Savoie, 29-1-2016

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Savoie, 29-1-2016
LE DAUPHINÉ LIBÉRÉ | VENDREDI 29 JANVIER 2016 | 3
ISAVOIEI
IALBERTVILLEI
93 000 véhicules attendus
sur les routes ce week­end
Michel Polnareff sera
en concert en novembre
» En ce dernier week­end de janvier, les routes des stations » Après Johnny Hallyday, qui fera l’ouverture des concerts seront particulièrement encombrées. Samedi, 39 000 véhicules devraient se rendre dans les stations de Tarentaise et de Maurienne (dont 27 000 rien qu’en Tarentaise). Dans le sens du retour, pour ce même jour, ce sont au total 30 000 automobilistes qui devraient prendre la route, dont 22 000 depuis les stations en Tarentaise. Dimanche, 10 000 véhicules iront en Tarentaise, et 14 000 en partiront.
de la Halle olympique d’Albertville, le 24 mars prochain, place à Michel Polnareff, le 11 novembre. Neuf ans après “Ze (re) Tour”, le chanteur de “Goodbye Marylou” crée l’événement avec un nouvel album et une tournée qui débutera au printemps.
La Halle olympique accueillera aussi la tournée “Mes idoles” le 2 avril 2016, “Stars 80”, le 8 avril 2017, et la comédie musicale “Saturday night fever”, le 16 décembre 2017.
VOTRE RÉGION
SAVOIE | L’opération de sensibilisation “Vivre les valeurs de la République a l’école”, mise en place par l’Éducation nationale, se poursuit
La liberté selon 250 élèves et un généticien
En marchant à travers la France, Axel Kahn a découvert l’ivresse d’être libre
L’opération “Vivre les
valeurs de la République
à l’école”, relayée par
Le Dauphiné Libéré, se
poursuit. Après le thème
de la laïcité, il y a un mois,
250 écoliers savoyards ont
travaillé sur la liberté.
Un sujet qui a donné lieu
à des échanges en classe,
à l’écriture de textes ou
de dessins… Le généticien
et écrivain Axel Kahn a lui
aussi accepté de plancher
sur cette question qui lui
tient très à cœur.
coup, j’ai découvert un ni­
veau de liberté que je ne
soupçonnais même pas.
Peu importe mes déci­
sions, je n’avais aucune
position et personne ne
dépendait de moi. Cette
liberté m’a procuré une
ivresse et une jouissance
totale.»
Ü Comment peut-on
en parler aux enfants
actuellement ?
«Il faut leur faire prendre
conscience de ce qu’il y a
de plus beau dans la liber­
té humaine. Il faut oser
vouloir. La liberté d’oser
vouloir est l’assurance de
pouvoir réaliser ce que
l’on veut.»
A
xel Kahn est un méde­
cin généticien et es­
sayiste français. An­
cien président de l’Univer­
sité Paris Descartes, ses
travaux portent sur le con­
trôle des gênes, des mala­
dies génétiques, du cancer
et de la nutrition.
Outre ses travaux scien­
tifiques, Axel Kahn inter­
vient sur des sujets tou­
chant aux aspects moraux
et sociaux de la médecine,
de la génétique et des bio­
technologies. Son prochain livre “Être
humain, pleinement” par­
lera de la vie de jumelles
indonésiennes qui ont
grandi dans deux univers
complètement différents
afin d’établir une distinc­
tion entre elles, pour para­
chever leur individualisa­
tion par rapport à “l’autre
soi” en s’appuyant sur des
thèmes comme l’éduca­
tion, la sexualité ou encore
la liberté.
À Aix-les-Bains, à l’école de la Liberté
Ü Êtes-vous inquiet
En octobre dernier, Axel Kahn était l’invité du Grand bivouac, à Albertville, pour témoigner de ces voyages
à pied, en traversant la France en diagonale. Deux moments de liberté intense. Archives photo Le DL/Thierry GUILLOT
Ü Pouvez-vous
définir la liberté
en général ?
