intervention. Elle
conduit à considérer "l'institution comme un espace technique, comme un espace de droit,
comme un espace de promotion des personnes", et en définitive comme un système complexe de
relations ; elle renvoie à des "exigences de positionnement et de compréhension des situations
des usagers", comme de vigilance.
Elle repose sur le professionnalisme des pratiques de prise en charge. Celui-ci permet de
structurer l'action collective au moyen du développement de la règle, choisi comme mode
d'organisation.
Elle se manifeste par la capacité de l'institution à créer du lien entre ses membres et à
organiser un système complexe de relations.
- 52 -
L'engagement des dirigeants, racine et énergie de la cohésion de l'institution :
ENGAGEMENT DES DIRIGEANTS ET FORCE DU LIEN ENTRE L'INSTITUTION ET SES MEMBRES
FAIBLE
MEDIAN
FORT
2.
L'institution
L'institution
L'institution
Les personnels
Les personnels
Les personnels
Priorité à l'expérience
individuelle et collective
L'institution sanctionne les
écarts et ruptures
Priorité au management
Le lien se manifeste sous la
forme de l'instruction
opérationnelle, centrée sur un
objet
Priorité à la construction de
positionnements permanents,
garantie d'un système
complexe de relations
PORTER UNE ATTENTION PERMANENTE A TROIS DYSFONCTIONNEMENTS INSTITUTIONNELS :
Le repli : L'institution "n'émet plus".
Elle n'est plus en capacité de définir un référentiel, d'établir des positionnements et de construire
des liens avec ses acteurs et son environnement.
Le débordement : L'institution n'est plus en mesure de comprendre la situation des usagers.
Sa capacité de présence responsable est atteinte et l'expose à la dérive de la maîtrise des
personnes.
La saturation : L'institution ne "reçoit" plus.
L'attention de ses dirigeants est dissoute de manière maximale dans les nécessités et contraintes
du fonctionnement quotidien ; sa capacité de surprise et de présence adulte sont atteintes.
Parce qu'ils traduisent des insuffisances de la régulation institutionnelle et affectent la capacité
d'accompagnement de l'établissement, ils sont tous porteurs potentiellement du risque de
maltraitance.
DEVELOPPER LE PROFESSIONNALISME AU MOYEN D'UNE ORGANISATION FONDEE SUR LA
REGLE.
3.
Les processus d'organisation permettent à l'institution :
D'absorber les forces centrifuges qui s'exercent sur l'établissement :
Les obligations légales définissant les prestations d'accueil, les décisions administratives, les
effets de la vulnérabilité des personnes accueillies, les attentes et difficultés des familles, les
rigidités du milieu extérieur vis-à-vis du handicap, la revendication d'autonomie des personnels.
De produire des garanties de sûreté personnelle.
De structurer un cadre contant protecteur, capable d'agir sur la chaîne des risques de système
par le progrès du professionnalisme.
- 53 -
Les dirigeants sont conduits à développer une attention transversale ainsi fondée :
Organiser et entretenir l’établissement comme un système de relations : le doter d'un
référentiel.
Faire des positionnements les assises de l’organisation :
Je sais ce que l’on me demande, selon quelles marges d’autonomie et enjeu de
reconnaissance.
Je sais qui me dirige.
Je sais comment je suis situé vis-à-vis de ceux avec qui je travaille.
Je connais mes soutiens et recours.
Entretenir les distances : validation et médiation, l’expression de la parole :
Vis-à-vis des équipes de personnel : garantir le projet de l’institution.
Au sein des équipes de personnel : réunions, temps de parole et observation des conduites.
Vis-à-vis de l’usager : respect et garantie de son intimité.
Garantir la vigilance : .apprécier l'aptitude du référentiel à produire l'ensemble des
performances opérationnelles requises pour accompagner des personnes handicapées. Elle
résultera de sa fiabilité et de sa résistance aux situations de danger, de l'entretien des procédures
et de sa disponibilité à l'événement.
Loin de vouloir entretenir une culpabilité collective et enfermer les établissements dans des
contrôles et des procédures, la démarche proposée vise :
A mesurer leur capacité à faire face au risque central de la maltraitance en maîtrisant leurs
processus de fonctionnement ;
A leur permettre de conserver ou de retrouver leur vocation de communautés d'accueil et de
soutien dédiées à l'accompagnement de personnes vulnérables, des adultes comme des jeunes.
