Les operateurs et la revolution numerique

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Les operateurs et la revolution numerique
Les opérateurs et la révolution numérique
Intervenants :
Ismo Silvo, Directeur de la stratégie et du développement, YLE (groupe public de télévision
finlandaise)
Directeur exécutif de l'Observatoire Audiovisuel Européen à Strasbourg de 1993 à 1997, il est ensuite
devenu directeur des programmes de la chaîne nationale TV1 et culture YLE Teema.
Jean-Briac Perrette, Président, NBC Universal Digital Distribution (U.S.A.)
Depuis 2006, il supervise la distribution de contenus sur Internet et autres plates-formes mobiles et
numériques. Il a dirigé la création de Hulu, récente joint venture en ligne de NBC avec News Corp et
Providence Equity Partners. Il a été vice président de New Media Distribution. Suite à l'acquisition
de Vivendi Universal Entertainment par NBC, il a mené l'intégration des divisions câblées
d'Universal.
Un service public européen, un des grands networks américains, deux personnalités
particulièrement qualifiées pour une confrontation Américains / Européens présentent leurs
expériences numériques.
La Finlande est le premier pays au monde à être passé au tout numérique. Ce passage a généré
toute une série de nouveaux services. L’exemple finlandais est donc riche d’enseignement. Ismo
Silvo décline la stratégie numérique mûrement réfléchie d’Yle, le service public de ce pays de 4,3
millions d’habitants (quatre chaînes de télévision, six chaînes de radio, une vingtaine de chaînes
régionales, un service ADSL, des services Internet, catch up TV, etc.), financé à 99 % par la
redevance (215 euros). Leur premier souci a été de maintenir leurs audiences sur les plates-formes
numériques et de tout investir sur les programmes, en assurant la continuité du service public. Pari
réussi : ils ont augmenté leurs parts de marché après le passage au tout numérique. Ils ont été
capables de s’adapter aux différents publics avec des contenus ciblés, en proposant 25 % de
programmes en plus. Pour arriver à ces résultats, ils ont mis quatre notions clés au cœur de leur
stratégie :
Une orientation vers le client : ils ont réalisé un changement de perspective important en se
focalisant sur des individus. Essayer de comprendre les attentes des utilisateurs a nécessité
beaucoup de travail conceptuel, en essayant de ne pas se focaliser sur les chiffres d’audience. Ils
sont allés notamment interroger les gens en face à face.
Les contenus : ils insistent sur les contenus et leur enrichissement, et pas sur le médium. Produire
pour des segments de public demande beaucoup de programmes, ainsi qu’une réflexion sur la
manière dont on s’adresse à ces publics, y compris les jeunes. Très peu de programmes atteignent
tous les spectateurs : pour faire sens, le producteur doit se battre. Ce type de production a
nécessité une refonte complète de leur organisation interne et la recherche de compétences en
externe.
Faciliter : la philosophie du « facilitateur » est de sortir le service public de la concurrence. Par
exemple, sur la page d’accueil de leur site web, ils montrent aussi la production de leurs
concurrents. À l’inverse, les contenus du service public devraient être accueillis sur des canaux de
diffusion privés.
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Ouverture : dans un contexte multicanal, le contenu du service public doit être du domaine public,
en accès libre, le plus ouvert possible.
Aux États-Unis, les usages vidéo de l’Internet ont connu une croissance incroyable : 52,5 % de la
population regarde de la vidéo sur Internet, dont 25 % regarde des épisodes de séries TV. En 2 ans,
on est passé à un monde où c’est le consommateur et non plus le programmateur qui mène la danse
(1/3 de l’audience regarde ce qu'elle veut). Les gens disent passer 10 heures par jour sur les
médias, cela signifie qu’ils regardent tout en même temps, TV, web, mobile… Comment NBC
Universal, l’un des grands networks privés américains, s’est-il adapté à ce nouveau monde
numérique ? En rendant leurs contenus accessibles sur toutes les plates-formes numériques, en
étant partout sur le web, avec une stratégie de distribution sur tous les grands portails, explique
Jean-Briac Perrette. Le problème étant d’arriver à vendre de la publicité à une audience qui se
fragmente de plus en plus. Bonne nouvelle : plus de plates-formes signifie plus d’audience pour les
contenus télévisuels. Le succès des Jeux olympiques de Pékin le montre : NBC, partenaire des JO
avait proposé 172 heures de contenus pour Atlanta en 1996, contre 3 600 heures pour ceux de
Pékin, sur diverses plates-formes. Le numérique permet en particulier de diffuser de petits sports,
qui font moins d’audience, sur Internet ou les mobiles. Grâce à tous ces canaux de diffusion, ces JO
ont été l’événement le plus regardé de l’histoire de la télévision aux États-Unis.
Autre exemple de la stratégie de NBC : leur joint venture avec News Corp et Fox pour lancer le site
Hulu.com fin 2007-début 2008. L’explosion de la distribution de vidéo depuis 2006 les a incité à
créer ce site d’agrégation de vidéos, dans le but d’être l’équivalent de YouTube sur le contenu
professionnel. Ils proposent plus de 30 000 vidéos, provenant de 115 partenaires producteurs de
contenus. Là aussi, c’est un succès : en 6 mois, Hulu est devenu le sixième site de vidéo en ligne
aux Etats-Unis et son audience ne cesse d’augmenter. En conclusion, cette jeune expérience de la
révolution numérique montre plusieurs choses : Internet est central, mais la télévision reste le
média dominant ; pas de cannibalisation pour l’instant entre la télévision et les plates-formes, au
contraire, on constate une augmentation de l’audience sur les multi-plates-formes, notamment
chez les jeunes.
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