Alimentation, style de vie et hypertension artérielle

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Alimentation, style de vie et hypertension artérielle
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Alimentation, style de vie et hypertension artérielle
Paolo M. Sutera, Kerstin Hübela, Dominique Evéquozb
a
b
KPIM, Departement für Innere Medizin, Universitätsspital Zürich
Abteilung Kardiologie, Spitalzentrum Oberwallis, Brig
Paolo M. Suter
Les auteurs
certifient
qu’aucun conflit
d’intérêt n’est lié
à cet article.
Selon la dernière statistique publiée par l’OMS, l’hypertension artérielle se situe globalement au 14e rang des
maladies les plus prévalentes («global burden» de l’hypertension artérielle). Il est anticipé que l’hypertension figurera en 2030 selon toute vraisemblance au 8e rang de ce
palmarès au grand regret des «hypertensiologues» et surtout des patients [1]. Cette tendance est importante à plus
d’un titre: d’une part, cette évolution se poursuit malgré
l’existence aujourd’hui de médicaments antihypertenseurs
considérés comme très efficaces. D’autre part, les interventions préventives de nature non pharmacologique
pourraient possiblement contribuer à freiner cette augmentation. Ce constat suggère que toutes les interventions
non pharmacologiques devront – tôt ou tard – être associées à une approche pharmacologique pour assurer un
contrôle tensionnel optimal.
En pratique quotidienne, on attend des interventions
non pharmacologiques les mêmes critères d’efficacité et
de sécurité qu’une approche médicamenteuse. Un critère
fondamental à cet égard est leur applicabilité à long
terme.
Il n’existe probablement guère de nutriment ou de composant de l’alimentation à qui des vertus «antihypertensives»
n’ont pas été attribuées [2, 3]. Pour des raisons didactiques, nous allons discuter séparément certains facteurs
liés au style de vie. Nous savons que les traitements médicamenteux combinés sont plus efficaces que les monothérapies. De manière similaire, le fait d’associer plusieurs
interventions non pharmacologiques a un impact plus
significatif sur la baisse des valeurs tensionnelles qu’un
traitement isolé. S’agissant des facteurs nutritionnels, il
faut tenir compte du fait que nous ne consommons pas
des nutriments isolés, mais des mélanges complexes de
nutriments présents dans nos aliments. De nombreuses
études (cf. ci-dessous) ont montré que le mélange idéal,
autrement dit le mode alimentaire dans son ensemble,
est beaucoup plus important que ses composants pris
isolément.
Comme le rapport entre le niveau de la tension artérielle
et le risque cardiovasculaire a une forme linéaire sans
limite inférieure, les mesures non pharmacologiques
visant à contrôler la tension artérielle devraient (resp.
doivent) en fait être appliquées quelles que soient les valeurs tensionnelles. Cette recommandation est d’autant
plus valide qu’une grande partie des événements cardiovasculaires survient chez des patients normotendus et
que les interventions en question influenceront aussi
positivement d’autres facteurs de risque éventuellement
présents. Une application systématique des mesures non
pharmacologiques dans la catégorie des patients avec
«pré-hypertension» est susceptible de retarder, voire
d’empêcher l’augmentation des valeurs tensionnelles
vers la zone d’hypertension avérée [4].
Vous trouverez les questions à choix multiple concernant cet article
à la page 845 ou sur Internet sous www.smf-cme.ch.