Je vous remercie de votre attention.
Robert MOULIAS, vice-président d'ALMA France :
Merci pour cet exposé très dense. On a tous compris l’importance de garder sa capacité à s’étonner
et des dangers de la routine et de la perte de sens. Je laisse la parole à M. HUGONOT.
Robert HUGONOT
En principe, je devrais vous faire un exposé
d’un quart d’heure mais il va durer seulement
quelques minutes. Vous avez entendu très
souvent le mot de vulnérabilité mais avant
cela, si les personnes sont vulnérables, c’est
qu’elles sont fragiles. Et si elles sont fragiles,
c’est parce qu’elle sont dépendantes et de la
constance de cette dépendance et de la qualité
des personnes qui vont s’occuper d’elles.
Vous avez donc dit des mots qui sont très
importants : dépendance, fragilité,
vulnérabilité et c’est parce qu’elles sont
vulnérables qu’elles courent des risques. Une
- 54 -
chose de plus, c’est que vis-à-vis d’un
handicap les personnes ne sont pas toutes les
mêmes ; je veux dire par là. On peut si nous
prenons le thème du handicap visuel se rendre
compte que certains peuvent réagir
remarquablement et d’autres vont s’effondrer.
Ce matin, vous avez vu Madame Maudy
PIOT qui vous a remarquablement parlé des
handicaps en général, de son handicap
particulier et cependant c’est une personne qui
a perdu totalement la vue. Je lui ai rendu
visite dans une rue de Paris. J’ai été accueilli
d’abord par son chien d’accompagnement et
puis une dame s’est présentée et dans un
appartement qui n’était pas gigantesque, une
dame enjouée vient vers moi et me dit « c’est
moi, Mme Maudy PIOT. Elle se promenait
dans son appartement
d’une manière remarquable. Il y a fort
longtemps, environ 50 ans, j’étais allé rendre
visite au Pr DEBREY. Je suis allé lui rendre
visite dans son appartement au rez de
chaussée vers St germain des Prés et il vient
m’accueillir. Je ne savais pas à ce moment là
qu’il était totalement aveugle . C’est
seulement après que je me suis rendu compte
que ses meubles étaient fixés au sol et
quelque temps après à Lille, j’avais écouté
une de ses conférences qu’il donnait sans une
note. Il est évident que toute personne qui a
perdu la vision ne peut pas s’adapter de la
même manière que d’autres. L’autre mot qu’il
faut souligner, c’est le mot d’adaptabilité qui
est encore un facteur supplémentaire et je me
souviens d’avoir rencontré Paul VERZAR à
Bern qui était un spécialiste du vieillissement
qui disait que l’adaptabilité, c’est le facteur le
plus important dans l’avance en âge. Mais je
l’applique également à la survenue d’un
handicap. Plus on vieillit et moins on
s’adapte. Retenons, dépendance, fragilité,
vulnérabilité et adaptabilité.
Vous allez tous recevoir un document dans
lequel toutes ses conférences sont écrites.
DEBAT :
Un intervenant :
J’ai bien aimé l’idée de la capacité de surprise, d’éveil et d’étonnement et il me semble qu’il
faudrait transformer cette capacité on outil, outil de veille. Il me semble possible que par rapport à
la maltraitance on pourrait mettre en place un outil qui ressemblerait à un bulletin météo. En tant
que Médecin, des Directeurs d’établissement me posent souvent la question « Monsieur, c’est très
bien ce que vous faites de nous parler de la maltraitance mais est-ce que vous pourriez mettre à
notre disposition un outil qui permettrait de nous sensibiliser à la vigilance ?
Bruno FABRE :
Vous posez là la question de l’après-vente. Cette question des outils et des instruments relève pour
une part de mesures assez simples qui existent déjà dans les établissements et dont on n’a pas tiré
toute la signification. Ils existent dans les établissements médico-sociaux des cahiers de liaison qui
sont un peu le fétiche de la tribu. On pourrait transformer ces cahiers de liaison en documents
d’observation. On peut dire ce que l’on veut voir obligatoirement dans le cahier de liaison. Les
dirigeants vont définir leur points d’attention ; dire qui est chargé de la validation. On peut parler
aussi du travail de proximité des équipes et de l’existence de réunions. ON peut par le biais de la
délégation discuter des conduites professionnelles inadéquates ; l’observation de l’isolement, de la
fatigue. Dans l’affaire MALEVRE, l’avocat a fait un discours remarquable sur la responsabilité de
l’établissement en matière de soutien et d’attention aux équipes. Il y a des outils qui existent et qui
peuvent être mis en place avec peu de frais.
