Le Mystère Fontaine - Anciens Lycée Shanghai

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Le Mystère Fontaine - Anciens Lycée Shanghai
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Le Mystère Fontaine
NOUS AVONS RÉUSSI À OBTENIR UNE INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC PAUL-VINCENT FONTAINE, PROFESSEUR DE PHILOSOPHIE DU
LYCÉE FRANÇAIS. NOUS AVONS VOULU EN FINIR AVEC LES ÉTERNELLES CITATIONS PHILOSOPHIQUES ET LES CHEMISES À FLEURS
POUR CONNAITRE ENFIN LE « VRAI » MONSIEUR FONTAINE…
D’où venez-vous, et quel a été votre parcours ? J’ai grandi à Reims, mais mes
parents sont bretons et corses. Au lycée, j’ai fait un Bac A1, c’est-à-dire littérature/mathématiques. Je suis ensuite passé par Sciences-Po, avant d’aller
à la Sorbonne faire de la philosophie, sans pourtant terminer ma thèse. J’ai
ensuite passé un concours du ministère de la Justice, avant de diriger ce
qu’on appelle des maisons de correction pour mineurs délinquants. Avant
d’arriver à Shanghai en 2003, et d’accepter un poste de professeur de philosophie.
Votre note en philo au Baccalauréat ? Je n’ai jamais réussi à me rappeler ! Je
sais en revanche que j’ai eu mention Bien, et 19 en maths. En ce temps-là,
les mentions étaient rares ! (rires)
Quel est votre philosophe préféré et pourquoi ? Durant mes études, j’ai
beaucoup étudié les philosophes de l’Antiquité, dont Aristote. Depuis que je
suis ici et que j’ai rouvert des livres de philosophes, je trouve Rousseau et sa
théorie sur l’éducation très puissant, et je partage cette vision. Par exemple,
je ne pense pas, du moins en théorie, qu’un enfant devrait avoir ouvert de
livres avant l’âge de 11 ans. Mais il y a du bon à prendre chez tous les philosophes.
“
Estimez-vous être quelqu’un de vertueux en général ? (soupir) Je ne sais
pas, je ne suis pas tellement obsédé par la justice. La vie est injuste, il vaudrait mieux opter pour la sagesse, je pense, et accepter les injustices. J’essaie
d’être juste avec les élèves, mais c’est plus un mouvement global.
Circé Canivet
Vos loisirs, vos passions ? Ma grande passion a toujours été le théâtre,
j’en ai d’ailleurs fait ici à Shanghai. À part ça, je dirais le cinéma. Je dois dire que je suis beaucoup plus cinéphile que Monsieur Fléchaire
! (rires)
Quelle est votre conception de la pédagogie ? Je trouve qu’il y a une grosse démagogie des professeurs, et surtout dans ma matière, de vouloir laisser la place à l’élève. Selon moi, l’enseignement doit se baser sur la relation maître/élève. C’est super ringard ! Mais le côté humain,
ce n’est pas mon rôle ! Je prêche l’autonomie des élèves. Je trouve que favoriser la mise en place de l’autonomie aide l’élève non seulement
pour se préparer au Bac, mais aussi pour se préparer à la vie en général. Et c’est une méthode à risques.
M. Mazourine a une question pour vous : qu’auriez-vous fait dans un Sofitel, le 14 Mai, à New York ? (rires) Je serais sorti de ma salle de
bain sans serviette, évidemment ! Mais j’aurais été discret… Je pense qu’on ne devrait cependant pas mêler politique et vie privée.
Comment choisissez-vous vos chemises ? C’est un moyen de retenir l’attention des élèves ou un simple effet de style ? Je suis obligé, ma
femme est styliste ! Donc elle fait mes chemises.
Dans les couloirs, on entend parfois : « Fontaine, égo surdimensionné ». Qu’avez-vous à répondre à cela ? J’espère bien, j’espère bien ! Et
ça ne me vexe pas du tout. Beaucoup de gens font profil bas, moi j’assume pleinement. Les plus grands hommes, comme César, avaient
des ego surdimensionnés (rires). Les gens sont jaloux ! ça suppose d’écraser les gens, et bah me**e ! C’est un reproche d’hommes du ressentiment.
Avez-vous déjà écrit des réflexions philosophiques ? J’ai beaucoup écrit durant mes années universitaires. On nous demandait, comme en
Terminale, de fournir une pensée personnelle. J’ai commencé ma thèse de Doctorat, appelée « Impassibilité et affectivité divine », autrement dit sur ces êtres qui se portaient au-delà d’eux-mêmes, qui aspiraient à une puissance surnaturelle.
Un dernier mot pour les élèves ? Ras le bol de parler aux élèves ! Non, ne publiez pas ça. (rires) Je leur dirais de ne pas trop être obsédés
par le bonheur, il y a des valeurs sans doute plus hautes, comme la liberté.
Propos recueillis par Circé Canivet et Louis Soulard
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