Surpoids et obésité
Du point de vue physiopathologique, le surpoids (obésité
comprise) est probablement le facteur de risque et l’indicateur du risque le plus important pour les principales
maladies cardiovasculaires. Aucun autre facteur de risque
n’exerce une influence négative sur un nombre aussi important d’autres facteurs de risque: il existe en effet une
relation causale nette entre le surpoids et l’intolérance
au glucose, les dyslipidémies, l’inflammation et en dernier lieu l’hypertension artérielle. Nous essayons, dans le
cadre de la stratification des risques, de nous adresser
au profil de risque global du patient et nous cherchons à
agir sur ces risques de manière globale. Dans la population
de l’étude de Framingham, environ 70% de l’augmentation des valeurs tensionnelles avec l’âge s’expliquent par
l’augmentation du poids [5, 6]. Il y a une relation linéaire
sans limite inférieure entre le poids et la tension artérielle: plus le poids est élevé (resp. l’indice de masse
corporelle), plus le risque d’augmentation de la tension
artérielle et d’hypertension avérée est important. La pathogenèse de l’hypertension artérielle liée à l’obésité
n’est pas entièrement élucidée, mais on sait qu’elle est
multifactorielle et qu’une hypervolémie, une augmentation du débit cardiaque, une stimulation du système nerveux sympathique et d’autres mécanismes entretenus
par la résistance à l’insuline (notamment la stimulation
du système nerveux sympathique ou encore l’augmentation de la réabsorption du sodium au niveau rénal) jouent
probablement un rôle. Une réduction du poids permet
souvent un abaissement significatif de la tension artérielle, mais pas chez tous les patients. L’action hypotensive de la réduction pondérale est cliniquement imprévisible, si bien qu’un essai est toujours indiqué. Une
augmentation du poids implique en règle générale tôt ou
tard une augmentation de la tension artérielle [7]. Quoi
qu’il en soit, le poids devrait être stabilisé chez tous les
patients et toute prise de poids avec l’âge devrait absolument être évitée. Les effets hypotenseurs de cette approche
ne dépendent en rien de la stratégie utilisée pour réduire
le poids. Compte tenu des résultats souvent très décevants des programmes d’amaigrissement, l’accent doit
vraiment être porté sur la prévention.
Le sel de cuisine
Les études épidémiologiques et expérimentales montrent
qu’un excès de consommation de sel peut induire une
Le présent article paraît dans le cadre de la campagne nationale
sur la pression artérielle de la Fondation Suisse de Cardiologie en
collaboration avec la Société Suisse d’Hypertension.
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augmentation de la tension artérielle et/ou une hypertension vraie. L’une des plus connues est l’étude Intersalt, qui a examiné la relation entre les apports de sel
(mesurés dans des collections d’urines de 24h) et la tension artérielle dans 52 centres répartis dans le monde
entier. Une variation de 100 mEq/jour de la consommation de sodium correspondait à un changement de
3–6 mm Hg des valeurs tensionnelles systoliques [8]. Une
réduction des apports de sodium de 100 mEq/jour a
aussi décalé de bien 10 mm Hg vers le bas la courbe
d’accroissement de la tension systolique qui est observée
avec l’âge (sur la base de mesures prises chez des sujets
âgés de 25 à 55 ans). La population observée dans le cadre
d’Intersalt était très hétérogène, si bien qu’on ne sait pas
avec certitude si ces résultats peuvent s’appliquer également à des collectifs plus spécifiques ou homogènes.
Une consommation excessive de sel n’entraîne pas chez
tous les sujets une augmentation de la tension artérielle,
mais seulement chez les individus dits
Une consommation excessive «sensibles au sel». Cette constatation
de sel n’entraîne pas chez tous constitue également la base d’une recomles sujets une augmentation mandation toujours très controversée et
de la tension artérielle, mais qui serait une restriction des apports de
seulement chez les individus sel à l’échelle de la population générale. Il
existe de nombreuses preuves indiquant
dits «sensibles au sel»
qu’un excès d’apport de sel induit une
augmentation de la tension artérielle chez les personnes
sensibles. La présence et/ou le degré de la sensibilité au
sel est très difficile à déterminer en pratique et n’est guère
réalisable de manière fiable que dans des conditions
expérimentales. La sensibilité au sel est influencée par
divers facteurs, dont certains sont modifiables, ce qui
peut s’avérer très utile au quotidien. Une augmentation
de la sensibilité au sel s’observe plus particulièrement
avec l’âge, chez les patients d’origine africaine, chez les
patients hypertendus, chez les patients avec anamnèse
familiale positive pour une hypertension artérielle et en
cas de surpoids ou d’obésité. Suivant les facteurs en présence, 30–50% des sujets hypertendus sont sensibles au
sel et pourraient théoriquement bénéficier d’une limitation des apports. Bien que de courte durée et d’efficacité
relativement modeste, l’effet sur la tension artérielle d’une
diète restrictive en sel a été confirmé par plusieurs essais
cliniques. La réduction de la tension artérielle variait suivant les études et les moments des mesures de 4,9/2,9
pour la systolique à 3,7/0,9 mm Hg pour la diastolique
chez les patients hypertendus et de 1,7/1,0 pour la systolique à 1,0/0,1 mm Hg pour la diastolique chez les sujets
normotendus. Même si l’abaissement de la tension artérielle était peu important, il pourrait malgré tout résulter
(en particulier chez les hypertendus) en une réduction de
l’incidence des principales complications tardives de
l’hypertension. Dans la plupart des études, l’effet hypotenseur s’est estompé au cours du temps, un phénomène
attribué à la baisse de suivi du régime pauvre en sel. Il
s’agit là très certainement de l’un des problèmes majeurs
de la mise en œuvre des interventions non pharmacologiques, y compris de la restriction des apports sodés. Les
effets relativement faibles de la diète pauvre en sel sur la
tension artérielle au niveau populationnel et les difficultés
de sa mise en application donnent régulièrement lieu à
des controverses à propos de l’intérêt de directives éventuelles en vue d’une limitation générale des apports de sel.