Un intervenant :
Peut-on M. Fabre transformer la capacité d’éveil en outil de veille de manière à dépister la
maltraitance ?. L’intérêt d’un bulletin météo est qu’il est lisible par tous et pas seulement par les
dirigeants.
Bruno FABRE :
Les dirigeants doivent être des spécialistes. Ils ne peuvent pas tout savoir sur tout. Ils doivent
déterminer les niveaux d’intervention et certains lieux de croisement de l’information et contrôler
l’information. Ensuite, on peut imaginer diffuser cela dans l’institution
- 55 -
Une intervenante :
Je suis au CCAS de ma commune. Autrefois, il y avait des fermes pour que les personnes
handicapées aient des activités. On a tout supprimé. Il n’ y a pas de relais entre l’hôpital
psychiatrique et la maison de retraite. J’aimerais savoir ce que vous en pensez.
Robert MOULIAS :
Je connais peu les problèmes concernant la psychiatrie chronique mais une des pires négligences est
l’ennui. Une fois que la personne a reçu ses médicament et est peignée, lavée, alimentée, c’est
souvent le moment où la vie s’arrête ou bien c’est le moment où la vie peut commencer. Il y a
quelques jours a eu lieu le premier congrès des animateurs en gériatrie. On a posé la question de
savoir si une animation pouvait être maltraitante. La réponse est oui, mais l’absence d’animation est
encore plus maltraitante. La vie en établissement pour personnes démentes ne peut pas ne pas
comprendre des activités occupationnelles…cela permet de faire ressortir la créativité. Il faut casser
l’ennui et mettre une vraie vie en établissement.
Geneviève LAROQUE :
Je voulais faire deux observations.
Seul M. BLANC a évoqué dans une phrase la question de la formation. Et dans votre remarquable
exposé, Monsieur FABRE, vous n’avez pas parlé une seconde de la qualification des personnes.
Tout ce que vous pouvez proposer en terme d’organisation et de fluidité ne tient pas si on ne se pose
pas d’abord la question de la qualification qui est différente de la professionnalisation. On peut être
un excellent professionnel avec un esprit de professionnel sans avoir aucune qualification et même
avec toute la bonne volonté possible, l’affaire va se casser la figure.
Le deuxième point concerne ces malades mentaux stabilisés qui ne peuvent pas rester dans un
établissement de santé spécialisé parce qu’ils ont réorganisé leurs projets. Il se pose aussi la
question des handicapés vieillissants. Je pense à un établissement qui est en cours de création et a
comme objet de s’occuper de personnes de moins de 60 ans, frappés par la maladie d’Alzheimer
qu’on souhaite ne pas mélanger avec des grands vieillards. C’est un sujet sur lequel on travaille tant
au ministère que dans les associations depuis plus de 10 ans et qui est très difficile à traiter tant
qu’une véritable convergence entre la problématique et la réglementation des personnes
handicapées et des personnes âgées dépendantes n’avancera pas. On avance dans l’idée que si j’ai
été reconnu handicapé avant 60 ans, je pourrais continuer à garder mon statut après, ce qui
résoudrait seulement le problème des établissements pour handicapés vieillissants. Et je pense que
quelqu’un qui est frappé d’un accident de santé autour de 60 ans alors qu’il était en pleine activité et
qui se trouve placé parmi les personnes âgées dépendantes se trouvera dans une situation
parfaitement insupportable et n’aura plus comme choix que de devenir insupportable ou de se
laisser aller
Robert HUGONOT :
Pardonnez mon intrusion, je sois passer la parole à Monsieur TREGOAT qui vient d’arriver. Nous
vous remercions, Monsieur, de bien vouloir conclure cette journée.
Jean Jacques TREGOAT, directeur général de l'Action Sociale
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs, bonjour
- 56 -
A la fin des années 1990 la prise de conscience collective quant aux violences dont sont victimes
les adultes vulnérables (personnes âgées et adultes handicapés) a suscité l’organisation d’une
action administrative de l’Etat contre ce fléau.