«La liberté est une très dif­
ficile question philosophi­
que. Quand l’Homme dé­
sire réaliser quelque cho­
se, il a cette liberté de
l’accomplir. Depuis l’Anti­
quité, il y a deux écoles :
les chantres de la liberté,
pour qui la liberté est le
propre de l’humain et qui
considèrent qu’il jouit de
l’exercer comme bon lui
semble, et les fatalistes,
pour qui la liberté est une
illusion car l’Homme ne
connaît pas les ressorts de
ses actions. De toute fa­
çon, il est essentiel que
l’Homme puisse être libre
et responsable de ses ac­
tions. Sans liberté, pas de
responsabilité et sans res­
ponsabilité, il n’y a plus
d’humanité. Cette liberté
peut être totale pour un
Homme vivant dans le dé­
sert, contrairement à celui
qui vit en société, qui de­
vra se confronter à celle
des autres. Ne dit­on pas :
“La liberté des uns s’arrê­
te là où commence celle
des autres ?”»
Ü Comment avez-vous
ressenti la liberté, lors de
vos marches à travers la
France ?
«C’est une chose que je
n’avais point anticipée.
Durant toute ma vie, que
cela soit en tant que petit
enfant, écolier, étudiant,
père de famille ou direc­
teur d’université, je n’étais
jamais totalement libre du
fait des règles que je de­
vais suivre ou des respon­
sabilités liées à mon poste.
Il n’y a pas de manière
d’être moins libre qu’être
plus responsable. Quand
j’ai débuté mes marches le
8 mai 2013, d’un seul
pour la liberté ?
«La liberté a toujours été
plus au moins menacée.
Les influences des médias,
les entreprises comme
Google et Facebook qui
permettent les big data…
La vie privée a, en partie,
disparu. Nos vies intimes
sont devenues des vies pu­
bliques à cause des ré­
seaux sociaux. »
«Par conséquent, ils pour­
raient s’en servir comme
un pouvoir sur nous et
contraindre nos libertés.
Les gens ignorent la dan­
gerosité de ces sites. Pré­
server notre liberté face à
ces nouvelles technologies
représente le défi considé­
rable des temps moder­
ne.»
Ü À l’école de la Liberté d’Aix-les-Bains, élèves et enseignants étaient tout particulièrement motivés par le sujet.
Normal dans une école avec un si beau nom. Deux classes
ont travaillé sur ce thème : les CM1/CM2 de Patricia Fayolle et
les CE2/CM1 de Chrystelle Dal Palu.
Après des lectures et un débat en classe, les enfants se sont
mis à l’œuvre. Ils ont réalisé des affiches qui vont être exposées sous le préau ces prochains jours, et des poésies à la
manière de Paul Éluard. Extraits : “Quand des enfants font la
guerre, je crie ton nom. Quand on est enfermé, je crie ton nom.
Quand on est tout seul, sans ami, je crie ton nom. Quand je
suis harcelée, sans personne pour m’aider, je crie ton nom.
Quand je pense à toi, je crie ton nom. Quand on ne peut pas
sauver la nature, je crie ton nom. Quand je vois pleurer, je crie
ton nom. Quand on vient d’un autre pays, et qu’on est rejeté, je
crie ton nom. Quand on nous interdit d’exprimer nos idées, je
crie ton nom…” Et tout ce travail a laissé des traces dans les
esprits. Ainsi Stan, qui disait : « La liberté, c’est de ne pas aller
à l’école », assure aujourd’hui, « la liberté, c’est de pouvoir aller
à l’école, apprendre. »
Jean­Philippe POINTET
À Gilly-sur-Isère, les écoliers ont écrit des lettres à leur “chère liberté”
« S
i on veut être libre,
il faut rester dans
les lois. » En quelques
mots, Lucile pose toute la
complexité de la notion de
liberté. Élève de la classe
de Patrice Viboud, à l’éco­
le de Gilly­sur­Isère, elle a
participé, avec ses 22 co­
pains de CM1, à des
échanges sur ce thème.