Dans la pratique quotidienne et tout particulièrement
dans les cas d’hypertension difficiles à contrôler, nous préconisons néanmoins l’application de toutes les mesures
disponibles, y compris une diminution de la consommation de sel.
A la consultation, la diminution des apports de sel est un
point essentiel à aborder lors de l’entretien avec le patient
lorsque nous parlons des interventions non pharmacologiques visant à abaisser la tension artérielle. La question
de la sensibilité au sel ne se pose même pas chez les
patients en insuffisance rénale ou cardiaque. Un régime
pauvre en sel constitue dans ces situations un pilier du
traitement et est d’ailleurs systématiquement préconisé
dans la pratique quotidienne. La restriction saline est
certes essentielle dans ces deux groupes d’insuffisance
organique, mais pas forcément dans la même mesure
dans la population générale.
Le régime est difficile à appliquer aussi bien chez les hypertendus que dans la population générale; le suivi est
très faible et l’intervention n’est pas tout à fait sans danger,
notamment dans la population âgée (réduction des apports
hydriques – pensez à l’été caniculaire de 2003).
La réponse de la tension artérielle au régime pauvre en
sel est influencée par d’autres facteurs nutritionnels, par
exemple les apports de potassium et de calcium.
En pratique, il est probablement judicieux de ne pas
consommer trop de sel et de maintenir les apports à un
niveau aussi bas que possible. A l’heure actuelle, En pratique, il est judicieux
la limite supérieure re- de ne pas consommer trop
commandée est de 6 g de de sel et de maintenir les
sel par jour. Suivant les apports à un niveau aussi
aliments et les habitudes bas que possible
de consommation à table,
les 6 g sont rapidement atteints. La consommation moyenne
quotidienne de sel par personne en Suisse est estimée par
l’Office fédéral de la santé publique à 15–20 g. Ce chiffre
est toutefois sujet à critique dans la mesure où on ne dispose pas dans notre pays de données représentatives sur
les apports de sel et que les quelques études consacrées
à ce thème ont rapporté des résultats très variables (en général probablement sous-estimés). La relation entre la tension artérielle et la consommation de sel était faible dans
une étude de suivi sur dix ans réalisée dans une population
genevoise [9]. Les principales sources de sel relevées dans
cette étude étaient le pain, le fromage, les potages, les produits industriels prêts à la consommation, les produits à
base de viande et de poisson, qui rendaient compte de plus
de 70% des apports de sel [10]. Dans la population de
l’étude genevoise, la consommation journalière moyenne
de sel était de 6 g chez les hommes et de 4,9 g chez les
femmes. Ces chiffres sont intéressants, mais doivent être
interprétés avec prudence, car la mesure de l’excrétion du
sodium dans les urines de 24 heures constitue la seule méthode fiable pour l’estimation des apports de sel.
Les fruits et les légumes sont riches en potassium et
pauvres en sodium. Une forte consommation de potassium
produit un effet natriurétique et peut par conséquent
équilibrer ou du moins compenser partiellement une
tendance à l’excès de sel.