Pour ce faire, il convenait, d’une part, de définir et de mettre en œuvre une véritable politique
nationale en direction des adultes vulnérables, à l’instar de ce qui a été progressivement réalisé
pour lutter contre la maltraitance envers les mineurs.
Il importait, d’autre part, pour assurer une plus grande cohérence de l’action, d’animer des
dispositifs transversaux couvrant l’ensemble des Etablissements Sociaux et Médico-Sociaux
(ESMS) et des publics accueillis - mineurs et adultes vulnérables.
La Direction Générale de l’Action Sociale (DGAS) a été chargée de piloter dans le champ social et
médico-social cette politique qui s’articule principalement autour de 5 axes :
-
mieux connaître le phénomène,
développer le signalement, renforcer l’accueil téléphonique et coordonner le traitement des
situations, notamment dans les ESMS,
développer le contrôle et l’accompagnement des ESMS, y compris dans leur dimension
préventive,
promouvoir une démarche de bientraitance,
apporter un soutien technique et juridique aux acteurs de terrain, notamment aux services
déconcentrés du ministère.
Ainsi, les grandes lignes d’une politique nationale en direction des adultes vulnérables ont été
tracées.
Néanmoins, une telle action ne peut être efficace et durable que si elle repose sur un large
partenariat : Etat, collectivités territoriales, institutions sociales et médico-sociales, professionnels,
grand public, associations…
Par son expertise, sa connaissance des situations, sa connaissance des besoins des usagers et son
expérience votre association, ALMA, a su s’imposer comme un des acteurs majeurs de la lutte
contre la maltraitance.
Elle est devenue au fil des années un des partenaires privilégié de la DGAS. Et c’est dans cet esprit
de partenariat que le ministère a souhaité et souhaite travailler encore avec vous.
Ce colloque est donc l’occasion de réitérer le soutien de la DGAS à ALMA et de rappeler les
grandes lignes de la politique de lutte contre la maltraitance dans laquelle ALMA s’intègre à
plusieurs niveaux.
MIEUX CONNAÎTRE LE PHÉNOMÈNE DE MALTRAITANCE
Ainsi, dans un premier temps je souhaite évoquer avec vous le premier axe de la politque conçue
par la DGAS à savoir la connaissance du phénomène.
En effet, pour analyser la politique, la faire évoluer et la rendre plus pertinente, le ministère a
souhaité pouvoir observer les situations de maltraitance.
La DGAS a donc conçu un outil de recueil des signalements de maltraitance en institution qui
constitue la base d’un observatoire des faits de violence sur les personnes âgées et sur les personnes
handicapées.
- 57 -
L’action d’ALMA dans ce domaine vient compléter et alimenter l’action du ministère. En effet, en
offrant un éclairage sur les violences à domicile, les statistiques issues du réseau ALMA contribuent
pleinement à améliorer la connaissance du phénomène.
L’ouverture sur le secteur du handicap devrait d’ailleurs contribuer à améliorer encore notre
connaissance sur le sujet ce qui va dans le sens des orientations souhaitées par le ministre qui veut
élargir le comité national de vigilance au secteur du handicap et de l’enfance en danger.
La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté
des personnes handicapées appelle également à une approche plus partagée des préoccupations,
dans ce domaine comme dans d’autres, concernant l’accompagnement des personnes handicapées et
des personnes âgées ayant des troubles de santé invalidants. La suppression prévue, dans un délai
maximum de cinq ans après la promulgation de la loi, des dispositions opérant une distinction entre
les personnes handicapées, en fonction de critères d'âge en matière de compensation du handicap et
de prise en charge des frais d'hébergement en établissements sociaux et médico-sociaux, nous
amène déjà à anticiper sur cette prochaine étape en portant un regard transversal en matière de
maltraitance.
DEVELOPPER LE SIGNALEMENT, RENFORCER ET COORDONNER LE
TRAITEMENT DES SITUATIONS, NOTAMMENT DANS LES ESMS
Cependant, l’observation des signalements de maltraitance, leur analyse, pour être pertinentes et
surtout pour refléter les violences dont sont victimes les publics vulnérables, doivent s’accompagner
d’une politique de développement du signalement.
C’est là le second axe de la politique de lutte contre la maltraitance que je souhaite aborder avec
vous aujourd’hui.
A cette fin, le ministère a souhaité sensibiliser les établissements au respect des obligations
auxquelles ils sont soumis en matière de signalement, de prise en charge des situations de
maltraitance, de protection et d’accompagnement des personnes.