Mais aussi à un débat phi­
losophique avec Michel
Bufflier. Et à des ateliers
d’écriture avec Corinne
Chaix. Le professeur de philoso­
phie et l’écrivain ont
ouvert grand les portes de
l’école pour permettre aux
enfants de s’exprimer le
plus librement possible…
« C’est un thème diffici­
le », souligne Patrice Vi­
boud, « habituellement
abordé en philosophie en
terminale. Mais, après les attentats
de Paris, en novembre, le
jour de la minute de silen­
ce, nous avons parlé en
classe. Et à la fin de la
discussion, un élève a dit
que c’était une atteinte
aux libertés. » L’ensei­
gnant a rebondi en propo­
sant aux enfants un travail
d’écriture autour de la li­
berté. Après les débats, après
avoir écouté le texte de
Paul Éluard, “Liberté”, les
petits écoliers ont eux­mê­
mes composé des acrosti­
ches. Et écrit, chacun, une
lettre à la liberté. Des
courriers d’enfants naïfs,
mais qui témoignent
d’une certaine familiarité
rafraîchissante. Encourageante !“Liber­
té, je t’aime” a écrit Coli­
ne, qui explique « qu’il
faudrait surtout que les
animaux soient libres
comme les hommes. Pas
comme les baleines que
l’on tue pour leur grais­
se ». Dans ces courriers, qu’ils
ont parfois familièrement
adressés à “ma chère li­
berté”, comme s’il s’agis­
sait d’une amie, les ga­
mins se racontent aussi. Ils parlent de leurs activi­
tés, de leur famille, de leur
âge. Mais la liberté, quel
âge a­t­elle ? « Des siècles
et des siècles » s’exclame,
dans un sourire, Maika.
Laurence VEUILLEN
À Albertville
À Esserts-Blay
Ü Les écoliers d’Esserts-Blay
Ü Les CM2 de l’école Louis ont habillé de couleurs et de
Pasteur ont imaginé un beau mots la statue de la liberté.
ciel bleu peuplé de colombes Une façon de donner encore
aux couleurs des pays…
plus de force à ce symbole.
À Sainte-Hélène-sur-Isère
Ü La classe des CE2-CM1 a écrit :
“La liberté, c’est… pouvoir être heureux, être libre de jouer, de
faire le sport qu’on veut, de peindre, choisir son métier, faire
énormément de choses et passer du temps avec ses amis,
aimer ce qu’on veut, conduire sa voiture pour aller se baigner
ou partir en vacances, aller où on veut, pouvoir donner son
avis, faire ses choix, pouvoir voter à 18 ans, faire ce qu’on veut
en respectant les lois, voir les animaux en liberté, respecter la
liberté des autres.
À Monthion
Après avoir débattu sur ce thème, les écoliers ont participé à des ateliers d’écriture. Pas facile de passer
de l’oral à l’écrit.
« Se promener sur les sentiers enneigés, manger du chocolat »
V
oici le texte collectif
composé par les éco­
liers de Gilly :
F Plus d’attentats, ça em­
pêche la liberté : comme à
Paris, 130 morts et 350
blessés ! On est triste, on
est blessé d ans n otre
cœur !
F Écrire pour les gens
qui sont morts, pour leur
rendre hommage.
F Pourquoi avoir la ri­
chesse et pas l’amour ?
F La liberté, c’est remer­
cier, aimer, partager, ado­
rer, rêver, vivre, avoir des
droits, s’exprimer comme
il faut, se promener sur les
sentiers enneigés, aller
dans la rue, manger du
chocolat, avoir le droit de
cuisiner et aussi avoir la
liberté d’expression.
F Être libre, c’est parta­
ger des choses, c’est être
en paix et ne pas faire la
guerre.
F La liberté est une façon
de vivre ensemble. C’est
un droit, c’est aussi la li­
berté qui agit.
F Il y a des gens qui se
battent pour que l’on ne
tue pas les animaux
n’importe comment.
F Quand diriez­vous :
On m’empêche d’être li­
bre ? À l’école ? À la mai­
son ?
­ « Quand on m’enferme
da n s ma c ha m bre , ç a
m’empêche d’être libre. »
F La cigarette : la pire
des choses qu’on peut fai­
re dans la vie, ça empêche
d’être libre, car on est mal
dans sa santé.
Ü Les écoliers de cycle 3 de l’école de Monthion ont choisi de
dessiner la liberté, en bleu, blanc, rouge, avec des oiseaux,
sans doute des colombes…