Ces recommandations montrent que nous ne devons pas
nous concentrer sur des nutriments isolés ou sur des
stratégies diététiques individuelles, mais que ce sont les
habitudes alimentaires et le mode de vie dans son ensemble qui comptent. Le surpoids et l’obésité favorisent
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la sensibilité au sel. En pratique et au vu des difficultés de
satisfaire à une discipline personnelle, il est néanmoins
plus simple de parler des méfaits du sel que d’aborder
concrètement le problème du surpoids et de l’obésité.
De manière surprenante, nombre de nos patients évoquent
spontanément l’excès de sel comme principal facteur
pathogénique nutritionnel de l’hypertension artérielle.
On ne peut que s’étonner qu’une personne dont l’indice
de masse corporelle se situe entre 30 et 40 kg/m2 le croit
vraiment. La cause réside d’une part dans l’absence de
prise de conscience ou d’acceptation de la nécessité d’une
autodiscipline et les connaissances nutritionnelles (surtout
leur mise en pratique) sont d’autre part très insuffisantes
chez beaucoup de nos patients. Les recommandations ne
servent à rien si elles ne sont pas compréhensibles et ne
sont pas applicables pour la majorité de la population.
Alcool
Les effets potentiellement cardioprotecteurs des boissons
alcoolisées sont bien connus des médecins et des patients,
mais on oublie peut-être un peu vite que l’alcool est l’un
des principaux produits hypertenseurs issu d’une consommation volontaire [12, 13]. La consommation régulière
d’alcool est associée à des valeurs de tension artérielle
plus élevées et représente une cause fréquente d’hypertension, difficile à contrôler. Une règle souvent invoquée
dit que la consommation de plus de 30 g d’alcool par
jour (i.e. plus de 2–3 unités) augmente le risque d’hypertension artérielle. Deux unités de boisson standard par
jour représentent cependant déjà un «quantum satis»
pour la majorité des patients hypertendus.
Divers
Potassium
Le potassium a un effet natriurétique. Une alimentation
riche en potassium est par définition pauvre en sodium.
Dans l’expérimentation animale, l’apport de potassium
améliore, voire évite l’hypertension artérielle induite par
le sel. En cas de sensibilité au sel, les effets hypertenseurs
du sodium sont renforcés en cas d’apports faibles de potassium. La prévalence de l’hypertension est plus basse
dans les populations aux apports de potassium élevés,
autrement dit consommant beaucoup de fruits et de
légumes [14]. Les suppléments oraux de potassium
abaissent de quelques mm Hg les niveaux des tensions
systolique et diastolique. L’action hypotensive du potassium est plus marquée chez les sujets hypertendus ou en
cas de sensibilité au sel, ainsi que chez les personnes
d’origine africaine, mais se retrouve aussi chez des personnes consommant peu de sel. Une déplétion en potassium à la suite d’une consommation insuffisante ou d’une
prise de diurétiques peut entraîner une augmentation de
la tension artérielle [15]. Le potassium induit une diminution de la tension artérielle, notamment par son action
natriurétique, par la suppression de la rénine, par des effets vasodilatateurs et aussi par l’inhibition de certains
effets de l’angiotensine II. En présence d’une hypertension artérielle, la substitution en potassium ne présente
aucun intérêt en tant que mesure isolée [16] et elle n’est
pas sans dangers en raison du risque d’hyperkaliémie.
Une recommandation simple pour augmenter les apports
de potassium repose sur une augmentation de la consommation de fruits et de légumes [17, 18].
Calcium et magnésium
Plusieurs études indiquent que des apports accrus de calcium ou de magnésium pourraient avoir des effets favorables sur une baisse de la tension artérielle. Les mécanismes physiologiques pour expliquer cette contribution
existent mais il n’existe pas encore de données et évidences suffisantes pour le recommander [19, 20]. L’action
hypotensive du calcium et du magnésium est relativement
faible et elle n’a guère d’intérêt pratique en cas d’administration isolée. Dans l’optique de l’abaissement des valeurs
tensionnelles, le calcium et le magnésium jouent un rôle
beaucoup plus important par leurs interactions avec
d’autres nutriments dans le cadre d’une alimentation dite
«DASH» («Dietary Approaches to Stop Hypertension»).