De même, ALMA, en développant un réseau d’écoute téléphonique de proximité, offre à ceux qui
sont en situation d’être maltraités ou à ceux qui sont témoins de maltraitance un lieu d’accueil, de
compréhension et d’accompagnement qui contribue au développement du signalement.
C’est la raison pour laquelle le ministère souhaite soutenir le développement d’antennes de
proximité et permettre à chacun d’accéder à ce type de service dans tous les départements.
J’invite, à cet égard, les antennes d’ALMA à se rapprocher des nouvelles maisons départementales
des personnes handicapées, créées par la loi du 11 février 2005, pour leur proposer leur concours
pouvant, par exemple, s’inscrire dans le cadre de conventions locales. Le rôle d’accompagnement
des personnes handicapées et de leur entourage confié aux maisons départementales, de même que
la désignation par leurs soins d’une personne référente chargée de recevoir et d’orienter les
réclamations individuelles des personnes handicapées ou de leurs représentants vers les services et
autorités compétents, plaident en faveur de cette collaboration.
Les réclamations mettant en cause une administration, une collectivité territoriale, un établissement
public ou tout autre organisme investi d'une mission de service public sont transmises par la
personne référente au Médiateur de la République, conformément à ses compétences définies par la
loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur de la République.
- 58 -
Les réclamations mettant en cause une personne morale ou physique de droit privé qui n'est pas
investie d'une mission de service public sont transmises par la personne référente soit à l'autorité
compétente, soit au corps d'inspection et de contrôle compétent.
De même, vos antennes pourront nouer utilement des liens avec les commissions départementales
consultatives des personnes handicapées qui jouent notamment un rôle d’observation de la situation
des personnes handicapées et des conditions d’application sur le plan local des politiques les
concernant.
PROMOUVOIR LA “BIENTRAITANCE”
Par ailleurs et c’est là le troisième axe de la politique du ministère sur lequel je souhaite insister, la lutte
contre ce fléau ne pourra être efficace que si elle est complétée par une politique de prévention, qui
appelle des actions à moyen et long termes, visant à améliorer les conditions de vie et de prise en
charge des personnes vulnérables, à domicile ou en institution.
Pour ce faire, il s’agit de développer et de renforcer les droits et libertés des usagers en s’appuyant
sur les outils de la loi du 2 janvier 2002.
Je veux rappeler la portée de cette loi qui a placé les droits des usagers au cœur de la rénovation de
l’action sociale et médico-sociale, dans leur affirmation et dans leur promotion.
Cette loi a abordé les droits des usagers sous l’angle d’une meilleure reconnaissance du sujet
citoyen, en définissant les droits et libertés individuels des usagers du secteur ainsi qu’en
fournissant les outils propres à garantir l’exercice effectif de ces droits.
Ces outils, qui doivent permettre une réelle participation des usagers aux réponses que les
professionnels doivent leur apporter, sont variés :
-
projet d’établissement,
livret d’accueil,
charte des droits et libertés de la personne accueillie,
règlement de fonctionnement,
contrat de séjour,
conseil de la vie sociale ou autre forme d’expression,
recours à une personne qualifiée.
Je vais en terminer là et je vous remercie de votre écoute.
Robert HUGONOT, Président d’ALMA France :
Voilà, cette journée se termine. Je remercie tous les intervenants et tous les participants pour leur
présence à cette journée. Je vous souhaite un bon retour.