L’importance d’apports adéquats de calcium est primordiale dans la perspective de la prévention de l’ostéoporose
et il semble aussi que des apports journaliers inférieurs à
600 mg constitueraient un seuil minimal pour avoir un
impact sur l’hypertension artérielle [21]. Une augmentation des apports de calcium peut être obtenue le plus
simplement par la consommation de produits laitiers
(éventuellement à faible teneur en matière grasse). Dans
ce contexte, on rappellera le possible rôle de la vitamine D
dans la régulation de la tension artérielle [22]. Une carence en vitamine D peut induire une activation du système rénine–angiotensine et ainsi contribuer au développement de l’hypertension artérielle. Là aussi, les données
ne sont pas toujours conclusives et certains indices suggèrent que la vitamine D ne serait qu’un nutriment – parmi
d’autres – possédant une action modulatrice de la tension
artérielle en interaction avec d’autres facteurs.
Acides gras
Il est évoqué qu’une alimentation contenant des quantités accrues d’acides gras Oméga-3 («huiles de poisson»)
pourrait avoir des effets favorables sur différents facteurs
de risque cardiovasculaire (par ex. métabolisme des lipoprotéines, agrégation plaquettaire, inflammation), y
compris l’hypertension artérielle. Hormis les effets indirects sur le poids et leurs conséquences sur la tension
artérielle, les acides gras saturés, ainsi que d’autres
acides gras n-6, n’ont pas d’impact sur le plan médical
et nutritionnel en tant que mesures non pharmacologiques visant à réduire la tension artérielle.
Protéines
Une augmentation de la consommation de protéines d’origine animale ou végétale (par ex. soja) est associée à une
réduction de la tension artérielle. En règle générale,
l’augmentation des apports de protéines se fait au détriment des hydrates de carbone et/ou des graisses.
Régime alimentaire
Nous ne mangeons pas des nutriments isolés, mais un
mélange complexe de nutriments eux-mêmes impliqués
dans un ensemble tout aussi complexe de réactions métaboliques et biochimiques susceptibles de produire des
effets hypotenseurs. On sait depuis longtemps qu’une
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diète de végétarien est associée à une tension artérielle
basse et que l’augmentation de la tension artérielle liée
à l’âge est moins marquée chez les adeptes de régimes
végétariens [23]. Comme on pouvait s’y attendre, il n’est
pas possible d’identifier un seul facteur nutritionnel
expliquant à lui seul la tension basse des végétariens.
C’est bien plus le style de vie de ces personnes dans son
ensemble qui résulte en un profil de risque globalement
plus favorable (moins de surpoids, absence de consommation de tabac, davantage d’activité physique, qualité
des composants alimentaires). La forte consommation de
fruits et de légumes implique une augmentation des apports de potassium, de fibres alimentaires, de vitamine C,
de magnésium et d’autres nutriments favorisant une
tension artérielle basse seuls ou, à plus forte raison, en
combinaison les uns avec les autres. Le concept de l’alimentation DASH a été élaboré sur la base de cette évidence épidémiologique et expérimentale et a fait l’objet
de plusieurs tests cliniques. Il s’agit d’une «diète combinée» pauvre en graisses, caractérisée par une augmentation des apports de fruits et de légumes, de produits
laitiers à faible teneur en matière grasse et de produits à
base de céréales complètes avec réduction simultanée
des apports d’acides gras saturés. Une étude a trouvé que
l’alimentation DASH abaisse de 5,5/3,0 mm Hg la tension
systolique/diastolique [24, 25]. L’alimentation DASH est
logiquement particulièrement efficace chez les sujets
consommant habituellement beaucoup de sel. Une réduction comparable des valeurs tensionnelles peut aussi être
obtenue avec une alimentation riche en fruits et légumes
et en protéines (avec réduction concomitante des hydrates de carbone et des graisses saturées), de même que
des apports augmentés d’acides gras insaturés et polyinsaturés [26, 27]. Qu’un changement radical de l’alimentation vers un régime de type DASH ou une diète telle
que celle décrite dans l’étude Omniheart, évoquée cidessus, induise une diminution de la tension artérielle
n’est pas surprenant en soi. Toute intervention nutritionnelle, en particulier lorsqu’elle suppose la consommation
d’aliments normaux et non de suppléments alimentaires
commerciaux, requiert toutefois un minimum d’initiative
personnelle et d’autodiscipline. Contrairement à beaucoup
d’autres mesures, son efficacité serait certaine et elle serait parfaitement applicable vu le nombre presque infini
de combinaisons possibles d’aliments aussi divers qu’attrayants; malheureusement, le patient moderne préfère
laisser la prévention à d’autres.