- 59 -
GLOSSAIRE
AAH
Allocation aux Adultes Handicapés
AGEFI
Agence Economique et Financière
ANAH
Agence Nationale de l’Habitat
ANPEA
Association Nationale des Parents d’Enfants Aveugles
APA
Allocation Personnalisée d’Autonomie
CASF
Code de l’Action Sociale et des Familles
CAT
Centre d’Aide par le Travail
CDAPH
Commission des Droits et de l’Autonomie des personnes Handicapées
CLIC
Centre Local d’Information et de Coordination
CNCPH
Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées
CNSA
Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie
DDASS
Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales
DGAS
Direction Générale de l’Action Sociale
DRASS
Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales
EHPAD
Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes
ERP
Etablissements Recevant du Public
ESMS
Etablissements Sociaux et Médico-Sociaux
ETS
Educateur Technique Spécialisé
FAM
Foyer d’Accueil Médicalisé
HID
Handicaps Incapacité Dépendance
MA
Moniteur d’Atelier
MAS
Maison d’Accueil Spécialisée
MDPH
Maisons Départementales des Personnes Handicapées
ODAS
Observatoire de l’Action Sociale décentralisée
PCH
Prestation de Compensation du Handicap
PDU
Plan de Déplacements Urbains
PMR
Personne à Mobilité Réduite
PCH
Prestation de Compensation du Handicap
RTH
Reconnaissance du Travailleur Handicapé
TUC
Travaux d’Utilité Collective
- 60 -
Bibliographie non exhaustive proposée par
sur les thèmes
Maltraitances, handicaps, vulnérabilité
ALMA France
adresse : B.P. 1526
38025 – Grenoble cedex
téléphone :
(33) 04 76 84 20 40
fax :
(33) 04 76 21 81 38
e-mail : [email protected]
site Internet : http://www.alma-france.org
TOPIE Thérèse, Maltraitance des personnes handicapées : résultats des 32
premiers mois de fonctionnement d'ALMA-Handicap-54, thèse de médecine,
Université de Dijon. Faculté de médecine, 2005.
Publications dans le cadre de l’association ALMA1 :
"Comment maltraiter un vieillard en dix leçons ?" 2 DVD pour sessions de formation
professionnelle
:
- en institution (38 mn)
- à domicile (25 mn)
BUSBY Françoise, Refuser la maltraitance envers les adultes âgés et réagir avec …
connaissance, compréhension, tolérance, compassion, un livret de repérage et prévention
de la maltraitance édité dans le cadre d’ALMA France, mai 2004.
HUGONOT Robert, La vieillesse maltraitée, Editions Dunod, 2ème édition, 2003.
Familles violentes, vieillards victimes, Actes de la 6ème Journée d'Etudes d'ALMA,
Décembre 2004.
Les négligences sont-elles une violence ? Actes de la 5ème Journée d'Etudes d'ALMA, Mai
2003.
Et …
"Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence.", Rapport 339
d'une commission d'enquête du Sénat. Disponible sur le site Internet du Sénat, juin 2003.
"Personnes âgées et maltraitance" : cycle criminologie et victimologie : Ministère de
l'intérieur, 2002.
Rapport DEBOUT, Prévenir la maltraitance envers les personnes âgées, Ministère de
l’Emploi et de la Solidarité, Direction Générale de l’Action Sociale, 22 janvier 2002.
1
se renseigner à ALMA France BP 1526, 38 025-Grenoble cedex
- 61 -
Livre blanc : Maltraitances des personnes handicapées mentales dans la famille, les
institutions, la société ; prévenir, repérer, agir, Les Cahiers de l'UNAPEI, Juin 2000.
Le livre noir du handicap, les 12 défis de la réforme de la loi de 75, contribution nationale
du Collectif des Démocrates Handicapés au débat sur la réforme de la loi du 30 juin 1975,
Esméralda Editions, 2003
Vivre ensemble, guide des civilités à l'usage des gens ordinaires, guide publié avec le
soutien du ministère délégué à la Sécurité Sociale, aux Personnes Âgées, aux Personnes
Handicapées et à la Famille.2005
Vulnérabilité et droit au risque, 7ème Congrès de l'association francophone des droits de
l'homme âgé, 10 et 11 juin 1999 (OSPA, 28, rue Louis Braille, 42000-Saint Etienne)..
Maisons Départementales des Personnes Handicapées : une réforme bien engagée,
Observatoire Nationale de l'action sociale décentralisée (ODAS), mai 2006.
Rapport final, Maisons départementales des personnes handicapées, Groupe de travail
présidé par Monsieur le Sénateur Paul BLANC, 2005.
LOI n°2005-102 du 11 février 2005
pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes
handicapées NOR : SANX0300217L
LOI n°2004-626 du 30 juin 2004
relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
NOR : SOCX0300201L
Lettre READAPTATION n° 502
La maltraitance et les personnes handicapées, la personne adulte handicapée mentale,
Nicolas VERLEY, Président de l’A.T.I. du Nord, 2006
- 62 -
Restant à votre entière disposition.
Cordialement.
Marlène GOMEZ, Pré-presse
4, rue Emile Zola G Z.A. du Rondeau G 38130 ECHIROLLES
Tél. 04 76 23 64 17 G Fax 04 76 40 31 78 G [email protected]