activité physique régulière. Il en résulte une réduction
des valeurs tensionnelles systoliques et diastoliques [29].
Cette méta-analyse montre que l’activité physique diminue de –7,4/–5,8 mm Hg la tension systolique/diastolique
chez les patients hypertendus [29]. L’action hyL’activité physique n’est pas
potensive de l’exercice
seulement essentielle dans
physique est marquée
l’optique du traitement de
chez les hypertendus,
l’hypertension, mais aussi
comme
avec
dans la prévention de celle-ci mais,
toutes les mesures non
pharmacologiques, le modèle des réponses est hétérogène et dépend de plusieurs facteurs (sévérité de l’hypertension artérielle, âge du patient, intensité, durée et fréquence de l’exercice). L’activité physique n’est cependant
pas seulement essentielle dans l’optique du traitement
de l’hypertension, mais aussi et surtout dans la prévention de celle-ci. Le volume d’entraînement nécessaire
pour obtenir un minimum d’efficacité sur la tension artérielle est de 3–5 séances d’au moins 60 à 90 minutes
d’une activité d’endurance chaque semaine, à une intensité correspondant à 60–90% de la fréquence cardiaque
maximale (ou 50–85% de la VO2 max) [28].
Résumé et conclusions
Activité physique
De nombreux facteurs peuvent influencer la tension artérielle. Personne ne parvient à mettre en pratique de façon
durable l’ensemble des mesures préconisées. Les recommandations doivent par conséquent être formulées individuellement. Un mot d’ordre: «Keep it simple.» L’intervention probablement la plus importante est le contrôle
du poids corporel: en cas de surpoids ou d’obésité,
une réduction du poids est absolument indispensable;
lorsque le poids est normal, on évitera «à tout prix» une
prise de poids avec l’âge. Le fait de mettre l’accent principal sur la régulation du poids se traduit pour ainsi dire
automatiquement et «sans y paraître» par la mise en
œuvre des autres mesures non pharmacologiques (alimentation saine: moins d’aliments à forte densité énergétique, augmentation de la consommation de fruits et
de légumes, réduction de la sensibilité au sel, augmentation de l’activité physique, etc.). Les aspects pratiques
des mesures médicales et nutritionnelles visant à un
meilleur contrôle de la tension artérielle sont simples; les
difficultés résident dans la durabilité de leur application
et dans la motivation du patient, qui a de la peine à résister aux tentations de toutes sortes auxquelles il est
journellement confronté.
Une activité physique de type endurance est associée à une
réduction de la tension artérielle et à une tension artérielle constitutive plus basse [28]. Un style de vie sain inclut nécessairement une activité physique régulière. Une
régulation normale de l’appétit nécessite absolument
une hygiène de vie globalement améliorée en incluant une
Correspondance:
Prof. Paolo M. Suter
Klinik und Poliklinik für Innere Medizin (KPIM)
Departement für Innere Medizin
Universitätsspital
CH-8091 Zürich
[email protected]
Références recommandées
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– Suter PM, Sierro C, Vetter W. Nutritional factors in the control of blood
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– Suter PM. Checkliste Ernährung. Stuttgart & New York: Georg Thieme
Verlag, 2005.
Vous trouverez la liste complète des références dans la version en ligne
de cet article sous www.medicalforum.ch.
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853
Ernährung, Lebensstil und Bluthochdruck
/ Alimentation, style de vie et hypertension artérielle
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